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731. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « M. Ampère »

Son père avait commencé de lui enseigner le latin ; mais lorsqu’il vit cette disposition singulière pour les mathématiques, il la favorisa, procurant à l’enfant les livres nécessaires, et ajournant l’étude approfondie du latin à un âge plus avancé. […] Je m’imagine (que les mathématiciens me pardonnent si je m’égare), je m’imagine qu’il y a dans cet ordre de vérités, comme dans celles de la pensée plus usuelle et plus accessible, une expression unique, la meilleure entre plusieurs, la plus droite, la plus simple, la plus nécessaire. […] Quant au grand Haller, il est nécessaire de lire le journal de sa vie pour découvrir sa lutte perpétuelle et ses combats sous cette apparence calme qu’on lui connaissait : il s’est presque autant tourmenté que Pascal. […] Il y avait certains résultats réputés positifs, ceux de Malthus, par exemple, qui le mettaient en colère : il était tout sentimental à cet égard ; sa philanthropie de cœur se révoltait de ce qui violait, selon lui, la moralité nécessaire, l’efficacité bienfaisante de la science.

732. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre quatrième. La connaissance des choses générales — Chapitre premier. Les caractères généraux et les idées générales. » pp. 249-295

. — D’abord, il n’est pas nécessaire que ces corps donnent à la main qui les soulève la sensation de résistance ; car l’air qui fait monter le mercure du baromètre est pesant. […] Ainsi, tout ce qui est dans notre atmosphère tombe, et tombe vers le centre de notre planète. — Mais, pour qu’un corps tombe, il n’est pas nécessaire qu’il soit compris dans notre atmosphère ; des deux mouvements qui composent le mouvement total de la lune, l’un est une chute vers nous. — Encore deux pas, et l’épuration de notre idée s’achève. […] En d’autres termes, chaque nom de nombre équivaut au groupe désigné par le précédent, plus un86. — Pour ne pas encombrer notre mémoire, nous réduisons ces noms au strict nécessaire. […] Sous nos yeux et tous les jours, une quantité prodigieuse de corps sont en repos ou en mouvement, de sorte qu’à ce point de vue l’expérience nous fournit tous les matériaux nécessaires pour que nous puissions isoler les deux idées élémentaires de repos et de mouvement.

733. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XVI. La littérature et l’éducation publique. Les académies, les cénacles. » pp. 407-442

Fontenelle, quand il écrit ses Eloges des savants, ne croit plus nécessaire de contraindre la langue de Cicéron à exprimer les mystères de l’algèbre ou de la physique. […] Et l’on comprendra qu’il est nécessaire de savoir, non seulement ce qu’on étudiait, mais comment on étudiait chaque chose à toute époque. […] Une lutte nécessaire s’établit entre deux forces, l’une intérieure qui tend à la maintenir dans ses opinions et ses habitudes, l’autre extérieure qui tend à la mettre en harmonie avec les changements opérés autour d’elle. […] Il est nécessaire de porter l’effort, tantôt dans un sens, tantôt dans un autre, suivant que l’art a suivi avec excès telle ou telle direction.

734. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 mai 1885. »

Glasenapp, solennelles de respectueuse admiration, de culte presque religieux pour le Père de la musique, — les pages, dont les principales seront traduites en cette revue, sur Beethoven, enthousiastes jusque le lyrisme, où l’essence de la musique est, à jamais, définie, et le caractère divinement génial de Beethoven, « le Révélateur », avec des adorations agenouillées, — les pages sur Gluck, sur Weber, sur Spontini, — et celles où il proclame le culte des vieux Maîtres, inviolable, sacré, nécessaire, d’ordre divin. […] De même, notre Schopenhauer, avec un souci constant et caractéristique, avait senti et appliqué dans sa vie extérieure, — en conservant intact son petit patrimoine — cette compréhension : que la saisie de la vérité, en chaque recherche philosophique ou intellectuelle, est toujours, sérieusement, menacée par la dépendance où nous sommes à l’égard du gain nécessaire de l’argent. […] Noufflard, qui comprend la biographie de Wagner, jusqu’en 1849, est venu en son temps : pour comprendre l’œuvre d’un artiste, il est utile de connaître sa vie ; mais une biographie exacte et rigoureuse est nécessaire, avant toute autre étude. […] La première est nécessaire pour être chantée sur la scène au risque de la trahison.

