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1364. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre I : La politique — Chapitre III : Examen de la doctrine de Tocqueville »

Cependant il ne l’a ni tout à fait aimée, ni tout à fait comprise comme celui qui, sorti des classes autrefois déshéritées, a pu juger par lui-même quels biens il a conquis. […] Tel est l’ordre de faits qu’on aurait voulu voir décrit et jugé par M. de Tocqueville.

1365. (1881) La parole intérieure. Essai de psychologie descriptive « Chapitre V. La parole intérieure et la pensée. — Premier problème : leurs positions respectives dans la durée. »

Si, au contraire, les deux pensées sont jugées différentes, l’expression provisoire est par là même condamnée ; nous disons qu’elle dénature notre pensée, ou qu’elle la dépasse, ou qu’elle l’amoindrit ; nous ne l’acceptons pas, et nous nous mettons à la recherche d’une expression meilleure. […] Cette expression trouvée et approuvée, on est maître de sa pensée, on la comprend mieux, on est en état de la juger sûrement, parce qu’on l’a rattachée à des notions bien connues dont on sait de longue date les affinités naturelles et les incompatibilités. « On ne sait justement ce qu’on voulait dire que quand on l’a dit », mais à une condition : c’est qu’on l’ait bien dit253.

1366. (1868) Curiosités esthétiques « IV. Exposition universelle 1855 — Beaux-arts » pp. 211-244

Ces formes de bâtiments, qui contrariaient d’abord son œil académique (tout peuple est académique en jugeant les autres, tout peuple est barbare quand il est jugé), ces végétaux inquiétants pour sa mémoire chargée des souvenirs natals, ces femmes et ces hommes dont les muscles ne vibrent pas suivant l’allure classique de son pays, dont la démarche n’est pas cadencée selon le rythme accoutumé, dont le regard n’est pas projeté avec le même magnétisme, ces odeurs qui ne sont plus celles du boudoir maternel, ces fleurs mystérieuses dont la couleur profonde entre dans l’œil despotiquement, pendant que leur forme taquine le regard, ces fruits dont le goût trompe et déplace les sens, et révèle au palais des idées qui appartiennent à l’odorat, tout ce monde d’harmonies nouvelles entrera lentement en lui, le pénétrera patiemment, comme la vapeur d’une étuve aromatisée ; toute cette vitalité inconnue sera ajoutée à sa vitalité propre ; quelques milliers d’idées et de sensations enrichiront son dictionnaire de mortel, et même il est possible que, dépassant la mesure et transformant la justice en révolte, il fasse comme le Sicambre converti, qu’il brûle ce qu’il avait adoré, et qu’il adore ce qu’il avait brûlé. […] Voici une armée de doigts trop uniformément allongés en fuseaux et dont les extrémités étroites oppriment les ongles, que Lavater, à l’inspection de cette poitrine large, de cet avant-bras musculeux, de cet ensemble un peu viril, aurait jugés devoir être carrés, symptôme d’un esprit porté aux occupations masculines, à la symétrie et aux ordonnances de l’art.

1367. (1899) Le roman populaire pp. 77-112

Si j’avais à juger l’école naturaliste française, non dans sa formule, où il entre beaucoup de vérité, non pas même dans l’œuvre de tel ou tel auteur, mais dans l’ensemble des livres qui se réclament du naturalisme, je dirais que son principal défaut littéraire a été de méconnaître la réalité ; je montrerais ce qu’il y a de contraire aux règles de l’observation et de la sincérité, dans le procédé qui consiste à ne peindre de l’homme que les instincts, à supprimer les âmes, à expliquer le monde moral par des causes inégales aux effets, à murer toutes les fenêtres que l’homme, accablé tant qu’on le voudra par la misère, le travail, la maladie, l’influence du milieu, continue et continuera d’ouvrir sur le ciel. […] Le combat intérieur qui la précède est plus magnifique encore, et il est conduit, ravivé, mené à son terme avec un art prodigieux. » De nos jours, un critique, l’un des plus sagaces et aussi l’un des plus sévères qui aient jugé Victor Hugo, — j’ai nommé Edmond Biré, — n’hésite pas à écrire ces lignes : « Si les Misérables avaient été continués et terminés dans le même esprit qui avait présidé à leur conception ; s’ils n’avaient pas été dénaturés, envenimés par les passions de l’auteur devenu démagogue et socialiste ; s’ils n’avaient pas été démesurément enflés par des épisodes qui débordent le cadre primitif, … l’œuvre du poète, qui reste encore très puissante et très belle, serait la plus admirable qu’il eût écrite, une des plus belles de notre littérature. » Tout le monde connaît la thèse, l’idée maîtresse des Misérables.

