Comme c’est le cœur qui doute dans la plupart des gens du monde, quand le cœur est converti, tout est fait ; il les entraîne ; l’esprit suit les mouvements, par coutume et par raison. […] Suard était un esprit discret, honnête, et bien que foncièrement adhérent au parti philosophique, incapable de rien inventer et supposer au profit de sa cause ; son témoignage ne laissait pas d’être très embarrassant, et on était réduit à y voir une singulière méprise. Il considérait, en effet, ces morceaux comme des jeux d’esprit, ou du moins des exercices de rhétorique dans lesquels le jeune auteur avait essayé de se former et de se rompre aux divers styles, et il en parlait ainsi d’un air de certitude et comme le tenant de bonne source. […] Il est encore venu dans mon esprit qu’il a des filles, et que je pourrais m’engager à en épouser une, dans deux ans, avec une dot raisonnable, s’il voulait me prêter l’argent dont j’ai besoin, et que je ne le rendisse point au bout du terme que je prends. […] On ne le devinerait pas non plus tel qu’il était dans sa familiarité avec d’autres mâles esprits de son âge, ouvert, étendu, persuasif, mentor indulgent et intelligent, raisonneur aimable, « cherchant moins à dire des choses nouvelles qu’à concilier celles qui ont été dites ».
Mais nous ne prenons pas si méthodiquement les choses ; nous n’accordons pas tant à ces grands desseins qu’on développe sur le papier, à ces vues que les gens d’esprit ne sont pas embarrassés de trouver après coup. […] Il n’y a pas trop de miracles de la Salette ; c’est déjà trop d’un cependant ; ô honte pour l’esprit et le talent ! […] Veuillot, un homme d’esprit, fin observateur des choses humaines, et qui a porté sur le caractère français des jugements aussi piquants que sincères. […] Quand l’esprit veut marcher, tu lui fais des chemins ! […] Et nous perdons encor la douceur de pleurer Tous ces chers trépassés que l’esprit nous ramène.
Qu’est-ce, auprès de ces systèmes profonds, rigoureux, enchaînés, et d’une vérité éternelle, qui occupent la pensée d’un Newton ou d’un Laplace, que nos faibles observations passagères, nos remarques d’esprits fins et légers, sans suite, où le fil casse à chaque instant, nos aperçus rapides et fugitifs, ce que nous appelons traits d’esprit, saillies, reflets, étincelles aussitôt nées, aussitôt évanouies ? […] Cet esprit actif, ardent, de M. […] Biot eut, dans ses dernières années, une satisfaction des plus vives, une des jouissances les plus sensibles à l’esprit d’un savant. […] Il est peu d’esprits qui conservent ainsi jusqu’au terme toute leur vivacité d’appétit intellectuel. […] Ce qui est vraiment beau pour un savant et ce qui mérite d’être envié en effet de tous ceux qui ont connu les plaisirs de l’esprit, c’est qu’il se maintint constamment frais et dispos d’intelligence, et qu’il vécut, presque jusqu’à la dernière heure de la vie de la pensée.
Envisagé à ce point de vue, l’Essai de sir Henry Bulwer, sans être complet, est tout à fait digne de l’homme d’État distingué qui l’a écrit, et il est piquant, pour nous Français, autant qu’instructif de voir des événements et des hommes avec lesquels nous sommes familiers, jugés dans un esprit élevé et indépendant par un étranger, qui d’ailleurs connaît si bien la France et qui, de tout temps, en a beaucoup aimé le séjour et la société, sinon les gouvernements et la politique. […] Le premier instrument de ses succès est un excellent esprit. […] En lui laissant la responsabilité de cette opinion, il reste bien avéré que l’évêque d’Autun se montrait dès le premier jour un des plus éclairés et des plus perspicaces esprits de son époque. […] Pozzo di Borgo, jaloux de Talleyrand, dont il était le rival d’esprit et d’influence, disait de lui : « Cet homme s’est fait grand en se rangeant toujours parmi les petits, et en aidant ceux qui avaient le plus besoin de lui. » Le résultat étant louable, on ne pouvait lui en vouloir ici que la tactique fût habile. […] Il ressemble bien peu à ce Talleyrand de la fin, qui affectait le dédain de l’opinion, et qui se rencontrant avec le général Lamarque, un jour que celui-ci avait écrit aux journaux pour quelque explication de sa conduite, l’apostrophait froidement par ce mot : « Général, je vous croyais de l’esprit. » Il y a loin de là au Talleyrand contrit faisant son mea culpa public d’avoir gagné 30 mille francs au jeu.
