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457. (1856) Réalisme, numéros 1-2 pp. 1-32

Le roman, le théâtre, la peinture, sont les trois grands moyens d’action des observateurs. […] Vous les haïssez, vous les craignez ou vous en avez besoin ; leurs idées, leurs actions touchent aux vôtres et s’y mêlent. […] La première est la vérité dans la fable, la seconde l’illusion dans l’action. […] Si le roman est l’étude, la description de notre société ; s’il doit montrer les actions des hommes et leurs motifs d’action, il faut montrer les hommes avec leurs passions, leurs instincts, leur caractère enfin. […] … ces rapports c’est l’action.

458. (1782) Essai sur les règnes de Claude et de Néron et sur la vie et les écrits de Sénèque pour servir d’introduction à la lecture de ce philosophe (1778-1782) « Essai, sur les règnes, de Claude et de Néron. Livre second » pp. 200-409

C’est l’envie, l’envie que vous affligez par le récit d’une belle action. […] un instant d’agonie flétrirait une action héroïque ! […] …* C’est la conformité habituelle des pensées et des actions aux lois de la nature. […] Quelle comparaison d’une belle ligne, quand je saurais l’écrire, à une belle action ? […] Il est des actions sur lesquelles on ne peut ramener trop souvent l’admiration des hommes.

459. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre II. Le Roman (suite). Thackeray. »

Nul auteur n’est plus fécond en dissertations ; il entre à chaque instant dans son récit pour nous tancer ou nous instruire ; il ajoute la morale de théorie à la morale en action. […] À mon avis, c’est un psychologue, un psychologue qui naturellement et involontairement met la psychologie en action ; ce n’est rien d’autre, ni de plus. […] Il ne combine leurs actions que pour leur donner du ridicule, de l’odieux ou des désappointements. […] L’auteur ne manque pas une occasion de lui témoigner la sienne ; pendant trois volumes, il la poursuit de sarcasmes et de mésaventures ; il ne lui prête que des paroles fausses, des actions perfides, des sentiments révoltants. […] » Ces tendresses si nobles paraissent encore plus touchantes par le contraste des actions qui les entourent.

460. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLIIIe entretien. Madame de Staël. Suite. »

Comment, après cette horrible action, un seul roi de l’Europe a-t-il pu se lier avec un tel homme ? […] « On se demande maintenant quels ont été les motifs de cette terrible action, et je crois facile de les démêler. […] Il viola tout dans une seule action : le droit des gens européens, la constitution telle qu’elle existait encore, la pudeur publique, l’humanité, la religion. Il n’y avait rien au-delà de cette action ; donc on pouvait tout craindre de celui qui l’avait commise. […] Le siècle n’avait point de poëte français en vers, point d’orateur en action ; il adopta cette femme comme la poésie et l’éloquence de l’époque.

461. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre II. L’antinomie psychologique l’antinomie dans la vie intellectuelle » pp. 5-69

Le cerveau concentre et synthétise les actions de ces deux milieux différents et irréductibles. […] De quel droit nier son action ici après l’avoir admise là ? […] Il croit que tous les essais d’unification fondés sur l’action de l’esprit, sur l’influence des religions et des morales sont insuffisants, superficiels et sans avenir. […] Il n’en reste pas moins que l’action de la physiologie sur les intelligences est tout aussi considérable qu’autrefois. […] Il y a dans la constitution native de l’individu quelque chose qui limite l’action de l’éducation et qui individualise en chacun la pensée sociale exprimée dans le langage.

462. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Charles Dickens »

