La Parque toute-puissante m’a fait cette destinée immuable : poursuivre les homicides jusqu’à ce qu’ils soient descendus sous terre. […] Sans doute aussi, elle avait reconnu, dans l’auguste Vierge, le type transfiguré de sa race, la providence de sa destinée. […] Elles règnent avec une suprême puissance sur la destinée des hommes : aux uns, elles accordent les chants d’allégresse, aux autres elles infligent une vie attristée par les larmes… Ces spectres terribles vont, je le vois, être d’un grand secours à ma ville.
Je ne sais ce que le ciel me destine ; mais jamais il n’a versé tant de joie dans mon âme. […] Je leur destine dans mon portefeuille une place avec mes brevets et les témoignages honorables que j’ai reçus de mes chefs dès mon enfance. […] Comme je l’avais faite à mes frais et à crédit, j’ai donc fait trois parts de son bénéfice ; la première a servi à en acquitter les frais, la seconde à payer d’avance ceux d’une seconde édition, et je destine le reste à liquider toutes mes dettes.
… beau défaut de la jeunesse qui ignore la destinée ; à cela près, elle était accomplie. […] Elle ne voulait qu’un cœur ; elle savait se proportionner aux plus humbles conditions de la vie commune, pourvu que l’amour, cette poésie du cœur, ne manquât pas à sa destinée. […] Ce parti ne pouvait pas choisir une personne plus accomplie pour l’un ou l’autre de ces rôles : Diane de Poitiers n’était pas plus belle, madame de Maintenon pas plus supérieure ; mais la jeune fille à qui on destinait leur rôle avait l’innocence qui manquait à l’une, la franchise qui manquait à l’autre.
Le pauvre salue la Mort comme la consolatrice divine ; l’artiste espère par-delà le tombeau l’achèvement de la destinée et un incorruptible avenir ! […] Le vers négligé, mou, le versus pedestris du dix-huitième siècle, qui convient si bien à la muse décrépite de l’abbé Delille et de ses imitateurs, n’est plus de mise dans un poème court destiné à frapper l’esprit des lecteurs par une succession rapide d’images intenses. […] Cette qualité est frappante dès le second morceau, intitulé Bénédiction, où l’auteur présente l’action fécondante du malheur sur la vie du Poète : il naît, et sa mère se désole d’avoir porté ce fruit sauvage, cet enfant si peu semblable aux autres et dont la destinée lui échappe ; il grandit, et sa femme le prend en dérision et en haine ; elle l’insulte, le trompe et le ruine ; mais le Poète, à travers ces misères, continue de marcher vers son idéal, et la pièce se termine par un cantique doux et grave comme un final d’Haydn : Vers le Ciel où son œil voit un trône splendide, Le Poëte serein lève ses bras pieux, Et les vastes éclairs de son esprit lucide Lui dérobent l’aspect des peuples furieux : « — Soyez béni, mon Dieu, qui donnez la souffrance Comme un divin remède à nos impuretés, Et comme la meilleure et la plus pure essence Qui prépare les forts aux saintes voluptés !
Spencer, le besoin d’un plus grand bonheur que les formes de plus en plus complexes de la civilisation seraient destinées à réaliser de plus en plus complètement ? […] Elle n’est pas fondée dans la nature, puisqu’elle est destinée à lui faire violence en l’empêchant de produire ses conséquences anti-sociales. […] Seulement, cette contrainte ne résulte pas d’une machinerie plus ou moins savante, destinée à masquer aux hommes les pièges dans lesquels ils se sont pris eux-mêmes.
Henri IV, qui savait que « le jugement, l’invention, l’ordre et le ménage » étaient des conditions essentielles à un grand maître, songea à Rosny, et le lui dit, en paraissant regretter que, destiné dans un temps très prochain à la direction absolue de ses finances, il ne pût cumuler les deux charges, dont chacune méritait bien un homme tout entier. […] Peu après, le roi lui témoignait qu’il lui destinait l’épée de connétable s’il voulait abjurer et se convertir.
Il a fait de Fabrice un Italien de pur sang, tel qu’il le conçoit, destiné sans vocation à devenir archevêque, bientôt coadjuteur, médiocrement et mollement spirituel, libertin, faible (lâche, on peut dire), courant chaque matin à la chasse du bonheur ou du plaisir, amoureux d’une Marietta, comédienne de campagne, s’affichant avec elle sans honte, sans égards pour lui-même et pour son état, sans délicatesse pour sa famille et pour cette tante qui l’aime trop. […] S’il fallait discuter la vraisemblance de l’action dans le roman, on pourrait se demander comment il se fait que cet accident de grande route ait une si singulière influence sur la destinée future de Fabrice ; on demanderait pourquoi celui-ci, ami (ou qui peut se croire tel) du prince de Parme et de son Premier ministre, coadjuteur et très en crédit dans ce petit État, prend la fuite comme un malfaiteur, parce qu’il lui est arrivé de tuer devant témoins, en se défendant, un comédien de bas étage qui l’a menacé et attaqué le premier.
