C’est ce qui explique pourquoi les vassaux roturiers s’appellent homines dans la langue du droit féodal. […] Mais lorsque les plébéiens, les hommes dans la langue féodale, commencèrent à faire partie de la cité, le meurtre de tout homme fut appelé homicide. […] Après les remarques diverses que nous avons faites dans ce chapitre sur tant d’expressions élégantes de l’ancienne jurisprudence romaine, au moyen desquelles les feudistes corrigent la barbarie de la langue féodale, Oldendorp et tous les autres écrivains de son opinion doivent voir si le droit féodal est sorti, comme ils le disent, des étincelles de l’incendie dans lequel les barbares détruisirent le droit romain.
1º J’écoute deux personnes converser dans une langue inconnue. […] Dans la surdité verbale, en effet, le malade se trouve à l’égard de sa propre langue dans la même situation où nous nous trouvons nous-mêmes quand nous entendons parler une langue inconnue. […] Mais l’enfant saurait alors répéter tous les mots que son oreille distingue ; et nous-mêmes, nous n’aurions qu’à comprendre une langue étrangère pour la prononcer avec l’accent juste. […] Alléguerez-vous que ce sont là des raffinements d’une langue déjà très perfectionnée, et qu’un langage est possible avec des noms concrets destinés à faire surgir des images de choses ? […] À vrai dire, il n’y a jamais là qu’une question de degré : raffinée ou grossière, une langue sous-entend beaucoup plus de choses qu’elle n’en peut exprimer.
Si sa science s’étend aux langues anciennes, il est mieux armé encore, car il a rendu esclaves un plus grand nombre de mots, et, qu’il s’en serve ou pas, ils demeurent serfs et enrichissent le domaine du poète. […] Pierre de Bouchaud Somme toute, c’est l’artiste qui a dominé chez lui et lui a dicté ses moindres pensées, en poésie, où les mots : gloire, patrie, amour, bonheur, souffrance (toute la vie), reviennent sans cesse sous sa plume, sauvés de la vulgarité par le charme d’une langue nerveuse, colorée, et par de beaux élans d’enthousiasme, transformés par la magie d’un talent sensitif, fécond, impressionnable, précisément parce qu’il provient d’une nature artiste, revêtus enfin du majestueux vêtement d’un style imagé, toujours respectueux de la forme.
Buffier, Restaut, la Touche, Wailli, & quelques autres, ont composé des Grammaires qui se réduisent à l’exposition des regles du discours : celui-ci, moins occupé du mécanisme des Langues, que de leur génie particulier, en a fait, pour ainsi dire, l’anatomie ; & c’est en les décomposant, qu’il en a expliqué les premiers principes. […] La Méthode raisonnée pour apprendre la Langue Latine, pour n’être pas aussi estimable que ce Traité, ne fait pas moins d’honneur au génie analytique de M.
Et c’est le même dualisme que maintenant, entre gens de langue française et gens de langue flamande. […] Ce parti considère comme une faute contre la patrie l’emploi de la langue française, dangereux facteur de dénationalisation, et témoigne d’une mauvaise humeur de plus en plus méfiante envers un Maeterlinck ou un Verhaeren, coupables d’écrire dans la langue de Racine. […] Qui se soucie aujourd’hui des littérateurs de langue flamande ? […] Maurice Wilmotte a beaucoup voyagé, il parle cinq ou six langues et possède les principales littératures européennes. […] Rapport sur la question des Langues et l’Université flamande.
Les langues hébraïque, latine, grecque surtout, lui étaient aussi familières que l’idiome de famille. […] Ils traitaient ensemble dans la langue classique grecque et latine les affaires secondaires qui sont, sous un ambassadeur négligent, des détails de la compétence des secrétaires dans les grandes ambassades. […] Mon oreille, accoutumée aux sons rapides et doux de la langue grecque, aux articulations lentes et sonores de l’idiome turc, se trouvait entièrement étrangère au ton de l’arabe vulgaire, et semblait frappée par instant de quelques phrases harmonieuses au milieu des cris d’un jargon guttural. […] C’est surtout chez eux que réside cet honneur, dont vous avez inventé autrefois le mot en France, et qui n’existe point dans la langue anglaise. […] Quelques Arabes me servent ici ; je parle leur langue, et leurs soins me suffisent.”
Hugo n’a pas innové moins hardiment dans la langue que dans les idées et les systèmes littéraires. […] Pour le maniement de la langue, M. […] Une singulière découverte coïncide avec celle de l’esprit nouveau, c’est que la langue française, qui semblait ne plus sembler bonne qu’à rimer des petits vers spirituels ou aimables, se trouva tout à coup vibrante, sonore, pleine d’éclat. […] Ferdinand Brunetière C’est toute une langue nouvelle que Victor Hugo a ainsi façonnée pour l’usage des versificateurs, et cette langue a eu la fortune la plus extraordinaire. […] Malgré la légende, j’ai beaucoup aimé et beaucoup admiré Victor Hugo, et voici ce que j’écrivais il y a longtemps : « Quelle brusque et prodigieuse fanfare dans la langue que ces vers de Victor Hugo !