Les coups de fortune, les travestissements, les révélations subites, les secrets de famille, les ténébreuses intrigues, d’acharnées et gratuites inimitiés, déterminent sans cesse le cours de l’action, sans que la suite même de ces incidents parvienne à s’ordonner logiquement. […] Si Dickens ne sut ni observer les hommes qu’il connut, ni étudier les mouvements mêmes de sa propre âme, ni employer les notions psychologiques qu’il aurait inconsciemment perçues, il ignore plus visiblement encore l’art de connaître et de montrer les lieux et les milieux où il place l’action de ses récits. […] Tous ces traits, la simplicité, la permanence, la puérilité de nature, l’outrance du dessin, la vérité de la charge qui distinguent les personnages de Dickens, caractérisent également au plus haut degré les scènes où le récit de leurs actions, la reproduction de leurs conversations, la description des lieux où ils se trouvent, s’unissent pour constituer les épisodes par lesquels l’action chez Dickens s’achemine au dénouement avec les détours les plus longs et les plus invraisemblables. […] Si l’on fient exactement compte de ces définitions, on pourra en déduire presque tous les caractères de l’art de l’écrivain anglais, et l’organisation mentale qui lui sera ainsi reconnue appartenir, sera une organisation générique qui pourra servir à déterminer d’autres tempéraments analogues au sien, et qui donnera même, par réciproque, quelques lumières sur l’action de l’émotion chez l’homme. […] Si Dickens conçoit ses héros comme permanents, s’il leur donne une unité de nature contraire à la vérité, si ses scènes mêmes ne font faire à l’action aucun progrès sensible, c’est que les sentiments qui sont à l’origine de toutes ses inventions sont eux-mêmes uns, indivisibles, sans nuances qualitatives, que l’hypocrisie de M. 

463. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Le Roman de Renart. Histoire littéraire de la France, t. XXII. (Fin.) » pp. 308-324

Tiècelin, descendez donc, et de ce mal me délivrez ; certes, je ne vous en prierais pas si je pouvais vous en dispenser ; mais avant-hier je me suis cassé la jambe dans un piège par mésaventure, et je ne puis bouger d’où je suis. » On voit tout le jeu et le développement de cette petite action. […] La fable n’est pas finie ; n’oublions pas qu’avec les trouvères nous sommes dans le récit épique : il ne s’agit pas de faire une fable courte, qu’on lit dans un livre, mais de réciter une action qui se développe, qui tient un auditoire en suspens et qui fait la joie du vilain. […] La bataille est rude dans la prairie : les Bretons ont cinq des leurs hors de combat ; ils ne sont plus que vingt-cinq, lorsqu’un écuyer, Geoffroi de La Roche, demande à être fait chevalier de la main de Beaumanoir, au milieu de l’action. […] Ce jour aurons honneur : chacun y gagnera Vaillante renommée…………………… Et Beaumanoir, que cette parole enflamme, se remet si vivement à l’action que, de colère et de douleur, la soif lui passa.

464. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Marivaux. — II. (Fin.) » pp. 364-380

Ses personnages, au lieu de vivre, de marcher et de se développer par leurs actions mêmes, s’arrêtent, se regardent, et se font regarder en nous ouvrant des jours secrets sur la préparation anatomique de leur cœur. Le Paysan parvenu, second roman de Marivaux (1735), a plus d’action, je ne dirai pas plus d’invention ; mais il y a du mouvement. […] Tous ceux qui ont vu et connu Mme Balletti, dite au théâtre et dans la société Silvia, ont parlé d’elle comme parlent de Mlle Mars ceux qui l’ont vue à quinze ans : « Action, voix, esprit, physionomie, maintien, et une grande connaissance du cœur humain », Silvia possédait tout cela. […] c’est ce que toute l’action semble dire.

465. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire de mon temps. Par M. Guizot. »

. — Il faut être national et fort, avant tout et tout de suite… » Qu’était-ce enfin que cet ami de beaucoup d’esprit (dans lequel il m’est impossible de ne pas reconnaître M. de Rémusat, l’homme des idées, sinon de l’action), qui du fond de son département écrivait à M.  […] Je me figure l’action de ce ministre passionné, violent et un peu convulsif dans la modération, par une image : le chardu gouvernement roulait sur la pente, à l’aventure, et menaçait de verser : il mit le bras en travers de la roue, se brisa lui-même, mais l’arrêta. […] Thiers essaye là, à l’égard de l’Espagne, ce qu’il essayera quatre ans plus tard et aussi vainement pour la question d’Orient, d’intervenir, de donner à la politique extérieure de la France un peu plus d’action, d’influence déclarée par les armes, de lui valoir un peu de gloire : un baptême de gloire, ç’a toujours été une petite formalité assez essentielle pour sacrer une monarchie. […] Mais il est pourtant impossible de faire d’un tel régime, dans son esprit et dans son ensemble, quelque chose de grand, — de grand par l’action, par l’impulsion soit au dedans, soit au dehors, — quelque chose dont on soit fier d’avoir été le contemporain ; et M. 

466. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Sainte-Hélène, par M. Thiers »

Napoléon parlait de tout et avec une impartialité, une douceur qui montraient à quel point il était détaché et revenu de l’action. […] Il était tout à fait sorti de l’action, ai-je dit, et il jugeait avec impartialité, avec philosophie, les hommes et les choses ; mais quelle philosophie ? […] Loin de démonter l’instrument, les chefs d’État doivent en effet chercher à le remonter plutôt et à le tenir constamment en action pour l’employer, pour le conduire. […] Le gigantesque auquel il s’échappait dans l’action se contient dans le discours, maintenant que la tentation prochaine ou éloignée n’y est plus.

467. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Salammbô par M. Gustave Flaubert. (Suite.) » pp. 52-72

Ce fils d’un rhéteur grec et d’une fille campanienne sent tout le parti qu’il peut tirer de cet Africain robuste, brutal, superstitieux et brave ; lui, il est lâche à l’action, mais hardi partout ailleurs, fertile en idées, l’homme aux expédients : tous deux ils se doublent et se complètent. […] Ses énervements l’abandonnèrent, et ce fut une ardeur d’action folle et continuelle. […] Spendius, cependant, a un peu rappelé Mâtho à la raison ; celui-ci se remet à commander les troupes et à les faire manœuvrer dans l’attente d’une action. […] Je me laisse aller à faire de la rhétorique à propos d’un livre qui y provoque, et j’allais oublier l’action.

468. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Don Quichotte (suite.) »

Les personnages mis en scène sont si bien venus et si vivants, ils sont nés sous une si heureuse étoile, ils sont d’une physionomie si originale et ont un caractère si marqué (y compris leurs deux montures, inséparables des deux maîtres), qu’on s’attache et qu’on s’affectionne à eux tout d’abord, indépendamment de la moralité finale que l’auteur prétend tirer de leurs actions. […] Je n’entends point parler ici de maint anachronisme ni des inadvertances de détail qu’on a relevés et qui sont échappés à la plume rapide de l’auteur ; je ne parle que de l’ensemble des caractères et de l’action. Le personnage de Don Quichotte n’est complet qu’à sa seconde sortie et lorsqu’il est suivi de Sancho : ce n’est qu’au moyen de cette antithèse perpétuelle et de cette alliance boiteuse que l’action a tout son sens désormais, qu’elle a sa prise et sa portée en toute direction. […] Soldat, aventurier, esclave algérien, employé de finance, prisonnier, romancier, c’est un Gil Blas, mais un Gil Blas assombri, et qui n’est pas destiné à s’écrier comme l’autre dans sa jolie maison de Lirias : Inveni portum… » C’est étrangement rabaisser Cervantes (toujours d’après notre auteur), que de soutenir qu’il a employé la fleur de son génie à combattre l’influence de quelques romans de mauvais goût, dont le succès retardait sur les mœurs du siècle et n’avait plus aucune racine dans la société d’alors : « Ce que je crois plutôt, s’écrie le nouveau commentateur, qui a lu son Don Quichotte comme d’autres leur Bible ou leur Homère, et qui y a tout vu, c’est que le chevaleresque Cervantes, qui s’était précipité dans ce qui, à la fin du xvie  siècle, restait de mouvement héroïque, dut se sentir abattre par le désenchantement d’un croyant plein de ferveur qui n’a pas trouvé à fournir carrière pleine, qui dans l’exagération de son idéal s’est heurté et blessé contre les réalités, et qui, après avoir été contraint d’abdiquer l’action, s’est condamné à une retraite douloureuse, s’est réfugié dans ses rêves, et en dernier lieu, dans un testament immortel, lance à son siècle une satire qui n’était pas destinée à être comprise de ce siècle et dont l’avenir seul était chargé de trouver la clé. » Et nous adjurant à la fin dans un sentiment de tendre admiration, essayant de nous entraîner dans son vœu d’une réhabilitation désirée, l’écrivain, que je regrette de ne pas connaître, élève son paradoxe jusqu’aux accents de l’éloquence : « Ah !

469. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre IX. Inquiets et mystiques » pp. 111-135

Voilà l’action de cette élite. […] Bérenger, pas celui du Sénat, celui des Étudiants, le même rajeuni, vient de produire L’Effort attendu, le roman sur l’action qui convenait pour confondre les derniers opposants et rallier les perplexes. […] Bérenger que je trouvé maladroitement mise en action. […] Seulement l’action des uns est plus diverse et plus inconsciente, celle des autres plus précise et plus critique.

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