/ 1682
1012. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « La Papesse Jeanne » pp. 325-340

Et voilà ce qui manquait à la France, avant qu’un traducteur, qui n’a pas voulu courir les risques de sa traduction, l’ait traduit pour elle, mais en se cachant… Était-ce dans la cave de Marat, — de l’athée Marat, qui aurait avec joie trempé son museau dans ces affreuses porcheries ?

1013. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Lamennais »

Sous ce masque imposant, terrifiant, qui n’a jamais souri que comme Oreste, dans l’ironie de la fureur ou dans l’âpre joie du sarcasme, nous allons à présent montrer un esprit auquel certainement on devra moins s’attendre encore.

1014. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Le roi Stanislas Poniatowski et Madame Geoffrin »

En vain, cette femme, plus jeune que son âge, parle-t-elle à chaque instant, dans toutes ses lettres, comme Mademoiselle de Lespinasse, bouillante de ses trente ans contenus et impatients, parlerait à M. de Guibert : « J’irai jusqu’à vous, tant que terre pourra me porter, et, là, je mourrai dans vos bras, de joie, de plaisir et d’amour ! 

1015. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Dargaud »

… Est-ce que l’âme, ses joies et ses douleurs, ne sera pas toujours le plus haut intérêt de l’homme et de son orgueilleuse pensée ?

1016. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « L’abbé Gratry »

Le temps qui s’est écoulé depuis cette époque n’a pas diminué la joie d’avoir signalé l’un des premiers un ouvrage qui frappe et tient presque en échec (on le dirait, du moins, à leur silence,) les esprits le plus connus pour s’occuper des hautes spéculations de la pensée.

1017. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Hector de Saint-Maur »

L’homme alors que tourmente un éternel souci S’interroge : — Est-ce là l’asile salutaire Où la pensée est sainte, où la joie est austère ? 

1018. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre IV. »

Enfin lorsque, dans l’Iliade, au dernier combat d’Hector le poëte fait succéder, comme pour l’apothéose d’une telle victoire, l’acclamation soudaine des vainqueurs : « Nous avons remporté une grande gloire, nous avons tué le vaillant Hector » ; rien n’est changé dans la forme des vers ; et le majestueux hexamètre se plie et se replie à ces violentes saillies de la joie guerrière.

1019. (1846) Études de littérature ancienne et étrangère

Ce que l’on voit surtout, c’est l’âme de Cicéron, ses joies, ses craintes, ses vertus, ses faiblesses. […] Rien n’était plus conforme aux vœux des Romains ; et quand Tibère, selon l’usage, prononça, sur la place publique, l’éloge funèbre de son fils Drusus, une joie secrète se cachait sous le deuil apparent du peuple. […] La joie du peuple, à la disgrâce de Séjan, éclate en mille transports. […] » Dans ces joies enfantines d’une imagination républicaine, on surprend le secret que tout Romain éclairé portait au fond du cœur. […] Les fureurs du fanatisme, l’enthousiasme de la révolte, les tristes joies des partis vainqueurs, les haines profondes de la guerre civile, avaient de toutes parts assailli et exercé son génie.

1020. (1902) Propos littéraires. Première série

Il traverse l’Allemagne, mélancolique et encore assombrie par la Réforme récente, et la grave tristesse des pays du Nord, tantôt le pénètre délicieusement, tantôt, par réaction, fait qu’il songe à l’Italie et à la joie lumineuse de la Renaissance. […] L’âme peut jouir et doit jouir de ces mystères et de ces grandeurs. « Que l’azur céleste, objet de ma contemplation extatique, soit seulement un état de moi-même causé par de la poussière décomposant au passage le mouvement ondulatoire d’un milieu matériel qui échappe à la balance, j’en éprouve d’abord une surprise affligeante pour mon imagination… Mais ma joie en présence d’un ciel matinal de mai, cette joie sereine, immense et légère comme ce pavillon même, prend plus loin son origine. […] Gyp. « Joies d’amour » Le dernier roman de Gyp, Joies d’amour, est moins heureux que l’admirable Bijou dont je vous parlais avec tant d’enthousiasme. […] Il est des âmes telles, pour qui le bonheur est un mal, n’éveillant chez elles que l’idée qu’il est fugitif, et pour qui un jour de joie, une heure de plaisir est une souffrance aiguë, ne leur donnant, ne pouvant leur donner que ce genre de réflexion. […] Il professait donc et avec conscience et avec joie, charmé de se sentir vivre dans sa ville natale, et de rencontrer ses amis dans les rues aimées, quand tout à coup un heurt survint.

1021. (1882) Autour de la table (nouv. éd.) pp. 1-376

Je tiens pour une vérité vraie que, de toutes les joies que l’esprit peut goûter, celle de savourer les grandes œuvres d’art est la plus douce et la plus vive. […] Ce ne fut donc pas une fantaisie, une idée littéraire quelconque, cette adorable pièce de La joie fait peur. […] — Avec quelle joie j’aurais sacrifié le monde ! […] À quoi Faust répond : Qu’est-ce que les joies du ciel dans ses bras ? […] » C’était une joie, des rires, une surabondance d’entrain dont rien, ne peut donner l’idée.

