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639. (1868) Curiosités esthétiques « V. Salon de 1859 » pp. 245-358

Tels nous apparurent, il y a quatorze ans à peu près, ces sauvages du Nord-Amérique, conduits par le peintre Catlin, qui, même dans leur état de déchéance, nous faisaient rêver à l’art de Phidias et aux grandeurs homériques. […] Liès a cerclé de noir, non seulement le contour général de ses figures, mais encore toutes les parties de leur accoutrement, si bien que chacun des personnages apparaît comme un morceau de vitrail monté sur une armature de plomb. […] Enfin, quel que soit le moyen le plus visiblement employé par l’artiste, que cet artiste soit Holbein, David, Velasquez ou Lawrence, un bon portrait m’apparaît toujours comme une biographie dramatisée, ou plutôt comme le drame naturel inhérent à tout homme. […] Çà et là, de loin en loin, apparaît la trace d’une protestation, un talent libre et grand qui n’est plus dans le goût du siècle. […] Nous le voyons apparaître au moyen âge, se comportant et s’étalant avec toute la maladresse cynique et toute la superbe de l’idée sans art.

640. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Horace Vernet (suite.) »

Lui, il transporte sur la toile la chose comme elle est, comme elle lui apparaît sous un prompt coup d’œil, sans y rien changer. […] C’est ainsi qu’ils doivent apparaître dans les portraits de haut style, peints de souvenir plutôt que d’après la réalité.

641. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Théophile Gautier. »

C’est une suite d’évocations lugubres, après une promenade au cimetière le jour des Morts ; tour à tour Raphaël, Faust, Don Juan, Napoléon lui-même, apparaissent aux yeux du poète qui demande à la vie et à la tombe son secret ; nul de ces grands revenants ne le sait, chacun renvoie à l’autre. […] Toujours, au milieu du festin, au sein de l’ivresse, et quand le poète enflammé exhalera l’ardeur de ses chants entre les bras de Théone ou de Cinthie, la Mort se lèvera tout à coup et apparaîtra devant ses yeux, non la Mort des anciens dont l’idée ne faisait qu’aiguiser plutôt et raviver le sentiment du plaisir, mais la Mort de la Danse macabre, avec son ricanement féroce, et qui vous met et vous laisse au cœur une certaine petite crainte a l’Hamlet que la nuit funèbre ne soit pas le long sommeil, mais le rêve, et que tout ne soit pas fini après la vie : La mort ne serait plus le remède suprême ; L’homme, contre le sort, dans la tombe elle-même   N’aurait pas de recours, Et l’on ne pourrait plus se consoler de vivre, Par l’espoir tant fêté du calme qui doit suivre   L’orage de nos jours !

642. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Le comte de Ségur »

. — Au dîner qui suivit, le front de Sémiramis apparut tout chargé de nuages et silencieux ; vers la fin, s’adressant au jeune ambassadeur, elle lui fit entendre que ses goûts brillants le rappelaient dans la capitale, et qu’il devait supporter impatiemment les ennuis de cette retraite monotone. […] M. de Ségur se délassait de ces travaux sévères par des morceaux plus courts, par des Essais d’observation et de causerie qui, insérés d’abord dans plusieurs journaux, ont été recueillis sous le titre de Galerie morale et politique (1817-1823)  : cet ouvrage, où l’auteur apparaît aussi peu que possible et où l’homme se découvre au naturel, était aussi celui des siens qu’il préférait.

643. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXVe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins (6e partie) » pp. 129-176

Critique de l’Histoire des Girondins (6e partie) I Le personnage vraiment historique, mais froid et déclamatoire, de madame Roland, m’apparaît sous un aspect plus juste à l’heure de sa mort. […] ” En parlant ainsi et en s’efforçant de gesticuler des épaules et de rompre ses liens, il avait tellement déchiré son habit et sa chemise que son buste grêle et osseux apparaissait presque nu au-dessus de la charrette.

644. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre I. Renaissance et Réforme avant 1535 — Chapitre II. Clément Marot »

À Alençon, à Bourges, à Nérac, à Pau, dans toutes ses résidences, en voyage même, elle n’apparaît qu’entourée de poètes et de savants, qui sont ses valets de chambre, ses secrétaires, ses protégés et comme ses nourrissons. […] Sa protection qui ne tombait pas de haut, et froidement, était une tendresse soucieuse où son cœur, non pas seulement sa puissance, apparaissait.

645. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Octave Feuillet »

Octave Feuillet apparaissent alors comme de ravissants mensonges, et peut-être comme les plus gracieux qu’on ait imaginés en ce siècle pour bercer les âmes jeunes et enchanter les esprits innocents. […] Feuillet a voulu marquer dès le début que cette Locuste n’est qu’une darwiniste pratique, quelque chose comme un Lebiez en jupons : la première fois qu’elle apparaît à Vaudricourt, c’est en chasseresse braconnant sur les terres d’autrui et pénétrée des droits que lui confère la grande loi de la « lutte pour la vie ».

646. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « La jeunesse du grand Condé d’après M. le duc d’Aumale »

L’inutilité de la vie nous apparaît plus aisément, à nous qui, si nous représentons quelque chose, le représentons avec des millions d’autres êtres. […] Dès la première rencontre, il se bat éperdument. « Après avoir tiré à bout portant ses deux pistolets, il désarme de sa main et fait prisonnier un capitaine de cuirassiers de l’empereur. » Nous savons par les témoignages des contemporains qu’il donnait toujours de sa personne dans la mêlée, que le combat l’enivrait et le transfigurait, et qu’il apparaissait alors, les yeux flamboyants, tout rouge de sang, « pareil au dieu Mars ».

647. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre quatrième »

Depuis que l’ode a franchi les limites que lui trace l’Art poétique, et qu’elle nous est apparue non comme le seul genre « ou le poète soit poète de profession36 », mais comme celui où il est le plus poète d’inspiration, J. […] Cependant, pour inventer, à la fin du dix-huitième siècle, parmi tous ces fades jeux d’esprit où achevait de s’énerver et de se perdre l’art des vers, une poésie jeune, fraîche, parfumée, qui nous transporte au milieu de vrais champs et nous ramène en nous-mêmes ; pour faire apparaître, parmi toutes ces fleurs de papier peint, un si charmant bouquet de fleurs naturelles, il fallait plus que les grands sentiments d’André Chénier, plus que sa raison supérieure ; il fallait ce qui peut s’appeler du même nom en religion et en poésie, il fallait la grâce.

648. (1911) La valeur de la science « Première partie : Les sciences mathématiques — Chapitre III. La notion d’espace. »

Les uns et les autres m’apparaissent sous forme de sensations musculaires. […] Deux sensations de même couleur affectant deux parties différentes de la rétine m’apparaîtraient comme qualitativement distinctes, au même titre que deux sensations de couleur différente.

649. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « V »

Toutefois entendons-nous : si, d’une part, la seule Science ne peut produire que d’habiles amateurs, — grands détrousseurs de « procédés », de mouvements et d’expressions, — consommés, plus ou moins, dans la facture de leurs mosaïques, — et, aussi, d’éhontés démarqueurs, s’assimilant, pour donner le change, ces milliers de disparates étincelles qui, au ressortir du néant éclairé de ces esprits, n’apparaissent plus qu’éteintes, — d’autre part, la foi, seule, ne peut produire et proférer que des cris sublimes qui, faute de se concevoir eux-mêmes, ne sembleront au vulgaire, hélas, que d’incohérentes clameurs : — il faut donc à l’Artiste-véritable. à celui qui crée, unit et transfigure, ces deux indissolubles dons : la Science et la Foi. — Pour moi, puisque vous m’interrogez, sachez qu’avant tout je suis chrétien, et que les accents qui vous impressionnent en mon œuvre ne sont inspirés et créés, en principe, que de cela seul. […] La septième affiche apparaît le mardi 3 mai seulement, pour annoncer la représentation.

650. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « La duchesse du Maine. » pp. 206-228

La duchesse du Maine en était une, et des plus singulières : elle mérite d’être étudiée, elle et son existence princière, dans sa petite cour de Sceaux, où elle nous apparaît comme une des productions extrêmes et les plus bizarres du règne de Louis XIV, du régime monarchique poussé à l’excès. […] Tel défaut qui, dans le chef, était balancé et tenu en échec par une haute qualité, se démasque tout à coup chez les descendants, et apparaît hors de mesure.

651. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Madame Émile de Girardin. (Poésies. — Élégies. — Napoline. — Cléopâtre. — Lettres parisiennes, etc., etc.) » pp. 384-406

La jeune fille, aussi blonde que sa mère était brune, n’était pas moins belle, de cette beauté qui apparaît d’abord et qu’on ne s’aviserait pas plus de contester qu’on ne conteste le soleil. […] Il y a en Mme de Girardin un homme de beaucoup d’esprit (celui qui sera le vicomte de Launay), et qui a tué le poète ; tué, non, car le poète apparaît encore parfois avec son masque, sa cuirasse, son casque de Clorinde, son escrime habile, aisée et large de jeu, ses poussées de beaux vers dans la tirade, et comme ses éclairs dans la mêlée ; mais tout cet appareil et cette mise en scène ne sauraient imposer à ceux qui ont une fois connu ce que c’est que la poésie véritable.

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