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1081. (1855) Préface des Chants modernes pp. 1-39

On croirait entendre parler des ombres ; cela s’appelle conserver la tradition. […] Il me semble que nous sommes revenus à ces temps pleins d’ombre du paganisme où les dieux vermoulus tressaillaient sur leurs autels désertés, en écoutant avec terreur les vagissements du nouveau-né de Bethléem ; il me semble qu’au milieu de nous j’ai vu passer des apôtres et que l’on entend parler dans les airs les voix encore indécises d’une religion nouvelle.

1082. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Vicq d’Azyr. — II. (Fin.) » pp. 296-311

Cependant la scène change ; dans cette existence d’un éclat croissant et d’une gloire jusque-là facile, les ombres vont s’introduire et se mêler par degrés et de plus en plus au tableau.

1083. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Mémoires et journal de l’abbé Le Dieu sur la vie et les ouvrages de Bossuet, publiés pour la première fois par M. l’abbé Guettée. — II » pp. 263-279

Bien qu’il ait vécu à côté de Bossuet, il n’en a reçu aucun rayon pour l’expression, et sa manière de dire se passe toute dans l’ombre.

1084. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Fanny. Étude, par M. Ernest Feydeau » pp. 163-178

Effaré par le grincement des verres, par le cliquetis de l’argenterie, par le frottement des porcelaines ; ébloui par la réverbération des touches de lumière sur les cloches bombées qui couvraient les plats ; ahuri par le va-et-vient des valets empressés qui servaient chacun, sans mot dire, glissant sans bruit sur les tapis, comme des ombres noires gantées de blanc ; suffoqué par la chaude atmosphère de la salle empreinte (imprégnée ?)

1085. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Questions d’art et de morale, par M. Victor de Laprade » pp. 3-21

Ce doux feuillage obscurcissait ta route, Son ombre aidait ton cœur à s’égarer ; La feuille tombe, et sillonnant la voûte, Un jour plus pur descend pour t’éclairer.

1086. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Les Contes de Perrault »

Doré excelle donc dans ces tournants et ces profondeurs de forêts, dans ces dessous de chênes et de sapins géants qui étendent au loin leurs ombres !

1087. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Campagnes de la Révolution Française. Dans les Pyrénées-Orientales (1793-1795) »

Dans l’histoire des guerres comme dans celle des littératures, il y a des moments et des heures plus favorisées ; le rayon de la gloire tombe où il lui plaît ; il éclaire en plein et dore de tout son éclat certains noms immortels et à jamais resplendissants : le reste rentre peu à peu dans l’ombre et se confond par degrés dans l’éloignement ; on n’aperçoit que les lumineux sommets sur la grande route parcourue, on a dès longtemps perdu de vue ce qui s’en écarte à droite et à gauche, et tous les replis intermédiaires : et ce n’est plus que l’homme de patience et de science, celui qu’anime aussi un sentiment de justice et de sympathie humaine pour des générations méritantes et non récompensées, ce n’est plus que le pèlerin de l’histoire et du passé qui vient désormais (quand par bonheur il vient) recueillir les vestiges, réveiller les mémoires ensevelies, et quelquefois ressusciter de véritables gloires.

1088. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Le Mystère du Siège d’Orléans ou Jeanne d’Arc, et à ce propos de l’ancien théâtre français (suite et fin.) »

N’y cherchez pas ombre d’art ni de contraste : ce sont bien moins des contrastes que des disparates.

1089. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Térence. Son théâtre complet traduit par M. le marquis de Belloy »

Pour moi, je crois entendre l’Ombre de Ménandre, par chacun de ces vers aimables qui nous sont arrivés en débris, nous dire : « Pour l’amour de moi, aimez Térence. » Les Anciens eux-mêmes, en les comparant, restaient parfois dans le doute.

1090. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Souvenirs d’un diplomate. La Pologne (1811-1813), par le baron Bignon. »

Le président du conseil des ministres à Varsovie, le comte Stanislas Potocki, l’un des plus grands seigneurs de la Pologne et des plus considérés, n’avait cependant qu’une ombre d’autorité, et il ne trouvait pas dans la trempe de son caractère de quoi suppléer à l’insuffisance de ses pouvoirs.

1091. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Les cinq derniers mois de la vie de Racine »

Mais la réflexion que vous faites, monsieur, sur cette belle circonstance de l’histoire de ces anciens enfants des Saints, convient tout à fait à la haute idée qu’une religion aussi éclairée que la vôtre donne de l’image de Dieu qui est dans l’homme, et de l’alliance que Jésus-Christ a élevée à ia dignité de sacrement… » Et il prenait de là occasion pour citer, à son tour, plus d’une parole de l’Écriture se rapportant à l’union mystique du Verbe avec la nature humaine et du Sauveur avec son Église, toutes choses divines dont le mariage humain, en tant que sacrement, n’est que l’ombre et la figure.

1092. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre IV. De l’amour. »

Si l’on savait mourir, on pourrait encore se risquer à l’espérance d’une si heureuse destinée, mais l’on abandonne son âme à des sentiments, qui décolorent le reste de l’existence ; on éprouve, pendant quelques instants, un bonheur sans aucun rapport avec l’état habituel de la vie, et l’on veut survivre à sa perte ; l’instinct de la conservation l’emporte sur le mouvement du désespoir, et l’on existe, sans qu’il puisse s’offrir dans l’avenir une chance de retrouver le passé, une raison même de ne pas cesser de souffrir, dans la carrière des passions, dans celle surtout d’un sentiment qui, prenant sa source dans tout ce qui est vrai, ne peut être consolé par la réflexion même : il n’y a que les hommes capables de la résolution de se tuer3, qui puissent, avec quelque ombre de sagesse, tenter cette grande route de bonheur : mais qui veut vivre et s’expose à rétrograder ; mais qui veut vivre et renonce, d’une manière quelconque à l’empire de soi-même, se voue comme un insensé au plus cruel des malheurs.

1093. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre V. La Fontaine »

À la fin de sa longue existence, ce très profane abbé a ressenti dans ses sens et dans son âme une ombre des impressions qui font la douloureuse beauté de l’Ecclésiaste.

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