Sans doute elle comptait bien ne pas réussir dans sa demande ; elle se fiait sur un reste d’affection au cœur d’Élisabeth et sur le mépris souverain que cette princesse avait pour son neveu : elle ne se trompait pas et il y eut à cette occasion, et à la suite d’un d’ouble entretien, non pas un retour durable de confiance et d’amitié de l’Impératrice à elle, mais un replâtrage. […] Lorsque je vins en Russie, et les premières années de notre union, pour peu que ce prince eût voulu se rendre supportable, mon cœur aurait été ouvert pour lui ; il n’est pas du tout surnaturel que quand je vis que de tous les objets possibles j’étais celui auquel il prêtait le moins d’attention, précisément parce que j’étais sa femme, je ne trouvai pas cette situation ni agréable ni de mon goût, qu’elle m’ennuyait et peut-être me chagrinait. Ce dernier sentiment, celui du chagrin, je le réprimais infiniment plus que tous les autres ; la fierté de mon âme et sa trempe me rendaient insupportable l’idée d’être malheureuse ; je me disais : “Le bonheur et le malheur est dans le cœur et dans l’âme d’un chacun ; si tu sens du malheur, mets-toi au-dessus de ce malheur, et fais en sorte que ton bonheur ne dépende d’aucun événement.” […] Au reste, cet écrit même doit prouver ce que je dis de mon esprit, de mon cœur et de mon caractère. […] Tout ce qu’on vous dira à la place de ceci ne sera que des propos de pruderie non calqués sur le cœur humain, et personne ne tient son cœur dans sa main, et ne le resserre ou le relâche à poing fermé ou ouvert à volonté. » On ne peut mieux indiquer, par cette digression même presque involontaire et où la femme revient et se trahit, que, tout en cédant volontiers de son côté à la tentation et à l’attrait, elle se prévalait aussi à son tour de cet attrait et de cet ascendant aimable, de sa séduction irrésistible et de sa certitude de plaire, pour se faire, à la Cour et dans tous les rangs, nombre d’amis dévoués, inféodés, résolue à tout pour la servir, et qui, le jour et le moment venus, la firent ce que de tout temps elle avait rêvé d’être, afin de pouvoir ensuite donner sa mesure au monde et marquer son rang dans l’histoire.
Tantôt c’est un persiflage doux et honnête à une jeune coquette très-aimable et très-vaine qui m’appelait son berger dans ses lettres, et qui prétendait à tous les talents et à tous les cœurs ; tantôt ce sont des vers fugitifs sur ce que M. de Voltaire, bienfaiteur de mesdemoiselles Corneille et de Varicour, les a mariées toutes deux, après les avoir célébrées dans ses vers. […] Cette charmante mythologie que le xviie siècle avait défigurée en l’adoptant, et dont le jargon courait les ruelles, il la recompose, il la rajeunit avec un art admirable ; il la fond merveilleusement dans la couleur de ses tableaux, dans ses analyses de cœur, et autant qu’il le faut seulement pour élever les mœurs d’alors à la poésie et à l’idéal. […] » Il est à craindre pour Le Brun que les dissentiments politiques n’aient aigri son cœur, et que l’échafaud d’André ne soit venu ayant la réconciliation. […] j’atteste les Cieux que j’ai voulu le croire, J’ai voulu démentir et mes yeux et l’histoire ; Mais non : il n’est pas vrai que les cœurs excellents Soient les seuls en effet où germent les talents. Un mortel peut toucher une lyre sublime, Et n’avoir qu’un cœur faible, étroit, pusillanime, Inhabile aux vertus qu’il sait si bien chanter, Ne les imiter point et les faire imiter, etc., etc.
Quand on est moraliste et qu’on n’observe que des hommes faits, on court risque de tourner au La Rochefoucauld et au La Bruyère ; si le regard se reporte au contraire sur une jeunesse honnête et chaque jour renouvelée, on garde la fraîcheur du cœur jusque dans la connaissance du fond, la consolation dans les mécomptes, une vue plus juste de la nature morale dans ses ressources et dans son ensemble. […] Sur quoi je me suis informé auprès de lui de choses qui me tiennent à cœur. […] Quittant avec un serrement de cœur sa chère maison de la promenade Saint-Antoine, il alla à Mornex, tiède village du Salève, se préparer à un second voyage de Vichy. […] Si l’auteur a voulu montrer dans ce ministre (et il l’a voulu en effet) combien avec un esprit juste, avec un cœur pur et droit, exercé par la pratique chrétienne, guidé par les inspirations de l’Écriture, et muni d’une vigilance et d’une observation continuelles, on peut se trouver en fin de compte plus avisé que les malicieux, plus habile que les habiles, et véritablement un maître prudent et consommé dans les traverses les plus délicates de la vie comme dans les choses du cœur, il a complètement réussi. […] Sayous, parent et ami de Topffer, et qui l’a si bien connu par l’esprit et par le cœur.
