“Il peint, dit l’Ecrivain déjà cité, agréablement ses pensées ; son style est vif & élégant ; mais il y a peu d’ordre dans son traité ; ses fréquentes contradictions sont de la peine à des lecteurs attentifs ; elles se dérobent à la plûpart des lecteurs entraînés par les agrémens du style. […] Aussi tous ses lecteurs ne sont-ils pas de son goût. […] On embrasse ici ces deux objets, parce que le Poëte & l’Orateur, (ainsi qu’on l’observe) n’ayant tous deux que le même but, celui de plaire, de toucher, d’instruire, ils ne différent que dans la maniere d’employer les moyens qui leur sont communs : mais la poétique n’est pas longue, parce qu’on se propose moins de former des Poëtes que des lecteurs éclairés.
Dupuytren, qui était debout attentif, en face de lui, devait être là-dessus du même avis que le plus passionné lecteur des Méditations. […] Nous ne pouvons que renvoyer le lecteur à l’article du 13 avril 1830, que nous avons déjà eu l’occasion de reproduire dans l’appendice du tome XII des Nouveaux Lundis (page 445), sur l’élection alors récente de M. de Pongerville, successeur de M. de Lally-Tollendal à l’Académie française.
Cela n’a point d’inconvénient toutes les fois que la fin dernière du discours est la représentation d’un état de l’imagination ou de l’âme : toutes les métaphores alors, toutes les hyperboles, toutes les figures naturelles sont bonnes, du moment qu’elles font connaître cet état d’âme ou d’imagination au lecteur ou le suscitent en lui. […] Et dans la critique littéraire, quand on a comparé ses auteurs aux aigles, aux lions, aux papillons, aux abeilles, aux prairies émaillées de fleurs, aux montagnes abruptes, aux clairs ruisseaux, aux torrents furieux, quelle idée a-t-on donné aux lecteurs de leur talent et de leurs œuvres ?
Ce n’est pas qu’ils soient tout-à-fait dépourvus de mérite : ils annoncent des connoissances, des lumieres, un esprit cultivé, & sont écrits avec assez de correction ; mais ils manquent tous de cette chaleur qui anime & passionne le Lecteur, qui le fait entrer dans les sentimens du Panégyriste, & sans laquelle il n’existe pas de vrai talent. […] De plus, il y regne un ton dogmatique & magistral, qui décele un Auteur jaloux de ses petites idées, & indispose contre lui le Lecteur le plus porté à l’indulgence.
Le lecteur croira même sans peine que les solitaires qui éleverent son enfance, et qui instruisirent sa jeunesse, ne l’avoient jamais excité à travailler pour le théatre. […] Que le lecteur se souvienne enfin de ce qu’il a lû, comme de ce qu’il a entendu dire à des témoins oculaires, sur le sujet dont il s’agit ici.
Je ne prétends pas qu’un grand nombre de lecteurs doivent être attirés à une poésie si austère et si haute. […] Certes, aucun de vos lecteurs ne vous en voudrait de cette erreur. […] C’est une causerie, mais pleine de sens, de tact, et qui s’arrête bien en deçà de la fatigue du lecteur. […] C’est à cette condition seulement que des idées pures peuvent émouvoir, entraîner le lecteur. […] L’auteur ne surmène ni son imagination, ni ses lecteurs.
Il est une bonne et forte école pour le peuple des lecteurs. […] Il prépare des lecteurs aux génies puissants qui peuvent survenir. […] Les chiffres, en leur brutalité, sont là, qui sonnent à l’oreille du lecteur. […] Pour neuf lecteurs sur dix, le défaut capital du Docteur Pascal est là. […] Le lecteur est stupéfait que ce soit le contraire.
Mais nous avons résolu, le lecteur et moi, de ne juger jamais sur parole. […] Je ferai grâce au lecteur d’une infinité de personnages et d’incidents ennuyeux qui n’ont aucun rapport avec la pièce de Molière. […] Le lecteur devine le résultat de mon dialogue avec le journaliste ; il dédaigna mes remarques, et je le cherchai vainement huit jours après au même théâtre, où l’on donnait la même pièce, mais avec un tout autre appareil. […] D’après ce court préambule, nous n’avons qu’à copier une note prise dans l’Histoire des théâtres ; le lecteur fera lui-même ses remarques, et les appliquera aux circonstances, aux personnages. […] Le lecteur ne se bornera pas sans doute à remarquer combien il a fallu d’invention pour trouver cinq actes dans un sujet aride ; combien il a fallu d’art pour nourrir ces cinq actes, d’une fable toujours vive et variée, sans l’embarrasser du moindre détail étranger : le lecteur doit aussi démêler le moyen dont l’auteur s’est servi.
