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671. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XXV. Mme Clarisse Bader »

La première condition de l’Histoire, l’exigible avant toutes les autres, c’est la nouveauté, — c’est d’apprendre aux hommes quelque chose qu’ils ne savaient pas, — ou du moins de leur montrer, dans ce qu’ils savent, ce qu’ils n’avaient pas vu. […] Tel est l’essentiel reproche qu’on peut faire à cette érudite, qui entasse texte sur texte et noms propres sur noms propres pour ne nous apprendre, en définitive, que ce que nous savions, avant qu’elle prit la peine d’écrire.

672. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « La Chine »

que cette histoire dépasserait en renseignements et en aperçus les autres histoires insuffisantes, et que nous apprendrions quelque chose de nouveau sur ce peuple étrange, qui, du fond de sa gravité imperturbable, a l’air de se moquer de nous. […] Sera-ce le Chinois, le Chinois, le plus faible de tous les peuples, qui se multiplie par la polygamie et se consomme par l’infanticide ; dont les troupes innombrables n’ont pu résister, même avec de l’artillerie, à quelques hordes armées de flèches ; qui, même avec l’imprimerie et quatre-vingt mille caractères, n’a pas su encore se faire une langue que l’étranger puisse apprendre ; qui, avec quelques connaissances de nos arts et la vue habituelle de notre industrie, n’a pas fait un pas hors du cercle étroit d’une routine de plusieurs mille ans… peuple endormi dans l’ombre de la mort, cupide, vil, corrompu, et d’un esprit si tardif qu’un célèbre missionnaire écrivait qu’un Chinois n’était pas capable de suivre dans un mois ce qu’un Français pourrait lui dire dans une heure.

673. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Louis Vian » pp. 373-387

Coutume sublime, qui n’était pas particulière à la maison de Montesquieu, mais qui était la coutume des anciennes maisons chrétiennes d’un pays qui aimait les pauvres comme Jésus-Christ lui-même, et qui, en donnant un pauvre pour parrain à leurs enfants, croyaient leur donner Jésus-Christ Ainsi, nous apprend Louis Vian (qui nous apprend bien d’autres choses encore, dans cette biographie étincelante de mille détails neufs), fut baptisé Montaigne, le comte de Beauvais et Buffon.

674. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Jacques Cœur et Charles VII »

« J’aime mieux — disait madame de Staël — qu’on m’apprenne tout simplement la couleur de la voiture de monsieur un tel, que de me débiter solennellement des généralités sans puissance. » Madame de Staël avait raison. […] Elle fait plus penser qu’elle n’apprend les faits.

675. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Michelet » pp. 259-274

., et que je soupçonne, au style, d’être de madame Michelet, nous apprend que ce livre posthume n’est que le fragment d’un livre plus grand dans la conception de son auteur. […] Fils de l’exécrable xviiie  siècle, ils devaient ignorer profondément le Christianisme, si même on ne leur avait pas appris à le haïr et à le mépriser.

676. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Émile de Girardin » pp. 45-61

Vous vous rappelez ces gentilshommes dont Molière s’est moqué et qui disaient « savoir tout sans avoir rien appris » ? […] Jourdain, fatigué de n’être qu’un mamamouchi turc, voulût être un mamamouchi littéraire, et qu’il se fît laver et racler une comédie par le professeur de rhétorique qui lui apprenait l’orthographe, vous auriez quelque chose d’assez semblable à la comédie de Μ. de Girardin.

677. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Horace Walpole »

Les spectacles que lui avait donnés Robert-le-Diable, son père, lui avaient appris à les mépriser. […] Crébillon le fils est démodé. » Lui encore, qui avait appris ce qu’il savait de français dans les adorables Mémoires du comte de Grammont, édités d’admiration par lui, il se demande où, dans l’empâtement philosophique universel, s’en était allée la délicieuse et ancienne vivacité française, cette furie qui gagnait les batailles de l’esprit comme les autres !

678. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Funck Brentano. Les Sophistes grecs et les Sophistes contemporains » pp. 401-416

… Je ne sais rien de lui, sinon qu’il est professeur, comme il nous l’apprend, du reste, dans le titre même de son livre, et qu’il a, malgré son nom allemand, la précision française du langage, et un mépris très français aussi pour les idées allemandes… Il range, en effet, Kant et Hégel — mais trop en passant, il est vrai, — parmi les sophistes dont il écrit l’histoire. […] Chez Zénon, nous apprend M. 

679. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Dargaud »

Il faut que les artistes comme lui l’apprennent et le sachent. […] Après Shakespeare, dont la religion est inconnue, — qui adorait peut-être Saturne, — on ne sait, — indifférent à tout comme Goethe ; après Shakespeare et Goethe, ces aruspices qui ont fouillé les entrailles de la victime humaine aussi loin que le couteau pouvait aller, il n’y a plus réellement que le catholicisme qui puisse nous apprendre quelque chose sur le cœur de l’homme.

680. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Edgar Quinet. L’Enchanteur Merlin »

Quinet apprit ainsi qu’il ne l’était pas. […] Quinet est un Rabelais, mais un Rabelais contrefaçon, que le sérieux trahit, et qui n’apprendra jamais à rire.

681. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « André Chénier »

On ouvre en vain la poule aux œufs d’or, on n’apprend pas comment se forment ces œufs d’or, dans le mystère de ses entrailles ! […] Mais, pour nous qui ne croyons pas à la thèse de ce pauvre Henri Heine, malade pour son compte bien avant de mourir, que tout homme de génie est nécessairement malade, nous n’avons rien à dire quand on nous apprend que Chénier le fut toute sa vie, sinon que nous en sommes fâché et voilà tout !

682. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXI. De Mascaron et de Bossuet. »

On dirait qu’ils apprennent cette vérité pour la première fois, car tout ce qu’on sent fortement est une espèce de découverte pour l’âme. […] Au lieu de déplorer la mort des autres, grand prince, dorénavant je veux apprendre de vous à rendre la mienne sainte.

683. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXVI. Des éloges académiques ; des éloges des savants, par M. de Fontenelle, et de quelques autres. »

Les premiers regardent ces éloges comme une justice rendue à des citoyens utiles, ou qui ont voulu l’être ; comme une manière de plus d’honorer les arts ; comme un tribut de l’amitié entre les hommes qui ont été unis par le désir de s’instruire ; comme des matériaux pour l’histoire de l’esprit humain ; enfin, comme un encouragement et une leçon qui apprennent aux citoyens de toutes les classes que le mérite peut quelquefois tenir lieu de fortune et attirer aussi le respect. […] Tous les objets dont on s’y occupe sont grands, et en même temps sont utiles ; c’est l’empire des connaissances humaines ; c’est là que vous voyez paraître tour à tour la géométrie qui analyse les grandeurs, et ouvre à la physique les portes de la nature ; l’algèbre, espèce de langue qui représente, par un signe, une suite innombrable de pensées, espèce de guide, qui marche un bandeau sur les yeux, et qui, à travers les nuages, poursuit et atteint ce qu’il ne connaît pas ; l’astronomie, qui mesure le soleil, compte les mondes, et de cent soixante-cinq millions de lieues, tire des lignes de communication avec l’homme ; la géographie, qui connaît la terre par les cieux ; la navigation, qui demande sa route aux satellites de Jupiter, et que ces astres guident en s’éclipsant ; la manœuvre, qui, par le calcul des résistances et des forces, apprend à marcher sur les mers ; la science des eaux, qui mesure, sépare, unit, fait voyager, fait monter, fait descendre les fleuves, et les travaille, pour ainsi dire, de la main de l’homme ; le génie qui sert dans les combats ; la mécanique qui multiplie les forces par le mouvement, et les arts par l’industrie, et sous des mains stupides crée des prodiges ; l’optique qui donne à l’homme un nouveau sens, comme la mécanique lui donne de nouveaux bras ; enfin les sciences qui s’occupent uniquement de notre conservation ; l’anatomie par l’étude des corps organisés et sensibles ; la botanique par celle des végétaux ; la chimie par la décomposition des liqueurs, des minéraux et des plantes ; et la science, aussi dangereuse que sublime, qui naît des trois ensemble, et qui applique leurs lumières réunies aux maux physiques qui nous désolent.

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