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2522. (1913) Les idées et les hommes. Première série pp. -368

Ils ont les manières du premier homme, dans le paradis. […] Vous séparez, a-t-il répondu, l’homme public et l’homme privé ; mais « il y a l’homme : son caractère est indivisible comme sa nature ». […] C’est qu’à votre avis l’homme, et voire le grand homme, est dans le secret de son âme et de sa chair un pauvre homme : peut-être ! […] » s’écrie l’homme de désir. […] C’est un homme de cabinet.

2523. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « La Margrave de Bareith Sa correspondance avec Frédéric — I » pp. 395-413

Ces mémoires faits, elle les confia à un homme d’esprit, son médecin, M. de Superville, qui ne demeura point auprès d’elle. […] Quand elle l’a obtenu, il lui donne le moyen sûr pour le garder près d’elle autant qu’elle le voudra, et même pour entreprendre un voyage s’il le lui ordonne : c’est que le margrave envoie au roi quelques grands hommes pour son régiment favori ; moyennant cette « galanterie de six pieds » faite au roi, tout ira bien ; « deux ou trois grands hommes envoyés à propos seront des arguments vainqueurs62. » — Le général ministre Grumbkow, qui a tant persécuté Frédéric et sa sœur, meurt un an avant son maître, laissant une mémoire généralement exécrée. […] Ce fut la belle époque et la plus littéraire du règne de Frédéric : c’est alors qu’il cherche à rassembler autour de lui l’élite des hommes distingués de son temps, et qu’il semble un instant près d’y réussir. […] ) Je ne donne ici que la moralité que tire Frédéric de ce démêlé avec Voltaire : quant à ses jugements sur l’homme, ils sont trop sévères, trop durs, pour qu’une plume française se complaise à les répéter. […] Il vous donne le juste titre de grand homme.

2524. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Œuvres de Maurice de Guérin, publiées par M. Trébutien — II » pp. 18-34

Le bruit des hommes, qui se taisent toujours les derniers, va s’effaçant sur la face des champs. […] Il se méfie de lui, il a peur des hommes : Paris, 1er février 1834. — Mon Dieu, fermez mes yeux, gardez-moi de voir toute cette multitude dont la vue soulève en moi des pensées si amères, si décourageantes. […] Ces grandes organisations primitives auxquelles ne croyait pas Lucrèce et auxquelles Guérin nous fait presque croire ; en qui le génie de l’homme s’alliait à la puissance animale encore indomptée et ne faisait qu’un avec elle ; par qui la nature, à peine émergée des eaux, était parcourue, possédée ou du moins embrassée dans des courses effrénées, interminables, lui parurent mériter un sculpteur, et aussi un auditeur capable d’en redire le mystère. Il supposa le dernier des centaures interrogé au haut d’un mont, au bord de son antre, et racontant dans sa mélancolique vieillesse les plaisirs de ses jeunes ans à un mortel curieux, à ce diminutif de centaure qu’on appelle homme ; car l’homme, à le prendre dans cette perspective fabuleuse, grandiose, ne serait qu’un centaure dégradé et mis à pied. […] Aucun de ceux qui connaissent ce drôle de corps, cet homme d’esprit infecté de mauvais goût, ne saurait prétendre que son influence puisse être bonne, à la longue, pour personne ; mais relativement, et pour un temps très court, Barbey dut être utile à Guérin.

2525. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Les frères Le Nain, peintres sous Louis XIII, par M. Champfleury »

… Tous ces personnages, hommes, femmes, enfants, sourient doucement, et à travers ce sourire perce une sorte de tristesse. […] Saint Joseph, qui regarde l’enfant, est véritablement un homme de campagne, déjà sur l’âge ; la Vierge est une jeune femme de campagne aussi, belle, brune, un peu forte ; l’enfant, qui fait sécher les langes devant la cheminée, semble un enfant de la maison, sauf les ailes qui sont comme ajoutées ; le berceau qu’on voit sur le devant est un bers tout rustique et grossier. […] Dans un coin du tableau, au premier plan, l’homme et la femme sont assis devant une table où est une bouteille. L’homme boit avec délectation et lenteur, il boit bien ; il a le nez dans son verre à demi plein d’un vin rouge. […] Gardilanne, chef de bureau, grand, sec, pâle, sobre, l’homme d’une seule passion, est donc possédé du démon de la faïence, et il est arrivé, après plus de trente ans de patience et de chasse infatigable, à se faire avec ses maigres appointements une collection unique, digne d’un musée.