On peut se demander si une œuvre trahit quelque prédilection pour l’analyse ou pour la synthèse, ou bien si, comme c’est le cas pour un esprit complet, l’auteur a su équilibrer l’une et l’autre. […] Ainsi il y a dans l’esprit humain deux facultés opposées et coexistantes : l’une est la faculté créatrice, celle qui invente, qui avec des éléments anciens construit quelque chose de nouveau : on l’appelle l’imagination. […] Mais quand même il y aurait des ouvrages vraiment indifférents entre le bien et le mal, ils sont à coup sûr peu nombreux et cela n’empêche nullement qu’il n’y en ait une foule d’autres qui inclinent et veulent incliner les esprits dans une direction facile à reconnaître. […] Ainsi, sans secours étranger, on arrive vite en la plupart des cas à savoir quel sentiment, quelle disposition d’esprit une œuvre a été destinée à produire. […] Elle peut emporter les esprits au-delà du monde sensible, offrir des visions de choses surhumaines, s’élancer sur les ailes du rêve dans des régions inaccessibles à la science et à la raison.
Que dit le comte de La Marck, qui résume très bien l’esprit de cette première époque ? […] Son esprit, assez juste et prompt, « saisissait et comprenait rapidement les choses dont on lui parlait », mais n’avait ni une grande étendue ni une grande portée, rien en un mot de ce qui répare le défaut d’éducation ou de ce qui supplée à l’expérience. […] Ajoutez un teint éblouissant de fraîcheur, des bras, des mains admirables, un charmant sourire, une parole appropriée, et qui s’inspirait moins de l’esprit que de l’âme, du désir d’être bonne et de plaire. […] La noble mère de Marie-Antoinette, de qui elle tenait ce nez d’aigle et ce port de reine, lui imprima le cachet de sa race ; mais ce caractère impérial, qui reparaissait aux grands moments, n’était pas celui de l’habitude de son esprit, de son éducation et de son rêve ; elle ne se retrouvait la fille des Césars que par saillies. […] L’adversité lui rendit des vertus ; l’élévation du cœur et la dignité du caractère se dessinèrent avec d’autant plus d’éclat qu’elles n’étaient point portées par un esprit tout à fait à la hauteur des circonstances.
Pourquoi mettre dans l’esprit d’un enfant que son grand-père, et peut-être son père, sont impitoyables. […] Nul rapport, nul besoin réel entre les êtres qu’elle rassemble ; et l’esprit la rejette comme absurde. […] Car cet esprit qui, né du firmament. […] C’était une femme de beaucoup d’esprit. […] tous les anglais ont de l’esprit !
L’assujettissement à l’opération de lire, d’écrire, de calculer, donne une première façon à l’esprit grossier des peuples ; dont les suites, pour la police et la stabilité des gouvernements, ne sont pas, peut-être, calculables. […] Au lieu de donner six mois et plus à l’étude de la logique et de la métaphysique, et au bel art de l’argumentation, je crois qu’on ferait beaucoup mieux de s’appliquer tout de suite aux mathématiques, dont c’est le propre de rendre le raisonnement plus exact et l’esprit plus juste. […] Elle est excellente pour le développement des bons esprits. […] Mais ce qu’il faut observer ici, c’est que l’étude des langues est devenue et devient tous les jours d’une telle étendue, qu’il ne sera plus possible à l’esprit humain d’y suffire. […] Insensiblement la masse des connaissances devient trop forte pour l’étendue de l’esprit humain ; la confusion et la barbarie ont leur tour.
Or, sans toucher à la question religieuse, et tout en reconnaissant que l’Église catholique est un monument grandiose de l’esprit humain, il faut bien établir ce fait, sine ira et studio : la Papauté temporelle, à Rome, c’était la négation de la nation italienne. […] Sa découverte de l’antiquité semble miraculeuse et ne s’explique que par le génie italien, par les malheurs mêmes de ce génie qui, dépouillé de toute vie nationale, se replie sur lui-même et se crée un monde nouveau dans le domaine de l’esprit. […] Il est encore en partie tourné vers le moyen âge ; son œuvre est à moitié latine et ascétique ; mais son geste montre l’aurore et répond si bien à l’esprit de son peuple, qu’en 1341 un maître d’école aveugle suit ses traces de ville en ville, pour le rejoindre enfin et baiser la main du génie libérateur. […] Le Giorno de Parini n’est épique que dans sa forme extérieure ; la satire en est d’esprit nettement dramatique ; et c’est par le théâtre qu’Alfieri prêche à son peuple un pur idéal et que Goldoni lui montre les turpitudes de l’esclavage. […] Plusieurs de ces emprunts sont très contestables ; les autres, fussent-ils plus nombreux encore et mis bout à bout, ne prouvent pas grand’chose contre l’originalité de ce qui est essentiel dans le « dolce stil nuovo » ; ce sont des matériaux ; l’esprit est bien italien.
