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1641. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre troisième. »

Chacun d’eux résolut de vivre en gentilhomme, Sans rien faire… Voilà un trait de satyre qui porte sur le fond de nos mœurs, mais d’une manière bien adoucie.

1642. (1763) Salon de 1763 « Peintures — Vernet » pp. 227-230

Une mère pleure sur son enfant noyé ; cependant le vent applique ses vêtements contre son corps, et vous en fait discerner les formes ; des marchandises se balancent sur les eaux, et des passagers sont entraînés au fond des gouffres.

1643. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 31, de la disposition du plan. Qu’il faut diviser l’ordonnance des tableaux en composition poëtique et en composition pittoresque » pp. 266-272

Un de ses plus magnifiques ouvrages, les nôces de Cana, qu’on voit au fond du refectoire du couvent de saint Georges à Venise, est rempli de fautes contre la poësie pittoresque.

1644. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 50, de la sculpture, du talent qu’elle demande, et de l’art des bas-reliefs » pp. 492-498

Leurs sculpteurs ne sçavoient que couper des figures de ronde bosse par le milieu ou par le tiers de leur épaisseur, et les plaquer, pour ainsi dire, sur le fond du bas-relief, sans que celle qui s’enfonçoient fussent dégradées de lumiere.

1645. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « XIII »

Généralement, pour la trouver, il faut la chercher laborieusement et, bien qu’elle soit un mérite positif du rang le plus élevé, c’est moins l’esprit d’invention que l’esprit de négation qui nous fournit les moyens de l’atteindre. »‌ Tous les grands écrivains ont à peu près dit la même chose, et, l’hésitation n’est pas permise, c’est Edgard Poë (sic) qui a raison : l’originalité du fond et surtout l’originalité de la forme peut être instantanée ; mais, en général, il est très vrai qu’il faut la chercher laborieusement, nous l’avons prouvé sans réplique dans notre dernier livre par les corrections manuscrites des grands auteurs.

1646. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre II. Dryden. »

Au fond, le drame, comme toute œuvre d’art, ne fait que rendre sensible une idée profonde de l’homme et de la vie ; il y a une philosophie cachée sous ses enroulements et sous ses violences, et le public doit être capable de la comprendre comme le poëte de la trouver. […] Ce ne sont que sentiments chargés, dévouements improvisés, générosités exagérées, emphase ronflante de chevalerie maladroite ; au fond, les personnages sont des rustres et des barbares qui ont essayé de s’affubler de l’honneur français et de la politesse mondaine. […] Dryden veut garder le fond du vieux drame anglais, et conserve l’abondance des événements, la variété des intrigues, l’imprévu des accidents et la représentation physique des actions sanglantes ou violentes. […] Au fond, dans ce siècle en Angleterre, toutes les discussions restent étroites. […] Nature meant me A wife, a silly harmless household dove, Fond without art, and kind without deceit.

1647. (1895) Les confessions littéraires : le vers libre et les poètes. Figaro pp. 101-162

Bauër, Anatole France, etc., et nous causons et, tout de suite, Mme Marie Krysinska affirme hautement son indépendance puis elle dit : « Au fond, pourquoi s’occuper de Mistral ? […] Le fond de ma pensée, c’est que ce sont là questions menues et auxquelles on attache trop d’importance. […] Au fond, M. de Bornier, par amour de la paix et de la modestie académique bien connue, esquive les embarrassantes réponses sur le vers libre : devons-nous lui en faire un reproche cruel ? […] Ceux-là, loin de vouloir tout remette en question et troubler de fond en comble, se contentent de joindre un jonc de plus à la syrinx, et de faire moduler a la gamme éternelle un accord jusque-là inentendu et d’une plus ineffable mélodie. […] Il me paraît que dans ce qu’on appelle les nouvelles écoles, lesquelles, soit dit en passant, n’ont rien rénové, n’étant que la conséquence immédiate des erreurs romantiques et parnassiennes, le style semble beaucoup plus répréhensible que le fond lui-même.

