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957. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre II : La littérature — Chapitre III : La littérature du xviiie et du xixe  siècle »

Il est de ce beau temps des lettres françaises par la mesure, les images modérées et justes, par l’éclat doux et égal, par les beautés antiques pensées et senties de nouveau, par le style, où il a la noblesse du grand siècle sans en avoir l’étiquette. […] Mais nous croyons en même temps qu’il y a bien des places dans la maison du Seigneur ; qu’un certain classique n’est pas tout le classique ; que le parfait a toujours quelque imperfection qui permet de concevoir un autre genre de parfait ; que, par exemple, le classique du xviie  siècle n’est qu’une forme de classique qui n’est pas sans défaut ; qu’on pourrait soutenir très-fortement que le classique grec lui est supérieur, et peut-être aussi que le classique anglais ou allemand (si l’on peut employer une telle expression) lui est égal ; que, pour comparer en toute justice ces différents genres de chefs-d’œuvre, il faudrait lire Goethe et Shakespeare avec la même préparation que nous lisons Racine ou Corneille : il faudrait se faire Anglais ou Allemand, tandis qu’il nous est si facile d’être Français. […] C’est ainsi que la vivacité française (que nous trouvons très-aimable) n’est pas loin de paraître de la folie aux flegmatiques habitants du Nord. […] Nisard et les efforts qu’il fait pour nous donner une image idéale et fidèle de l’esprit français ; mais, malgré tout, la vérité est la vérité. […] Aujourd’hui, l’esprit français n’a plus cette candide innocence qui lui faisait croire qu’il était le modèle Unique et parfait de la civilisation, de la littérature et du goût.

958. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre XII : Pourquoi l’éclectisme a-t-il réussi ? »

Écoutez ce passage, sentez ce style, et dites si un Français de 1815 pouvait y résister. Mon âme m’échappe malgré moi, et je ne puis consentir à garder les bienséances que m’inspire ma faiblesse, au point d’oublier que je suis Français. […] Soutenez la liberté française encore mal assurée et chancelante au milieu des tombeaux et des débris qui nous environnent, par une morale qui l’affermisse à jamais ; et cette forte morale, demandons-la à jamais à cette philosophie généreuse, si honorable pour l’humanité, qui, professant les plus nobles maximes, les trouve dans notre nature, et qui nous appelle à l’honneur par la voix du simple bon sens96. — Sorti du sein des tempêtes, nourri dans le berceau d’une révolution, élevé sous la mâle discipline du génie de la guerre, le dix-neuvième siècle ne peut en vérité contempler son image et retrouver ses instincts dans une philosophie née à l’ombre des délices de Versailles, admirablement faite pour la décrépitude d’une monarchie arbitraire, mais non pour la vie laborieuse d’une jeune liberté environnée de périls97. […] On avait renversé nos derniers philosophes français, et l’on avait besoin d’une gloire nationale. […] Enfin, en matière d’idées, le Français est naturellement discipliné, fort différent des Allemands qui réfléchissent chacun à sa façon et chacun dans son coin, très-docile aux opinions courantes, très-paresseux contre les opinions nouvelles, très-grognon quand on dérange ses habitudes, et qu’au lieu de réciter il est contraint de penser.

959. (1923) Les dates et les œuvres. Symbolisme et poésie scientifique

Et d’autre côté, dans les Poètes français contemporains que G. […] Est-ce du Français ? […] Ils tournent d’abord leur phrase comme tout le monde, en langage français et chrétien. […] Je souhaite pour ce grand homme qu’il soit plus facile à comprendre en allemand que ses adorateurs ne le sont en Français. […] Je résumerai ainsi Charles Morice : en 1886, lui, tentait de créer une « Ecole Française », au nom du classicisme, et après 1900, au nom du classicisme tentant une sournoise réaction, il rêvait de créer encore une « Ecole Française » !

960. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — chapitre VII. Les poëtes. » pp. 172-231

» Il n’y a pas un Français du dix-huitième siècle qui eût imaginé une gracieuseté semblable. […] Rappelons-nous, quand nous voulons la juger équitablement, le temps où nous faisions des vers français qui ressemblaient à nos vers latins. […] Ce justaucorps doré, si bien fait pour un Français, ne convient qu’à peu près à leur taille ; de temps en temps un mouvement trop fort, incongru, le découd aux manches, et ailleurs. […] Il faut être vraiment mondain ou artiste, Français ou Italien, pour y répugner. […] Hume, Robertson et Gibbon sont presque Français par leur goût, leur langue, leur éducation, leur conception de l’homme.

961. (1891) Enquête sur l’évolution littéraire

Moi je suis Français, vous m’entendez bien, un chauvin de Français, — avant tout. […] Nous sommes des Français, sacré nom de Dieu ! […] Encore un qui a traduit le français en moldo-valaque ! […] que la rime est la raison d’être du vers français. […] Mais qu’on la conserve si l’on ne veut pas tuer le vers français !

962. (1902) Les poètes et leur poète. L’Ermitage pp. 81-146

— Victor Hugo est, à mon avis, le plus grand, le meilleur, le plus lumineux des poètes français. […] ne sera jamais pour déplaire à un poète français. […] — Votre question limitée aux poètes morts (et français, n’est-ce pas !) […] Selon moi, Baudelaire a écrit les plus beaux vers de la langue française et je le préfère à Victor Hugo. Baudelaire est l’anneau qui relie et continue la chaîne des Poètes Français qui part d’Eustache Deschamps pour aboutir à Verlaine en passant par Villon, Ronsard, La Fontaine et Musset.