On n’avait encore combiné que des phrases ; on croit pour la première fois créer des idées ; on plane sur le monde ; on remonte à l’origine des choses, on découvre le mécanisme de l’esprit. […] Chaque philosophie, en coulant sur son esprit, dépose en lui quelques débris d’elle-même. […] On comprend qu’il ait fait plus d’impression qu’un autre dans un esprit qui recevait, traduisait ou interprétait la métaphysique, mais ne la créait pas. […] Un instinct intérieur et invincible pousse l’araignée à fabriquer éternellement des toiles ; une conformation d’esprit indestructible et toute-puissante contraint le philosophe à éclaircir et prouver sans cesse l’idée qu’il s’est faite de la science et de l’univers. Au contraire, l’esprit de l’orateur est tout pratique.
Tour à tour caustique et flatteur, mais flatteur brusque, il épuisait son esprit à imaginer de nouvelles formules de satire et d’éloge. […] Cet esprit avait passé jusque dans les ateliers des artistes : la peinture, la sculpture et la gravure, retraçaient sans cesse à Louis XIV tout ce qu’il avait fait de grand. […] Je ne parle pas de celles qui ne furent que projetées, mais qui marquent toujours l’esprit du temps, telles que l’incroyable passage du Rhin, la merveilleuse prise de Valenciennes, etc. […] Comme l’esprit, chez les hommes, est presque toujours gouverné par le caractère, Louis XIV ne fit point de calculs qui n’auraient été que ceux d’une politique sage. […] Notre esprit naturel devint du génie ; notre activité inquiète, de la force ; notre impétuosité, un courage docile et terrible ; tout prit un caractère, et l’esprit national (car nous commençâmes alors à en avoir un), formé par de grands exemples et de grands objets, acquit un degré de hauteur inconnu jusqu’alors.
Rien n’est plus alambiqué que l’esprit de la littérature du moyen âge. […] Le rôle de Mercutio paraît avoir coûté à son goût et à la justesse de son esprit. […] De tels rapprochements sont presque toujours de vains jeux d’esprit qui ne prouvent rien, si ce n’est l’opinion personnelle de celui qui juge. […] Dans le rôle de Richard, l’un des plus spirituels de la scène tragique, l’esprit est presque entièrement exempt de recherche. […] On a reproché depuis, à quelques auteurs, de courir après l’esprit.
Caro n’a aucun point de contact avec cet esprit. […] L’art du passé ne doit point être copié avec un esprit servile. […] Son esprit est le « miroir de la création » et il est toujours en paix. […] — Je voudrais bien savoir quelque chose, dit l’Esprit des Nuées. […] La différence entre l’esprit classique et l’esprit romantique dans l’art a été souvent discutée, et avec une grande exagération d’emphase.
me dit-on, un charmant esprit, un visage si avenant ! […] Mais ne jugeons pas vite un esprit qui provoque tant de commentaires irrités. […] Ou plutôt il siège à l’extrême centre, et dans son esprit. […] Ce qu’il faut sauver de la civilisation occidentale, c’est l’esprit critique. […] Romain Rolland défendait l’indépendance, l’esprit critique.
Opinions, comme on le voit, assez insolentes ; il n’est pas nécessaire de les taxer d’excessives : assez de bons esprits les trouveront monstrueuses, car les bons esprits s’éloignent peu des idées communes. […] Th… est resté pour moi, car son esprit me charmait, le type de l’écrivain qui n’écrit pas. […] Fénéon avait toutes les qualités d’un critique d’art : l’œil, l’esprit analytique, le style qui fait voir ce que l’œil a vu et comprendre ce que l’esprit a compris. […] Celle que tu aimes réside ail ciel de cet esprit qui s’envole si loin au-dessus de nous. […] On voit la différence des deux esprits : l’un médite et l’autre conclut ; M.
