Ainsi, les tableaux de Bernardin de Saint-Pierre ont toujours quelque chose d’idéal, sans cependant jamais sortir de la nature ; il est comme ces statuaires des temps antiques, qui reproduisaient la figure humaine avec des proportions si parfaites, que sous une forme mortelle on reconnaissait une divinité. […] Sa figure était inexprimable au pinceau et à la langue ; il aurait fallu, pour la peindre, les yeux, les sens et comme l’âme de l’auteur de Paul et Virginie. […] Sa figure même avait la puissance simple et douce des éléments, sa chevelure blonde et blanche tout à la fois lui faisait comprendre la jeunesse éternelle ou le phénomène de l’immortalité. […] Amant de la gloire de loin, comme des choses qui brûlent en éblouissant, sa figure portait le témoignage de son caractère ; il était grand, fort, élancé ; ses traits, pris séparément, n’étaient pas délicatement irréprochables, mais vus de distance ils étaient imposants, doux et fiers ; ses membres souples, sa démarche libre et noble. […] Les uns le persiflaient, en lui demandant où il avait vu Dieu, et quelle figure il avait ; les autres s’indignaient de sa crédulité ; les plus calmes lui adressaient des paroles méprisantes.
Des commentaires sur l’Évangile peuvent bien se transformer en pamphlets politiques ; c’est une marque du trouble des esprits et de la ruine théologique ; il y a ici agression et lutte sous figure d’enseignement ; mais de tels compromis sont interdits à la Poésie. […] Les figures idéales, typiques, que celui-ci a conçues, ne seront jamais ni surpassées ni oubliées. […] À l’exception d’Hamlet, qui échappe à toute définition par son extrême complexité, les caractères virils me semblent de beaucoup supérieurs aux figures féminines. […] Cette langue si neuve, si riche et si précise, ces figures, ces péripéties dramatiques, ces noms ne sortiront plus de notre mémoire ; la vision du Poète est devenu la nôtre. […] Quatre-vingt-treize, enfin, n’est-il pas un poème dont les héros sont des types du devoir accompli, du sacrifice sublime, des figures symboliques plutôt que des hommes, tant elles sont grandes ?
Le voyez-vous se lever devant vous, l’essaim des figures françaises, toutes parées de vives couleurs que vous n’aviez pas aperçues ? […] Ces figures ne diffèrent pas seulement de celles que vous venez de quitter ; elles diffèrent aussi entre elles ; vous en distinguez les nuances. […] On se figure M. […] On les a vus s’agiter sur la scène du Vaudeville à la façon des figures de bois peint qui tournent sur les orgues de Barbarie. […] « Je ramai sous le Maure », a-t-il dit plus tard, un peu par figure de rhétorique.
Laurent Pichat est une figure sympathique.
Ces figures colossales ont quelque chose d’effrayant & qui choque la vue.
De là, le défaut de liaison & de suite dans ses idées, d’assortiment dans l’ensemble, de caractere dans son style, tantôt philosophique, tantôt religieux, & toujours froid ; de là, ces figures étrangeres au sujet & préparées avec effort, ces tours étudiés, ces expressions symétriques qui supposent de l’esprit, mais qui décelent un cœur vide de sentimens, & par conséquent incapable de toucher les autres cœurs & de s’en rendre le maître.
J’aimerais mieux avoir croqué ces figures-là où l’on ne discerne presque rien encore que leur action avec l’ordonnance générale, que de m’être épuisé après ce mauvais Milon de Crotone.
Un peintre, et encore plus un poëte, qui tient toujours une grande place dans son imagination, et qui lui-même est encore souvent un homme de ce caractere d’esprit violent, pour lequel il n’est point de personnes indifferentes, se figure qu’une grande ville, qu’un roïaume entier n’est peuplé que d’envieux ou d’adorateurs de son mérite.