1648. (1900) La culture des idées

Au fond, il n’y a qu’un genre : le poème ; et peut-être qu’un mode, le vers, car la belle prose doit avoir un rythme qui fera douter si elle n’est que de la prose. […] Rochefort est d’ailleurs un écrivain original et l’un de ceux qu’on devrait citer d’abord pour démontrer que le fond n’est rien sans la forme : il suffit de lire un peu au-delà de son article. […] Or le cliché porte sur les mots et le lieu commun sur les idées ; le cliché qualifie la forme ou la lettre, l’autre le fond ou l’esprit. […] Il n’y a pas d’amour qui ne désire l’amour et qui ne l’exige au fond de soi : sainte Thérèse veut être aimée alors même qu’elle sacrifie ses joies à sa passion. […] À Marsala, l’auteur de l’Apocalypse, prédestiné à ce rôle, rend les oracles au fond de l’antre d’une ancienne sibylle, et vraiment ici la naïveté confine à l’épigramme.

1649. (1888) Études sur le XIXe siècle

Au fond, il est de la famille des exaltés, des saints ; lui, l’ennemi des prêtres, il eut un grain du désintéressement sublime qui fit les François d’Assise. […] D’ailleurs, au fond de lui-même, le peintre de la Hollande doit préférer à tout le reste la vie artificielle, et je ne crois pas qu’il ait jamais eu d’élan sincère vers la vraie nature délivrée de l’homme. […] Tous ceux que j’ai connus personnellement m’ont attristé jusqu’au fond du cœur par le spectacle de grandes facultés demeurées stériles et impuissantes. […] Au fond, son juste milieu n’est autre chose que l’art de gouverner avec mesure. […] Au fond, les conditions religieuses de la société moderne l’occupent plus que la religion même, et il devait finir par s’inquiéter assez peu des dogmes et beaucoup des rapports entre l’Église et l’État.

1650. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Molière »

Malherbe, homme de forme, de style, esprit caustique, cynique même, comme M. de Buffon l’était dans l’intervalle de ses nobles phrases, Malherbe, esprit fort au fond, n’a de chrétien dans ses odes que les dehors ; mais le génie de Corneille, du père de Polyeucte et de Pauline, est déjà profondément chrétien. […] Il avoit les yeux collés sur trois ou quatre personnes de qualité qui marchandoient des dentelles ; il paroissoit attentif à leurs discours, et il sembloit, par le mouvement de ses yeux, qu’il regardoit jusqu’au fond de leurs âmes pour y voir ce qu’elles ne disoient pas. […] Mais laissons parler sur ce chapitre domestique un contemporain du poëte, dans un récit fort peu authentique sans doute, assez vraisemblable pourtant de fond ou même de couleur, et à quoi, comme familiarité de détail, rien ne peut suppléer : « Cependant ce ne fut pas sans se faire une grande violence que Molière résolut de vivre avec sa femme dans cette indifférence. […] Mais, en arrivant devant les Bons-Hommes, le religieux demanda à être mis à terre et prit sa besace au fond du bateau ; ce n’était qu’un moine mendiant. […] Mais une distinction essentielle est à faire, et l’on ne saurait trop la méditer parce qu’elle touche au fond même du génie dramatique.

