La guerre achevée, ils les congédiaient, et la république restait libre. […] Les Médicis ne voulaient ni de cette gloire soldée, ni de ces chutes honteuses ; ils préféraient leur rôle civique et leur croissance régulière par l’estime publique dans un pays prospère et libre. […] Quand il mourut, Florence était libre, la Toscane prospère, l’Italie pacifique, l’Europe édifiée de ses vertus ; il fallait ou reconnaître son ascendant ou se déclarer le peuple le plus ingrat de la terre. […] Par cet amour qui vous fait embrasser tout le genre humain, qui vous a fait descendre du ciel et revêtir notre humanité nue, qui vous a fait souffrir la faim, la soif, le froid, la chaleur, le labeur, les moqueries, le mépris, les coups, la flagellation, la mort enfin sur une croix ; par cet excès d’amour, ô mon Sauveur Jésus, je vous supplie et vous conjure de détourner vos regards, votre face de mes péchés, afin que cité à comparaître devant votre tribunal, ce que je sens devoir être très-prochain, je ne sois pas puni pour mes fraudes, mes péchés, mais pardonné par les mérites de votre croix : qu’il plaide, qu’il plaide en ma faveur, ce sang, le plus précieux de tous, que vous avez répandu sur ce sublime autel de notre rédemption, et pour rendre l’homme libre, donner à l’homme la liberté. » Après ces paroles et d’autres encore, devant tous les assistants en pleurs, le prêtre ordonna qu’on le relevât et qu’on le mît dans son lit pour qu’on lui administrât plus facilement le sacrement : il s’y opposa d’abord ; mais, de crainte de manquer d’obéissance au vieillard, il se laissa fléchir, et répétant avec fermeté les paroles sacramentales, déjà sanctifié et vénérable par une sorte de majesté divine, il reçut le corps et le sang du Seigneur.
« Je prends de la fortune le premier argument : ils me sont également bons, et ne desseigne jamais de les traiter entiers : car je ne vois le tout de rien… De cent membres et visages qu’a chaque chose, j’en prends un, tantôt à lécher seulement, tantôt à effleurer, et parfois à pincer jusqu’à l’os : j’y donne une pointe, non pas le plus largement, mais le plus profondément que je sais, et aime plus souvent à les saisir par quelque lustre inusité233. » De cette libre allure vient cette fraicheur vive d’impression qui donne tant de grâce primesautière, tant de force pénétrante aussi à son expression. […] Soyons libres aussi à l’égard de toutes les formes de la vie sociale : ne croyons pas le bien et la vérité attachés à ces formes politiques ou religieuses, d’une croyance trop passionnée qui nous arrache à nous-mêmes et nous donne aux objets de notre fantaisie. Soyons libres même à l’égard des affections naturelles : aimons notre patrie, notre femme, nos enfants, non pas jusqu’au point de nous en troubler. […] Au sacrifice près, qui, en quelque mesure que ce soit, n’est pas la pente de sa nature, c’est un excellent et aimable homme, de charmant commerce, ami exquis et vrai, d’autant que le libre choix, dans l’amitié, assure son ombrageuse indépendance : on sait sa liaison de quatre années avec La Boétie, et la chaleur qui lui en resta toujours au cœur.
Dans les Cygnes, dans la Chevauchée, le poète veut s’énoncer avant tout ; il parle d’une voix ingénue et libre, et le plus souvent ne paraît rien devoir qu’à lui-même ; comme M. […] Et non seulement pour cette ressemblance extérieure que l’un composa des vers libres et l’autre des vers inégaux ; plutôt parce que leur parole écrite fut sincère et fidèle, — et plus encore parce que tous deux ils ont participé du génie populaire. […] C’est un adolescent libre qui va, vient, s’encourt à travers la prairie et jusqu’à la forêt. […] Et la cuirasse encore le gêne et la rondache pèse à son bras : alors il rejette tout cet arroi rigide, foule aux pieds l’écrasant appareil de la guerre et marche soudain libre dans les champs et les prés dont il compte les fleurs.
Sans doute une majorité toute-puissante, comme en Amérique, peut empêcher l’individu de penser ce qui ne lui convient pas ; mais il restera toujours un champ très-étendu de pensée libre, et de ce retranchement la liberté pourra toujours faire peu à peu des sorties et prendre pied sur le terrain qui lui est interdit. […] Il lui semblait que plus l’homme s’accorde de liberté sur la terre, plus il doit s’enchaîner du côté du ciel, qu’il est incapable de supporter à la fois une complète indépendance religieuse et une entière liberté politique, enfin « que, s’il n’a pas de foi, il faut qu’il serve, et, s’il est libre, qu’il croie. » Quelque pénétré qu’il fût de la nécessité de cette alliance entre la liberté et la religion, il ne se faisait aucune illusion sur les difficultés qu’elle rencontrait de notre temps. […] Albert de Broglie la question suivante, qui, de la part d’un écrivain, un peu suspect de libre pensée, ne laisserait pas que de passer pour indiscrète : « Pourquoi la religion chrétienne, qui, sous tant de rapports, a amélioré l’individu et perfectionné l’espèce humaine, a-t-elle exercé, surtout à sa naissance, si peu d’influence sur la marche de la société ? […] Sans doute il est cruel à une cause qui s’est toujours donnée pour la cause de la liberté de s’entendre dire, et cela sans passion, et même avec bienveillance, qu’elle porte la servitude dans son sein, et qu’il lui faudra lutter contre ses plus violents instincts pour rester libre.