735. (1739) Vie de Molière

Si on osait encore chercher dans le cœur humain la raison de cette tiédeur du public aux représentations du Misanthrope, peut-être les trouverait-on dans l’intrigue de la pièce, dont les beautés ingénieuses et fines ne sont pas également vives et intéressantes ; dans ces conversations même, qui sont des morceaux inimitables, mais qui n’étant pas toujours nécessaires à la pièce, peut-être refroidissent un peu l’action, pendant qu’elles font admirer l’auteur ; enfin dans le dénouement, qui, tout bien amené et tout sage qu’il est, semble être attendu du public sans inquiétude, et qui venant après une intrigue peu attachante, ne peut avoir rien de piquant. […] On admire la conduite de la pièce jusqu’au dénouement ; on sent combien il est forcé, et combien les louanges du roi, quoique mal amenées, étaient nécessaires pour soutenir Molière contre ses ennemis. […] On pourrait répondre à ce grand critique que Molière n’a point allié Térence avec Tabarin dans ses vraies comédies, où il surpasse Térence : que s’il a déféré au goût du peuple, c’est dans ses farces, dont le seul titre annonce du bas comique ; et que ce bas comique était nécessaire pour soutenir sa troupe. […] Il y a de la cruauté à vouloir avilir des hommes nécessaires à un État bien policé, qui exercent, sous les yeux des magistrats, un talent très difficile et très estimable.

736. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Le buste de l’abbé Prévost. » pp. 122-139

remarquez que déjà le plan se gâte : cet ami de Paris qui vient l’informer des nouvelles dans sa solitude, et qui lui est plus nécessaire qu’il ne pense, répond à une faculté secrète qui est en lui : il y a dans l’abbé Prévost un curieux, en effet, un journaliste, un homme à l’affût des livres et des productions du moment. […] D’une grande incurie et d’une parfaite indifférence pour les intérêts matériels, il ne put toutefois s’y soustraire, et il fut toujours commandé par eux : la plus grande partie de sa vie se passa dans les assujettissements laborieux desquels il ne retirait que le strict nécessaire.

737. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Marivaux. — II. (Fin.) » pp. 364-380

Je voudrais qu’un esprit aussi fin que le sien eût senti qu’il n’y a pas un si grand mérite à donner du joli et du neuf sur de pareilles matières, et que tout homme qui les traite avec quelque liberté peut s’y montrer spirituel à peu de frais ; non que, parmi les choses sur lesquelles il se donne un peu carrière, il n’y en ait d’excellentes en tous sens, et que même celles où il se joue le plus ne puissent recevoir une interprétation utile ; car enfin, dans tout cela, je ne vois qu’un homme d’esprit qui badine, mais qui ne songe pas assez qu’en se jouant il engage quelquefois un peu trop la gravité respectable de ces matières : il faut là-dessus ménager l’esprit de l’homme, qui tient faiblement à ses devoirs, et ne les croit presque plus nécessaires dès qu’on les lui présente d’une façon peu sérieuse. […] Marivaux avait les goûts recherchés que l’on conçoit de la part d’une organisation si fine et si coquette, parure, propreté curieuse, friandise ; tout ce superflu lui était chose nécessaire.

738. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Geoffroy de Villehardouin. — I. » pp. 381-397

Et qu’on me permette ici une réflexion générale qui s’applique à cette époque et à beaucoup d’autres : il y a, dans les divers états de la société et aux divers degrés de la civilisation, des facultés nécessaires et des talents qui, répandus par la nature sur certains hommes, diffèrent beaucoup moins qu’on ne suppose de ces mêmes talents, développés à des époques en apparence plus favorisées. […] Le doge, à cette époque, et quand ces députés d’outre-monts arrivèrent, pouvait beaucoup ; les Conseils qu’on lui avait déjà associés pouvaient beaucoup également et étaient devenus ses adjoints nécessaires : et enfin l’assemblée générale du peuple n’avait point encore été dépouillée de tout droit de sanction.

739. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Sénac de Meilhan. — I. » pp. 91-108

On n’a besoin que d’une certaine activité nécessaire pour une prompte expédition, que d’embrasser des détails familiers par l’habitude, d’avoir présent à l’esprit le texte de quelques règlements, des formes prescrites, des usages qui ont force de loi. […] Tout le monde, en fait d’esprit, semble avoir dans ce siècle le nécessaire, mais il y a peu de grandes fortunes.

740. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Histoire du Consulat et de l’Empire, par M. Thiers. (Tome XII) » pp. 157-172

Il croit me mettre dans l’embarras ; il se trompe fort ; rien ne m’arrêtera ; mes desseins s’accompliront ; j’ai la volonté et la force nécessaires. […] L’intérêt capital de ce volume-ci est dans l’expédition de Masséna en Portugal et sa retraite, devenue si nécessaire, et payée d’une disgrâce non méritée.

741. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Divers écrits de M. H. Taine — II » pp. 268-284

Il suppose en principe que les facultés d’un homme, comme les organes d’une plante, dépendent les unes des autres ; qu’elles sont mesurées et produites par une loi unique ; qu’il y a en nous une faculté-maîtresse dont l’action uniforme se communique différemment à nos différents rouages, et imprime à notre machine un système nécessaire de mouvements prévus. — Une fois qu’on a saisi la faculté maîtresse, dit-il ailleurs en parlant de Shakespeare, on voit l’homme se développer comme une fleur. […] Est-ce à dire, parce que Tite-Live est éloquent par nature et cherche des sujets riches et féconds, des sujets propices au développement des talents qu’il a en lui, qu’il soit orateur en tout et partout dans son histoire, orateur au pied de la lettre, et orateur en quelque sorte dépaysé quand il fait autre chose que des discours, tellement que lorsqu’il peint, par exemple, des caractères, Annibal, Fabius, Scipion, Caton, Paul-Émile, s’il les conçoit d’une façon un peu plus noble et un peu plus adoucie qu’un autre ne les eût présentés, tout ce qu’on peut louer ou blâmer dans cette manière de traiter les portraits soit l’effet de l’esprit oratoire, un effet rigoureux, nécessaire, découlant de là directement comme un corollaire d’un principe ?

742. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « L’abbé de Marolles ou le curieux — I » pp. 107-125

Quant à la correction des mœurs de ses religieux, il n’estimait pas apparemment que son titre d’abbé commandataire lui conférât autorité suffisante pour cela, et, au lieu d’entrer en lutte avec ses moines, il avait mieux aimé patienter ; c’est à l’archevêque diocésain sous la juridiction duquel était placée l’abbaye, qu’il demanda enfin d’autoriser un rétablissement de règle devenu bien nécessaire. […] [NdA] Je demande qu’on me passe ce mot de collectionneur qui m’est nécessaire et qui exprime la manie ; collecteur ne dit pas assez.

743. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Correspondance diplomatique du comte Joseph de Maistre, recueillie et publiée par M. Albert Blanc » pp. 67-83

Il y a un moment très difficile à fixer avec précision où, dans ces luttes du héros nouveau, de ce grand diable d’homme (comme il l’appelle) contre les souverains des vieilles races, le fer insensiblement se transmute et acquiert de l’or : laissons les figures ; il y a un moment où le fait devient droit, où l'utilité publique, la grandeur nationale, l’immensité des services rendus et à rendre, le prestige qui rayonne et ne se raisonne pas, se confondent pour sacrer un homme nécessaire et une race qui fait souche à son tour. […] Il n’est pas nécessaire d’être bien fin pour deviner (en 1814) que l’Italie est une monnaie qui doit payer d’autres choses.

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