d’Aiguillon, qui était à Versailles, et avait, d’après ses conseils, formé le projet de faire rester le roi à Trianon tant que durerait cette incommodité. […] Comme le parti de ceux qui désiraient l’expulsion de Mme Dubarry et de ses vils sectateurs n’était en général composé que de gens honnêtes, il se bornait à désirer tout ce qui pouvait en hâter le moment, mais ne formait à cet égard aucunes intrigues. […] Elles n’avaient pas eu plus la petite vérole que M. le Dauphin, et en avaient peur : elles ne voulurent pas se rendre aux représentations que nous leur fîmes, et se montrèrent inébranlables dans le projet qu’elles avaient formé de ne point abandonner leur père.
À Lyon, il y a plus de vingt mille ouvriers en soie qui sont consignés aux portes ; on les garde à vue, de peur qu’ils ne passent à l’étranger. » À Rouen616 et en Normandie, « les plus aisés ont de la peine à avoir du pain pour leur subsistance, le commun du peuple en manque totalement, et il est réduit, pour ne pas mourir de faim, à se former des nourritures qui font horreur à l’humanité » « À Paris même, écrit d’Argenson617, j’apprends que le jour où M. le Dauphin et Mme la Dauphine allèrent à Notre-Dame de Paris, passant au pont de la Tournelle, il y avait plus de deux mille femmes assemblées dans ce quartier-là qui leur crièrent : Donnez-nous du pain, ou nous mourrons de faim. » — « Un des vicaires de la paroisse Sainte-Marguerite assure qu’il a péri plus de huit cents personnes de misère dans le faubourg Saint-Antoine depuis le 20 janvier jusqu’au 20 février, que les pauvres gens expiraient de froid et de faim dans leurs greniers, et que des prêtres, venus trop tard, arrivaient pour les voir mourir sans qu’il y eût du remède. » — Si je comptais les attroupements, les séditions d’affamés, les pillages de magasins, je n’en finirais pas : ce sont les soubresauts convulsifs de la créature surmenée ; elle a jeûné tant qu’elle a pu ; à la fin l’instinct se révolte. […] Selon les meilleurs observateurs, « le quart du sol est absolument en friche… Les landes et les bruyères y sont le plus souvent rassemblées en grands déserts, par centaines et par milliers d’arpents632. » — « Que l’on parcoure l’Anjou, le Maine, la Bretagne, le Poitou, le Limousin, la Marche, le Berry, le Nivernais, le Bourbonnais, l’Auvergne, on verra qu’il y a la moitié de ces provinces en bruyères qui forment des plaines immenses, qui toutes cependant pourraient être cultivées. » En Touraine, en Poitou, en Berry, ce sont des solitudes de trente mille arpents. […] Arthur Young, en 1789, s’étonne de leur prodigieuse multitude et « penche à croire qu’elles forment le tiers du royaume ».
. — Principaux composés que forment leurs combinaisons. — La naissance et la rectification d’une illusion sont les deux procédés par lesquels se forment en nous nos diverses sortes de connaissances. […] Comment des événements intérieurs comme ceux qu’on a décrits parviennent-ils à les former ?
Ces inquiétudes étaient justifiées, à quelques égards, par les infirmités qui affligèrent Pierre pendant le petit nombre d’années qu’il fut à la tête du gouvernement de la république ; mais les talents de Laurent dissipèrent bientôt ces nuages d’un moment, et élevèrent sa famille à un degré d’illustration et d’éclat dont il est probable que Côme lui-même avait eu peine à se former l’idée. » VIII Bien qu’il fût âgé de soixante et quinze ans, sa taille élevée, la majesté de ses traits, la grâce de son visage, si conforme au titre de Père de la patrie que les Florentins avaient d’eux-mêmes ajouté à son nom, la bienveillance de son accueil, la cordialité de son amitié le rendaient aussi agréable que dans sa belle jeunesse. […] Pour donner plus de stabilité à ces études, Laurent et ses amis formèrent le projet de renouveler avec un éclat solennel la fête annuelle qui avait été célébrée en l’honneur de la mémoire de Platon, après la mort de ce grand philosophe, jusqu’au temps de ses disciples Plotin et Porphyre, et qui depuis avait été interrompue pendant l’espace de douze cents ans. […] La jeunesse florentine, un peu revenue de la première terreur de l’événement, se forma d’elle-même en escorte autour de Laurent et le conduisit à son palais par un détour, afin de lui éviter le spectacle du cadavre de l’infortuné Julien.
Sans doute l’expérience ne donne de cette vérité qu’une connaissance actuelle, et par là ne semble pas suffisante à fonder un axiome ; mais, qu’on le remarque, l’imagination y supplée ; nous nous formons une image mentale des deux lignes, et nous voyons que, dès qu’elles se rencontrent de nouveau, elles cessent d’être droites. […] Mais quand ce sentiment est une fois formé, il a exactement la force d’un sentiment primitif : l’argent est aimé pour lui-même. […] Elles se sont formées par accumulation lente, comme nos intuitions d’espace et de temps.