1651. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Le maréchal de Saint-Arnaud. Ses lettres publiées par sa famille, et autres lettres inédites » pp. 412-452

La gaieté et l’entrain y sont d’ailleurs fréquemment coupés par la maladie, la gastrite et les accès de découragement. « Je ressemble à ces vieux chevaux de bonne maison qui, bien pansés, bien cirés, bien harnachés et un peu poussés d’avoine, redressent encore la tête et piaffent avec élégance ; mais plus de fond, plus de nerf… L’élan est toujours là, impétueux, terrible, mais il ne faut pas que la course soit longue. » Dans ce camp du Fondouck, dans ces commandements de misérables bicoques où l’on est relégué durant des saisons, il y a de longs intervalles d’ennui, d’attente, où l’on est visité par la fièvre ; on sent qu’on s’use et qu’on se mine sans profit : « Ah ! […] Ils m’ont volé l’occasion presque sûre de les battre et de les jeter dans le Danube71. » Les Russes jouaient leur jeu, et il n’y avait rien dans ce mouvement rétrograde qui ne fût d’une bonne politique et d’une bonne tactique ; Saint-Arnaud au fond le savait bien : « La Russie peut être bloquée impunément. […] Le Roy de Saint-Arnaud, dans ces grandes expéditions, l’homme, c’est bien peu de chose ; ses desseins, ses projets, c’est moins encore : il faut que Dieu sanctionne et protège tout cela. — Je ferai de mon mieux : Dieu est le maître ; je ne néglige rien pour mettre les bonnes chances de mon côté ; mais je sens bien que je navigue dans une mer semée d’écueils, et que chaque jour j’en vois sortir de nouveaux du fond des eaux… — À la volonté de Dieu ! […] Au moment enfin de prendre la mer (29 août), énumérant encore une fois les incertitudes, les difficultés de tout genre qu’il ne se dissimulait pas, et sur le point précis où opérer le débarquementad, et sur la manière d’aborder Sébastopol et le côté par où mordre à « ce dur morceau », et son autre souci, presque aussi grave, du bon accord à maintenir entre des alliés d’habitudes et de génies si différents, le maréchal concluait ainsi et livrait le fond de son âme au sein de l’intimité : N’est-ce pas bien lourd tout cela, mon cher Franconnière, pour un pauvre homme qui lutte contre ses propres souffrances, qui les domine pour d’autres luttes plus importantes et plus nobles, qui heurte sa tête, sans l’amollir, contre des obstacles sans nombre que la prudence humaine ne peut ni prévoir ni empêcher ?

1652. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXIIe entretien. Vie et œuvres de Pétrarque (2e partie) » pp. 81-155

Tristesse au fond du cœur, sourire encore sur les lèvres. […] Si j’ouvre la porte aux passions, je serai toujours pauvre : l’avarice, la luxure, l’ambition ne connaissent point de bornes ; l’avarice surtout est un abîme sans fond. […] Dans le fond je les méprise, et peut-être serais-je fâché de ne pas les avoir. […] Dans le fond c’est mon affaire.

1653. (1860) Cours familier de littérature. X « LVIe entretien. L’Arioste (2e partie) » pp. 81-160

Il fond sur les chrétiens assoupis, il immole une foule de guerriers, choisissant les plus illustres. […] Le portique, assez vaste pour contenir une foule de clients ; l’escalier de marbre blanc à rampes moulées ; la salle des gardes, presque aussi longue et aussi large que le palais lui-même ; la tribune haute qui régnait sous les corniches ; les fresques poudreuses qui décoraient le sombre plafond ; les statues de nobles Vénitiens sous leur armure, qui contemplaient les passants du fond de leurs niches autour de la salle ; le parvis négligé et humide de cette salle ; les volées de colombes qui s’y abattaient librement par les fenêtres ouvertes ; le vent de mer qui faisait tinter ces vitres, mal attachées aux châssis de plomb ; enfin le léger et mélancolique clapotement des petites vagues du canal contre les marches extérieures de l’escalier : tout cela donnait au palais de Léna une apparence et comme une odeur de sépulcre, qui imposait à tous les sens une certaine langueur molle, le caractère de la ville et des habitants. […] Léna et sa fille entrèrent dans une enfilade d’appartements, dont on apercevait à peine le fond à travers une longue avenue de portes en drap vert, toutes ouvertes. […] On voit que la sensibilité était le fond de ce génie de l’Arioste.

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