. — Je relève en marge du Vieux Cordelier ce portrait entre autres de Camille : « Desmoulins avait un extérieur désagréable, la prononciation pénible, l’organe dur, nul talent oratoire ; mais il écrivait avec facilité et était doué d’une gaieté originale qui le rendait très-propre à manier l’arme de la plaisanterie. » — N’est-ce pas un type du pamphlétaire comme on se le figure ? […] généreux, dévoués, se chargeant eux-mêmes, s’accusant de tout : Bories le premier, Bories, jeune martyr au front calme, au cœur résigné, plein de vertu et de génie, confondant ses juges, consolant et relevant ses compagnons ; les soutenant sur la charrette du supplice contre l’horreur d’une mort méconnue ; les faisant monter avant lui sur l’échafaud pour les affermir jusqu’au bout de son regard et de sa voix ; Bories, figure mélancolique et sans tache, luttant contre l’oubli ; nom sublime à inscrire dans la mémoire publique à côté des Roland, des Vergniaud, des Oudet, des Hoche et des Manuel ! […] Nous lisions les nouveaux livres tout haut en récréation : on ne se figure plus aujourd’hui, on ne peut plus se figurer quel enthousiasme, quel transport ce fut pour les premiers vers de Lamartine parmi ceux de notre âge ; nous tous qui voulions faire des vers, nous fûmes touchés ; nous ressentions là le contrecoup d’une révélation ; un soleil nouveau nous arrivait et nous réchauffait déjà de ses rayons… » — Et me transportant moi-même, aujourd’hui, de ces souvenirs d’un passé qui me revient par bribes des conversations de M. […] C’est une espèce de satire ou conte à l’adresse d’un écrivain bien oublié aujourd’hui, Mme de Genlis, et qui venait de publier alors Les Arabesques mythologiques, — « avec figures », a bien soin d’ajouter, dans un petit Avertissement, l’auteur de la satire que j’ai sous les yeux. C’est à l’une de ces figures peut-être que fait allusion une gaillardise de ce court poème, qui a le sel gai.
Çà et là, dans les Mémoires, on voit passer quelques-unes de ces étranges figures surannées, par exemple, en Bourgogne, « des gentilshommes chasseurs, en guêtres, en souliers ferrés, portant sous le bras une vieille épée rouillée, mourant de faim et refusant de travailler64 » ; ailleurs, « M. de Pérignan, en habit, perruque et figure rousses, faisant travailler à des murs de pierre sèche dans sa terre, et s’enivrant avec le maréchal-ferrant du lieu » ; parent du cardinal Fleury, on fit de lui le premier duc de Fleury Tout contribue à cette décadence, la loi, les mœurs, et d’abord le droit d’aînesse. […] Même avec la délégation du roi, un gouverneur de province, fût-il héréditaire et prince du sang comme les Condés en Bourgogne, doit s’effacer devant l’intendant ; il n’a pas d’office effectif ; ses emplois publics consistent à faire figure et à recevoir. […] Il n’y a que Versailles pour se montrer, faire figure, se pousser, pour s’amuser, converser ou causer, au centre des nouvelles, de l’action et des affaires, avec l’élite du royaume et les arbitres du ton, de l’élégance et du goût. « Sire, disait M. de Vardes à Louis XIV, quand on est loin de Votre Majesté, non seulement on est malheureux, mais encore on est ridicule. » Il ne reste en province que la noblesse pauvre et rustique ; pour y vivre, il faut être arriéré, dégoûté ou exilé. […] Se figure-t-on un grand seigneur, jadis abbé brillant et galant, maintenant évêque avec cent mille livres de rente et qui volontairement s’enterre pour toute l’année à Mende, à Condom, à Comminges, dans une bicoque ?
Ce groupe est fort abondant ; on s’en aperçoit à la multitude des détails qu’on est obligé de donner quand on essaye de décrire une figure et une âme humaines. […] On le tenait dans les bras, et il regardait un abat-jour posé sur une bougie, où des figures de chiens, bien éclairées, se dessinaient en noir. À mesure qu’on tournait l’abat-jour et qu’une nouvelle figure apparaissait, il criait oua-oua d’un air de triomphe : c’était l’enthousiasme de la découverte ; tous les jours, il fallait recommencer. […] Lorsque Oken, rencontrant un squelette de mouton, imagina que le crâne est un composé de vertèbres élargies et soudées, lorsque Goethe, observant des étamines pétaloïdes, supposa que tous les organes de fleur sont des feuilles transformées, lorsque Newton, voyant une pomme tomber, conçut la lune comme un corps pesant qui tend aussi à tomber sur la terre, ils répétaient l’opération mentale et retrouvaient le ravissement du petit garçon qui, voyant des chiens sur l’abat-jour, criait oua-oua. — Entre une vertèbre et le crâne, entre la feuille verte et un pistil ou une étamine, entre la pomme qui tombe et la lune qui chemine dans le ciel, entre le chien de chair et aboyant et la petite figure de l’abat-jour, la dissemblance est énorme ; il semble que les deux représentations diffèrent du tout au tout. […] Le manuel qu’il livre aux commençants a mille pages, et il faudrait je ne sais combien d’atlas et de volumes pour contenir la figure et l’énumération de toutes les parties qu’à l’œil nu il a constatées. — S’il arme son œil du microscope, ce nombre se multiplie au centuple ; Lyonnet n’a pas eu trop de vingt ans pour décrire la chenille du saule. — Au-delà de notre microscope, des instruments plus puissants accroîtraient encore notre connaissance ; il est visible que dans cette voie la recherche n’a pas de terme. — Pareillement, voici un corps inorganique, de l’eau ; l’idée que j’en ai est celle d’un liquide, sans odeur ni couleur, transparent, bon à boire, qui peut devenir glace ou vapeur ; rien de plus ; du groupe énorme des caractères ou propriétés physiques et chimiques qui s’accompagnent et constituent l’eau, je ne sais pas autre chose.