Daru prescrivait aux intendants sous ses ordres d’envoyer au Jardin des plantes de Paris les catalogues du Jardin de Berlin et des plantes de la Poméranie, avec des échantillons de graines ; il en adressait aussi qui lui avaient été demandés pour le parc de la Malmaison, et, dans une lettre à l’impératrice Joséphine, il terminait cet envoi par des vers gracieux : L’humble ruisseau de Malmaison Roulait paisiblement ses ondes fortunées, Lorsque de belles mains, au sceptre destinées, Prirent soin d’embellir son modeste vallon, etc. […] Daru comme une critique hostile à l’œuvre et au talent de M. de Chateaubriand, mais il faut y voir plutôt une pièce d’analyse exacte, de modération et d’impartialité, un compromis judicieux destiné à ménager l’entrée de l’auteur au sein même de l’Institut.
Il serait difficile de rien extraire ici d’un travail qui s’adresse particulièrement aux gens du métier ; dont tous les articles, développés avec un soin égal, sont destinés à l’application, et où rien n’est donné à l’effet. […] Les habitudes les plus futiles et les plus inutiles ont d’immenses racines dans le passé, et, quoique de prime abord il semble qu’il suffise d’un souffle pour les détruire, elles résistent souvent et aux convulsions des sociétés, et aux efforts d’un grand homme. » Cette opinion personnelle du prince, qu’on vient de voir si formellement exprimée, étant telle et si en accord avec celle de Franklin, il est plus facile encore d’apprécier la haute impartialité que le même prince devenu empereur, et pouvant tout, a apportée dans la solution pratique, et combien il s’est montré l’homme de son nouveau rôle et de sa destinée, publique, lorsque, dans l’œuvre de conciliation, il a laissé faire une si large part à l’opinion opposée.
Il a exprimé en mainte occasion cette sensation diffuse, errante ; il y avait des jours où, dans son amour du calme, il enviait « la vie forte et muette qui règne sous l’écorce des chênes » ; il rêvait à je ne sais quelle métamorphose en arbre ; mais cette destinée de vieillard, cette fin digne de Philémon et de Baucis, et bonne tout au plus pour la sagesse d’un Laprade, jurait avec la sève ardente, impétueuse, d’un jeune cœur. […] Ces deux volumes qu’on donne aujourd’hui le feront vivre ; et par une juste compensation d’une destinée si cruellement tranchée, ce qui est épars, ce qui n’était écrit et noté que pour lui seul, ce qu’il n’a pas eu le temps de tresser et de transformer selon l’art, devient sa plus belle couronne, et qui ne se flétrira point, si je ne m’abuse 3.
Quelques années après, devenu empereur, il avait changé de devise, il était entré résolument dans sa destinée, avec ce mot audacieux qui faisait mentir les colonnes d’Hercule : Plus ultra (c’est-à-dire, passons outre et au-delà) ! […] Les différences de cette fin si digne, si caractérisée, mais si spéciale, si exclusive et si ensevelie, du grand empereur du xvie siècle, les contrastes qu’elle offre avec les destinées de cet autre empereur exposé plus encore que relégué à Sainte-Hélène, y achevant de vivre et s’y dévorant dans les loisirs forcés d’une retraite où les mortifications, certes, ne manquaient pas, mais qui s’éclaire des rayons d’une civilisation supérieure et des lumières d’un génie universel, sont assez sensibles sans que j’y insiste.
Soulié, que, le dimanche, dans la belle saison, on devait conduire les enfants chez leur grand-père pour leur faire prendre l’air des champs : « L’inventaire des objets restés dans la chambre de cette maison, occupée par les époux Poquelin, prouve qu’on trouvait là tout ce qui était nécessaire pour passer une nuit ; on n’y a oublié ni les boules de buis qui servaient sans doute de jouets aux enfants, ni la paire de verges destinée à les corriger. » Ce confort, cette opulence domestique de la maison Poquelin, tenaient en partie à la présence de la femme dans la maison : il est permis de le penser ; du moins, dans le dernier inventaire fait chez Jean Poquelin bien des années après, tout dénote négligence, désordre et abandon ; ce père, en vieillissant, n’était plus le même. […] Il nous montre, dans la vie des comédiens de campagne décrite par Scarron en son fameux Roman, la peinture fidèle de ce que devait être la destinée et la fortune de cette troupe ambulante de Molière ; il se demande s’il n’y a même pas de rapport, de reflet plus direct de l’un de ces groupes comiques à l’autre, et si Scarron, du temps qu’il était au Mans, n’a pas eu l’occasion d’y voir cette troupe de passage des Béjart avec son illustre capitaine.
Voltaire, au chant VII de la Henriade, introduisant le fantôme divin de saint Louis et lui faisant révéler en songe à Henri IV le cours des choses futures et les destinées de sa race, a dit : Regardez dans Denain l’audacieux Villars, Disputant le tonnerre à l’aigle des Césars. […] Mais Berwick, destiné à commander l’armée du Dauphiné, n’était là que provisoirement et pour le cas où on livrerait une nouvelle bataille.