Hugo avec les mots) dans la langue osée et plate des goujats, et c’est même là son mérite, selon la poétique de M. […] Comme Dubartas, il accouple les substantifs, ce qui est le péché contre nature dans la langue. […] Au lieu de parler la langue de son pays dans cette pureté d’accent qui est une patrie qu’on emporte avec soi, comme les Anciens emportaient leurs dieux, il pouvait parler une langue barbare : il était exilé ! […] Certes, nous n’abaisserons ni la métaphysique, ni la logique, ni le sens commun, ni la langue française jusqu’à répondre à ces insanités ténébreuses. […] Victor Hugo n’a qu’une langue, et il est sa tour de Babel à lui seul, périssant et croulé dans sa propre confusion.
IV Ce côté, c’est le côté du détail cru, du mot vulgaire, de cette langue de Paris qui quelquefois est un argot mêlé à la grande langue française, c’est enfin toute cette réalité d’en bas, qui, sous une autre plume moins distinguée et moins savante que celle des de Goncourt, lesquels ont gardé de l’idéal dans la pensée, tend à devenir chaque jour le plus affreux démocratisme littéraire. […] Ils en ont dû prendre les mœurs, du moins dans le langage ; et ils ont pensé qu’en faisant entrer les mots de cette langue, spéciale aux ateliers, dans la langue littéraire, ce serait là un accroissement et une richesse de plus pour la langue et pour la littérature. […] En fait de style, ils allaient jusqu’à tuer sous eux un cheval tous les jours, et je le leur ai reproché… Il ne faut pas monter en casse-cou la langue française. […] … C’est la sobriété, c’est l’économie et la distribution de la couleur, c’est la langue, quand elle n’est pas l’argot de Renée, et elle ne l’est pas longtemps ; ce sont enfin les qualités mâles d’hommes qui se possèdent et qui ne font plus que ce qu’ils veulent. […] Ainsi l’absurde visite de la Faustin à ce maniaque de professeur de grec, pour entendre lire Phèdre dans une langue qu’elle ne comprend pas !
Une langue ne se fixe pas. […] La langue de Montaigne n’est plus celle de Rabelais, la langue de Pascal n’est plus celle de Montaigne, la langue de Montesquieu n’est plus celle de Pascal. Chacune de ces quatre langues, prise en soi, est admirable, parce qu’elle est originale. […] Les langues sont comme la mer, elles oscillent sans cesse. […] C’est en vain que nos Josués littéraires crient à la langue de s’arrêter ; les langues ni le soleil ne s’arrêtent plus.
Il y avait, dans ce recueil, des pièces tout à fait supérieures, d’un sentiment exquis, d’une langue à la fois sévère et doucement colorée, d’un rythme ferme et harmonieux. […] Paul Stapfer La langue de M.
Flaubert connaît les termes techniques des matières dont il traite ; dans Salammbô et la Tentation, les langues anciennes, de l’hébreu au latin, aident à désigner en paroles propres les objets et les êtres. Sans cesse, en des phrases où l’on ne peut noter les expressions cherchées et acquises, il s’efforce de dire chaque chose en une langue qui l’enserre et la contient comme un contour une figure. A cette dure précision de la langue, s’ajoute en certains livres et certains passages une extraordinaire beauté. […] Sous les différences de langue et de sujet, unissant des formes tantôt lyriques, tantôt vulgaires, les rapports de mots sont semblables de Madame Bovary à la Tentation, et constituent des phrases analogues associées en deux types de période. […] Et comme cette rigueur concise exclut de la langue de Flaubert toute superfluité, des lacunes existent, ou le semblent, entre les unités dernières de son œuvre ; les paragraphes se suivent sans se joindre, et les livres s’étagent sans soudure.
Après Froissart et après Joinville, j’arrive, en remontant, jusqu’à Villehardouin qui est en date notre premier historien, et dont la chronique est un monument de notre vieille langue. […] Dans sa langue, il est d’un siècle plus âgé que Joinville, qui nous paraît plus aimable ; mais Villehardouin était certainement plus fort […] Ceux qui sont curieux d’apprécier et de mesurer le progrès de la langue, et surtout de la politique, durant trois siècles, peuvent faire au long cette comparaison des deux ambassades de Commynes et de Villehardouin. […] Car enfin la langue du Moyen Âge est une langue à part, et si on la comprend en gros tout d’abord, on n’a pas trop de toute la science philologique pour la rendre de près et par le menu.