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1026. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « La Bruyère »

A la manière énergique dont Saint-Simon nous parle de cette race des Condés, on voit comment par degrés en elle le héros en viendra à n’être plus que quelque chose tenant du chasseur ou du sanglier. […] Il avait dit dès sa première édition : « Combien d’hommes admirables et qui avoient de très-beaux génies sont morts sans qu’on en ait parlé ! Combien vivent encore dont on ne parle point et dont on ne parlera jamais !  […] On apprend d’un morceau qui se trouve dans l’Esprit des Journaux (févr. 1782), et où l’auteur anonyme apprécie fort délicatement lui-même la Notice de Suard, que La Bruyère, déjà moins lu et moins recherché au dire de D’Olivet, n’avait pas été complétement mis à sa place par le XVIIIe  siècle ; Voltaire en avait parlé légèrement dans le Siècle de Louis XIV : « Le marquis de Vauvenargues, dit l’auteur anonyme (qui serait digne d’être Fontanes ou Garat), est presque le seul, de tous ceux qui ont parlé de La Bruyère, qui ait bien senti ce talent vraiment grand et original. […] J’avais noté un endroit où il parle des jeunes gens, lesquels, à cause des passions qui les amusent, dit-il, supportent mieux la solitude que les vieil » lards, et je rapprochais sa remarque d’un mot de Lélia sur les promenades solitaires de Sténio.

1027. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « François Ier, poëte. Poésies et correspondance recueillies et publiées par M. Aimé Champollion-Figeac, 1 vol. in-4°, Paris, 1847. »

Brantôme, qui parle avec de grands éloges du talent poétique de la reine d’Écosse, nous apprend qu’on lui attribuait déjà, dans le temps, des vers qui ne ressemblaient nullement à ceux de l’aimable auteur, et qui, selon lui, ne les valaient pas. […] Je ne sais plus quelle dame de la Cour d’Henri III disait à Des Portes, en lui demandant de la faire parler en vers, qu’elle envoyait ses pensées au rimeur . […] Voici encore un sixain délicat, où le doux nenny est aux prises avec le sourire ; nous le donnons ici dans toute sa correction : Le desir est hardy, mais le parler a honte ; Son parler tramble et fuyt, l’aultre en fureur se monte ; L’ung fainct vouloir ung gaing, dont il souhaite perte ; L’ung veult chose cacher que l’aultre fait apperte ; L’ung s’offre et va courant, l’aultre mentant refuse : Voyez la pauvre femme en son esprit confuse. […] Vous ouvrez Baïf, le plus infatigable translateur en vers et qui ne laisse rien passer des anciens sans le reproduire bien ou mal ; mais quelquefois il vous semble se reposer, il parle en son nom ; il a ses gaietés gauloises, on le jurerait, et ses propres gaillardises. […] Ces deux femmes idolâtrent ce roi de leur sang dont elles sont glorieuses ; elles débordent sitôt qu’elles parlent de lui.

1028. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLVIIIe entretien. De la monarchie littéraire & artistique ou les Médicis (suite) »

Au reste, dans les premiers moments de votre séjour à Rome, il vous conviendra plus généralement d’écouter les autres, que de parler beaucoup vous-même. […] Il faudra éviter toute liaison intime avec ceux dont les mœurs sont décriées, non seulement pour l’inconvénient de la chose en elle-même, mais aussi à cause de l’opinion publique, qu’il est bon de se concilier ; parlez de choses générales avec chacun. […] Probablement on vous priera, dans bien des circonstances, de parler à Sa Sainteté et d’intercéder auprès d’elle pour des affaires particulières. […] Catherine obtint du peuple la permission d’aller parler aux troupes. Elle ne leur parla que pour les affermir dans la révolte.

1029. (1888) Journal des Goncourt. Tome III (1866-1870) « Année 1870 » pp. 321-367

Refus de parler. […] Quand on lui parle raison, on a beau y mettre toute l’affection possible, on ne peut jamais obtenir de lui une réponse, l’engagement qu’il fera la chose demandée, au nom de cette raison. […] Il a parlé de ses livres. […] Je suis resté près de lui jusqu’à la nuit, sans avoir le courage de lui parler, sans avoir le courage de le forcer à parler. […] Prud’homme parlait !

1030. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Sainte-Beuve » pp. 43-79

… Individuel comme les plus individuels de ce temps romantique, pour parler comme parlera l’histoire, bien plus près, par sa nature de talent, de Crabbe et de Wordsworth que d’André Chénier, Sainte-Beuve ne semblait pas alors avoir été créé pour faire étude de la muse antique, car c’est à elle qu’il devait revenir un jour, avec une intelligence qui est un hommage. […] Il était plus difficile qu’on ne croit de parler de Virgile en l’an de grâce 1857, et d’intéresser en en parlant. […] Il a parlé de l’originalité relative de Virgile, et cette originalité n’est pas que relative : elle est absolue. […] Pour Virgile, puisque l’on ose parler d’imitation, l’inspiration de l’Iliade était forcée. […] je n’ai pas parlé des morales, dont les qualités intellectuelles doivent être doublées pour qu’il y ait un grand critique… La sincérité, la sécurité, l’autorité… Sainte-Beuve y tenait peu, et son siècle peut-être y tient encore bien moins que lui !