J’aurai assez d’occasions, chemin faisant, de marquer ce point sans l’annoncer à l’avance ; les lecteurs français sont d’eux-mêmes assez éveillés là-dessus. […] Il fut pris, à dix-sept ans, de ce que son compatriote Segrais appelait la petite vérole de l’esprit, c’est-à-dire qu’il voulut se faire religieux ; par bonheur pour ses lecteurs futurs et pour le bien du genre humain (c’est lui-même qui nous le dit aussi naïvement qu’il le pense), on le jugea trop faible de santé pour soutenir les exercices du chœur, et sa fièvre de vocation eut le temps de se dissiper. […] L’abbé de Saint-Pierre, en négligeant de plaire aux lecteurs, allait donc contre ses principes… Son défaut était moins de nous regarder comme des enfants que de nous parler comme à des hommes. » Que ne connaissait-il mieux les poètes !
La plupart de mes lecteurs l’auront déjà senti et en auront fait tout bas la remarque : le monde est présentement occupé et distrait ; il n’a plus d’oreille pour le poëte qui se plaint seul, pour celui qui vient nous dire sur tous les tons : Je suis la fleur des champs égarée au désert… ou bien : J’étais un jeune oiseau sans plumes à son aile… Le monde commence à être rebattu de l’éternelle chanson ; il a écouté, non point patiemment, mais passionnément, tous les grands plaintifs depuis Job jusqu’à Childe-Harold ; il s’écoutait lui-même en eux, et il assistait à ses propres pensées désolées : cela lui suffît ; le reste lui paraît faible ; les pleureurs à la suite ont tort ; il en a assez pour quelque temps de ces lamentations sur les lacs et sur les rochers. […] Non, mais je cherche en toi cette force qui fonde, Cette mâle constance, exempte du dégoût… Il cherche, en un mot, la vertu la plus absente, la qualité la plus contraire au défaut qui s’est trop marqué ; et il se plaît ici, en regard et par contraste, à exposer en disciple d’Hésiode et de Lucrèce, en lecteur familier avec le bouclier d’Achille et avec les tableaux des Géorgiques, l’invention des arts, la fondation des cités, la marche progressive et lente du génie humain, tout ce qui est matière aussi de haute et digne poésie. […] Après cette suite de beaux vers, d’un souffle élevé et juste, notre estime, celle de tous les lecteurs, est acquise au jeune poëte.
La douleur profonde qu’il laisse à ses amis de Genève sera ressentie ici de tous ceux qui l’ont connu, et elle trouvera accès et sympathie auprès de ces lecteurs nombreux en qui il a éveillé si souvent un sourire à la fois et une larme. » Mais c’est trop peu dire, et ceux qui l’ont lu, qui l’ont suivi tant de fois dans ces excursions alpestres dont il savait si bien rendre la saine allégresse et l’âpre fraîcheur, ceux qui le suivront encore avec un intérêt ému dans les productions dernières où se jouait jusqu’au sein de la mort son talent de plus en plus mûr et fécond, ont droit à quelques particularités intimes sur l’écrivain ami et sur l’homme excellent. […] Cet homme simple, et dont le lecteur croit devancer parfois la sagacité, se trouve toujours au niveau de chaque crise et la fait tourner à bien. […] Toutes les scènes qui se rapportent à la mort de Rosa sont d’une haute beauté morale ; il sera sensible à tout lecteur que celui qui les a si bien conçues et représentées travaillait, lui aussi, en vue du sujet même, c’est-à-dire du suprême instant et qu’il peignait d’après nature.
Ce ne sont pas les esprits qui ont changé, ce sont les idées ; les esprits intuitifs sont restés les mêmes ; mais leurs lecteurs ont exigé d’eux plus de concessions. […] Mais si l’on avait pris soin de traduire le raisonnement dans le langage de la Géométrie, intermédiaire entre celui de l’Analyse et celui de la Physique, ces défiances ne se seraient sans doute pas produites, et peut-être pourrait-on ainsi, même aujourd’hui, tromper encore bien des lecteurs non prévenus. […] C’est pourtant ce que ferait le lecteur d’un livre de Mathématiques, s’il n’était que logicien.
On avait le droit de faire des objections et des questions au lecteur ; de la sorte, la réunion dégénérait vite en une sorte d’assemblée libre. Elle avait un président 387, des « anciens 388 », un hazzan, lecteur attitré ou appariteur 389, des « envoyés 390 », sortes de secrétaires ou de messagers qui faisaient la correspondance d’une synagogue à l’autre, un schammasch ou sacristain 391. […] D’un autre côté, la liberté, laissée à qui la voulait prendre, de s’instituer lecteur et commentateur du texte sacré donnait des facilités merveilleuses pour la propagation des nouveautés.