1022. (1904) Zangwill pp. 7-90

Au nord »,… Circuit, le mot n’est pas de moi, le mot est de Taine ; cette méthode est proprement la méthode de la grande ceinture ; si vous voulez connaître Paris, commencez par tourner ; circulez de Chartres sur Montargis, et retour ; c’est la méthode des vibrations concentriques, en commençant par la vibration la plus circonférentielle, la plus éloignée du centre, la plus étrangère ; en admettant qu’on puisse obtenir jamais, pour commencer, cette vibration la plus circonférentielle ; car on voit bien comment des vibrations partent d’un centre, connu ; on ne voit pas comment obtenir la vibration la plus circonférentielle, ni même comment se la représenter, si le centre est par définition non connu, et si un cercle ne se conçoit point sans un centre connu ; pétition de principe ; c’est le contraire de ce qui se passe pour les ondes sonores, électriques, optiques, pour toutes les ondes qui se meuvent partant de leur point d’émission ; c’est le contraire de ce qui se passe quand on jette une pierre dans l’eau ; c’est une spirale commencée par le bout le plus éloigné du centre ; à condition qu’on tienne ce bout ; ce sont les vastes tournoiements plans de l’aigle, moins l’acuité du regard, et le coup de sonde, et, au centre, la saisie ; je découpe ici mon exemplaire, et je cite au long, pour que l’on voie, pour que l’on mesure, sur cet exemple éminent, toute la longueur du circuit : « Au nord, l’Océan bat les falaises blanchâtres ou noie les terres plates ; les coups de ce bélier monotone qui heurte obstinément la grève, l’entassement de ces eaux stériles qui assiègent l’embouchure des fleuves, la joie des vagues indomptées qui s’entre-choquent follement sur la plaine sans limites, font descendre au fond du cœur des émotions tragiques ; la mer est un hôte disproportionné et sauvage dont le voisinage laisse toujours dans l’homme un fond d’inquiétude et d’accablement. — En avançant vers l’est, vous rencontrez la grasse Flandre, antique nourrice de la vie corporelle, ses plaines immenses toutes regorgeantes d’une abondance grossière, ses prairies peuplées de troupeaux couchés qui ruminent, ses larges fleuves qui tournoient paisiblement à pleins bords sous les bateaux chargés, ses nuages noirâtres tachés de blancheurs éclatantes qui abattent incessamment leurs averses sur la verdure, son ciel changeant, plein de violents contrastes, et qui répand une beauté poétique sur sa lourde fécondité. — Au sortir de ce grand potager, le Rhin apparaît, et l’on remonte vers la France. […] Mais, je le répète, la supériorité intellectuelle entraîne la supériorité religieuse ; ces futurs maîtres, nous devons les rêver comme des incarnations du bien et du vrai ; il y aurait joie à se subordonner à eux. » J’arrête ici ma citation, parce qu’il est très long de copier, et parce qu’ici, comme dans l’Avenir de la science, il faudrait tout citer, tant tout est plein : curieux, inquiétant, nouveau, passionnant ; pourtant il faut que je recommence : « L’univers serait ainsi consommé en un seul être organisé, dans l’infini duquel se résumeraient des décillions de décillions de vies, passées et présentes à la fois. » Or il est évident qu’un tel résumé ne pourrait s’obtenir que par une totalisation de la mémoire universelle, donc par une globalisation, par un achèvement, et par un arrêt de l’histoire. […] Le monde n’est qu’une série de sacrifices humains ; on les adoucirait par la joie et la résignation. […] « Je me dis souvent que si le but du monde était une course aussi haletante que vous le supposez vers la science, il n’y aurait pas de fleurs, pas d’oiseaux brillants, pas de joie, pas de printemps.

1023. (1928) Les droits de l’écrivain dans la société contemporaine

Or, quelle que soit la manière dont on la conçoive, les plus grandes joies que l’homme puisse tirer des biens qu’elle lui apporte sont les joies qu’il saura extraire de la pensée et de l’art. […] Feu de joie A propos des manuscrits non insérés et brûlés, je disais l’autre jour qu’il m’aurait plu de voir étendre cette mesure (l’incinération) aux livres eux-mêmes, qui vraiment encombrent. […] Un bon feu de joie !

1024. (1887) Journal des Goncourt. Tome II (1862-1865) « Année 1863 » pp. 77-169

Un moment se dresse, sur l’estrade de l’orchestre, un théâtre de marionnettes, où se joue la parodie du Bossu, parodie autour de laquelle toutes les femmes s’asseyent en corbeille, celles qui n’ont pas de place s’asseyant sur les genoux de celles qui en ont une… Puis Fournier, cette fois en pierrot, mi-partie blanc mi-partie noir, trébuchant d’un portant à l’autre, les bras levés en l’air et invitant à la joie, ivre de vin, ivre du bruit et de la folie de sa fête — et fantastique, et hoffmanesque, et shakespearien, et sardanapalesque, m’apparaît à la façon de Pierrot, dans une apothéose de la Faillite, au moment où une main invisible serait en train d’écrire sur le décor du fond : Clichy. […] 29 juillet Ici, de jour en jour, croît en moi une allégresse bête, dans laquelle les organes et les fonctions ont comme de la joie. […] Les grands plaisirs du peuple sont les joies collectives. […] Il remue avec joie tout son vestiaire de mascarade orientale, et le voilà se costumant, et montrant, sous le tarbouch, une tête de Turc magnifique, avec ses traits énergiques, son teint sanguin, ses longues moustaches tombantes… et du fond de ses loques colorées, il finit par retirer, en soupirant, la vieille culotte de peau de ses longues chevauchées, une culotte de peau toute ratatinée, — et qu’il considère avec l’attendrissement d’un serpent qui contemplerait sa vieille peau.

/ 1682