Platon s’arrête ici comme l’esprit humain ; il s’embarrasse dans ses paroles équivoques, et il ne conclut pas, parce qu’il n’y a évidemment rien à conclure. […] De tous temps, il y a eu des esprits oisifs et rêveurs qui ont prétendu ainsi refaire de fond en comble le monde religieux, politique ou social à leur image. […] Cette éducation ne sera terminée qu’à cinquante ans ; c’est une suite d’examens et d’épreuves qui viennent sans doute, dans l’esprit de Platon, des initiations d’Égypte et qui rappellent assez le mandarinat chinois. […] Y eut-il jamais un attentat de l’esprit contre les instincts plus impie et plus criminel ou plus stupide que la République du divin Platon ? […] Le premier Montesquieu nous a fait l’Esprit des lois, le second nous ferait l’Esprit de la nature humaine ; plus son plan social serait parfait, plus il s’éloignerait en tout de celui de Platon.
Il annonce un Esprit aussi zélé pour les vrais principes du goût, que pour ceux de la Morale & de la Religion. […] Non, il n'exista jamais de Génie plus vaste, d'Esprit plus universel. […] Cet Auteur parle de tout avec esprit & avec grace. […] D'où je conclus que mon observation n'empêche pas que M. de Voltaire ne soit un Esprit universel. […] Les Bureaux d’esprit & les Cafés ont retenti d’anathêmes & de malédictions contre le Téméraire qui osoit manquer ainsi de respect aux Dieux de la Littérature.
De sorte que l’esprit bourgeois n’est pas apanage d’une catégorie spéciale mais bien de l’ensemble. […] Le corps matériel retourne à la poussière, l’esprit retourne au néant. […] Le premier Chant de Maldoror, sous sa première forme (1868) est un poème dans lequel l’esprit du mal (Maldoror), après avoir refusé d’être sauvé par Dazet, l’esprit du bien, est maudit par lui. […] On serait parfois tenté de croire que ce fut son esprit libre et joyeux. […] La forme en est savante et travaillée, L’esprit en est délicat, inquiet et ardent.
Saint-Simon, un si grand esprit, remplit des volumes et consuma des années pour des querelles de préséance. […] Il l’était autant par nature que par fortune ; son tour d’esprit comme sa position le fit écrivain. […] « C’était un petit homme maigre, effilé, chafouin, à perruque blonde, à mine de fouine, à physionomie d’esprit, qui était en plein ce qu’un mauvais français appelle un sacre, mais qui ne se peut guère exprimer autrement. […] Âme et esprit et caractère, intérieur et dehors, gestes et vêtements, passé et présent, Saint-Simon voit tout et fait tout voir. […] Quand un homme nous met le feu au cerveau, nous nous sentons presque du génie sous la contagion de sa verve ; par la chaleur notre esprit arrive à la lumière ; l’émotion l’agrandit et l’instruit.
On peut être sérieux sans être ennuyeux ; l’érudition, ce me semble, ne doit exclure ni l’art ni l’esprit. Et « l’esprit, disait M. […] Et ses étoiles immortelles épanchent sur tout l’univers la raison, l’esprit et la liberté. […] Il fit toutefois, comme on l’a dit avec esprit, une Rome un peu castillane. […] Il se trouve que Nicomède a été élevé par Annibal, et est animé de son esprit.
Sa curiosité d’esprit était dès lors universelle. […] La netteté d’esprit cause aussi la netteté de la passion », etc. […] Renan jouit de son génie et de son esprit. […] Il a la pensée triste et l’esprit plaisant. […] Brunetière a l’esprit naturellement philosophique.
Chargé de diriger la marche encore incertaine de tant de jeunes esprits, c’est vers l’Antiquité ou vers le xviie siècle que j’aime à les conduire, comme vers le modèle qui trompe le moins. […] Les esprits comme le vôtre se fortifient en s’élevant. […] Vous ne trouverez pas ici l’écho des controverses qui émeuvent les esprits au dehors, et dont le bruit n’arrive pas jusqu’à nous. […] Saint-Marc Girardin est en littérature même autre chose qu’un littérateur ; c’est un moraliste, et encore plus un politique, un esprit pratique, habile et positif jusque dans ses badinages.