En vain les stoïciens voudraient nous présenter ici Jupiter comme soumis à leur destin ; Jupiter et tous les dieux ont tenu conseil sur les choses humaines, et les ont par conséquent déterminées par l’effet d’une volonté libre. […] Du moment qu’il est établi (nous l’avons démontré et nous le démontrerons mieux encore) que les gouvernements ne sont point nés de la fraude, ni de la violence d’un seul, peut-on, en embrassant tous les cas humainement possibles, imaginer d’une autre manière comment le pouvoir civil se forma par la réunion du pouvoir domestique des pères de famille, et comment le domaine éminent des gouvernements résulta de l’ensemble des domaines naturels, que nous avons déjà indiqués comme ayant été ex jure optimo, c’est-à-dire libres de toute charge publique ou particulière ? […] Toutes ces choses furent d’abord propres à l’individu, libres en cela même qu’elles étaient individuelles, et, parce qu’elles étaient libres, capables de constituer de véritables républiques.
C’est l’heure des vacances, c’est le moment de faire son tour de Suisse, sa visite aux Alpes ; pour ceux qui sont libres comme pour ceux qui sont retenus, il n’est pas de moyen plus agréable ou d’éclairer sa route si l’on part, ou de se figurer le voyage si l’on reste, que de prendre les livres de Töpffer. […] C’est là qu’en accostant, dit-il, le paysan qui descend la chaussée, ou en s’asseyant le soir au foyer des chaumières, on a le charme encore d’entendre le français de souche, le français vieilli, mais nerveux, souple, libre et parlé avec une antique et franche netteté par des hommes aussi simples de mœurs que sains de cœur et sensés d’esprit ; … — en telle sorte que la parole n’est plus guère que du sens, mais franc, natif, et comme transparent d’ingénuité. […] Nous supplions seulement qu’on ne l’imite pas, et qu’on n’aille pas faire un genre littéraire, une école, de ce qui, chez le libre amateur genevois, a été précisément l’absence d’école et une inspiration forte et combinée.
Il avait ouvert ses premiers cours libres et gratuits d’anatomie pendant les vacances de 1773 : à la rentrée des Écoles, comme les professeurs de la Faculté devaient enseigner aux mêmes heures, on lui proposa de changer les siennes, et il refusa. […] Une jeune fille, nièce de Mme Daubenton, ayant été saisie d’un évanouissement près d’une salle d’étude où était Vicq d’Azyr, celui-ci accourut, prodigua ses soins à la jeune malade, et lui inspira un soudain intérêt qui se consacra bientôt par un mariage : ce mariage dura peu, et la mort de la jeune femme laissa Vicq d’Azyr veuf, et libre de nouveau, ce qui ne nuisit pas à ses succès dans le monde : mais il avait acquis l’amitié de Daubenton et les moyens, grâce à lui, d’étendre ses recherches d’anatomie sur les animaux étrangers. […] Il était de l’intérêt de la haute administration d’avoir une sorte de conseil médical consultatif, libre des préjugés et de la routine, dégagé des lenteurs d’écoles, prévenant sans entêtement les abus de l’empirisme, ou en accueillant, s’il y avait lieu, les bons résultats, et prêt à répondre, à donner un avis sur quantité de questions à l’ordre du jour.
C’est ainsi que dans une peinture large et libre où on lui permettrait bien des tons, il trouve moyen d’en assembler d’impossibles à concilier et qui se heurtent. « Il a du génie, mais point de jugement », disait de lui Tallemant des Réaux, singulièrement d’accord en ceci avec Boileau. […] Toutefois il a entrevu quelque chose, il a eu un éclair de nouveauté et de libre peinture ; sa chaleur de jeunesse l’a bien servi, et dans cette pièce, de même que dans la suivante, intitulée Le Contemplateur et adressée à l’évêque de Nantes Cospeau, il a eu en présence de la nature l’aperçu de certains genres de poésie descriptive ou méditative qui ont sommeillé durant près de deux siècles encore, pour n’éclore et ne se développer dans leur vraie et pleine saison que de nos jours. […] Saint-Amand ne vit dans Rome, même dans la nature romaine, même dans les ruines, que matière à pasquinade et à parodie : Il vous sied bien, monsieur le Tibre, De faire ainsi tant de façon, Vous dans qui le moindre poisson À peine a le mouvement libre ; Il vous sied bien de vous vanter D’avoir de quoi le disputer À tous les fleuves de la terre, Vous qui, comblé de trois moulins.