À plusieurs époques de notre révolution, les sophismes les plus révoltants remplissaient seuls de certains discours ; les phrases de parti, que répétaient à l’envi les orateurs, fatiguaient les oreilles et flétrissaient les cœurs. […] L’éloquence ne peut se composer que d’idées morales et de sentiments vertueux : et dans quels cœurs retentiraient maintenant des paroles généreuses ? […] Quand on se rappelle les visages froids et composés que l’on rencontre dans le monde, j’en conviens, on croit impossible de remuer les cœurs ; mais la plupart des hommes connus sont engagés par leurs actions passées, par leurs intérêts, par leurs relations politiques. […] Un très petit nombre d’hommes se vouait, chez les anciens, à cette morale stoïcienne qui réprimait tous les mouvements du cœur : la philosophie des modernes, quoiqu’elle agisse plus sur l’esprit que sur le caractère, n’est qu’une manière de considérer tous les objets de la vie. […] Ce sentiment de mélancolie que chaque siècle doit développer de plus en plus dans le cœur humain, peut donner à l’éloquence un très grand caractère.
Dans son cœur ? […] Presque tous les héros des romans écrits par ce chrétien sont des athées, et qui ont du génie — et de grands cœurs. […] Mais Veuillot était, je crois, « humble de cœur » malgré tout, et il y avait chez lui des coins de tendresse. […] — Pendant la Terreur, l’abbé Reniant, prêtre défroqué, jette aux cochons des hosties consacrées : ces hosties avaient été confiées par des prêtres à une pauvre sainte fille qui les portait « entre ses tétons » — Le major Ydow, quand il découvre que sa femme Pudica n’était qu’une courtisane, brise l’urne de cristal où il gardait le cœur de l’enfant mort qu’il avait cru son fils, et lui jette à la tête ce cœur qu’elle lui renvoie comme une balle. « C’est la première fois certainement que si hideuse chose se soit vue ! un père et une mère se souffletant tour à tour le visage avec le cœur mort de leur enfant » (A un dîner d’athées) Le duc de Sierra-Leone, ayant soupçonné don Esteban d’être l’amant de la duchesse, le fait étrangler par ses nègres, puis lui arrache le cœur et le donne à manger à ses chiens.
Il a beau écrire Diamant du cœur, pour dire une larme et vouloir pétrifier tous ses pleurs pour en faire jaillir un rayon plus vif, dans son amour de l’étincelle, l’émotion est plus forte que sa volonté. […] Nous voulons écrire aux murs de ta tombe, Que ton clair génie eut aussi du cœur. […] Et dans ton cœur vibrant sous d’augustes présages Tu lui bâtis d’avance un palais enchanté ! […] Sa parole de marbre et d’or avait le son Des clairons de l’été chassant les jours moroses ; Comme en Thrace Apollon banni des grands cieux roses, Il regardait du cœur l’Olympe, sa maison. […] Être accusé de manquer de cœur est le sort commun de tous les artistes non effrontés, qui ne font pas de leur cœur métier et marchandise, et qui ne l’accommodent pas en mélodie pour piano ; peut-être faut-il qu’on soit resté simple et instinctif pour deviner l’être aimant et divinement tendre, en lisant le Triomphe de Pétrarque et l’héroïque Thermodon ; mais il me semble difficile que le premier venu puisse lire sans pleurer les strophes émues et déchirantes inspirées à Théophile Gautier par la mort de sa mère.
Simple et immense, paisiblement irrésistible, il lui a été donné d’unir la profusion des peintures naturelles, l’esprit d’élévation des spiritualistes fervents et l’ensemble des vérités en dépôt au fond des moindres cœurs. […] Au centre de ce ravissant mélange de cantiques et d’élégies rassemblés, le Lac, argenté par la lune, se dessinait dans son contour harmonieux, site unique entre tous ceux du monde poétique, chef-d’œuvre d’art et de cœur qui ne sera jamais surpassé. […] C’était, pour ainsi dire, la respiration même du poète suspendue ou précipitée par ses souffrances ou ses joies, c’étaient les propres battements de son cœur ralenties ou hâtées par elles, qui, spontanément, scandaient et divisaient son vers. […] Doué de tous les dons souverains, — beauté, poésie, éloquence, courage, sens profond de l’avenir, et, au-dessus du génie, la bonté, ce génie du cœur, — Lamartine est un des plus nobles êtres qui aient paru sous le ciel de France. […] Delà ce chant qui est la voix du cœur qui médite, un chant où tout se dispose pour la complète libération de l’âme, un chant où les émotions allégées semblent venir du fond d’un rêve.
