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1122. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série «  Leconte de Lisle  »

Il mit dans ce poème ce qu’il avait de plus sincère en lui, la protestation obstinée contre le mal physique et moral, et aussi la sérénité de l’artiste paisiblement enivré de visions précises. […] Savez-vous bien que cela suppose deux sentiments éternels et très humains, portés l’un et l’autre au plus haut degré : le désenchantement de la vie, et, seul remède durable, l’amour du beau, et du beau sans plus : j’entends le beau plastique, celui qui est dans la forme et qui peut se passer de la notion du bien, celui qu’on sent et qu’on reconnaît indépendamment de tout jugement moral, sans avoir de haine ou d’amour pour ce qui en fait la matière, que ce soit la Nature ou les actions des hommes ?

1123. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre sixième. »

Ses grands hommes dans les Vies ; dans les Œuvres morales, ses philosophies, sa religion, ses mœurs, sa vie domestique et anecdotique ; que de sources fécondes, que de termes de comparaison avec la société d’alors ! […] Au contraire, la préface des Œuvres morales (1574), en beaucoup d’endroits, sent le sermon.

1124. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Conclusion »

Le monde moral et le monde physique se confondent ; les sentiments sont des sensations ; les idées ont des contours ; l’abstrait prend un corps, et l’invisible même veut qu’on le voie. […] S’agit-il, par exemple, de l’usage des passions dans le drame, elle recueille dans les auteurs dramatiques les plus divers et les plus inégaux les traits vrais ou spécieux dont ils ont peint une passion ; elle compare les morceaux, non pour donner des rangs, mais pour faire profiter de ces rapprochements la vérité et le goût ; elle y ajoute ses propres pensées, et de ce travail de comparaison et de critique elle fait ressortir quelque vérité de l’ordre moral.

1125. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre I. Le broyeur de lin  (1876) »

Au moral, il est permis de dire ce qui n’est pas vrai au physique : quand les creux d’une coquille sont très profonds, ces creux ont le pouvoir de reformer l’animal qui s’y était moulé. […] Si le sens moral n’avait pas été chez elle aussi oblitéré qu’il l’était, elle n’eût pensé qu’à délivrer la sacristine ; mais elle n’y songeait guère.

1126. (1881) La psychologie anglaise contemporaine «  M. Georges Lewes — Chapitre II : La Psychologie »

Certaines monstruosités de l’ordre moral, des dépravations précoces, des goûts bizarres, ne semblent explicables que par l’hérédité. […] Lewes, tout en refusant de les aborder ; et pour ce qui concerne la transmission héréditaire du développement intellectuel et moral, il nous renvoie à M. 

1127. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre troisième. Le souvenir. Son rapport à l’appétit et au mouvement. — Chapitre premier. La sélection et la conservation des idées dans leur relation à l’appétit et au mouvement. »

Enfin on a tort de ne pas distinguer, dans cette question, les émotions physiques et les émotions morales. […] Ici encore, selon nous, il faudrait distinguer les émotions physiques et les émotions morales.

1128. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « Victor Hugo » pp. 106-155

Victor Hugo le porte dans le portrait physique ou moral de ses héros : Il y avait de l’illisible sur cette figure. […] Hugo tente d’éteindre l’inconnu, de ses questions oiseuses sur les ténèbres métaphysiques, de ses constants efforts à définir l’incertain des problèmes historiques, sociaux, moraux et religieux, de son abus de l’obscurité, de ses appels à une intervention divine, et de sa vision de l’inexplicable dans les plus claires choses ; il nous semble que la démonstration est suffisante.

1129. (1856) Cours familier de littérature. II « IXe entretien. Suite de l’aperçu préliminaire sur la prétendue décadence de la littérature française » pp. 161-216

Moi-même, dans une circonstance suprême où toutes les institutions monarchiques étaient sondées pour les remplacer par des institutions républicaines, quand des voix s’élevèrent en dehors du gouvernement pour demander l’abolition de cette aristocratie élective des lettres, je ne la défendis que par ce mot : « C’est plus qu’une institution, c’est une habitude de la France ; respectons les habitudes d’un peuple, surtout quand elles sont morales, littéraires, glorieuses pour la nation. […] et en n’achevant pas cette généreuse tentative de rénovation du monde intellectuel, moral et politique.

1130. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Émile Zola »

L’auteur du Ventre de Paris, dont la chair, pour parler comme lui, est faite des chairs mêlées de Victor Hugo, Théophile Gautier et Flaubert, malgré son amour monstrueux des choses basses, des couleurs criantes jusqu’à vociférer, et son cynique mépris des inspirations morales et des beautés intellectuelles dans les œuvres, a du talent encore. […] C’est la réplique, par la nature, aux choses morales et religieuses de l’ancien monde qui croyait à Dieu, et aux chagrins de l’âme immortelle, et, pour un matérialiste comme M. 

1131. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Ernest Feydeau » pp. 106-143

Enfant gâté qui, comme tous les enfants gâtés, a l’esprit de contradiction et le porte en toutes choses, il a entendu dire à la Critique que peut-être il sera moral demain, et il est remonté vers son immoralité de la veille, indifférent à tout, si ce n’est au jeu même de ses facultés. […] C’est comme une justice, et, à coup sûr, c’est une douceur que de voir le talent manquer à ceux qui manquent aux lois morales !

1132. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre vii »

Et ceux-là seuls qui savent en trouver les versets triomphals devant un tombeau cher sont dignes du disparu…‌ Obéissons… et refusant de voir la perte que subit la Lorraine et qu’on mesurera quand nous aurons publié l’œuvre interrompue de Pierre de Rozières, recueillons, comme deux exhortations morales dédiées à la jeunesse, deux lettres intimes où, dans l’année qui précéda la guerre, le jeune homme, chassant les inquiétudes de son âge, trouvait et définissait sa voie.‌ […] La vie à la campagne me semble être la plus normale, la plus féconde pour travailler, la plus propice pour offrir aux miens un véritable foyer, une demeure qui ne soit pas un appartement d’occasion, la plus hygiénique pour le physique et le moral d’une famille, celle enfin où l’on peut donner à sa maison le plus de sens.

1133. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Waterloo, par M. Thiers »

Et d’abord, comme premier élément, je rappellerai cette sorte de désaccord entre le moral de l’armée et ses chefs, le soldat ayant la disposition à se croire trahi et perdu, du moment qu’il ne voyait pas Napoléon.

1134. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Victor Hugo — Victor Hugo, romans (1832) »

L’auteur nous fait suivre les corps au gibet ; il nous fait toucher du doigt les squelettes ; mais des destinées morales, spirituelles, pas un mot.

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