Guillaume Favre, appelé dans sa jeunesse Favre-Cayla, et aussi depuis son mariage Favre-Bertrand, mort le 14 février 1851 à quatre-vingts ans passés, était un de ces Genevois de la belle époque, qui avaient trente ans en 1800 ; qui, après les années de la domination française, assistèrent à la restauration cantonale en 1814 ; qui, dès ce moment surtout, vécurent au bord de leur lac à côté d’Étienne Dumont, l’ami de Mirabeau, du libre publiciste d’Ivernois, du spirituel observateur Châteauvieux, de l’illustre naturaliste de Candolle, du Bernois le plus naturellement français et voltairien Bonstetten, de l’historien Sismondi, et de Rossi plus tard, des Pictet, des de La Rive, des Diodati. […] Heureux homme que ce Guillaume Favre, et que rien ne commandait dans la libre et capricieuse application de ses goûts ! […] Et toutefois, après qu’on a bien envié ce bonheur d’une étude libre, ornée, active et oisive, ayant à elle une belle galerie bâtie tout exprès, remplie de livres, décorée de tableaux, de statues, et en vue d’un lac magnifique, on reconnaît tout bas, à la manière même dont il a usé de ses dons et de ses avantages, qu’il y a autre chose à faire encore qu’à jouir ainsi ; que, si noble et utile qu’ait été son exemple parmi ses compatriotes et pour ceux, qui le consultaient de près, il n’a pas donné tout ce qu’il aurait pu, et qu’un peu de contrainte, un peu de nécessité ne nuit pas ; que c’est sous ces rudes conditions seulement que l’homme, moitié de bon gré, moitié à son corps défendant, tire de lui-même, de son foyer et de ses couches intérieures, tout l’art, toute l’industrie dont il est capable, et le peu d’or qu’il doit à tous.
Et ce n’est pas seulement en sautant par la fenêtre que Bonstetten, en cet âge avancé, fait acte de jeunesse ; il en donne de meilleures marques par son esprit libre, ouvert, affranchi de tout lien rétrograde. […] Mais Bonstetten à la fois sérieux et mobile, qui, en matière de politique, avait plus que des goûts et n’avait pas tout à fait des doctrines, ne rencontra guère d’occasions où il pût souffrir de ce désaccord : son dernier établissement dans une république polie, à l’abri des contradictions et loin des mécomptes, laissait le champ libre à ses seuls instincts, à ses bienveillantes et incorrigibles espérances. […] Il a exprimé, dans une page heureuse et que je veux citer, l’idéal de l’éducation libre comme il l’entendait et comme il avait commencé de la recevoir : On croit la jeunesse indomptable, parce qu’on se fait une fausse idée de l’autorité.
Veuillot ; il a cassé les vitres, il a fait, lui aussi, ses Libres Penseurs, et il les a jetés dans la rue à la tête du passant. […] Delécluze, recueille dans sa vieillesse ses Souvenirs, les publie alors, dépeigne à ses contemporains de ce temps-là les gens avec qui il a dîné trente ou quarante ans auparavant, cherche même à les montrer en laid et à se donner le beau rôle, il n’y aurait rien à cette façon de faire que d’assez simple, d’assez conforme à la loi des amours-propres et d’assez reçu, en effet, dans cette libre et babillarde république des Lettres. […] Libre à lui de prendre son succès au sérieux et d’en jouir, en ne tenant nul compte de la nuance de mésestime qui s’y attache !
Cette libre union de chaque jour qui ne devait finir qu’avec sa vie commença. […] Il fut de ceux du moins qui la retrempèrent et la refirent la langue des hommes libres. […] Certes, cet homme de haut talent et, jusqu’à un certain point, de génie, de noble aspect et « d’une figure avantageuse » (ainsi en parlent ceux qui l’ont vu et qui ne songeaient point à faire, comme aujourd’hui, des caricatures à tout propos) ; cet homme à l’âme ardente, élevée, d’un esprit libre, d’un caractère indépendant et fier, qui n’avait pu se plier à la vie de Turin, et qui n’hésita pas, en renonçant à son pays, à sacrifier les deux tiers de sa fortune pour se mieux dévouer à l’objet de son culte ; le poète qui, dans la Dédicace de Myrrha, s’étonnant d’avoir tant tardé à nommer publiquement celle qui l’inspire, lui disait : « Ma vie ne compte que depuis le jour qu’elle s’est enlacée à ta vie » ; un pareil homme méritait que la comtesse d’Albany, déçue et frappée dans sa destinée, crût elle-même s’honorer par un tel choix, et ne pas perdre, même aux yeux du monde, en échangeant royauté contre royauté.
Delavigne déposa d’abord ses sentiments dans quelques pièces légères, les seules de ses poésies peut-être où, tout à fait libre, encore inconnu, il se soit abandonné sans effort à ses goûts intimes et au simple penchant de sa muse. […] Le vers libre qu’affecte en général M. […] Delavigne n’a pas toujours évité les inconvénients du vers libre, les longues périodes qui se traînent en phrases incidentes sur des rimes redoublées, ni les combinaisons à effet, dans lesquelles l’intention manque son but.