2526. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Oeuvres inédites de la Rochefoucauld publiées d’après les manuscrits et précédées de l’histoire de sa vie, par M. Édouard de Barthélémy. »

Cousin, à cet égard, a assumé une grande responsabilité à laquelle il est homme, pour sa part, à largement suffire. […] Un critique littéraire, homme de goût et qui d’ordinaire est sobre d’éloges (M.  […] Croyez que je ne m’exagère pas le mérite d’une phrase bien faite ou qui, tant bien que mal, tombe d’aplomb sur ses pieds ; un galant homme peut fort bien soléciser ; mais qui diantre l’oblige à imprimer ses solécismes ? […] Un homme de ce temps et de cette race, un contemporain de la Régence et de la Fronde, que M.  […] En se faisant homme de parti au sortir de la Cour, et homme de guerre au profit d’une faction, La Rochefoucauld ne rendait pas ses chances meilleures et ne faisait que s’exposer à d’autres mécomptes.

2527. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Mémoires de madame Roland »

Faugère nous en promet une autre, et cet homme exact ne fait rien à demi. […] On ne le prendrait pas de plus haut s’il s’agissait de la Déclaration des Droits de l’Homme. […] Ce genre de vie serait très austère, si mon mari n’était pas un homme de beaucoup de mérite que j’aime infiniment ; mais, avec cette donnée, c’est une vie délicieuse dont la tendre amitié, la douce confiance, marquent tous les instants ; où elles tiennent compte de tout et donnent à tout un prix bien grand. […] C’est ainsi que juge le peuple des lecteurs : une femme déclare qu’un homme est beau, donc elle l’aime. […] Avertir ce digne homme qu’elle ne l’aime plus, mais qu’elle lui restera fidèle à son corps défendant, c’est dur, c’est impitoyable ; c’est par trop se faire valoir soi-même et trop peu accorder à la sensibilité des autres.

2528. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « JASMIN. » pp. 64-86

Il y a de plus, en ce point, de la dignité d’homme. […] Dupront, avocat, homme du pays, de grand talent au barreau, et qui eût été poëte lui-même, m’assure-t-on, si une sorte de paresse naturelle ne l’eût retenu. […] Jasmin, en effet, était un libéral de la Restauration, et aujourd’hui il est ce qu’on appelle un homme du mouvement. […] L’homme sage n’est pas ainsi… » Nous n’avons rien à ajouter à ces agréables et bonnes pensées, et nous espérons que le poëte y restera fidèle. […] il est homme du peuple tout de bon.

2529. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « M. Émile Zola, l’Œuvre. »

Zola se voit comme homme et, ce qui nous touche davantage, comme romancier ; nous savons ce qu’il est ou ce qu’il croit être. […] étudier l’homme tel qu’il est, non plus leur pantin métaphysique, mais l’homme physiologique, déterminé par le milieu, agissant sous le jeu de tous ses organes… N’est-ce pas une farce que cette étude continue et exclusive de la fonction du cerveau, sous prétexte que le cerveau est l’organe noble ? […] D’ailleurs, physiologie, psychologie, cela ne signifie rien : l’une a pénétré l’autre, toutes deux ne sont qu’une aujourd’hui, le mécanisme de l’homme aboutissant à la somme totale de ses fonctions… Ah ! […] Son roman est d’un homme qui n’a pas mis les pieds dans un atelier depuis quinze ans. […] Zola ressuscite les hommes des anciens temps.

2530. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Pensées, essais, maximes, et correspondance de M. Joubert. (2 vol.) » pp. 159-178

Sa vie fut simple, et je ne la rappelle ici que pour ceux qui aiment à bien savoir de quel homme on parle quand on a affaire à un auteur. […] Il devient réellement insupportable de converser avec des hommes qui n’ont, dans le cerveau, que des cases où tout est pris, et où rien d’extérieur ne peut entrer. […] » La Bruyère, avant lui, avait senti cette même difficulté et se l’était avouée aussi en commençant : « Tout est dit, et l’on vient trop tard depuis plus de sept mille ans qu’il y a des hommes, et qui pensent. » M.  […] Plus le genre dans lequel on écrit tient au caractère de l’homme, aux mœurs du temps, plus le style doit s’écarter de celui des écrivains qui n’ont été modèles que pour avoir excellé à montrer, dans leurs ouvrages, ou les mœurs de leur époque ou leur propre caractère. […] Naturellement, la conversation de ces hommes est encore supérieure à ce qu’ils laissent par écrit, et qui n’offre que la moindre partie d’eux-mêmes.

