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734. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Mémoires de l’abbé Legendre, chanoine de Notre-Dame, secrétaire de M. de Harlay, archevêque de Paris. »

Fléchier étant né lent, l’esprit ne lui venait qu’en ruminant ; à le voir en particulier, on eût dit qu’il en avait peu, tant sa conversation était plate et chétive » ; quand Legendre parle ainsi d’après des ouï-dire, je ne l’en crois pas du tout ; je proteste, et je soutiens que l’abbé a dû mal traduire en cet endroit ce que lui ont pu dire les meilleurs amis de Fléchier. […] En théologie, Harlay n’avait pas eu un moindre succès pour sa thèse dite Tentative ; en homme qui prévoyait et pressentait où il aurait à frapper plus tard, il la fit porter sur le point le plus controversé d’alors, saint Augustin et Jansénius ; ayant établi les propositions catholiques orthodoxes, il soutint hardiment que le saint docteur que chacun lirait à soi était de son côté, et que Jansénius l’avait mal compris.

735. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Oeuvres inédites de la Rochefoucauld publiées d’après les manuscrits et précédées de l’histoire de sa vie, par M. Édouard de Barthélémy. »

Mais venir soutenir qu’un morceau tout à fait inconnu jusqu’ici, — ou très peu connu, même en admettant qu’il ait couru et circulé en quelques mains vers 1649, — enlève à Pascal l’honneur d’avoir le premier dégagé la langue et va désormais s’introduire comme de droit, dans l’histoire de notre littérature, entre le Discours de la Méthode et les Provinciales, c’est vraiment imposer ses imaginations à un public trop docile ; c’est trop magnifiquement traiter La Rochefoucauld comme auteur, après l’avoir tant dénigré dans sa vie, au moral. […] » Il soutenait en effet que l’intérêt était partout, était tout, inspirait tout ; il ne croyait pas à l’essence des vertus : « La vertu est un fantôme formé par nos passions, à qui on donne un nom honnête, afin de faire impunément ce qu’on veut.

736. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Vaugelas. Discours de M. Maurel, Premier avocat général, à l’Audience solennelle de la Cour impériale de Chambéry. »

généreux et le plus lier, l’autre de la prose oratoire la plus soutenue et la plus élégante, même dans son emphase. […] Celui qui a rempli véritablement le vœu de Vaugelas, et qui a fait voir, non plus par ses préceptes, mais par son exemple, que notre langue possédait en effet tous ces mérites d’élégance, de chasteté, de hardiesse voilée et d’harmonie soutenue, qui est-ce donc, je le demande, si ce n’est Racine ?

737. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Mémoires de madame Roland »

Elle n’était ni une pédante, ni une précieuse et un bas bleu, pas le moins du monde ; et bien qu’il y ait dans ce qu’elle a écrit et ce qu’on a sous les yeux des pages qui, à distance et avec un peu de mauvaise volonté, permettraient de juger d’elle autrement, je reste persuadé et je soutiens que ces taches ou ces roideurs ne sont pas essentielles, qu’elles n’allaient pas en elle jusqu’à affecter et gâter la femme vivante ; c’est de la littérature écrite imitée, un pli de la mode, rien de plus. […] Elle confesse à Buzot qu’elle n’a pas été très fâchée d’être arrêtée, puisque Roland est parvenu à se dérober aux poursuites ; mais il faut l’entendre ici dans un langage qui est bien le sien et qu’elle n’emprunte à personne, pas plus que le sentiment compliqué et très élevé qui l’inspire : « Ils en seront moins furieux, moins ardents contre Roland, me disais-je ; s’ils tentent quelque procès, je saurai le soutenir d’une manière qui sera utile à sa gloire ; il me semblait que je m’acquittais ainsi envers lui d’une indemnité due à ses chagrins : mais ne vois-tu pas aussi qu’en me trouvant seule, c’est avec toi que je demeure ?

738. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « La reine Marie Leckzinska (suite et fin.) »

. — Le roi était si occupé de cette idée, qu’il envoya le lendemain, dès quatre heures et demie du matin, réveiller Mme de Villars (dame d’atours), en qui il sait que la reine a beaucoup de confiance, pour lui demander si la reine lui avait pardonné. » Il ne manquait à ces excellents sentiments que de se soutenir, et la reine, dans sa piété confiante, dut espérer qu’il en serait ainsi. […] Ceci me rappelle qu’un soir que Dugas-Montbel lisait, chez Mme Récamier, une tragédie traduite d’Eschyle ou de Sophocle, le marquis de Vérac qui s’était endormi se réveilla quand la lecture était déjà finie depuis quelques instants, et il dit tout haut : « L’intérêt se soutient. » On rit beaucoup.

739. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « DISCOURS DE RÉCEPTION A L’ACADÉMIE FRANÇAISE, Prononcé le 27 février 1845, en venant prendre séance à la place de M. Casimir Delavigne. » pp. 169-192

Une diction irréprochable et ornée, dont chaque point soutient ou égaye l’attention, vient servir et compléter cet heureux ensemble. […] Certes il aurait pu y avoir quelques mauvais jours à passer, quelques luttes pénibles à soutenir contre le flot.

740. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE SOUZA » pp. 42-61

Lorsqu’à la dernière scène, dans une de ces allées droites où l’on se voit de si loin, Mme d’Estouteville s’avance lentement, soutenue du bras d’Eugène, je sens tout se résumer pour moi dans cette image. […] Mme de Nançay a vécu aussi, contrariante et bonne, et qu’avec un peu d’adresse on menait sans qu’elle s’en doutât : « Mme de Nançay rentra chez elle disposée à gronder tout le monde ; elle n’ignorait pas qu’elle était un peu susceptible, car dans la vie on a eu plus d’une affaire avec soi-même, et si l’on ne se connaît pas parfaitement, on se doute bien au moins de quelque chose. » Eugénie et Mathilde, que nous avons déjà beaucoup cité, est le plus long et le plus soutenu des ouvrages de l’auteur, toujours Eugène et Adèle à part.

741. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « CHRISTEL » pp. 515-533

. — Elle voulait voir du mépris de la part d’Hervé, de la fierté insolente dans cette inattention soutenue, et tâchait de s’en irriter ; mais non, c’était moins et c’était pis, elle le sentait bien ; ce prétendu dédain s’enfonçait plus cruel, précisément en ce qu’il était plus involontaire ; c’était de l’oubli. […] Elle, au milieu de la chambre, debout, plus pâle que lui, répondait par monosyllabes sans comprendre, lorsque tout à coup, ne pouvant soutenir une lutte si inégale, elle se sentit chanceler, fit un geste comme pour se prendre à la grille, et tomba évanouie.

742. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre IV. Des figures : métaphores, métonymies, périphrases »

On loue les métaphores bien soutenues comme dans ces vers de Boileau : À peine du limon où le vice m’engage J’arrache un pied timide, et sors en m’agitant, Que l’autre m’y reporte et s’embourbe à l’instant. […] La métaphore soutenue plaît ou déplaît, selon que dans cette continuité l’on sent une rencontre naturelle ou une recherche laborieuse ; elle est de bon goût, quand les expressions figurées qui font cortège à la figure initiale naissent d’une création incessante de l’imagination, qui garde l’image comme elle la changerait, par la découverte instantanée et toujours renaissante de ressemblances successives ; elle est de mauvais goût, quand, par un renversement des rôles, l’esprit sacrifie la pensée à la figure, quand celle-ci, devenant tyrannique en cessant d’être dépendante, avide de durer, ne laisse plus pénétrer dans la phrase que les idées qu’elle peut absorber et amalgamer.

743. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre II. La première génération des grands classiques — Chapitre I. La tragédie de Jodelle à Corneille »

Les collèges leur fournissent un public, des acteurs : et voilà comment Michel de Montaigne note parmi les faits mémorables de sa jeunesse d’avoir, à l’âge de douze ans, vers 1545, « soutenu les premiers personnages ès tragédies latines de Buchanan, de Guérente, et de Muret », qui se représentaient « avec dignité » au collège de Guyenne, sous l’habile direction du principal André Gouvéa. […] Ces tentatives, auxquelles les comédiens de l’Hôtel de Bourgogne étaient hostiles, moitié par esprit de tradition, moitié par intérêt, pour ne pas mettre au rebut tout leur magasin de décorations, furent favorisées par l’établissement d’une seconde troupe de comédiens, celle de Mondory, qui se fixa à Paris en 1629 ; pour se soutenir contre l’Hôtel de Bourgogne, Mondory fit accueil aux nouveautés.

744. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre IV. Ordre d’idées au sein duquel se développa Jésus. »

Un sadducéen incrédule et mondain pouvait bien ne pas reculer devant une telle conséquence ; un sage consommé, tel qu’Antigone de Soco 158, pouvait bien soutenir qu’il ne faut pas pratiquer la vertu comme l’esclave en vue de la récompense, qu’il faut être vertueux sans espoir. […] Le lendemain, de bonne heure, on sera à Jérusalem ; une telle attente, aujourd’hui encore, soutient la caravane, rend la soirée courte et le sommeil léger.

745. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Monsieur de Balzac. » pp. 443-463

Pour soutenir cette victoire, pour porter cette vogue, n’en être ni effrayé ni découragé, ne pas défaillir et ne pas abdiquer sous le coup comme fit Léopold Robert, il faut avoir une force réelle, et se sentir arrivé seulement à son niveau. […] Ce sentiment-là le soutenait et l’enflammait dans le labeur.

746. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Florian. (Fables illustrées.) » pp. 229-248

Voltaire se montra si aimable pour lui, qu’il fut bientôt, de toutes les personnes de la maison, celle avec qui Florianet se plaisait le plus : Souvent il me faisait placer auprès de lui à table ; et, tandis que beaucoup de personnages qui se croyaient importants, et qui venaient souper chez Lope de Vega pour soutenir cette importance, le regardaient et l’écoutaient, Lope (c’est le nom qu’il donne partout à Voltaire dans le léger déguisement de ses Mémoires) se plaisait à causer avec un enfant. […] Une jeune fille, vêtue de même, soutenait avec moi une grande corbeille pleine de fleurs. » Le petit Florian chanta ensuite avec sa bergère une chanson en dialogue, composée par Voltaire en l’honneur de Mlle Clairon : Je suis à peine à mon printemps, Et j’ai déjà des sentiments… Mais ne voilà-t-il pas, dès l’entrée, toute une vie qui se dessine ?

747. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Rulhière. » pp. 567-586

Pourtant cette histoire mérite-t-elle, comme Daunou l’a soutenu et comme Chénier d’après lui l’a répété, d’être placée au rang des monuments modernes comparables à ceux de l’Antiquité ? […] Parmi les chefs polonais, il en choisit pour ses héros qui n’ont pas soutenu plus tard ce caractère : il les voit de loin dans les poses chevaleresques qu’ils se donnent, et tout à leur avantage.

748. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le duc d’Antin ou le parfait courtisan. » pp. 479-498

Une âme fière, généreuse, un cœur haut placé se serait dit : « La honte est dans ma maison, mon père n’a pas su sauver les dehors, et porter son malheur avec calme et dignité ; je soutiendrai mon nom mieux que lui. […] Une personne de ses amis, et qui s’intéressait à lui, le voyant dans ce train d’ambition raffinée qu’il fallait soutenir par une vie de dépense et de ruine, lui dit un jour, après s’en être expliquée avec lui : « Mon ami, vous êtes un fou ; il n’y a point de place, le cœur du roi est rempli ; vous courez après une idée chimérique dont vous serez sûrement la dupe. » — J’étais trop enivré, ajoute d’Antin, pour croire de si bons conseils ; et moins je recevais de grâces, plus je redoublais de soins et d’assiduité à la Cour et à la guerre.

749. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Le président de Brosses. Sa vie, par M. Th. Foisset, 1842 ; ses Lettres sur l’Italie, publiées par M. Colomb, 1836. » pp. 85-104

Il se distingua également dans ses cours de droit : Lorsqu’il soutint sa dernière épreuve, dit M.  […] Il goûte certes la gaieté italienne et le comique de Machiavel ; mais il ne trouve pas, comme Algarotti, qu’on puisse mettre sa Mandragore en comparaison avec les bonnes pièces de Molière « qui sont excellentes par toute l’Europe et des chefs-d’œuvre pour nous : En effet, s’écrie-t-il avec quelque chose de cet enthousiasme qu’il portait dans les Chambres du Vatican, quiconque, à jour et à jamais, voudra connaître à fond la nation française du siècle passé, n’aura qu’à lire Molière pour la savoir sur le bout du doigt ; aussi dans ma dispute avec Algarotti, lui soutins-je que nul homme n’était jamais allé aussi loin dans son art que Molière dans le sien, c’est-à-dire qu’il était encore plus grand comique qu’Homère n’était grand épique, que Corneille n’était grand tragique, que Raphaël n’était grand peintre, que César n’était grand capitaine.

750. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Le cardinal de Richelieu. Ses Lettres, instructions et papiers d’État. Publiés dans la Collection des documents historiques, par M. Avenel. — Premier volume, 1853. — II. (Fin.) » pp. 246-265

On n’en dira pas autant de Richelieu : il n’est pas un capitaine, il n’a pas débuté par l’action ; il est homme d’Église avant d’être homme d’État ; il a commencé par prêcher, par être orateur dans ses sermons, dans ses harangues ; il a soutenu des thèses en Sorbonne ; la gloire de Du Perron, le grand controversiste et l’habile négociateur, l’a tenté. […] Les voyant arriver à Angers, Richelieu s’efface devant eux et ne prend guère part à leurs délibérations ; entre deux écrits dressés au nom de la reine, l’un plus modéré, plus prudent, et qui ne va pas à la guerre civile, et l’autre plus aigre, plus violent, et qui est un manifeste d’hostilité, il est d’avis qu’on se borne au premier, d’autant plus qu’on n’est pas de force à soutenir le second.

751. (1860) Ceci n’est pas un livre « Une préface abandonnée » pp. 31-76

Ils soutiendront que vous êtes en dehors du genre et vous liront le règlement ! […] Je suis loin de vouloir soutenir qu’on ne peut être à la fois hommes de lettre et homme d’ordre, — que les hasards de l’amour libre sont plus favorables que le mariage aux créations de l’esprit, que l’art enfin se trouve mal assis au foyer domestique et mal couché sur le lit conjugal.

752. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « IX. Mémoires de Saint-Simon » pp. 213-237

… Après les désastres du xvie  siècle, les fautes politiques d’Henri IV et les luttes jusqu’au sang de Richelieu pour les réparer, après l’anarchie des Parlements et de la Fronde qui remuèrent Saint-Simon dans son berceau, Louis XIV soutint au milieu de la France en poudre le poids de l’écroulement universel et l’arrêta par son prestige personnel… plus d’un siècle ! […] que Dubois était destitué de tout talent, pour le porter à une si prodigieuse fortune et pour l’y soutenir !

753. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Macaulay »

L’écrivain, chez lui, l’écrivain dont la force poétique est toujours donnée par la comparaison, a la comparaison surtout ingénieuse, et il la suit longtemps quand il la trouve… En somme, si le critique défaille souvent pour les causes que j’ai dites, l’écrivain se soutient toujours, et c’est ce souci d’être toujours écrivain qui fait de lui un esprit, avant tout, littéraire et inaliénablement tel, alors même que le critique littéraire a disparu dans l’historien à prétention, dans le whig incessamment présent, dans l’utilitaire, dans le scholar ; car il est resté scholar aussi, d’habitude intellectuelle et même quelquefois de langage, cet homme qui n’a pas, malgré une force incontestable, su rompre ces emmaillottements ! […] Sans haine et non pas sans amour, elle est loyale, aisée, sincère, sans dogmatisme et sans aridité, d’un épanouissement de talent singulier, d’un feuillu d’idées le plus riche, de la verve la plus animée et cependant la plus soutenue !

754. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « Brizeux. Œuvres Complètes »

C’est par l’idylle et l’idylle élégiaque qu’il commença sa renommée, et malgré des efforts soutenus, comme on n’en aurait guère attendu de sa gracieuse faiblesse, et qui prouvent que l’entêtement n’est pas la force, même chez les Bretons, c’est par ce seul genre de poésie qu’il se soutiendra dans la mémoire des hommes.

755. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre III : M. Maine de Biran »

Il n’y a dans le monde que des faits et des rapports nécessaires ; quand on transforme ces relations et ces nécessités en petits êtres, on fabrique des entités à la façon des scolastiques ; on voit quelque chose de vague et d’abstrait qu’on déclare spirituel ; on finit par soutenir que le monde réel n’est qu’une apparence. […] M. de Biran l’a été jusqu’à soutenir qu’il aperçoit la force, exactement comme on aperçoit le plaisir ou toute autre sensation.

756. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « I » pp. 1-8

Quant à son avenir et à ses peintures idylliques6 de bonheur champêtre, de pureté virginale, de mariage inviolable (car il soutient le mariage), de propriété partagée à tous et toutefois respectée (car il a l’air de vouloir la propriété contre les phalanstériens, comme il veut la famille), on ne sait à quoi cela aboutirait.

757. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XI » pp. 39-46

La pièce lue soutient son mérite ; ç'a été une preuve de goût de n’y pas mettre une seule ligne de Préface.

758. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « Mme DESBORDES-VALMORE. (Pauvres Fleurs, poésies.) » pp. 115-123

Je voudrais qu’un jour on tirât de ce volume, qu’on dégageât cette suite d’élégies-romances dont la forme est si assortie à la manière de Mme Valmore, et dans lesquelles son sentiment soutenu se produit quelquefois jusqu’au bout avec un parfait bonheur, sans les tourments plus ordinaires à l’alexandrin : Croyance, la Femme aimée, Aveu d’une Femme, Ne fuis pas encore, la Double Image, Fleur d’Enfance.

759. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « SUR ANDRÉ CHÉNIER. » pp. 497-504

Les plus grandes places de poëtes sont dues, à coup sûr, à ceux qui ont mis de puissantes facultés d’imagination, de sensibilité et d’intelligence, au service des intérêts et des sentiments d’un grand nombre de leurs concitoyens et de leurs contemporains ; qui les ont soutenus, animés, récréés, ennoblis ; qui les ont aidés à pleurer, à espérer, à croire, soit dans un ordre purement héroïque et humain, soit par rapport aux choses immortelles.

760. (1874) Premiers lundis. Tome II « Mort de sir Walter Scott »

Dans cette première partie de sa vie littéraire, Scott ne fit pourtant que continuer et soutenir avec éclat le mouvement imprimé à la poésie anglaise à la fin du siècle par Beattie, Gowper, les ballades de Percy.

761. (1874) Premiers lundis. Tome II « Poésie — Le Comte Walewski. L’École du Monde »

Janin, dans les très spirituels feuilletons qui récidivent depuis quelque temps sous sa plume de plus en plus heureuse, c’est lui qui a intenté et soutenu l’accusation.

762. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre VI. De l’envie et de la vengeance. »

Il est certain d’abord qu’on soutient difficilement l’idée de savoir heureux l’objet qui vous a plongé dans le désespoir ; ce tableau vous poursuit, comme, par un mouvement contraire, l’imagination de la pitié offre la peinture des douleurs qu’elle excite à soulager.

763. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre cinquième. Le peuple. — Chapitre V. Résumé. »

I Ils sont les successeurs et les exécuteurs de l’ancien régime, et, quand on regarde la façon dont celui-ci les a engendrés, couvés, nourris, intronisés, provoqués, on ne peut s’empêcher de considérer son histoire comme un long suicide : de même un homme qui, monté au sommet d’une immense échelle, couperait sous ses pieds l’échelle qui le soutient  En pareil cas, les bonnes intentions ne suffisent pas ; il ne sert à rien d’être libéral et même généreux, d’ébaucher des demi-réformes.

764. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Les snobs » pp. 95-102

Ils ne sauraient soutenir longtemps le faux et le fragile et ce qui n’a pas en soi de quoi durer : mais leur zèle, quoique ignorant, peut hâter le triomphe de ce qui est appelé à vivre.

765. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XII » pp. 100-108

Le prince de Condé lui-même, après avoir défendu la cause du pouvoir, se trouva glorieux de soutenir celle de mademoiselle de Montpensier contre le pouvoir.

766. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 439-450

Ne devons-nous pas lui pardonner de nous prodiguer les ingénieuses épithetes d’ignorant & de sot ; de trouver notre style pitoyable ; de soutenir que les Trois Siecles, dont voici la cinquieme édition, ne sont qu’une misérable compilation tombée dans un mépris dont elle ne se relevera jamais ?

767. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre VI, première guerre médique »

Contre l’avis des autres stratèges, qui voulaient retrancher la défense au cœur de la ville, la circonscrire au rocher sacré, il soutint que le salut était dans l’attaque, qu’il fallait marcher sur l’ennemi au lieu de l’attendre, le frapper sur le rivage même de la mer, au seuil bruyant de la patrie grecque.

768. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Démosthéne, et Eschine. » pp. 42-52

On y voit enfin Démosthène ainsi que dans ses Philippiques, parce que le sublime est de tous les temps, de toutes les nations, & qu’il se soutient sans le stile, comme le diamant brille sans la monture.

769. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — L’Empereur Néron, et les trois plus grands poëtes de son siècle, Lucain, Perse & Juvénal. » pp. 69-78

La faveur de Paris se soutint jusqu’au règne de Domitien.

770. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Ronsard, et Saint-Gelais. » pp. 120-129

Mellin, appréhendant de ne pouvoir, au bout de sa carrière, se soutenir avec honneur, abandonna la poësie Françoise à son jeune rival, & se remit aux vers Latins ; ce qui fit dire que le soleil levant l’ayant effacé ou fait fuir d’un horison, il s’en étoit allé sous l’autre .

771. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Addisson, et Pope. » pp. 17-27

« Puissé-je, dit-il dans une de ses lettres, vivre & mourir dans l’indépendance ; vivre & mourir en paix ; soutenir l’aisance & la dignité d’un poëte ; voir les amis & lire les livres qu’il me plaira ; être au dessus du besoin d’avoir un protecteur, quoique je veuille bien appeller quelquefois un ministre mon ami !

772. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Jean-Baptiste Rousseau et M. de Voltaire. » pp. 47-58

Ces beautés sans nombre dont la Henriade est remplie ; caractères vrais & soutenus ; tableaux frappans des discordes civiles présentés sans partialité ; amour du bien public recommandé sans cesse ; ressors des passions humaines développés habilement ; intérêt croissant de chant en chant ; magie des vers poussée aussi loin que l’imagination peut aller : tout cela parut un crime aux yeux de Rousseau.

773. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Avertissement » pp. -

Mais la division par genres n’a rien de moins artificiel ou de moins arbitraire, si les genres ne se définissent, comme les espèces dans la nature, que par la lutte qu’ils soutiennent en tout temps les uns contre les autres.

774. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre premier. Vue générale des épopées chrétiennes. — Chapitre V. La Henriade »

La poésie épique Se soutient par la fable et vit de fiction.

775. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 30, de la vrai-semblance en peinture, et des égards que les peintres doivent aux traditions reçuës » pp. 255-265

Son geste est celui d’un furieux, et pour lancer sa pierre avec plus d’impetuosité, il ne se soutient que sur un pied.

776. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 42, de notre maniere de réciter la tragédie et la comedie » pp. 417-428

Nous voulons encore que ces acteurs parlent d’un ton de voix plus élevé, plus grave et plus soutenu que celui sur lequel on parle dans les conversations ordinaires.

777. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Préface » pp. -

Rousseau lui-même, le maladif Rousseau, avec son âme de domestique humilié qui lui fausse toutes choses, ne peut, dans sa Nouvelle-Héloïse, soutenir la comparaison avec des observateurs d’une franchise, d’une vigueur et d’une santé dans l’observation, comme Fielding, Richardson, Goldsmith.

778. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXII. Des éloges des hommes illustres du dix-septième siècle, par Charles Perrault. »

Perrault que l’on ne connaîtrait point, si on ne le connaissait que par l’humeur, les épigrammes et la prose de Boileau, est un des hommes du siècle de Louis XIV qui contribua le plus à honorer et à faire respecter les lettres ; au lieu de les avilir par la satire, il les soutint par son crédit : ses lumières et sa probité l’avaient rendu l’ami de Colbert.

779. (1782) Essai sur les règnes de Claude et de Néron et sur la vie et les écrits de Sénèque pour servir d’introduction à la lecture de ce philosophe (1778-1782) « Essai, sur les règnes, de Claude et de Néron. Livre premier. » pp. 15-203

Cet art était alors sur son déclin : et comment ce grand art, qui demande une âme libre, un esprit élevé, se soutiendrait-il chez une nation qui demande l’esclavage ? […] Comment le plébéien soutiendra-t-il la dignité de sa robe ? […] XII, cap. vi)  : « Comment un prince à peine sorti de sa dix-septième année pourrat-il soutenir un tel fardeau ? […] Ce trône que votre père n’a pu vous laisser, sur lequel les efforts de vos frères ne vous ont pas soutenu, je vous le donne. […]Soutenir la gloire d’un Néron !

780. (1814) Cours de littérature dramatique. Tome III

Tous les deux prirent la défense de L’Orphelin ; et Lanoue, dans le rôle de Zamti, contribua aussi à soutenir la pièce : Voltaire parle honnêtement des deux premiers, mais il se montre fort ingrat envers Lanoue. […] Josse ; c’est un poète tragique qui trouve qu’il n’y a rien au monde d’aussi important que des tragédies, qui soutient que le théâtre est une école de morale où l’on enseigne la vertu en action et en dialogue . […] Les arguments dont les deux époux appuient leur résolution sont étrangement déplacés dans un pareil moment : Idamé, qui soutient une thèse en faveur du suicide, n’est qu’une raisonneuse dont l’orgueil effréné ne convient ni à son sexe, ni à son état. […] De nos voisins altiers imitons la constance ; De la nature humaine ils soutiennent les droits, Vivent libres chez eux et meurent à leur choix. […] Ils n’estimaient que cette généreuse sensibilité qui défend l’innocence opprimée, soutient la faiblesse et soulage le malheur.

781. (1809) Tableau de la littérature française au dix-huitième siècle

On s’est si souvent trompé sur les choses et sur les hommes, qu’on veut bien soutenir son opinion, mais jusqu’au feu exclusivement, comme dit Montaigne. […] La cause que Perrault avait soutenue sans savoir et sans esprit, contre Racine et Boileau, fut embrassée par Lamothe. […] Après Œdipe, où il avait été soutenu par Sophocle, Voltaire ne put obtenir de triomphe complet. […] De cette sorte, l’histoire fut privée de tout ce qui donne aux récits un intérêt vif et soutenu. […] en avait-il appelé à la force et soutenu la guerre civile, pour maintenir une autorité absolue ?

782. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre I. Les origines. — Chapitre II. Les Normands. » pp. 72-164

En effet, ils sont en pays ennemi et conquis, et il faut bien qu’ils se soutiennent. […] À côté de lui, parfois dans l’assemblée, le plus souvent dans l’assistance, sont les yeomen, fermiers, forestiers, gens de métiers, ses compatriotes, hommes musculeux et décidés, bien disposés à défendre leur propriété, à soutenir de leurs acclamations, avec leurs poings, et aussi avec leurs armes, celui qui prendra en main leurs intérêts. […] Il portait à son côté une épée et un bouclier ; c’était un querelleur et un gaillard139. » Voilà les figures athlétiques, les culasses carrées, les façons de taureau joyeux, qu’on trouve encore là-bas, entretenues par le porter et la viande, soutenues par l’habitude des exercices du corps et des coups de poing. […] Telle est la classe obscure encore, mais chaque siècle plus riche et plus puissante, qui, fondée par l’aristocratie saxonne rabaissée et soutenue par le caractère saxon conservé, a fini, sous la conduite de la petite noblesse normande et sous le patronage de la grande noblesse normande, par établir et asseoir une constitution libre et une nation digne de la liberté. […] L’antique langage reparaît en partie, et l’antique mètre reparaît tout à fait ; plus de rimes, mais des allitérations barbares ; plus de badinage, mais une gravité âpre, une invective soutenue, une imagination grandiose et sombre, de lourds textes latins, assénés comme par la main d’un protestant.

783. (1863) Histoire de la vie et des ouvrages de Molière pp. -252

Il les avait suivis et soutenus dans le commencement à cause de moi ; mais alors, étant devenu amoureux de la Du Parc, il songea à se servir lui-même. […] Un organiste de Troyes, nommé Raisin, cherchant les moyens de soutenir sa nombreuse famille, fit faire un clavecin plus grand que les clavecins ordinaires, qui paraissait aller tout seul. […] Mais, après ce récit, Molière ne voulut point lire sa traduction, craignant qu’elle ne fût pas assez belle pour soutenir les louanges qu’il venait de recevoir. […] Mais elle ne prit point le change ; et, après avoir entendu la lecture de quelques morceaux, elle soutint à son maître qu’il n’en était pas l’auteur. […] Moi qui sais qu’il les achète, Je soutiens qu’ils sont à lui.

784. (1854) Nouveaux portraits littéraires. Tome II pp. 1-419

Je sais que l’opinion contraire est généralement accréditée ; mais cette opinion ne soutient pas l’examen. […] Il lut au roi Robert les premiers chants de l’Afrique, et soutint pendant trois jours un examen public sur la plupart des connaissances humaines. […] Écrit en tercets, comme la Divine Comédie, il soutient sans désavantage la comparaison. […] Grâce à la volonté ferme qui le soutient, grâce à l’espérance qu’il a conçue, il devient en peu d’années capable de remplir les fonctions les plus élevées et les plus diverses. […] Que Claudie lui avoue sa faute, qu’elle ne lui cache rien, et il l’aimera résolument, il la soutiendra comme si elle était pure et sans tache.

785. (1874) Portraits contemporains : littérateurs, peintres, sculpteurs, artistes dramatiques

On pensait que la représentation serait tumultueuse, et il fallait des jeunes gens enthousiastes pour soutenir la pièce. […] Jamais les vocalises de Garat ne s’épanouissaient plus brillamment que lorsqu’elles étaient soutenues par les accords de madame Gay. […] La Dette chantait d’abord un solo que soutenait bientôt un chœur immense. […] Des capitaines au long cours qui avaient fait dix fois le voyage de Marseille à Calcutta ont soutenu que l’auteur d’Heva avait secrètement visité l’Inde. […] D’ailleurs il eût craint d’y mettre l’effort soutenu, la contention préoccupée et laborieuse de l’homme de lettres de profession.

786. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCVe entretien. Alfred de Vigny (2e partie) » pp. 321-411

« Je regardais mon vieux commandant ; il marchait à grands pas, avec une vigueur toujours soutenue, tandis que son mulet n’en pouvait plus, et que mon cheval même commençait à baisser la tête. […] « Quelle idée le soutiendra, si ce n’est celle du devoir et de la parole jurée ? […] Une fermeté invincible le soutient contre tous et contre lui-même à cette pensée de veiller sur ce tabernacle pur, qui est dans sa poitrine comme un second cœur où siègerait un dieu. […] … Tantôt il porte l’homme à ne pas survivre à un affront, tantôt à le soutenir avec un éclat et une grandeur qui le réparent et en effacent la souillure.

787. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CIVe entretien. Aristote. Traduction complète par M. Barthélemy Saint-Hilaire (2e partie) » pp. 97-191

Je m’afflige donc, sans trop m’étonner, des irrégularités de toute sorte qui la déparent ; mais je soutiens que, malgré tant de lacunes, tant d’obscurités, tant d’insuffisances, sans même parler d’interpolations incontestables, la Poétique est encore digne du génie d’Aristote. […] Aristote avait toutes les armes nécessaires pour soutenir la lutte : le génie d’abord, hautement reconnu, et développé même par son maître ; les vastes connaissances ; les enseignements de la philosophie antérieure, et les discussions prolongées vingt ans au sein de l’école qu’il devait combattre, sans compter les trésors d’un roi capable de comprendre ses études en les favorisant. […] Plus tard, il soutiendra qu’elle est une substance, qu’elle est en acte et non pas seulement en puissance ; mais nous verrons en quel sens il prête à l’âme la substantialité et l’énergie. […] Considérons ce qu’elle peut devenir, lorsque, se livrant tout entière à cette poursuite, elle s’élève par ce noble élan du fond des flots qui la couvrent aujourd’hui, et qu’elle se débarrasse des cailloux et des coquillages qu’amasse autour d’elle la vase dont elle se nourrit, croûte épaisse et grossière de terre et de sable10. » Puis, dans cette sage conciliation que Platon a tentée entre le sensualisme ionien et l’idéalisme de Mégare, il employait la douce ironie qu’il avait apprise de Socrate, à se moquer « de ces hommes semés par Cadmus, de ces vrais fils de la terre, qui soutiennent hardiment que tout ce qu’ils ne peuvent pas palper n’existe en aucune manière ; de ces terribles gens qui voudraient saisir l’âme, la justice, la sagesse, ou leurs contraires, comme ils saisissent à pleines mains les pierres et les arbres qu’ils rencontrent, et qui n’ont que du mépris, et n’en veulent pas entendre davantage, quand on vient leur dire qu’il y a quelque chose d’incorporel11 ».

788. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXIe entretien. Conversations de Goethe, par Eckermann (3e partie) » pp. 5-96

Mais il y avait en lui assez de force résistante, aussi il a pu se maintenir un assez grand nombre d’années, et il se serait soutenu encore longtemps avec une manière de vivre plus saine. » Et Manzoni vit encore ! […] Si Dieu ne donnait pas à l’oiseau cet instinct pour ses petits, si un instinct pareil n’était pas répandu dans toute la nature vivante, le monde ne se soutiendrait pas ; mais partout est répandue la force divine, partout agit l’amour éternel !  […] « Voilà, dit-il, un sujet de la plus grande élévation ; nous avons là, devant les yeux, sous une belle image, le principe vivifiant répandu dans la nature entière, et qui soutient le monde ; cette œuvre et celles du même genre sont pour moi les vrais symboles de l’omniprésence de Dieu. » * * * Lundi, 6 juin 1831. […] Dans les longs intervalles de ce travail sans fin, il se livre par délassement à son souffle lyrique ; il écrit des odes, des ballades, des poésies symboliques de forme, très élevées de sens, très mélodieuses de rythme, que les femmes et les enfants comprennent, et qui sont, comme le chœur antique, destinées à reposer à la fois et à soutenir l’attention de l’Allemagne devant ses drames.

789. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Malherbe et son école. Mémoire sur la vie de Malherbe et sur ses œuvres par M. de Gournay, de l’Académie de Caen (1852.) » pp. 67-87

Mais ce ne sont là que deux strophes ; le reste de la pièce ne se soutient pas à cette hauteur. […] Toute l’ode de Maynard se continue et se soutient dans cet ordre d’idées : c’est le lieu commun éternel sur le néant de toute chose, sur la nécessité de mourir, quoi qu’on fasse.

790. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Joinville. — II. (Fin.) » pp. 513-532

On a à traverser un bras du Nil ou canal, et ce n’est point sans grand effort qu’on y parvient ; car les Sarrasins lancent le feu grégeois, et les tours en bois que construisent les croisés pour soutenir les travailleurs sont en danger d’être incendiées. […] Un jour, malade et affaibli lui-même par la fièvre, il le voit, pendant qu’il disait la messe devant lui, chancelant et prêt à défaillir au moment de la consécration : Quand je vis qu’il voulait choir, moi qui avais vêtu ma cotte, je sautai de mon lit nus pieds comme j’étais, et le soutins dans mes bras, et lui dis qu’il fît tout à son aise et tout bellement son sacrement (sa consécration z), que je ne le lairrais tant qu’il l’aurait fait. — Il revint à soi et fit son sacrement, et acheva de chanter sa messe d’un bout à l’autre ; et oncques depuis ne chanta.

791. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Mémoires ou journal de l’abbé Le Dieu sur la vie et les ouvrages de Bossuet, publiés pour la première fois par M. l’abbé Guetté. Tomes iii et iv· » pp. 285-303

de sorte que tous mes soins se tournaient uniquement à mériter un canonicat pour mon cousin, et il fallait s’y conduire avec d’autant plus de sagesse que l’abbé Bossuet était toujours à l’affût pour me chagriner et chercher noise… Mais Dieu m’a fait la grâce de prendre patience et de me soutenir toujours par l’espérance des bontés de M. de Meaux. […] Les jeunes neveux ne parlaient pas : l’abbé de Beaumont soutenait la conversation, qui roula fort sur le voyage de M. de Cambrai ; mais cet abbé était très honnête, et je n’aperçus rien, ni envers personne de ces airs hautains et méprisants que j’ai tant de fois éprouvés ailleurs47 : j’y ai trouvé en vérité plus de modestie et de pudeur qu’ailleurs, tant dans la personne du maître que dans les neveux et autres.

792. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Maine de Biran. Sa vie et ses pensées, publiées par M. Ernest Naville. » pp. 304-323

Trente ans plus tard, il finira par les résoudre dans le sens favorable à l’âme, à sa force active, et encore en supposant cette force aidée et soutenue par une puissance supérieure et un esprit qui lui communique une sorte de grâce. […] Il m’est impossible de faire autrement ; mon malheur et mon trouble, mon inutilité, tout vient de n’être pas commandé, de n’être soutenu par rien : je manque d’idée fixe et de but.

793. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Mémoires de l’abbé Legendre, chanoine de Notre-Dame secrétaire de M. de Harlay, archevêque de Paris. (suite et fin). »

Lorsque l’abbé Legendre fit la connaissance de l’archevêque, le prélat était au plus fort de l’engagement dans la lutte soutenue par Louis XIV pour les droits de sa couronne et les libertés de l’Église gallicane contre la Cour de Rome ; on était au lendemain de l’Assemblée de 1682. […] Étaient-ils vrais pour le positif des faits allégués, comme l’auteur le soutint toujours ?

794. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « La comtesse d’Albany par M. Saint-René Taillandier (suite et fin.) »

Je suis fâché que ce cœur, fortifié et soutenu par Alfieri, ait eu besoin d’un autre appui. » M. de Chateaubriand ne tient aucun compte, dans ce portrait dénigrant, d’un certain « air majestueux » que d’autres ont reconnu jusqu’à la fin à Mme d’Albany. […] elle s’en garda bien, elle resta digne, fidèle au nom dont elle soutenait l’honneur par ses talents et par sa haute raison : elle eût près d’elle, dans les dernières années de sa maturité et jusque dans son extrême vieillesse, un ami constant, fidèle et sur, un autre Fabre, Fauriel.

795. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Dominique par M. Eugène Fromentin »

Ainsi il a fait à El-Aghouat, ainsi à Aïn-Mahdy : et du haut de cette station dominante, promenant partout le regard, pensant aussi aux luttes sanglantes dont ces villes ignorées furent le théâtre, à ces sièges qu’elles soutinrent, et aux scènes humaines émouvantes qui durent se passer autour de ces murailles, il dira : « De ma terrasse, en m’accoudant sur un mur crénelé qui fait partie du rempart, j’embrasse une grande moitié de l’oasis et toute la plaine, depuis le sud où le ciel enflammé vibre sous la réverbération lointaine du désert, jusqu’au Nord-Ouest où la plaine aride, brûlée, couleur de cendre chaude, se relève insensiblement vers les montages. […] C’est là, à El-Aghouat, dans cette ville conquise de la veille et tout récemment française, qu’il va passer plusieurs semaines à peindre, à regarder, à s’imbiber de lumière et de soleil ; c’est de là qu’il fera une pointe de quelques jours jusqu’à Aïn-Mahdy à l’Ouest, une ville sainte, célèbre par le siège qu’elle soutint contre Abdel-Kader et par une lutte fratricide qui n’est pas à l’honneur de ce dernier.

796. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Catinat (suite.). Guerre des Barbets. — Horreurs. — Iniquités. — Impuissance. »

Les ambassadeurs suisses firent alors un dernier et suprême effort de médiation ; dans une lettre des plus pressantes qui fut lue en chaire par toutes les paroisses vaudoises, ils disaient81 : « Nous avons vu que vous avez beaucoup de peine à vous résoudre de quitter votre patrie, qui vous est d’autant plus chère que vos ancêtres l’ont possédée par plusieurs siècles et défendue valeureusement avec la perte de leur sang ; que vous vous confiez que Dieu, qui les a soutenus plusieurs fois, vous assistera aussi et que vous appréhendez même qu’une déclaration pour la sortie ne soit qu’un piège pour vous surprendre et accabler : nous vous dirons pour réponse que nous convenons avec vous que la loi qui oblige à quitter une chère patrie est fort dure ; vous avouerez que celle qui oblige à quitter l’Éternel et son culte est encore plus rude, et que de pouvoir faire le choix de l’un avec l’autre est un bonheur qui, en France, est refusé à des personnes de haute naissance et d’un éminent mérite, et qui s’estimeraient heureuses si elles pouvaient préférer une retraite à l’idolâtrie. » Quelle tache et quelle honte pour la France de Louis le Grand qu’une atroce injustice comme celle-ci trouve presque à se glorifier et à s’absoudre par l’exemple d’une injustice plus abominable encore, dont elle offrait alors au monde l’odieux et parfait modèle ! […] Il est vrai que le bras de Dieu, qui vous a soutenus dans les guerres passées, n’est pas encore raccourci ; mais si vous faites réflexion qu’un puissant roi s’est joint aux forces de votre prince, que les provisions, les officiers et l’union vous manquent, et que même vos obstinations vous feront abandonner de tous les princes et des États protestants…, vous ne pouvez pas espérer que la Providence divine, qui n’agit pas miraculeusement comme autrefois parmi les Israélites, veuille faire de vos ennemis ce qu’elle fit de Sennacherib ; et la parole de Dieu vous apprend que de se jeter dans les dangers sans prévoir humainement aucun moyen d’en sortir, c’est tenter Dieu qui laisse périr ceux qui aiment témérairement le danger… » On peut se figurer l’effet que dut produire la lecture d’une telle épître sur un auditoire mêlé de personnes timides, de vieillards, de femmes et d’enfants.

797. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Catinat (suite et fin.) »

Il aime le roi et l’État ; il sent que l’un et l’autre sont chargés d’une guerre qui ne peut se soutenir partout avec supériorité. […] Je me recueillerai et me soutiendrai de toutes mes forces pour rendre mes services utiles dans les opérations de guerre auxquelles on se prépare, et je n’oublierai rien pour effacer la mauvaise satisfaction que Sa Majesté a témoignée de mes services pendant cette campagne.

798. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand (suite.) »

Comprendre une situation, recueillir les influences éparses autour de lui et les diriger vers un point auquel il était de leur intérêt d’arriver, c’était là son talent particulier, Mais soutenir une lutte longue et prolongée, intimider et dominer les partis en lutte, cela dépassait la mesure de ses facultés, ou plutôt de son tempérament calme et froid31. » Il fut heureux d’échapper le plus tôt possible aux ennuis de sa situation à l’intérieur en prenant en main le jeu diplomatique et en allant représenter la France au congrès de Vienne. […] Avait-il raison, au contraire, comme le soutient sir Henry Bulwer, de saisir avec habileté le joint et de ne pas manquer l’occasion de diviser tes grandes puissances ?

799. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Madame Desbordes-Valmore. »

Lorsque j’ai rendu cette réponse très adoucie à Garat, il a dit : “On peut voir à présent que ce n’est pas moi qui suis l’hyène…” » — Et le 6 août 1822 : « Garat traîne sa vie ; il va tous les jours à Feydeau, mais soutenu par deux personnes. […] Les députés s’avalent bien de temps en temps, mais cela ne change rien aux plaisirs ni à notre bon gouvernement, qui est soutenu par la sagesse de notre roi et par l’esprit de l’armée qui est bon… » La spirituelle chroniqueuse, on le voit, était dans les meilleurs principes.

800. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Le général Jomini. [III] »

Le parti qui me reste à prendre n’est pas difficile à préjuger : je dois soutenir mon rôle et savoir mourir au besoin. […] Cependant, depuis un an, ma position est devenue telle, que je ne pouvais plus espérer de soutenir les fatigues d’un service à l’état-major.

801. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « George Sand — Note »

Elle y fut amenée par Planche qui lui servait de cavalier, et qui était alors dans une de ses courtes et rares périodes d’élégance ; elle connaissait très-peu d’entre nous, trois ou quatre au plus ; elle fut l’objet d’une vive curiosité qu’elle soutint simplement et avec bon goût, observant, parlant peu ; elle se retira de bonne heure. […] Il y a des hommes qui viennent au monde tout faits et qui n’ont pas de lutte à soutenir contre les écueils où les autres s’engagent et se choquent : ils passent au travers sans savoir seulement qu’ils existent, et parfois ils s’étonnent de voir tant de débris flotter autour d’eux.

802. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « MME DESBORDES-VALMORE. (Les Pleurs, poésies nouvelles. — Une Raillerie de l’Amour, roman.) » pp. 91-114

C’était accepter la question tout entière comme on l’avait posée, c’était ne l’éluder en rien et la soutenir dans sa complète importance, dans la hardiesse du premier défi. […] A part quelques grands poëtes qui soutiendront de l’ensemble de leur œuvre l’assaut du temps, qui de nous oserait en désirer pour lui, en espérer davantage ?

803. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre III. Les tempéraments et les idées — Chapitre III. Montesquieu »

Il développe avec toute sa science et sa pénétration les rapides indications de Bossuet, quand il nous expose le fond de l’âme romaine, cet amour de la liberté, du travail et de la patrie, la force des institutions militaires, et de la discipline ; l’ardeur des luttes intestines, qui tiennent les esprits toujours actifs, toujours en haleine, et qui s’effacent toujours dans les occasions de danger extérieur ; la constance de la nation dans les revers, et cette maxime de ne faire jamais la paix que vainqueurs ; enfin l’habileté du sénat, dont la substance se réduit à trois principes : soutenir les peuples contre les rois, laisser aux vaincus leurs mœurs, et ne prendre qu’un ennemi à la fois. […] Aussi le néglige-t-il tout à fait par la suite, et rien ne donne plus à son ouvrage le caractère d’un système abstrait, qu’aucune réalité vivante ne soutient.

804. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Jules de Glouvet »

La thèse que soutient ici M. de Glouvet est si juste qu’il ne faut pas lui en vouloir si ces deux romans sont un peu trop conçus comme des démonstrations. […] Même quand on n’est pas capable d’apporter dans cet exercice l’imagination drue, robuste, copieuse, qui sauve et soutient les Contes drolatiques de Balzac, ces contes sont encore agréables à ceux qui les écrivent, et d’aventure à ceux qui les lisent, et c’est le cas des Histoires du vieux temps de M. 

805. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre IX, les mythes de Prométhée »

La guerre de dix ans que les Titans soutiennent sur le champ de bataille de la Thessalie, entre l’Olympe et l’Othryx, contre Zeus tonnant dans le ciel, n’est au fond qu’une époque géologique en action. […] Cariatide du firmament, le géant vaincu soutenait sur sa tête courbée, de ses bras raidis, l’énorme rondeur du Zodiaque.

806. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre XI, les Suppliantes. »

— « Mieux vaut soutenir une guerre que de livrer des Suppliants », dit Euripide dans les Héraclides. […] Un des magistrats du pays, Aristodichos, soutint que les messagers avaient menti ou mal entendu.

807. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres de lord Chesterfield à son fils. Édition revue par M. Amédée Renée. (1842.) » pp. 226-246

Issu d’une race illustre, il en savait le prix, il voulait en soutenir l’honneur ; mais il lui était difficile pourtant de ne pas rire des prétentions généalogiques poussées trop loin. […] Ce qui soutient et presque ce qui touche le lecteur, dans cette lutte où tant d’art est dépensé et où l’éternel conseil revient toujours le même au fond sous tant de métamorphoses, c’est l’affection vraie, paternelle, qui anime et qui inspire le délicat et l’excellent maître, patient cette fois autant que vif, prodigieux de ressources et d’adresse, jamais découragé, inépuisable à semer sur ce sol ingrat les élégances et les grâces.

808. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Les Mémoires de Saint-Simon. » pp. 270-292

Marié à la fille du maréchal de Lorges, vivant vertueusement et à la fois dans le plus grand monde, il se montrait, en toute occasion, très jaloux de soutenir les prérogatives attachées au rang de duc et pair ; il s’engagea, à ce propos, dans plusieurs procès et contestations qu’il soutint avec chaleur, et qui lui donnaient, de son temps même, une légère teinte de manie et de ridicule.

809. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Mémoires du cardinal de Retz. (Collection Michaud et Poujoulat, édition Champollion.) 1837 » pp. 40-61

Retz nous le dit, et Tallemant, qui était du voyage et de sa compagnie, nous le confirme expressément : « Il le faut bien louer d’une chose, dit Tallemant, c’est qu’à Rome, non plus qu’à Venise, il ne vit pas une femme, ou il en vit si secrètement que nous n’en pûmes rien découvrir. » Avec cela il s’appliquait à relever cette modestie de passage d’une grande dépense, de belles livrées, d’un équipage très cavalier ; et un jour, pour soutenir le point d’honneur et plutôt que de céder le terrain dans un jeu de paume, il fut près de tirer l’épée avec sa poignée de gentilshommes contre toute l’escorte de l’ambassadeur de l’Empire. […] Ce n’est que dans ses dernières années que Retz se relève, qu’il recouvre quelque dignité par une retraite noblement soutenue, qu’il réveille même l’idée de probité par d’immenses dettes complètement payées, et qu’il se rachète à nos yeux dans l’ordre de l’esprit par la composition de ses incomparables Mémoires.

810. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le Brun-Pindare. » pp. 145-167

J’extrais ces paroles d’un factum ou Mémoire publié par Mme Le Brun en 1781, dans le procès qu’elle soutenait contre son mari depuis le mois de mars 1774. […] Il n’est pas nombreux avec suite ni d’une manière soutenue ; ses jets de talent sont isolés et attestent une force ingrate, à laquelle le ciel ni les parents n’ont jamais souri… Cui non risere parentes.

811. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Montesquieu. — II. (Fin.) » pp. 63-82

Et parlant du grand ouvrage que Montesquieu préparait depuis vingt ans, M. d’Argenson ajoutait : J’en connais déjà quelques morceaux qui, soutenus par la réputation de l’auteur, ne peuvent que l’augmenter ; mais je crains bien que l’ensemble n’y manque, et qu’il n’y ait plus de chapitres agréables à lire, plus d’idées ingénieuses et séduisantes, que de véritables et utiles instructions sur la façon dont on devrait rédiger les lois et les entendre… Je lui connais tout l’esprit possible ; il a acquis les connaissances les plus vastes, tant dans ses voyages que dans ses retraites à la campagne ; mais je prédis encore une fois qu’il ne nous donnera pas le livre qui nous manque, quoique l’on doive trouver dans celui qu’il prépare beaucoup d’idées profondes, de pensées neuves, d’images frappantes, de saillies d’esprit et de génie, et une multitude de faits curieux, dont l’application suppose encore plus de goût que d’étude. […] Il avait la bonhomie de croire qu’il avait négligé de faire la fortune de son nom et l’illustration de sa maison : « J’avoue, disait-il, que j’ai trop de vanité pour souhaiter que mes enfants fassent un jour une grande fortune ; ce ne serait qu’à force de raison qu’ils pourraient soutenir l’idée de moi ; ils auraient besoin de toute leur vertu pour m’avouer. » Ainsi il croyait, par exemple, que si l’un de ses enfants devenait ministre, chancelier, ou quelque chose de tel, ce serait un embarras à un personnage si considérable que d’avoir un père ou un aïeul comme lui qui n’aurait fait que des livres, Ceci même est un excès de modestie ou un reste de préjugé qu’on a peine à comprendre.

812. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Grimm. — II. (Fin.) » pp. 308-328

En France, il salue donc comme incomparable le siècle de Louis XIV ; et, au xviiie  siècle, il ne trouve qu’une classe d’hommes supérieurs et d’une espèce particulière, la seule qui manquât au grand siècle : « Je les appellerai volontiers philosophes de génie : tels sont M. de Montesquieu, M. de Buffon, etc. » Voltaire est le seul des littérateurs purs et des poètes qui soutienne le vrai goût par ses grâces., son imagination et sa fertilité naturelle : mais, selon Grimm il ne fait que soutenir ce qui fléchissait déjà.

813. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre IV : La philosophie — II. L’histoire de la philosophie au xixe  siècle — Chapitre II : Rapports de l’histoire de la philosophie avec la philosophie même »

D’ailleurs soutenir que toutes ces explications prétendues ne sont que des créations arbitraires, est-ce autre chose que le point de vue sceptique, c’est-à-dire précisément un des systèmes qu’il s’agit d’expliquer ? […] Cette explication est démentie en outre par la plus forte de toutes les raisons, par l’expérience, car on ne voit pas qu’il y ait une liaison nécessaire entre les doctrines et les mœurs, et l’on a vu trop souvent en philosophie de graves erreurs soutenues par des hommes d’une conduite irréprochable.

814. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre III : Concurrence vitale »

Une preuve évidente que le climat agit principalement d’une manière indirecte en favorisant d’autres espèces, c’est que nous voyons dans nos jardins une prodigieuse quantité de plantes supporter parfaitement notre climat, sans qu’elles puissent jamais s’y naturaliser à l’état sauvage, parce qu’elles ne pourraient ni soutenir la concurrence avec nos plantes natives, ni se défendre efficacement contre nos animaux indigènes. […] Chez les Coléoptères aquatiques, la structure des pieds, si bien disposés pour plonger, leur permet de soutenir la concurrence contre d’autres insectes, de chasser aisément leur propre proie et d’échapper au danger de devenir la proie d’autres animaux.

815. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre v »

J’ai prié et le Seigneur m’a soutenu, m’a donné le calme. […] Et je veux vous le dire aussi, le Dieu infiniment puissant et miséricordieux, dans lequel nous croyons tous, quoique différents de religion, dans lequel votre fils croyait (il me l’a dit), a pris auprès de lui, je l’espère, l’âme droite et loyale, qui s’est sacrifiée pour le devoir, et il l’a prise pour l’immortalité… J’ai prié du fond de mon cœur hier, aujourd’hui, ce Dieu de miséricorde, de recevoir votre fils auprès de lui, et de vous réunir à lui, quand le temps sera venu pour une réunion éternelle et heureuse… Puisse cette parole d’un ministre de Dieu, non pas calmer votre douleur, mais vous apporter l’espérance, soutenir votre courage, vous aider à supporter le sacrifice.

816. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre XI : M. Jouffroy moraliste »

Jouffroy n’a pas fait, analyser le mot douteux au moyen d’exemples ; il n’y a point de terme ambigu qui, sous cette torture, ne découvre sa double face et ne ruine la fiction qu’il soutient. […] Jouffroy demeura dans cette religion, qui fournissait un aliment à sa foi sans fermer la carrière à sa logique, qui s’appuyait sur la science nouvelle, au lieu d’être ébranlée par la science nouvelle, qui défendait la liberté au lieu de soutenir la tyrannie, et qui, tolérante, accréditée, nationale, convenait à son patriotisme, à son orgueil et à sa raison.

817. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre X. »

C’est à ce prix que, l’année même de Salamine, après d’autres succès d’Eschyle, elle avait atteint, dans le drame des Perses, cette élévation que devait soutenir et tempérer le majestueux Sophocle, et qui n’a pas été surpassée dans la suite des siècles, non plus que la grandeur de la statuaire antique. […] La cause ancienne de cette opinion tenait sans doute à une sorte de rudesse des hommes de la Béotie, n’ayant pas eu, comme ceux d’Athènes, l’activité du commerce et des arts, vivant d’une vie plus simple, laboureurs et bergers, et ne pratiquant pas, comme les Spartiates, leurs voisins, cette forte discipline, cette vertueuse et austère pauvreté qui, seule aux yeux des Grecs, soutenait le parallèle avec la magnificence et le bon goût d’Athènes.

818. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XX. Le Dante, poëte lyrique. »

C’est qu’en dépit de la division systématique soutenue dans quelques ouvrages célèbres, il n’y a pas deux mondes distincts pour l’imagination, il n’y a pas deux grandes écoles égales et contraires ; il y a moins et plus. […] « Après qu’il se fut davantage approché de nous, l’oiseau divin parut plus brillant ; et l’œil, n’en pouvant soutenir l’éclat, s’abaissait ébloui.

819. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Bossuet. Œuvres complètes publiées d’après les imprimés et les manuscrits originaux, par M. Lachat. (suite et fin) »

Cependant, entre tous les miracles oratoires de Bossuet, il n’en est aucun qui surpasse le Panégyrique de saint Paul, prêché par lui en juin 1657 (il avait trente ans) dans l’intérêt de l’Hôpital général, la Salpêtrière, qui venait d’être fondé et qui avait besoin d’être soutenu par la charité publique.

820. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « APPENDICE. — M. DE VIGNY, page 67. » pp. -542

La plupart des époques ne présentent pas la vie réelle aussi artistement arrangée que dans cette cour romanesque et intrigante ; elles ont toujours quelque chose de vulgaire et de trivial à quoi l’on est forcé de suppléer ; et, pour les traduire en roman, il est besoin d’un fonds de fiction qui les anime et les soutienne.

821. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section III. Des ressources qu’on trouve en soi. — Chapitre II. De la philosophie. »

Rien cependant n’inspire autant d’horreur que la possibilité d’exister uniquement, parce qu’on ne sait pas mourir ; et comme c’est le sort qui peut attendre toutes les grandes passions, un tel objet d’effroi suffit pour faire aimer cette puissance de philosophie, qui soutient toujours l’homme au niveau de la vie, sans l’y trop attacher, mais sans la lui faire haïr.

822. (1823) Racine et Shakspeare « Chapitre III. Ce que c’est que le Romanticisme » pp. 44-54

Le classique prudent au contraire, ne s’avance jamais sans être soutenu, en cachette, par quelque vers d’Homère, ou par une remarque philosophique de Cicéron, dans son traité de Senectute.

823. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Contre une légende »

Renan…   Je pourrais ajouter que cet homme « fuyant » a eu la vie la plus harmonieuse, la plus soutenue, la plus une qu’on puisse concevoir ; que cet « épicurien » a autant travaillé que Taine ou Michelet ; que ce grand « je m’enfichiste » (car on a osé l’appeler ainsi) est, au Collège de France, l’administrateur le plus actif, le plus énergique et le plus décidé quand il s’agit des intérêts de la haute science ; que, s’il se défie, par crainte de frustrer l’humanité, des injustices où entraînent les « amitiés particulières » il rend pourtant des services, et que jamais il n’en a promis qu’il n’ait rendus ; que sa loyauté n’a jamais été prise en défaut ; que cet Anacréon de la sagesse contemporaine supporte héroïquement la souffrance physique, sans le dire, sans étaler son courage ; que ce sceptique prétendu est ferme comme un stoïcien, et qu’avec tout cela ce grand homme est, dans toute la force et la beauté du terme, un bon homme… Mais je ne sais s’il lui plairait qu’on fît ces révélations, et je m’arrête.

824. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « La Tolérance »

Et le triste de l’affaire, c’est qu’on est beaucoup plus intolérant pour défendre les opinions que l’on a héritées ou que l’on accepte comme le mot d’ordre d’un parti que pour soutenir celles qu’on a essayé de se faire tout seul : car alors on sait par expérience ce qui s’y mêle d’incertitude… Ah !

825. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre X. Zola embêté par les jeunes » pp. 136-144

Lisez (si vous souriez, je vous prierai de me croire sur parole) la déjà longue série des romans jeunes de Zola, Les Mystères de Marseille, Le Vœu d’une morte… puis lisez les Contes à Ninon, et enfin les Rougon-Macquart, soutiendrez-vous que l’artiste n’ait point évolué, n’ait point lentement et mûrement corrigé sa manière ?

826. (1890) L’avenir de la science « VII »

On peut affirmer que, sans cet attrait, jamais les premiers érudits des temps modernes, qui n’étaient soutenus ni par une haute vue philosophique, ni par un motif immédiatement religieux, n’eussent entrepris ces immenses travaux, qui nous rendent possibles les recherches de haute critique.

827. (1890) L’avenir de la science « XX »

Cela posé, je soutiens que tous les vices de notre développement intellectuel viennent de la ploutocratie et que c’est par là surtout que nos sociétés modernes sont inférieures à la société grecque.

828. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XII. Ambassade de Jean prisonnier vers Jésus  Mort de Jean  Rapports de son école avec celle de Jésus. »

Pour fonder la mission de celui-ci sur un témoignage admis de tous, on raconta que Jean, dès la première vue de Jésus, le proclama Messie ; qu’il se reconnut son inférieur, indigne de délier les cordons de ses souliers ; qu’il se refusa d’abord à le baptiser et soutint que c’était lui qui devait l’être par Jésus 575.

829. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XVIII » pp. 198-205

Molière, soutenu de ces autorités, donna bientôt La Critique de l’École des femmes, c’est-à-dire mit en scène et livra au ridicule les censures qui avaient été faites de sa pièce, dont il aggrava les indécences, se targuant de l’approbation de la cour.

830. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 312-324

La fausse clarté de ceux-ci n’est que le produit de la corruption, s’éteint avec elle : l’autre est une clarté, dont l’éclat soutenu ne permet pas de méconnoître le vrai Guide destiné à nous conduire.

831. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Jean de Meun, et les femmes de la cour de Philippe-le-Bel. » pp. 95-104

Ils écrivirent qu’elles avoient mal pris le sens de son livre ; que le roman étoit une allégorie soutenue ; que, par cette rose, l’objet des vœux de l’amant, il falloit entendre la sagesse, ou l’état de grace, ou la sainte Vierge, ou bien l’éternelle béatitude.

832. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Seconde Partie. De l’Éloquence. — Éloquence du barreau. » pp. 193-204

Au lieu de soutenir comme lui (ce qui pourtant est très-vrai dans le fond) qu’il n’y a presque point de cas où l’on soit obligé de citer, & que, de mille arrêts qu’on rapporte & dont on se prévaut pour sa cause, il n’y en a pas deux qui se ressemblent ou qui y reviennent ; ils dirent simplement qu’en fait de citations, il falloit du choix, de la justesse & de l’économie.

833. (1867) Le cerveau et la pensée « Avant-propos »

Et qui pourrait soutenir qu’il n’est pas démontré que le cerveau est l’organe de la pensée ?

834. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre cinquième. La Bible et Homère. — Chapitre III. Parallèle de la Bible et d’Homère. — Termes de comparaison. »

Il en résulte un ébranlement, un froissement incroyable pour l’âme : car lorsque, exalté par la pensée, l’esprit s’élance dans les plus hautes régions, soudain l’expression, au lieu de le soutenir, le laisse tomber du ciel en terre, et le précipite du sein de Dieu dans le limon de cet univers.

835. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre quatrième. Éloquence. — Chapitre II. Des Orateurs. — Les Pères de l’Église. »

Toujours en action, toujours en repos, vous soutenez, vous remplissez, vous conservez l’univers ; vous aimez sans passion, vous êtes jaloux sans trouble ; vous changez vos opérations et jamais vos desseins… Mais que vous dis-je ici, ô mon Dieu !

836. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « XI »

Quant à soutenir qu’on peut avec quelques procédés acquérir le style des grands auteurs, et que tout grimaud, en y mettant le temps, peut devenir un Chateaubriand, il n’est pas en mon pouvoir d’empêcher M. 

837. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « XV »

Fiez-vous à votre premier jet. » Qui osera le soutenir ?

838. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre III. Des éloges chez tous les premiers peuples. »

Ainsi partout l’intérêt public a dicté les éloges ; chaque nation a loué ce qui était utile à ses besoins ou à ses plaisirs ; on a loué la piraterie chez les Scandinaves, le brigandage chez les Huns, le fanatisme chez les Arabes, les vertus douces et les talents chez les peuples civilisés, la chasse ou la pêche chez les sauvages, la navigation chez les habitants des îles ; mais il y a une qualité qui partout a toujours été également louée, c’est celle qui a créé toutes les révolutions, qui bouleverse tout, qui assujettit tout, qui soutient les lois et qui les combat, qui fonde les empires et qui les détruit, à qui tout est soumis dans la nature, et devant qui l’univers et les panégyristes seront éternellement prosternés : la force.

839. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XV. De Tacite. D’un éloge qu’il prononça étant consul ; de son éloge historique d’Agricola. »

Domitien, naturellement féroce, et d’autant plus implacable dans sa haine qu’elle était plus cachée, était cependant retenu par la prudence et la modération d’Agricola ; car il n’affectait point ce faste de vertu et ce vain fanatisme qui, en bravant tout, veut attirer sur soi l’œil de la renommée ; que ceux qui n’admirent que l’excès sachent que même sous de mauvais princes, il peut y avoir de grands hommes, et qu’une vertu calme et modeste, soutenue par la fermeté et les talents, peut parvenir à la gloire, comme ces hommes qui n’y marchent qu’à travers les précipices, et achèvent la célébrité par une mort éclatante, mais inutile à la patrie46. » Toutes les fois que Tacite parle des vertus d’Agricola, son âme fière et ardente paraît s’adoucir un peu ; mais il reprend la mâle sévérité de son pinceau pour peindre le tyran soupçonné d’avoir fait empoisonner ce grand homme, s’informant avec une curiosité inquiète des progrès de sa maladie, attendant sa mort de moment en moment, et osant feindre de la douleur, lorsqu’assuré qu’Agricola n’est plus, il est enfin tranquille sur l’objet de sa haine.

840. (1859) Cours familier de littérature. VII « XXXIXe entretien. Littérature dramatique de l’Allemagne. Le drame de Faust par Goethe (2e partie) » pp. 161-232

« Herman soutient d’un bras robuste et avec précaution la jeune fille penchée sur lui ; mais, comme elle ne connaît ni le chemin ni ses sentiers difficiles, elle fait un faux pas ; le pied lui manque et craque légèrement. Elle est près de tomber ; mais elle glisse sur lui ; il étend à la hâte le bras et soutient sa bien-aimée. […] Herman, soutenu par sa mère et par les voisins, s’avance vers Dorothée et lui dit d’une voix tremblante d’émotion et d’amour : « “Ne regrette pas ces larmes et cette douleur passagère, car elles ont assuré mon bonheur et le tien aussi.

841. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLIVe entretien. Madame de Staël. Suite »

Certes, ils auraient fait une déplorable découverte ceux qui auraient détrôné notre âme, condamné l’esprit à s’immoler lui-même, en employant ses facultés à démontrer que les lois communes à tout ce qui est physique lui conviennent ; mais, grâce à Dieu, et cette expression est ici bien placée, grâce à Dieu, dis-je, ce système est tout à fait faux dans son principe, et le parti qu’en ont tiré ceux qui soutenaient la cause de l’immortalité est une preuve de plus des erreurs qu’il renferme. […] « Ce n’est pas sans motif cependant qu’on met tant d’importance à fonder la morale sur l’intérêt personnel : on a l’air de ne soutenir qu’une théorie, et c’est en résultat une combinaison très-ingénieuse pour établir le joug de tous les genres d’autorité. […] On avait devant les yeux non pas l’historien, mais la victime de dix années d’exil, la personne qui avait soutenu au prix de tant de douleurs, un long défi contre le pouvoir absolu, avait compté en désespérant chacun de ses victorieux progrès, avait souffert ses rigueurs croissantes, les avait pressenties plus dures encore, et s’était enfin délivrée du mal par une fuite hardie, semant sur sa route de Genève à Londres, en passant par la Russie et la Suisse, la protestation contre la conquête universelle et le serment d’une résistance à vie.

842. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLVIIe Entretien. Marie Stuart, (Reine d’Écosse). (Suite et fin.) »

Le favori, soutenu par son audace, par la reine et par les troupes toujours dévouées à celui qui règne, parut en arme devant les juges et imposa insolemment l’absolution ; il montait ce jour-là un des chevaux favoris de Darnley, que le peuple reconnut avec horreur sous son assassin. […] Bourgoing lui répondit de la chambre où il était avec les autres serviteurs, que les lords attendaient Sa Majesté. — « Il n’est pas temps encore, reprit la reine ; qu’on revienne à l’heure convenue. » Alors, se précipitant de nouveau à genoux entre Élisabeth Curle et Jeanne Kennethy, elle fondit en larmes, se frappant la poitrine, rendant grâce à Dieu de tout, lui demandant avec ferveur, avec sanglots, de la soutenir durant les dernières épreuves. […] La reine, bien qu’elle eût mieux aimé s’appuyer encore sur eux, condescendit à leur faiblesse et se contenta, pour la soutenir, de deux gardes de Pawlet.

843. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXVIe entretien. Biographie de Voltaire »

L’aristocratie anglaise, au milieu de laquelle il avait été introduit et soutenu par Bolingbroke et Pope, concourut libéralement à cette souscription en faveur du poëte français. […] Voltaire admettait cette Providence pour les généralités de la création ; pour les individualités, il supposait Dieu aussi faible que l’homme ; il attribuait à l’intelligence infinie les procédés et les généralisations qui soulagent l’intelligence bornée et l’attention restreinte de l’homme ; il soutenait que Dieu gouverne par les ensembles et non par les détails ; c’était méconnaître la première des attributions et des forces de Dieu : l’infini. […] La République de 1848, en proclamant la neutralité complète de l’État en matière de culte et la respectueuse liberté des consciences, enleva à l’influence de Voltaire le point d’appui d’opposition qui la soutenait au-dessus de son niveau naturel.

844. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre premier »

« Sans considérer si je serai suivi et soutenu, dit-il, j’entreprends le combat contre les amants passionnés des Grecs et des Latins, qui voudraient nous faire quitter la plume en nous mettant, s’ils le pouvaient, dans le désespoir de les pouvoir jamais atteindre1. » Ce cri de guerre était d’un homme accoutumé à emboucher la trompette épique. […] Aussi, tandis que les provocations du vieux Desmarets obtiennent pour toute réponse quelques vers dédaigneux où Boileau tourne en ridicule ses poèmes et omet son nom, Perrault, soutenu de Fontenelle, a l’honneur d’avoir pour contradicteurs La Fontaine et Boileau. […] C’est le temps où, dans ses Dialogites des morts, Alexandre reçoit de la courtisane Phryné une leçon sur la guerre ; où Raphaël se tait sur son art, et soutient qu’il faut conserver tous les préjugés ; où Homère se moque de ses dieux ; où Thersite, disputant avec Agamemnon, a le dessus.

845. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre II, grandeur et décadence de Bacchus. »

Il penche la tête sur ses mamelles rubicondes ; s’il descend de sa monture, sa marche s’égare en festons pesants ; deux Bacchantes soutiennent, par les aisselles, ses membres flottants, et barbouillent de lie sa face écrasée. […] … Tes parfums sont agréables à respirer, ton nom est comme l’huile répandue ; c’est pourquoi les jeunes femmes t’aiment… Mon bien-aimé est pour moi un sachet de myrrhe suspendu entre mes seins… L’odeur de ses vêtements est comme l’odeur du Liban… Fortifiez-moi avec des raisins, soutenez-moi avec des oranges, car je ne meurs d’amour », Les Adonies répétèrent les fêtes de Byblos, adoucies et enrichies par le goût attique : Cypris vint, à son tour, comme sa sœur de Syrie, prendre entre ses bras le corps de « l’Époux » : mais, au lieu de l’étreinte furieuse d’Astarté, c’était un enlacement plein de grâce. […] Ces proies notaient que des ombres, des souffles, des résidus, des fumées ; elles l’enflaient démesurément sans le soutenir.

846. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Troisième Partie. De la Poësie. — IV. La Poësie dramatique. » pp. 354-420

On peut s’y montrer sur un ton épique & le soutenir. […] D’ordinaire leur grand mérite n’est que celui des circonstances ; mais celle-ci se soutient toujours : on la revoit aux Italiens avec plaisir. […] Porée, traitant la question des spectacles, soutient qu’ils pourroient être une école de vertu ; mais il ajoute en même-temps que, par notre faute, ils ne sont que l’école du vice.

847. (1856) La critique et les critiques en France au XIXe siècle pp. 1-54

Gardons-nous donc bien de condamner ce qui fait notre force ; et, sans nous laisser arrêter par une boutade dédaigneuse, que le grand orateur réfute d’ailleurs par son exemple, soutenons courageusement les droits et la dignité de la critique. […] Victor Hugo n’a jamais soutenu la doctrine de l’indépendance de l’art. […] « Si l’on accorde à l’art la haute mission de représenter le vrai dans une image sensible, il ne faut pas soutenir qu’il n’a pas son but en lui-même, etc. » Hegel, Esth.

848. (1920) Action, n° 3, avril 1920, Extraits

Nous nous retrouvons aussitôt en présence d’une manifestation purement de mentalité bourgeoise où la vanité du tréteau l’emporte sur la consistance de l’idée à soutenir. […] Il correspond durant la guerre avec Romain Rolland, qu’il soutient. […] Il fait par ailleurs un éloge soutenu du roman, dont il salue le style et la délicatesse dans l’évocation de cette histoire sensuelle, manière témoignant d’un néo-réalisme conjoignant l’exactitude de l’observation au bon goût.

849. (1888) Poètes et romanciers

Aucun écrivain ne porte et ne soutient plus haut sa pensée et son cœur. […] Imagine-t-on Béranger chantant une ode guerrière, soutenu par l’orchestre des canons, à la bataille d’Austerlitz ? […] Là, n’étant plus soutenue par l’émotion directe et personnelle, la poésie se trouble par endroits et s’obscurcit. […] Mais aujourd’hui, avec la rigueur inflexible des méthodes, avec l’instrument de précision appliqué aux phénomènes et cette chaîne serrée des lois où chaque anneau, soutenu par le précédent, soutient ceux qui le suivent, dans ce vaste déterminisme qui exclut le hasard et n’admet l’hypothèse qu’à titre provisoire, un Lucrèce est-il possible ? […] Il faut, pour soutenir une longue suite de vers et pour y intéresser le lecteur, un système vigoureusement accepté, traduit par une conviction ardente.

850. (1898) Politiques et moralistes du dix-neuvième siècle. Deuxième série

Mais cette idée, qui du reste était grande, il est le premier qui l’ait conçue, exprimée et soutenue avec une ténacité extraordinaire. […] Le patriotisme, l’esprit de corporation, l’esprit de caste sont probablement les formes les plus pures où l’égoïsme, soutenu du reste par un certain contingent d’esprit d’amour, puisse s’élever. […] Or, depuis des siècles, l’Église catholique était pour elle-même autoritaire, et, de plus, soutenait d’ordinaire les autorités établies, autres qu’elle. […] L’Église catholique, composée d’esprits autoritaires, devînt-elle décidément minorité partout, n’en continuera pas moins à soutenir partout les autorités établies et à recommander le respect à leur égard, sans s’embarrasser beaucoup de savoir si les autorités qu’elle soutient, ici, sont monarchiques et là sont républicaines. […] Ces idées, Edgar Quinet les soutenait avec éloquence, mais avec un défaut qu’il n’avait pas dans sa première manière et qu’il est temps de signaler brièvement.