963. (1922) Gustave Flaubert

Flaubert le retrouva en la personne du consul français de Rhodes. […] Flaubert a amené avec lui la vie bourgeoise française. […] « Dans trois ans, tous les Français peuvent savoir lire. […] Il vit avant sa mort Maxime Du Camp reçu à l’Académie française. […] de Français et à aller vivre aux antipodes.

964. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — A — Autran, Joseph (1813-1877) »

Il a écrit la Fille d’Eschyle, étude antique qui a été couronnée par l’Académie française, et les Poèmes de la mer, dans lesquels il a cru un peu trop l’avoir inventée. […] [Discours de réception à l’Académie française (23 mai 1878).]

965. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — G — Gourmont, Remy de (1858-1915) »

. — Esthétique de la langue française (1899). — Le Songe d’une femme (1899). — Oraisons mauvaises (1900). […] [L’Académie française (février 1893).]

966. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 19, de la galanterie qui est dans nos poëmes » pp. 143-146

Section 19, de la galanterie qui est dans nos poëmes Je vais encore rapporter aux françois ce que dit un autre écrivain anglois sur la galanterie de nos poëtes. […] Monsieur Perrault avoit reproché aux anciens qu’ils ne connoissoient point ce que nous appellons galanterie, et qu’on n’en voïoit aucune fleur dans leurs poëtes, au lieu que les écrits des poëtes françois, soit en vers, soit en prose, ces derniers écrits sont les romans, se trouvent parsemez de ces gentillesses.

967. (1895) Journal des Goncourt. Tome VIII (1889-1891) « Année 1891 » pp. 197-291

Villard soutenait que la qualité du Français et sa supériorité sur tous les autres Européens, étant l’ordre, la méthode, l’économie, on ne savait pourquoi, dans tout l’univers, sa grande réputation était sa légèreté. […] Voici, je crois, le japonisme lancé, et qui va partir pour les gros prix, comme j’ai vu partir l’estampe et le dessin français du xviiie  siècle. […] Je ne citerai que la censure théâtrale… Quant au bon marché de la vie, l’existence à Paris, et même en province, a presque décuplé depuis Louis-Philippe, en grande partie par la grande prépondérance donnée par le gouvernement à la société juive, et cela parallèlement à la diminution de la rente, à la baisse des fermages : les deux capitaux et les deux revenus des Français, qui ne sont pas juifs, qui ne sont pas tripoteurs d’argent. […] il fait bon être Scandinave… Si la pièce était d’un Parisien… Oui, oui, c’est entendu, du dramatique bourgeois qui n’est pas mal… mais de l’esprit à l’instar de l’esprit français, fabriqué sous le pôle arctique… et un langage parlé, quand il s’élève un peu, toujours fait avec des mots livresques. […] Je m’élevais, avec une espèce de colère, contre ce mangement de l’esprit français, à l’heure actuelle, par l’esprit étranger, contre l’ironie présente du livre qui n’est plus de l’ironie à la Chamfort, mais de l’ironie à la Swift, contre cette critique devenue helvetienne, allemande, écossaise, contre cette religion des romans russes, des pièces danoises, déclarant qu’autrefois, si Corneille avait emprunté à l’Espagne, il a imposé le cachet français à ses emprunts, tandis qu’aujourd’hui les emprunts que nous faisons dans notre servile admiration : c’est une vraie dénaturalisation de notre littérature.

968. (1896) Journal des Goncourt. Tome IX (1892-1895 et index général) « Année 1892 » pp. 3-94

Les Françaises valsent, le corps tout droit, tandis que les Hollandaises et les autres femmes des pays du patinage, valsent avec ce penchement, cette courbe en dehors d’un corps courant sur la glace. […] Et il arrivait qu’un jour, Français ayant dîné chez le père de Corot, ce père, au moment où Français allait sortir, lui dit qu’il allait le reconduire, et comme son fils s’apprêtait à le suivre, il lui fit signe de rester. Et dans la rue : « — Monsieur Français, est-ce que vraiment mon fils aurait du talent ? — Comment, répondait Français, mais c’est mon professeur !  […] Il dit que maintenant en France, une entame du patriotisme vient surtout du grand nombre de mariages contractés par des Français avec des étrangères — ce qui n’existait pas dans l’ancienne France — mariages qui donnent des enfants français, qui ne sont pas tout à fait français.

969. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXVIII » pp. 266-276

Les éditeurs ne font probablement pas un mauvais marché malgré ces dépenses : il s’est vendu, de l’Histoire de la Révolution française, 80 mille exemplaires en tout. […] Cousin, en terminant, conclut : « Selon nous, Pascal est l’exagération de Port-Royal comme Port-Royal est l’exagération de l’esprit religieux du xviie  siècle… » Puis il montre le xviiie  siècle réagissant en sens tout opposé : « Aujourd’hui, dit-il, le xixe  siècle a devant lui la dévotion sublime mais outrée du xviie  siècle, et la philosophie libre mais impie du xviiie  ; et il cherche encore sa route entre ces deux siècles… Son caractère distinctif qui déjà44 commence à paraître, consiste précisément à fuir toutes les extrémités qui jusqu’ici ont séduit et entraîné l’esprit français… Est-il donc impossible de s’arrêter sur la pente des systèmes et de concilier tout ce qui est vrai et tout ce qui est bien ? […] n’est-ce pas s’en tenir à des combinaisons sensées, prudentes, françaises, en effet, mais tout extérieures ?

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