2531. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « De la poésie et des poètes en 1852. » pp. 380-400

Il est aujourd’hui un assez grand nombre de personnes, hommes ou femmes, qui cultivent la poésie sans autre but qu’elle-même, comme on cultive entre soi la musique, le piano ou le chant. […] Florentin Ducos, homme instruit, écrivain de mérite, et qui, avant de l’aborder, s’est rendu compte de toutes les objections contre le genre, et en a pesé les difficultés. […] Les Fables de Lachambeaudie, publiées dans un magnifique volume (1851), nous avertissent que l’auteur est poète, homme de talent, doué de facilité naturelle, et sachant trouver des moralités heureuses quand il ne les assujettit point à des systèmes. […] Jeune, et déjà fait aux épreuves de la vie, il prend l’homme avec tous ses sentiments de père, de fils, d’époux, d’ami, et il le place dans le cadre éblouissant des Tropiques. […] Homme, si, le cœur plein de joie ou d’amertume, Tu passais, vers midi, dans les champs radieux, Fuis !

2532. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « L’abbé Barthélemy. — I. » pp. 186-205

Lui-même il a, comme homme, un caractère à part et modestement original dans sa nuance, entre tous les écrivains célèbres du xviiie  siècle. […] Il s’enhardit assez vite, se fit connaître et agréer de ces hommes plus ou moins distingués, et leur plut davantage à proportion qu’ils avaient plus d’esprit eux-mêmes. […] Il est l’ouvrage d’une main habile, qui a su mettre dans sa physionomie ce mélange de douceur, de simplicité, de bonhomie et de grandeur qui rendait, pour ainsi dire, visible l’âme de cet homme rare. […] Tout cela est dit en riant, et de ce ton d’homme du monde qui, chez Barthélemy, ne cesse d’accompagner le savant et d’écarter doucement le pédant. […] Outre un grand savoir, il a infiniment d’esprit et de polissonnerie (le mot est ainsi en français et souligné dans Walpole), et c’est une des meilleures espèces d’hommes qui soient au monde.

2533. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 38, que les peintres du temps de Raphaël n’avoient point d’avantage sur ceux d’aujourd’hui. Des peintres de l’antiquité » pp. 351-386

Ces vignettes representent des hommes, des animaux, des bâtimens, des chasses, des ceremonies et plusieurs points de l’histoire morale et naturelle de l’égypte ancienne. […] D’autres amours saisissoient Alexandre, et le tirant par sa cotte d’armes, ils l’entraînoient vers Roxane dans la posture d’un homme qui vouloit mettre son diadême aux pieds de l’objet de sa passion. […] Cet artisan ingénieux ayant exposé son tableau dans la solemnité des jeux olimpiques, Pronexides qui devoit être un homme de grande consideration, puisque cette année-là il avoit l’intendance de la fête, lui donna sa fille en mariage. […] C’est un homme qui se meurt, mais qui vient de recevoir le coup dont il meurt. […] Le coloriste qui aura mieux réussi que tous les autres coloristes qui seront venus jusques au temps d’un historien qui parlera de l’état où la peinture se trouve de ses jours, sera cité par cet historien pour le plus grand coloriste qui puisse être, pour un homme dont la nature même étoit jalouse.

2534. (1884) L’art de la mise en scène. Essai d’esthétique théâtrale

Supposez, par exemple, qu’une violente querelle s’élève entre deux hommes irascibles et que vous en soyez les témoins, ne frémirez-vous pas si vous apercevez un couteau placé sur une table à portée de ces deux hommes ? […] Pour lui, le monde extérieur n’était qu’un décor et les hommes n’étaient que des comédiens. […] Fritz est un homme jeune, bien portant, égoïste et heureux. […] Dans les comédies de Molière, les personnages sont le moins possible de leur temps, ou du moins ils ne le sont que dans la mesure nécessaire ; c’est l’homme que peint Molière plutôt que tel ou tel homme. […] Un homme vif, actif, ne s’habille pas ou ne porte pas ses vêtements comme un homme lent et paresseux.

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