Le bonheur, dont il est un enfant gâté, veut que la jeune fille qui lui a donné son cœur soit armée d’une volonté inflexible et résolue à l’épouser de par le Code, lorsque l’heure de sa majorité sonnera. […] Elles n’ont plus la verve d’enfer qui possédait les jolies diablesses de jadis, ni leur folie de gaspillage, ni les élans de cœur ou de sens qui les arrachaient parfois à l’amour vénal. […] André ne s’est pas récrié, quoique cette déclaration imprévue l’ait atteint au cœur : il aime Hélène, il allait demander sa main. […] Mais, dès sa première entrevue avec la jeune fille, Hélène lui a fait entendre qu’il était le fiancé de son cœur, l’époux de son choix. […] Elle professe sa perversité, elle la rédige et elle la démontre ; elle pratique, sur elle-même, l’autopsie de la femme sans cœur.
., Auteur qui a eu le courage de publier un Livre intitulé Tableau de l'Esprit & du Cœur, où il proscrit les conversations instructives & les Ouvrages agréables, en disant, avec un grand jugement, que l'utile est fait pour la plume, l'agréable pour la langue. […] Quand on sait faire ainsi le Tableau du Cœur & de l'Esprit, le cœur, ou tout au moins l'esprit de l'Auteur, & l'Auteur lui-même, ne doivent-ils pas se cacher bien loin derriere le Tableau ?
Le froissement des couvertures, le bruissement d’un insecte, les battements de son cœur, tout lui crie : Assassin ! […] Quand vous achevez le Père Goriot, vous avez le cœur brisé par les tortures de cette agonie ; mais l’étonnante invention, l’accumulation des faits, l’abondance des idées générales, la force de l’analyse, vous transportent dans le monde de la science, et votre sympathie douloureuse se calme au spectacle de cette physiologie du cœur. […] Son cœur est là-haut, dans le ciel où il a vu briller une étoile. […] Il sera impossible de l’écouter sans avoir le cœur attendri. […] Désespéré dans le cœur, dévoré par l’insulte, par la conscience de sa défaite, par l’idée de la risée publique, il reste aussi ferme, aussi hautain, aussi calme qu’il fut jamais.
Les moyens d’aller nu cœur ne se ressemblent pas tous. […] Si ses yeux regardent au ciel, son oreille écoute les cœurs. […] Chateaubriand regarda au fond de ce cœur, comme il avait regardé au fond du cœur de toutes ses victimes. […] Le cœur autrefois n’était pas atteint ; aujourd’hui ce sont les sens qui étouffent le cœur. […] C’est par le cœur qu’il faut relever celles dont on pervertit le cœur ; c’est par la littérature qu’il faut combattre l’influence de la littérature.
Est-ce donc qu’Amour a tiré de trois arcs, comme pour blesser, non pas un seul cœur en moi, mais trois cœurs ? […] A quoi te livres-tu, mon Cœur ? […] La petite Timo dura peu de temps, à ce qu’il semble, et ne lui tint guère au cœur ; elle vieillit vite, et il se vengea ou de ses rigueurs, ou plutôt de ses infidélités avec le beau Diodore, par une manière d’épode sanglante, digne d’Archiloque ou d’Horace à Canidie : il la compare pièce pour pièce à un vaisseau qui ne peut plus soutenir la mer. […] Ce n’est point cette fois par ses flèches, ce n’est pas même par son flambeau qu’Amour lui a mis la flamme au cœur : il a suffi d’une toute petite étincelle. […] Ce n’est pas seulement parce qu’il joue sur les noms de ses maîtresses, parce qu’étant un jour amoureux d’une certaine Tryphéra, il dit qu’elle est une Scylla, à peu près comme si mademoiselle de Scudery disait que la princesse de Tendre a un cœur de roche 133 ; il ne s’en tient pas à ces gentillesses : il est telle épigramme sur Héliodora où il nous montre Amour et elle jouant à la paume avec son cœur, et il la supplie de ne pas le laisser tomber, mais de se prêter au jeu et de renvoyer la balle.
Elle croyait honorer encore ceux qu’elle avait aimés, et dont elle se voyait privée, en cultivant dans un âge avancé les facultés de son cœur. […] Les réflexions graves lui vinrent avant l’âge, et sa maturité data du cœur même de sa jeunesse. […] Pourquoi faut-il que tous les arrangements de la société s’accordent pour troubler les jouissances du cœur ? […] On voit une personne qui connaît le cœur, qui possède à fond la réalité des cours, et qui ne dit pas tout. […] Si intelligente qu’elle soit, son meilleur lot est encore de comprendre toutes les idées par le cœur.