Lui, amateur des sources antiques, toujours en quête des saines et « bonnes disciplines », qui voudrait produire dans son style la « tranquillité modeste et hardie » de ses pensées ; lui qui, dans les belles pages de prose où il ébauche des projets d’ouvrages sévères, aspire et atteint à la concision latine, à la « nerveuse et succulente brièveté » d’un Salluste honnête homme et vertueux, on conçoit la colère à la Despréaux, et plus qu’à la Despréaux, qui dut le saisir en voyant un tel débordement de déclamations soi-disant philosophiques, de facéties galantes et de gentillesses libertines, découlant de la plume d’un bel esprit formé à l’école de Danton. […] Il montre que cette société, et toutes celles qui en dépendent, ces confréries usurpatrices, « se tenant toutes par la main, forment une sorte de chaîne électrique autour de la France » ; qu’elles forment un « État dans l’État » ; que « l’organisation de ces sociétés est le système le plus complet de désorganisation sociale qu’il y ait jamais eu sur la terre ».
On le dit libre et responsable dès qu’il est normal, dès que tous les poids qui concourent pour l’ordinaire à former cet équilibre instable se laissent voir dans la somme des éléments psychologiques qui le composent. […] Leur conduite est constamment conforme aux lois de la probité, à la conception que l’idéal de l’époque a formée de l’honnête homme, et à vivre de la sorte, ils rencontrent à la fois la fortune et l’estime publique. […] Il est, à vrai dire, le lieu où des êtres vivants, que d’un terme abstrait nous nommons des instincts, viennent en contact, et, s’unissant ou s’opposant, forment des gouvernements où tel groupe est tour à tour prépondérant.
Ils sont, comme nous, des hommes formés par le travail. […] L’unité française se forme dès lors, ainsi qu’une fois déjà elle s’est formée à la Fédération du 14 juillet 1790, non pas sur la même religion sociale exprimée, mais sur le même amour de la France, sur le même amour de la justice… Cette conciliation ne deviendra jamais sans doute une assimilation et une confusion : il faut des fleurs diverses au jardin de la terre. […] Je regarde se former en lui un chant qui ne jaillit pas, mais dont le murmure peut instruire et faire vivre ses frères.
À son arrivée dans ce monde sulpicien, il lui semblait, au contraire, se retrouver de nouveau dans son milieu de Bretagne ; entouré d’hommes graves, paisibles, de maîtres instruits (l’abbé Gosselin), quelques-uns profonds et très originaux (l’abbé Pinault, par exemple), il commença à développer lui-même sa propre originalité : « L’éducation ecclésiastique, a-t-il dit, qui a de graves inconvénients quand il s’agit de former le citoyen et l’homme pratique, a d’excellents effets pour réveiller et développer l’originalité de l’esprit. […] Soustrait à toute inspection, à tout contrôle officiel, le régime intellectuel des grands séminaires est celui de la liberté la plus complète : rien ou presque rien n’étant demandé à l’élève comme devoir rigoureux, il reste en pleine possession de lui-même ; qu’on joigne à cela une solitude absolue, de longues heures de méditation et de silence, la constante préoccupation d’un but supérieur à toutes les considérations personnelles, et on comprendra quel admirable milieu de pareilles maisons doivent former pour développer les facultés réfléchies.
comment des circonstances contraires et sinon menaçantes, du moins très-dignes de préoccupation, se sont-elles soudainement groupées et assemblées de manière à former non plus quelques points noirs épars çà et là à l’horizon, mais un compacte et redoutable nuage, une barre sombre qui recèle de l’inconnu ? […] — Je ne prétends point expliquer tout le phénomène, mais enfin j’en dirai le peu que j’ai pu observer et que je sais, et cette explication n’est point un hors-d’œuvre, car en montrant comment s’est formée la nécessité de la situation, elle avertit par là même combien il importe pleinement d’y satisfaire.
L’importance de l’objet auquel on aspire ne donne point la mesure de la douleur que fait éprouver la privation, c’est à la violence du désir qu’il inspirait, c’est surtout à l’opinion que les autres se sont formés de l’activité de nos souhaits, que cette douleur se proportionne. […] Quand elles ne veulent plaire que pour être aimées ; quand ce doux espoir est le seul motif de leurs actions, elles s’occupent plus de se perfectionner que de se montrer, de former leur esprit pour le bonheur d’un autre que pour l’admiration de tous : mais quand elles aspirent à la célébrité, leurs efforts, comme leurs succès, éloignent le sentiment qui, sous des noms différents, doit toujours faire le destin de leur vie.
D’autre part, dans un État qui peu à peu se dépeuplait, se dissolvait et fatalement devenait une proie, il avait formé une société vivante ; guidée par une discipline et des lois, ralliée autour d’un but et d’une doctrine, soutenue par le dévouement des chefs et l’obéissance des fidèles, seule capable de subsister sous le flot de barbares que l’Empire en ruine laissait entrer par toutes ses brèches : voilà l’Église. — Sur ces deux premières fondations, il continue à bâtir, et, à partir de l’invasion, pendant plus de cinq cents ans, il sauve ce qu’on peut encore sauver de la culture humaine. […] Ainsi se forment de nouveaux centres d’agriculture et d’industrie qui deviennent aussi des centres nouveaux de population6.
— Car il la faut ainsi, molle et incertaine, pas encore formée de corps ni d’esprit, pour que l’homme la puisse pétrir et créer entière et que, la créant, il soit à son tour renouvelé et achevé par elle. […] Formée par l’homme dans sa première jeunesse, à son tour elle agit sur lui.