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407. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre IX et dernier. Conclusion » pp. 586-601

Il vaudrait mieux rendre plus profond encore l’abîme qui sépare le vice de la vertu, réunir l’amour des lumières à celui de la morale, attirer à elle tout ce qu’il y a d’élevé parmi les hommes, afin de livrer le crime à tous les genres de honte, d’ignorance et d’avilissement ; mais, quelle que soit l’opinion qu’on ait adoptée sur ces conquêtes du temps, sur cet empire indéfini de la raison, il me semble qu’il est un argument qui convient également à toutes les manières de voir. […] Si vous inspirez à tous l’amour de la guerre, peut-être ferez-vous renaître le mépris de la pensée ; mais tous les maux de la féodalité pèseront sur vous. […] La valeur guerrière, cette qualité qui produit toujours un enthousiasme nouveau, cette qualité qui réunit tout ce qui peut frapper l’imagination, enivrer l’âme, la valeur guerrière que vous appelez à l’aide du despotisme, inspire l’amour de la gloire, et l’amour de la gloire devient bientôt le plus terrible ennemi de ce despotisme. […] Oui, tout est moralité dans les sources de l’enthousiasme ; le courage militaire, c’est le sacrifice de soi ; l’amour de la gloire, c’est le besoin exalté de l’estime ; l’exercice des hautes facultés de l’esprit, c’est le bonheur des hommes qu’il a pour but ; car on ne trouve que dans le bien un espace suffisant pour la pensée. […] à chaque page de ce livre où reparaissait cet amour de la philosophie et de la liberté, que n’ont encore étouffé dans mon cœur ni ses ennemis, ni ses amis, je redoutais sans cesse qu’une injuste et perfide interprétation ne me représentât comme indifférente aux crimes que je déteste, aux malheurs que j’ai secourus de toute la puissance que peut avoir encore l’esprit sans adresse, et l’âme sans déguisement.

408. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « L’abbé Maynard »

Çà et là, il est vrai, saint Vincent de Paul avait eu parmi les écrivains religieux, plus ou moins touchés de ses vertus, les panégyristes de l’admiration et de l’amour. […] Mais, puisqu’il faut se rabattre à la critique littéraire, disons que c’était presque une honte pour la littérature française que d’avoir de si magnifiques récits à mettre en œuvre sans une main qui fût attirée par ces magnificences et qui les plaçât dans la lumière, par amour seul de leur beauté. […] Il a l’amour de l’humilité, qui n’est pas la naïveté de la vertu, mais qui en est la simplicité, achetée souvent bien cher. […] Langue sans nom d’humilité volontaire, que Vincent, ce grand artiste en abaissements, s’était faite, et dont il nous a donné toute la rhétorique dans un seul précepte ravissant : « Entre deux expressions, — disait-il, — retenez toujours la plus brillante pour en faire un sacrifice à Dieu dans le fond de votre cœur, et n’employez que celle-là qui, moins belle, ne plaît pas tant, mais édifie. » L’humilité est, je crois, en effet, le caractère de sainteté de Vincent de Paul encore plus que l’amour ; personne, même parmi les saints, n’a eu cette soif de bassesse ; personne n’a dit comme cet homme : « Donnez-moi encore ce verre de mépris !  […] La grande sainte Thérèse elle-même, la carmélite brûlante, la fondatrice de tant de couvents, a autant d’amour que Vincent, mais n’a pas son humilité.

409. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Auguste Barbier »

S’il ne grandit point dans l’Art, puisque j’ai dit que dès le premier coup il y fut complet, comme dans la gloire, il s’y féconda et il publia successivement ces merveilles : Le Lion, L’Émeute, La Popularité, Melpomène, Le Rire, Desperatio, Les Victimes, Terpsychore, L’Amour de la mort, La Reine du monde, La Machine, Le Progrès et L’Idole, L’Idole, qui, dans la préférence que l’on donne à des beautés égales, me semble ce qu’il y a de plus beau. […] Par respect pour les égarements d’un talent immense, je me tus sur ces incroyables Odelettes, quoiqu’elles m’inquiétassent pour l’avenir du poète ; car si je conçois jusqu’à un certain point qu’Hercule, imbécillisé par l’amour, file aux genoux d’Omphale, je ne le conçois plus si, en filant, il ne casse pas tous ses fuseaux. […]                            Oui, je le crois, l’amour, L’amour vrai ne sera jamais l’amour d’un jour. […] ………………………………………………………… Car en ce brillant monde à quoi bon (sic) est la vie, Si l’amour n’y peut point contenter son envie ?

410. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Madame Sand et Paul de Musset » pp. 63-77

…), une chose effroyable dont personne de nous ne se doutait : c’est que le roman de madame Sand, le malheureux Alfred le prévoyait… qu’il l’avait porté toute sa vie sur son cœur, comme une arme qu’on ne devait décharger contre sa mémoire que quand il ne serait plus là pour tirer à son tour et rendre le coup… Mais si cela fut, et si l’opinion présente accepte une telle assertion comme tout le reste, ce n’est pas qu’il y ait dans le livre de madame Sand de ces pages, belles d’outrance, qui ajoutent par l’intensité du ressentiment ou l’atrocité de la haine — de cette haine après l’amour qui est peut-être de l’amour encore !  […] En effet, Laurent est un poète, comme Sténio, qui, disait-on, était déjà un portrait ; débauché comme Sténio, amoureux comme Sténio, bien plus de l’émotion de l’amour que de la femme aimée, recherchant cette émotion moins pour l’éprouver que pour la peindre, contradictoire comme un enfant et comme tant de génies, lorsque la religion, qui fait seule l’harmonie et l’ordre dans ces têtes sublimes et troublées, n’y verse pas la paix féconde et la lumière ! […] C’est toujours la morale de tous ses livres, à elle, et de ceux de son père, qui dit « toi et moi » comme s’il n’y avait dans le monde que des amants et des maîtresses, et que l’amour supprimât du même coup la société et Dieu ! C’est toujours, enfin, cet amour maternel — sans sacrement, bien entendu !  […] C’est ainsi que l’enfant vrai peut arracher du cœur de Thérèse, de ce cœur enragé ou plutôt dépravé par des besoins de maternité insatiables, l’amour faux de ce faux enfant d’amant, qu’elle s’obstine, jusqu’au dernier moment du livre, à traiter avec la lâcheté sublime que les mères ont parfois pour leurs fils !

411. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Deux romans scandaleux » pp. 239-251

…), une chose effroyable dont personne de nous ne se doutait, c’est que le roman actuel de Mme Sand, le malheureux Alfred le prévoyait… qu’il l’avait porté toute sa vie sur son cœur comme une arme qu’on ne devait décharger contre sa mémoire que quand il ne serait plus là pour tirer à son tour et rendre le coup… Mais si cela fut, et si l’opinion présente accepte une telle assertion, comme tout le reste, ce n’est pas qu’il y ait dans le livre de Mme Sand de ces pages, belles d’outrance, qui ajoutent par l’intensité du ressentiment ou l’atrocité de la haine, — de cette haine, après l’amour, qui est peut-être de l’amour encore, — au poids accablant de la formidable déclaration de M.  […] En effet, Laurent est un poète, comme Sténio qui, disait-on, était déjà un portrait, débauché comme Sténio, amoureux comme Sténio, bien plus de l’émotion de l’amour que de la femme aimée, recherchant cette émotion moins pour l’éprouver que pour la peindre, contradictoire comme un enfant et comme tant de génies, lorsque la religion, qui fait seule l’harmonie et l’ordre dans ces têtes sublimes et troublées, n’y verse pas la paix féconde et la lumière ! […] C’est toujours la morale de tous ses livres à elle et de ceux de son père, qui dit «  toi et moi », comme s’il n’y avait dans le monde que des amants et des maîtresses, et que l’amour supprimât du même coup la société et Dieu ! C’est toujours enfin cet amour maternel, — sans sacrement, bien entendu, — qui ressemble monstrueusement à l’inceste, puisque celle qui l’éprouve ne l’éprouve que pour devenir la maîtresse de celui qu’elle ose appeler son enfant ! […] C’est ainsi que l’enfant vrai peut arracher du cœur de Thérèse, de ce cœur enragé ou plutôt dépravé par des besoins de maternité insatiables, l’amour faux de ce faux enfant d’amant, qu’elle s’obstine, jusqu’au dernier moment du livre, à traiter avec la lâcheté sublime que les mères ont parfois pour leurs fils !

412. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLVIIIe entretien. Littérature latine. Horace (2e partie) » pp. 411-480

Ses odes, ce sont ses amours ; ses satires, ce sont ses anecdotes ; ses épîtres, ce sont ses amitiés. […] Si vous lisez cela en latin, chacun de ces vers est une flèche empennée à pointe de diamant tombée du carquois d’un Amour ou d’une Diane des bois sacrés de Castalie. […] Sa corde, ordinairement molle et tendre, devenait d’airain quand il voulait parler à la patrie, au lieu de roucouler pour ses amours ou de badiner pour ses amis. […] Puis tout à coup, à la dernière strophe de l’ode, il renverse le trépied comme indigne de s’y asseoir, et il revient à ses amours et à ses badinages. […] Elles m’ont, dis-je, ravi les joies, les amours, les festins, les plaisirs du jeu, et maintenant elles se préparent à m’enlever même la poésie.

413. (1895) Impressions de théâtre. Huitième série

Ignorez-vous la nature de l’amour ? […] quel étrange amour ! […] Nous avons pour la pudeur un amour plein d’impureté. […] Ils se redisent leur amour, si tristement ! […] Mayer réplique par l’annonce d’un monde que l’amour aura renouvelé.

414. (1895) Les mercredis d’un critique, 1894 pp. 3-382

moi dont la vie ne fut toujours qu’un douloureux sanglot jeté vers l’inconnu du grand amour !  […] « Sans doute, pour des années, je retombai dans la torpeur de l’enfance dont l’amour m’avait fait sortir. […] « Et comme on suppose que l’amour paternel n’est pas assez puissant pour réveiller le mort, on évoque, l’amour charnel. […] Des amours, des haines, drames burlesques, farces sinistres. […] René Bazin vient de publier sous ce titre : Humble amour, il en est deux, deux récits bretons, qui m’ont particulièrement frappé.

415. (1927) Approximations. Deuxième série

Elle murmurait : « Pars, mon amour, pars vite !  […] Que demandait-il à l’amour ? […] » ainsi se peint François, en arrêt devant l’amour de Marthe. […] Car en cette âme — provisoirement désaffectée — si l’amour jette une flamme si vive, c’est que l’amour lui est alors un absolu, qu’Aimée lui tient lieu de Dieu, — oh ! […] Quel amour difficile !

416. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre septième »

Il connut cette passion qui développe le cœur, et qui tire l’homme de lui-même par la séduction du plus grand amour de soi. […] A aucune époque l’amour n’a été mieux peint, ni sous des traits plus nobles et plus touchants. […] Là aussi l’amour est sérieux : il est violent, il est combattu. Dans les pièces où le devoir succombe, l’amour est à la fois malheureux et criminel ; dans celles où le devoir l’emporte, l’amour est encore malheureux, quoiqu’il soit innocent. […] Il restait à créer des rôles de femmes pour personnifier tous ces aspects et toutes ces nuances de l’amour.

417. (1900) Quarante ans de théâtre. [II]. Molière et la comédie classique pp. 3-392

Il les a menées à bien pour l’amour de la vérité. […] La question d’amour n’est pas entrée dans ses calculs. […] Il avait éliminé l’amour de ses calculs, et l’amour se venge ; et il se venge doublement. […] Son âme s’éveille à l’amour. […] pour l’amour du grec, souffrez qu’on vous embrasse.

418. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Des Rieux, Lionel (1870-1915) »

. — Les Amours de Lyristès (1895). — La Toison d’or (1897). — Les Colombes d’Aphrodite (1898). […] Lionel des Rieux a donné là un petit recueil, Les Amours de Lyristès, que nous ne saurions mieux comparer qu’à un collier de perles colorées, péchées par quelque marin heureux dans un golfe d’Ionie. Il s’y affirme poète délicat, et j’estime que les Amours de Lyristès brillent d’un éclat assez limpide pour laisser juger de la conscience et de la fantaisie de celui qui les enchâssa dans un écrin de rimes futiles.

419. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 120-121

Son Traité des Etudes, plein de réflexions justes, délicates & solides, est le Livre le plus propre que nous connoissions à inspirer l'amour de la vertu & le goût des Lettres. […] Cette Histoire est en effet écrite avec pureté, avec noblesse, & de ce ton sensible & communicatif, qui fait passer, avec l'instruction, l'amour de l'objet qu'on présente. […] Quand on a consacré ses travaux à l'instruction de la Jeunesse, formé des Disciples à l'amour de l'étude, de la Religion & de la Patrie, on a des droits assurés à la reconnoissance des Gens de Lettres & des bons Citoyens.

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