/ 1894
278. (1883) Essais sur la littérature anglaise pp. 1-364

n’est-elle pas altérée, rongée, à chaque instant par le milieu et les circonstances, de la même manière que le fer est mordu et à la fin détruit par la rouille ? […] Tous les souvenirs de sa jeunesse, veuve de son compagnon préféré, s’éveillent en un instant et lui montent au cerveau en fumées de colère. […] À chaque instant il a fallu émonder, éclaircir, sarcler, supprimer dans les violences et les familiarités de cet énergique langage. […] Au même instant, ils ont senti l’impossibilité d’être heureux désormais autrement que l’un par l’autre. […] Arrêtons-nous un instant devant cette forme de plaisanterie ; elle est curieuse à définir et à décrire.

279. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Barbusse, Henri (1873-1935) »

Et c’est le lointain au-delà du lointain… » Et sûrement l’on goûtera, dans les quelques pièces que nous donnons dans les Poètes d’aujourd’hui, les beautés tristes, voilées et presque muettes qu’à tout instant elles montrent.

280. (1890) Dramaturges et romanciers

Je regrette que ce type, qui se laisse apercevoir à chaque instant chez M.  […] Par instants, le dialogue s’anime et frise de très près la véritable comédie. […] Barrière a trouvé moyen de nous intéresser un instant. […] Ici je m’arrêterai un instant pour faire observer à M.  […] Victorien Sardou, disions-nous il n’y a qu’un instant.

281. (1888) Épidémie naturaliste ; suivi de : Émile Zola et la science : discours prononcé au profit d’une société pour l’enseignement en 1880 pp. 4-93

Ces consciences impeccables eurent, un instant, l’intention de faire interdire le volume dans un mouvement de vertueuse indignation. […] Acceptons sans réserve, pour un instant, cette donnée du naturalisme. […] Seulement, il arrive un instant où toutes sont épuisées. […] Etablir la morale sur les récompenses et les châtiments répartis en cette vie, c’est vouloir être démenti, à tout instant, par l’évidence des faits, c’est l’annuler complètement. […] Cette ignorance est saillante dans l’Assommoir, où des faits épisodiques et des incidents entravent, à tout instant, la marche de l’intrigue !

282. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXXVIII » pp. 313-315

Quant à M. de Lamartine, il n’a pu, un seul instant, maîtriser l’inattention de la Chambre ; il en souffrait, il le laissait voir, mais il ne parvenait point à fléchir cet auditoire impatient et irrité ; sous la magnificence que gardait encore sa parole jusque dans ce désarroi, on se demandait en vain ses raisons et ce qu’il voulait dire, et l’on n’a pu s’en rendre compte pas plus que lui-même il ne le savait bien peut-être. — Nous ne prétendons dans tout ceci, comme on le voit, que noter l’effet oratoire et, en quelque sorte, littéraire de ces deux séances.

283. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 115-117

Pour mériter des suffrages éclairés, il ne suffit pas d'avoir un coloris brillant, le style passager du jour, de savoir dialoguer une Scene, égayer un instant par de bons mots ; il faut inventer un sujet, le dessiner avec justesse, le développer avec grace, le conduire à un dénouement facile & pourtant imprévu.

284. (1761) Salon de 1761 « Peinture —  Bachelier  » pp. 147-148

Si vous causiez un instant avec lui, vous croiriez qu’elle va s’échapper et se mettre en liberté ; mais bientôt vous reconnaîtriez que les liens sont au-dessus des efforts, et qu’il faudra que cela se remue toute la vie, sans se dresser et partir.

285. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. BALLANCHE. » pp. 1-51

Plus d’une fois il eut de ces hallucinations qui restituent un instant la forme et l’existence à des personnes dont on pleure la mort, ou qui rendent présentes celles dont on regrette l’absence…. » C’est ainsi qu’ayant perdu sa mère en 1802, M. […] Dans les entretiens du Vieillard et du Jeune Homme, publiés en 1819, le vieillard qui, par un gracieux renversement d’idées2, est pour l’avenir, tandis que le jeune homme est pour le passé, le vieillard tâchant de vaincre les pressentiments sinistres de ce désespoir de vingt ans, dit en un endroit : « Voilà donc ce que je vous entends répéter chaque jour et à chaque instant du jour. […] Sur les pas des chœurs de Sophocle, et inspiré par la muse de la douleur, le poëte s’attachait à peindre l’histoire même de l’homme, de cet être qui, aux termes de l’énigme, n’a qu’une voix et n’est debout qu’un instant, l’histoire de ses misères, de ses faiblesses, de ses félicités trompeuses, suivies d’amers retours. […] Une doctrine de conciliation si haute en des instants si irrités ne fut que peu saisie, comme bien l’on pense, et, auprès du petit nombre de ceux qui la comprirent, elle ne fut accueillie ni dans un camp ni dans un autre. […] Ballanche, je dois le reconnaître, avait l’air des plus dégagés et des plus désintéressés sur les nouvelles qui arrivaient à chaque instant de Paris, et dont le résultat n’était plus douteux. « Je crois bien, lui dis-je, que pour le coup nous allons franchir deux degrés d’initiation à la fois. » Et il se prit à rire.