La petite Thérésina bâillait quelquefois de la cantilène monotone du professeur, qui lisait toujours ; la comtesse Léna avait des distractions en passant ses longs doigts dans les boucles cendrées de sa fille ; j’en avais moi-même en regardant plus complaisamment ces deux ravissantes figures de femmes que les fantômes du poème flottant dans la brume de l’âme sous mes yeux ; enfin le chanoine frappait de temps en temps du pied les dalles sonores de la grotte, comme un homme qui s’impatiente d’un entretien trop prolongé. […] Ainsi finit par un démasquement général ce poème rempli de travestissements et d’imbroglios tantôt héroïques, tantôt comiques ; les derniers chants qui rendent à chacun et à chacune son nom, sa gloire, son amant, son amante, ressemblent à ce dernier jour du carnaval de Venise, et à ce premier jour de pénitence où tous les masques tombent à la fois de tous les visages, et où les costumes de fantaisie et les déguisements des saturnales font place à la vérité des figures et au bon sens. […] Je ne le savais pas, je ne cherchais pas à le savoir ; mais c’était l’ensemble de cette situation, c’était ce groupe aimable, naïf, accompli, dont chaque figure était nécessaire à l’autre, et dont on ne pouvait en détacher une sans que le charme fût anéanti. […] La lune ruisselait du ciel à travers une chaude brume transparente comme une écume de l’air sur les toits, sur les balustrades, sur les pilastres, sur les cariatides de marbre de la façade ; le vent emportait à chaque bouffée les fleurs embaumées des orangers en caisse qui encadraient d’une sombre verdure les parterres au bas du perron ; les jets d’eau chantaient comme des oiseaux sans sommeil ; leurs légères colonnes d’eau, transpercées par les rayons nocturnes, s’inclinaient et se redressaient sous la brise comme des tiges de girandoles chargées de grappes de cristaux ; les blanches statues des terrasses ressemblaient aux fantômes pétrifiés d’une population de marbre ; la grotte, vide désormais, ouvrait au-dessus de moi son antre sombre, d’où suintait la petite rigole qui avait tant mêlé son gazouillement monotone aux stances du poète ; tout nageait dans un éther fluide et vague qui grandissait les objets et qui les faisait pyramider vers le firmament, comme s’ils avaient flotté entre ciel et terre ; enfin, pour comble d’illusion, un rideau blanc, agité par le vent à la fenêtre ouverte de Thérésina et de sa mère, jouait à longs plis sur le mur et ressemblait à la figure de Ginevra apparaissant à son amant sur le fatal balcon du palais de son père. […] Puisse cette séparation ressembler à celles de l’Arioste, où, après mille traverses héroïques, un enchanteur, un ermite ou un bon génie, sous la figure d’une Léna ou d’une Thérésina, ramène le héros au lieu et aux félicités qu’il regrette !
Elles ne se prenaient pas corps à corps, s’attaquaient à la figure, les mains ouvertes et crochues, pinçant, griffant ce qu’elles empoignaient. […] En effet, Charlotte, qui est une figure sympathique, charmante dans le livre de M. […] Têterol portait son histoire sur sa figure. […] Tout d’abord cette figure semblait effacée. […] C’était la figure du prêtre catholique.