1368. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Deuxième partie — Chapitre III. La complication des sociétés »

Pour la plupart des autres, ou leur dénombrement est impossible, ou il a été jugé inutile. […] Ne serait-on pas, au contraire, porté à juger a priori, indépendamment de ses actes propres, de la valeur d’un individu par la place qui lui paraît marquée d’avance dans toutes les sociétés, et à le tenir, avant toute expérience, comme digne de respect ou de dédain, suivant la hauteur de ce rang toujours le même ?

1369. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre premier. »

Pindare semblait en juger ainsi, dans ces deux vers qu’a conservés Clément d’Alexandrie : « Heureux qui a vu les mystères d’Éleusis, avant d’être mis sous terre ! […] Cette première étude peut d’ailleurs nous aider à juger ce que Pindare fut pour l’antiquité, et comment Cicéron a dit : « Parmi les poëtes, je parle des Grecs24, on ne nomme pas seulement Homère, ou Archiloque, ou Sophocle, ou Pindare, mais aussi les seconds après eux, ou même ceux qui sont inférieurs aux seconds. » Le grand orateur romain avait senti l’âme éloquente du poëte ; et lui, qui dit ailleurs qu’il faut avoir du temps à perdre pour lire les poëtes lyriques », il ne conçoit le rang de Pindare qu’à côté d’Homère.

1370. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Le maréchal de Villars — V » pp. 123-131

Je laisse à juger si la proposition fut reçue avec acclamation et reconnaissance.

1371. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Béranger — Note »

Leroux, que j’ai rencontré l’autre jour, est dans une situation toujours bien grevée : de son travail, vous en pouvez juger par les excellents articles de l’Encyclopédie, mais sa situation personnelle empire plutôt.

1372. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « M. de Sénancour — Oberman, édition nouvelle, 1833 »

Je te laisse juger. » Combien d’épisodes semblables à celui que nous venons d’esquisser, combien de poëmes obscurs, inconnus, mêlés d’une fatalité étrange, s’accomplissent à tout instant, autour de nous, dans de nobles existences !

1373. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. LOUIS DE CARNÉ. Vues sur l’histoire contemporaine. » pp. 262-272

Dans la république de l’avenir où nous tendons, les raisons secrètes ou avouées, les motifs égoïstes, intéressés, philosophiques ou mystiques, pour lesquels les institutions vraiment libres seront acceptées et pratiquées d’un chacun, offriront sans doute, surtout au début, beaucoup de variété et de bigarrure ; mais il suffira qu’on se rallie en fait à trois ou quatre grands points jugés indispensables.

1374. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Relation inédite de la dernière maladie de Louis XV. »

Le roi de Prusse jugeait Louis XV d’après lui ; … mais il avait mal vu, et ne tarda point d’abandonner un allié dont il reconnaissait la nullité, quand il eut retiré tous les avantages qu’il attendait de la campagne. » Le roi ira-t-il ou non à l’armée ?

1375. (1874) Premiers lundis. Tome II « Thomas Jefferson. Mélanges politiques et philosophiques, extraits de ses Mémoires et de sa correspondance, avec une introduction par M. Conseil — II »

Il jugeait l’usurpateur de brumaire au point de vue des républicains et idéologues français, comme un grand capitaine peut-être, mais comme un dévastateur au civil, comme un ignorant et audacieux pirate des libertés, dénué de tout sens moral de droit et de justice.

1376. (1874) Premiers lundis. Tome II « Quinze ans de haute police sous Napoléon. Témoignages historiques, par M. Desmarest, chef de cette partie pendant tout le Consulat et l’Empire »

» La résolution fut si avancée, qu’on jugea à propos de s’en ouvrir au vieux duc de Dantzig, commandant de la garde impériale.

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