286. (1861) La Fontaine et ses fables « Troisième partie — Chapitre I. De l’action »

Ainsi, la poésie, qui suit les démarches de l’âme, doit se composer de petits mouvements et à chaque instant changer d’allure. […] On sent à chaque instant qu’en lui l’imagination va faire éruption pour se dépouiller de cette forme inerte. Ses personnages, retenus un instant derrière le théâtre, accourent tout de suite sur la scène. […] Le poëte est meilleur moraliste que le raisonneur : car à chaque instant il applique les règles du syllogisme poétique et corrige les fausses preuves de ses devanciers. […] Nul ne trouve un seul instant l’affaire obscure ou douteuse.

287. (1889) La bataille littéraire. Première série (1875-1878) pp. -312

Les fanfares des roses annonçaient l’instant redoutable. […] Ce sang-froid ne le quitta pas au suprême instant. […] X… réfléchit un instant. […] me demanda Vitalis après quelques instants. […] En un instant l’hostilité avait fait place à un vif et universel intérêt.

288. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « M. DAUNOU (Cours d’Études historiques.) » pp. 273-362

 » Le style de Daunou, en cette occasion solennelle, ne se borne pas à être exact, pressé et châtié, ce qu’il est toujours ; il s’élève, se dilate par instants, revêt des expressions plus hardies et même pittoresques, qu’il ne retrouvera jamais. […] Sa plume excellente et correcte, et de plus si faite pour les délicatesses, pour les finesses de l’art d’écrire, s’empêche par instants tout d’un coup, s’appesantit et s’attarde dans ces prescriptions méthodiques qui reviennent plus qu’il ne faudrait. […] Ce n’était point parce qu’il avait été victime qu’il jugeait ainsi ; il savait établir la différence entre les hommes d’alors, faire la part de la lâcheté, de l’ineptie, du fanatisme ; mais sur Robespierre il était curieux et inexorable à entendre ; le burin de Tacite, pour un instant, avait passé en ses mains. […] Le grave éditeur semble par instants s’y égayer ; c’est comme son dessert. […] On y admire, à la réflexion, la rare puissance qu’il a fallu pour rassembler, pour coordonner et maintenir tant de faits et de rapports divers si prudemment et si nettement exprimés, sans que la plume ou le compas (je ne sais comment dire) ait dévié ni fléchi un seul instant durant tout ce long travail.

289. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre troisième. Suite de la Poésie dans ses rapports avec les hommes. Passions. — Chapitre III. La Phèdre de Racine. »

Cette femme, qui se consolerait d’une éternité de souffrance, si elle avait joui d’un instant de bonheur, cette femme n’est pas dans le caractère antique : c’est la chrétienne réprouvée, c’est la pécheresse tombée vivante dans les mains de Dieu ; son mot est le mot du damné.

290. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Histoire de la Restauration par M. Louis de Viel-Castel. Tomes IV et V. (suite et fin) »

Les Anciens aimaient à se figurer, en les unissant et les accouplant dos à dos, les types et figures représentant les genres les plus contraires : ainsi ils assemblaient dans un même marbre, en les opposant nuque à nuque comme les deux faces de Janus, la figure d’un Aristophane et celle d’un Sophocle : si ce n’était une profanation, à cause du sang qui tache le front de Danton, je me figurerais ainsi, ne fut-ce qu’un instant, Danton et Royer Collard enchaînés, et leurs deux faces tournées vers des fins toutes contraires, — deux antagonistes éternels ! […] M. de Serre, ce jour-là, semblait se jouer dans les tempêtes ; son argumentation n’en était pas un seul instant ébranlée et déconcertée ; et quand il arriva au fond même, au corps de la loi qu’il attaquait, il redoubla de vigueur et de puissance. […] A chaque instant, quand il juge, sa probité scrupuleuse à l’excès hésite à demander à l’expression toute sa vigueur.

/ 1894