1031. (1902) La formation du style par l’assimilation des auteurs

Faut-il vous parler sincèrement ? […] On n’écrit pas comme on parle, pas plus qu’on ne doit parler comme on écrit. […] Ce sont les faits qui parlent. […] Dieu vous parle : que ne suivez-vous ? […] Je veux parler de Sénancour et de Lamennais.

1032. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXXIVe entretien. Considérations sur un chef-d’œuvre, ou Le danger du génie. Les Misérables, par Victor Hugo (2e partie) » pp. 365-432

parlons », lui dis-je, et un dialogue de huit matinées commença entre nous. […] Il répondit : « — Le juge parle au nom de la justice, le prêtre parle au nom de la pitié, qui n’est autre chose qu’une justice plus élevée ; un coup de tonnerre ne doit pas se tromper.” […] Et puis, tenez, ce n’est pas tout cela : que venez-vous me questionner et me parler de Louis XVII ? […] Quand il eut parlé, ses yeux se fermèrent. […] Le lendemain, quelques braves curieux essayèrent de lui parler du conventionnel.

1033. (1864) Cours familier de littérature. XVII « XCVIIIe entretien. Alfieri. Sa vie et ses œuvres (3e partie) » pp. 81-152

D’ailleurs on a tant parlé de ces singuliers incidents, on a tant discuté le pour et le contre, que notre silence sur un point si délicat serait plus grave encore qu’une condamnation expresse. […] N’en parlons plus. […] Oui, elle est sincère encore, à cette date, quand elle se voit seule dans un désert, quand elle parle de son impuissance de vivre. […] Le caractère dominant de sa personne et de son esprit était la bonté, la sérénité, et une certaine dignité rêveuse qui rappelait sa vie sans en parler jamais. Sa destinée parlait assez pour elle.

1034. (1926) La poésie pure. Éclaircissements pp. 9-166

Impure, en un mot, l’éloquence, entendant par là non pas l’art de beaucoup parler pour ne rien dire, mais bien l’art de parler pour dire quelque chose. […] Cette « beauté », pour parler sa langue, « qui s’ajoute à la raison », ne peut pas ne pas être autre chose que la raison. […] La réponse dont nous parlons ne va jamais sans quelque souffrance. […] Nombre de vrais poètes parlent néanmoins, ou bégaient, comme nombre de mystiques. […] Mon correspondant qui veut rester anonyme, parle d’ailleurs en philosophe esthéticien, oh !

1035. (1923) Paul Valéry

Aucun démon ne l’obligeait de parler. […]  Faire des vers, pour lui, ce n’est pas parler. […] La prose de Valéry figure bien sa pensée immédiate, bonne pour parler, non pour écrire. […] Quand je parle de poème métaphysique, je parle en lecteur, et surtout en critique, et même en critique atteint de l’équation personnelle, du pli professionnel qui consiste à chercher les « idées » des livres. […] N’oublions pas que ce grand poète avait trouvé en lui-même plus de raisons de se taire que de parler.

1036. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « M. Littré. »

Un de ses anciens collègues d’internat, le docteur Campaignac, parla de lui à Carrel dont il était le médecin, et M.  […] si je me laissais aller à parler comme je sentais à l’âge où j’essayai pour la première fois de t’aborder, que ne dirais-je pas de toi ! […] Je ne parle plus du tout des travaux de M.  […] Jamais l’on n’a tant parlé de Nysten que depuis que ce nom est devenu un caillou pour lapider M.  […] Les Latins ne prononçaient pas toutes les syllabes d’un mot ; les peuples du Midi chantent et ne parlent pas.

1037. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre deuxième. Les mœurs et les caractères. — Chapitre II. La vie de salon. »

— « Sire, disait à Louis XVI le maréchal de Richelieu, témoin des trois règnes, sous Louis XIV, on n’osait dire mot ; sous Louis XV, on parlait tout bas ; sous Votre Majesté, on parle tout haut. » — Si l’autorité y perd, la société y gagne ; l’étiquette, insensiblement relâchée, laisse entrer l’aisance et l’agrément. […] Quand on en parle, c’est pour plaisanter ; les plus graves événements ne sont que des matières à bons mots. […] À peine leur langue est-elle déliée, qu’ils parlent le langage poli, celui de leurs parents. […] Dernier trait, plus significatif encore, je veux parler de la petite pièce. […] Un d’eux qui revenait de Versailles dans son château parlait à sa femme de tout ce qui l’avait occupé ; chez nous, il lui dit un mot sur ses dessins à l’aquarelle, ou reste silencieux, pensif, à rêver à ce qu’il vient d’entendre au parlement.

1038. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXVe entretien » pp. 317-396

On se trompe : j’avais l’ambition de la reconnaissance ; j’ai manqué mon but : n’en parlons plus. […] Voilà ce que personne ne pouvait savoir, parce que c’est pour la première fois que j’en parle et que je le publie. […] Les quatorze livres suivants roulent sur les King, les annales et toutes les parties de notre littérature, trop peu connue en Europe pour pouvoir en parler. […] Dans les douze livres suivants il est parlé de tous les peuples et nations avec lesquels la Chine a eu des rapports depuis plus de deux mille ans. […] Je n’ai pas parlé encore ici de la littérature purement littéraire de la Chine ; je n’ai parlé que de sa littérature morale et politique : pourquoi ?

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