851. (1894) Les maîtres de l’histoire : Renan, Taine, Michelet pp. -312

Villemain et Leclerc, qui le soutinrent de leur bienveillance, mais aussi des camarades moqueurs qui raillèrent sa pauvreté. […] Débile et toujours souffrant, l’esprit chez lui soutenait le corps. […] Ses thèses de doctorat, soutenues en 1819 portaient sur les vies de Plutarque et sur l’idée de l’infini dans Locke. […] Lui, de son côté, puisait dans son enseignement, dans l’entourage affectueux et sympathique de ses élèves, la force qui devait le soutenir et l’inspirer dans le travail de toute sa vie. […] Si j’avais, comme historien, un mérite spécial qui me soutient à côté de mes illustres prédécesseurs, je le devrais à l’enseignement, qui pour moi fut l’amitié.

852. (1912) Réflexions sur quelques poètes pp. 6-302

Ainsi poussé, Amour entre en colère, mais Folie lui soutient que c’est bien à elle de passer devant. […] Enfin, comme on l’a soutenu, nous n’avons peut-être de Jodelle que ce qu’il a fait de plus mal, c’est-à-dire ses commencements. […] Longin conclut naturellement : que le sublime remporte, alors même qu’il ne se soutient pas également partout. […] Un ancien bruit se réveilla alors : on recommença à soutenir que les poésies de Claudine n’avaient été que du cru de son mari. […] Ils soutenaient qu’il était allé de chute en chute, et que l’art moderne ne lui réussissait guère plus que la routine.

853. (1900) Molière pp. -283

Étienne Arago à son tour intervint plume en main dans la querelle ; il reprit et soutint dans son feuilleton de L’Avenir national la thèse qu’avait déjà plaidée avec son éloquence habituelle M.  […] Plus encore que Dona Elvire et que Dom Louis Tenorio, le Pauvre soutient la cause du ciel de la noblesse de son caractère propre, de l’énergie absolue de sa résistance contre Dom Juan. […] Mais il faut qu’il soit soutenu, en ce cas, par une vocation bien spéciale, bien certaine. […] Cependant, à l’entendre, il se soutient à peine ; Il eut hier encore la fièvre et la migraine. […] Il y a une bonté naturelle qu’il faut recevoir du ciel en naissant, comme un don de la grâce divine, ou de la première éducation, comme un précieux héritage de famille, parce que tous les efforts les plus vifs et les plus soutenus ne sauraient ensuite nous y porter.

854. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Molière »

Louis XIV, jeune encore, le soutint dans ses tentatives hardies ou familières, et le protégea contre tous. […] Cette disposition de Molière à observer durant des heures et à se tenir en silence s’accrut avec l’âge, avec l’expérience et les chagrins de la vie ; elle frappait singulièrement Boileau qui appelait son ami le Contemplateur. « Vous connoissez l’homme, dit Élise dans la Critique de l’École des Femmes, et sa paresse naturelle à soutenir la conversation. […] Cizeron-Rival, d’ordinaire exact, a dit d’après Brossette : « Au jugement de Despréaux (et autant que je puis me connoitre en poésie, ce n’est pas son meilleur jugement), de tous les ouvrages de Molière, celui dont la versification est la plus régulière et la plus soutenue, c’est le poëme qu’il a fait en faveur du fameux Mignard, son ami. […] J’ai cherché à soutenir ailleurs que chaque esprit sensible, délicat et attentif, peut faire avec soi-même, et moyennant le souvenir choisi et réfléchi de ses propres situations, un bon roman, mais un seul ; j’en dirai presque autant du drame. […] La lutte qu’il soutint avec l’hôtel de Bourgogne, et dont l’Impromptu de Versailles constate plus d’un détail piquant, n’est autre que celle du débit vrai contre l’emphase déclamatoire, de la nature contre l’école.

855. (1825) Racine et Shaskpeare, n° II pp. -103

Allons chez Tortoni, il est de mon devoir de vous réveiller, et certes je ne vous dirai plus un mot de littérature ; je n’ai ni jolies femmes ni grands cordons pour soutenir votre attention. […] Ils continueront à vous donner des pièces bien faites, comme Clytemnestre, Louis IX, Jeanne d’Arc, le Paria, qui ont succédé sous nos yeux à la mort d’Hector de Luce de Lancival, à l’Omasis de Baour-Lormian, à la mort de Henri IV de Legouvé, chefs-d’œuvre auxquels Clytemnestre et Germanicus iront tenir fidèle compagnie, dès que les auteurs de ces tragédies ne seront plus là pour les soutenir dans les salons par leur amabilité, et dans les journaux par des articles amis. […] Toutefois, monsieur le poète comique, si dans cette même année 1811, au lieu de gémir platement et impuissamment sur l’arbitraire, sur le despotisme de Napoléon, etc., etc., etc., vous aviez agi avec force et rapidité, comme lui-même agissait ; si vous aviez fait des comédies dans lesquelles on aurait ri aux dépens des ridicules que Napoléon était obligé de protéger pour soutenir son Empire Français, sa nouvelle noblesse, etc., moins de quatre ans après elles eussent trouvé un succès fou. […] Depuis que la mort de cet homme amusant faillit tuer leur journal, ce corps d’anciens critiques a été soutenu par le talent vivant de M.  […] L’homme d’esprit dont la lettre A signe les jolis articles passe pour l’un des plus fermes soutiens des idées surannées.

856. (1896) Journal des Goncourt. Tome IX (1892-1895 et index général) « Année 1892 » pp. 3-94

Dimanche 28 février Ce soir, chez Rodenbach, on causait valse, et je soutenais que les peuples qui sont des peuples valseurs, sont des peuples, où le patinage est une habitude. […] Et le voyageur parle de ces populations de Samarcande, de ces populations calomniées par les Persans, de ces populations lettrées, amoureuses de discussions littéraires, et où il a vu un individu soudainement poser une fiche en terre, portant l’annonce d’une thèse philosophique qu’il allait soutenir, et les passants et les vendeurs du marché, abandonnant leurs choses à vendre, pour se mêler à la discussion. […] » Et l’émotion, la suée de Lafontaine fut telle, qu’il soutient que la couleur de ses gants avait changé. […] C’est un roman (L’Atelier Chantorel) où sous un nom supposé, il raconte son enfance, sa jeunesse, son passage à l’École des Beaux-Arts, son apprentissage du métier d’architecte ; et l’intéressant bouquin est presque, tout le temps, soutenu par de la vie vécue. […] Ma foi, en sa qualité de chirurgien, il demandait une alène, de la grosse ficelle, et le recousait sur place, puis, le faisait reconduire à l’ambulance entre deux chevaux qui le soutenaient.

857. (1881) La parole intérieure. Essai de psychologie descriptive « Chapitre premier. Aperçu descriptif. — Histoire de la question »

Après les nominalistes et tous les philosophes qu’avait frappés l’association des termes généraux avec les notions générales, Condillac avait insisté sur le même fait, mais en logicien plutôt qu’en psychologue, et sans songer à distinguer la parole intérieure de la parole extérieure : « Tout l’art de raisonner se réduit à l’art de bien parler ; — une science bien traitée n’est qu’une langue bien faite ; — toute méthode analytique de la pensée est une langue ; — nous pensons par les langues » tels sont ses principaux aphorismes ; Rousseau, lui, envisageant la pensée et ses expressions comme deux successions parallèles, esquissait une vraie description psychologique quand il disait : « L’esprit ne saisit (les idées dont l’objet n’est pas sensible) que par des propositions : car sitôt que l’imagination s’arrête, l’esprit ne marche plus qu’à l’aide du discours. » Sur la question des origines, Condillac avait soutenu, après l’oratorien Richard Simon29 3 et avec la grande majorité des philosophes du xviiie  siècle et des idéologues, l’invention humaine de la parole, ou, en d’autres termes, la création de l’expression de la pensée par les seules forces naturelles de la pensée : à quoi Rousseau répondait : « La parole paraît avoir été fort nécessaire pour établir l’usage de la parole. » D’autre part, et dès avant ses recherches sur le langage, de Bonald était d’instinct partisan des vérités immuables ; et, disposé comme il l’était à voir dans le progrès une illusion coupable, dans le devenir une forme inférieure de la réalité, une déchéance de l’être, il avait été facilement mis par le P. […] Quand nous parlons des lèvres, « sans produire de son, nous entendons distinctement » une parole intérieure. — Quand nous parlons à haute voix, nous répétons ce que nous dicte à mesure la parole intérieure. — Quand nous nous taisons, elle prépare à l’avance nos discours à venir ; l’orateur se forme par l’exercice « soutenu et bien dirigé » de la parole intérieure ; « pour bien parler aux autres, il faut avoir contracté l’habitude de se parler à soi-même avec facilité70. » La parole intérieure dicte l’écriture71. — Puis « l’écriture réveille la parole intérieure dans l’esprit de celui qui lit… ; nous ne lisons pas pour voir l’écriture, mais pour entendre la parole intérieure72. » Elle nous aide à entendre, car elle « est souvent plus distincte que la sensation » sonore, et, alors, elle la complète73. — Cardaillac va plus loin, et soutient, cette fois à tort, que « le souvenir de la parole », c’est-à-dire la parole intérieure, « accompagne toujours la sensation » ; il serait même nécessaire pour que la parole d’autrui nous soit intelligible : « nous n’écoutons pas pour entendre la parole d’autrui, mais uniquement pour entendre la parole intérieure qui en est comme l’écho, et qui, pour nous, est le véritable corps de la pensée, seul capable de nous la rendre sensible74. » Comme si la parole d’autrui ne pouvait être directement comprise ! […] Dans quelques passages, entraîné par la logique de ses formules, il paraît nier l’intermédiaire entre les mots et les réalités, c’est-à-dire l’esprit individuel, et soutenir que les mots n’éveillent pas des idées latentes, mais les apportent avec eux : il dit, par exemple, que l’idée de Dieu « entre naturellement dans notre entendement » dès que l’expression qui lui est propre vient la rendre présente (Dissert. […] Ailleurs, Bonald soutient que les sourds-muets ne parlent pas naturellement par gestes : Législ. prim., Discours prélim., p. 28 ; Dissert., p. 264-265 ; Recherches, ch. 

858. (1814) Cours de littérature dramatique. Tome II

Montfleury avait en effet un ventre énorme, et il était obligé de le comprimer avec un cercle de fer pour en soutenir le poids : difformité fort étrange dans un héros amoureux. […] Je ne prétends point ici soutenir l’humanité de Clytemnestre ; elle n’en eut pas plus que de fidélité, quand elle assassina le grand Agamemnon, son illustre époux, pour se marier avec un joueur de flûte. […] Le genre de Mithridate est celui de Britannicus et d’Athalie ; il est le plus difficile et le plus rare, parce que le génie n’y est soutenu par aucun des prestiges du théâtre. […] Le terme est trop court : beaucoup d’ouvrages médiocres ont soutenu l’épreuve et trompé le public pendant plus de vingt ans : il est vrai que, dans les dernières années, plus on les regardait, moins on les trouvait beaux ; mais on n’osait pas s’en dédire. […] Ces deux pièces de Boursault ont toujours eu l’avantage d’avoir un excellent Ésope ; c’est ce qui les a soutenues.

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