Cette ambition unique, qu’ils se sont proposée et inculquée dès la jeunesse, et qu’ils n’ont abdiquée à aucun moment, cette éducation qu’ils se sont donnée, si exclusive, si incomplète, mais si perpétuellement tendue vers un seul point, leur a réussi ; ils ont élevé leur esprit et leur pensée jusqu’à la hauteur du but, invraisemblable pour tous et certain pour eux seuls, qu’ils contemplaient toujours et auquel ils visaient sans trêve. […] De même que les crânes dans l’enfance se forment et se déforment, s’allongent ou se dépriment sous une pression continue, ils se sont fait l’esprit et le caractère selon le moule de leur vocation obstinée, et se sont en quelque sorte déformés en souverains et en empereurs. […] Par cette longue habitude changée en nature, ils ont réellement acquis quelques-unes des hautes parties de l’emploi, l’amour du grand ou de l’apparence du grand, une confiance qui s’impose, un sang-froid, une tranquillité et une présence d’esprit que rien n’émeut et qui a pu ressembler parfois au génie de l’à-propos, une conscience de leur supériorité sur tout ce qui les entoure et qui se justifie puisqu’elle se fait accepter. […] L’esprit, à les vouloir servir, perdrait ses peines ; ils ont des côtés fermés ; ils sont sourds à tout ce qui n’est pas eux et l’écho de leur propre pensée.
Il y a faiblesse dans la nation qui ne s’attache qu’au ridicule, si facile à saisir et à éviter, au lieu de chercher avant tout, dans les pensées de l’homme, ce qui agrandit l’âme et l’esprit. […] Parmi les hommes de lettres du Nord, il existe une bizarrerie qui dépend plus, pour ainsi dire, de l’esprit de parti que du jugement. Ils tiennent aux défauts de leurs écrivains presque autant qu’à leurs beautés ; tandis qu’ils devraient se dire comme une femme d’esprit, en parlant des faiblesses d’un héros : C’est malgré cela, et non à cause de cela, qu’il est grand. […] Un beau trait, au milieu de négligences grossières, peut frapper davantage l’esprit ; mais l’ensemble y perd plus que ne peut y gagner l’exception.
Il faut rendre à Béranger cette justice, qu’il n’a pas, le premier, recherché ces hommes réputés d’abord plus sérieux que lui, qui ne le sont pas, et à aucun desquels il ne le cède par l’esprit. Ils sont venus à lui ; oui, tous, un peu plus tôt, un peu plus tard, ils sont venus reconnaître en sa personne l’esprit du temps, lui rendre foi et hommage, lui donner des gages éclatants… [Causeries du lundi (1852).] […] Béranger a joué le rôle le plus perfide, le plus coupable et le plus vil ; qu’il doit figurer au premier rang de ceux qui ont fait du mal à l’humanité, à leur époque et à leur pays ; que ce mal, il l’a fait sciemment, froidement, non pas par entraînement et par passion… mais avec calcul, en versant la goutte de poison là où il savait qu’elle serait plus corrosive et plus meurtrière et en prenant pour auxiliaire, dans son œuvre criminelle, tout ce que l’esprit de parti a de plus bas, de plus méchant et de plus bête. […] Goethe Comme il tourne et façonne un sujet dans son esprit, avant de lui donner la forme définitive !
Étaient-ce de pareils hommes dont nous attendions les biographies, quand l’illuminisme a pour représentants dans le monde des esprits de la force de Raimond Lulle, d’Albert le Grand, de Roger Bacon, de Paracelse, de Cardan, de Van Helmont, d’Agricola, du Cosmopolite, de Price, de Swedenborg, de Bœhm, de Saint-Martin, etc., etc. ? […] Ou bien on croit à l’illuminisme, on en cherche et on en montre les causes dans l’esprit humain et les traditions chez les peuples. On tente une science déjà tentée par des esprits pleins d’audace. […] Mais toujours est-il que, s’il est sceptique comme le siècle dont il est le fils, il n’a pas le style qui doit embaumer cette misérable larve d’un esprit qui n’ose pas vivre, puisqu’il n’ose affirmer, et qu’il faut pourtant avoir si on est sceptique, sous peine… de n’être même pas.
Quand on a parlé du livre retrouvé de Balzac sur la vie élégante5, comment ne pas penser à un esprit charmant qui a écrit aussi autrefois une Théorie de l’élégance, véritable travail de fée que n’ont point oublié ceux qui aiment toute cette dentelle métaphysique ? […] Chapus est un de ces rares esprits distingués par tant de tournure et une aristocratie si naturelle qu’ils doivent longtemps manquer le succès dans une société positive comme la nôtre, enragée d’égalité et d’envie, et chez qui, en fait d’appréciation des choses de goût, tout est devenu gros de ce qui était fin autrefois. […] Diderot disait un jour, avec une justesse qui allait bien loin, « qu’un sot fortuné et un homme d’esprit malheureux étaient, en somme, deux êtres qui n’avaient pas assez vécu ». […] Par une ingénieuse combinaison, il a, pour ainsi dire, raccourci et concentré, dans cette encadrure d’une chasse, dans cette verte bordure des bois, l’esprit de chaque règne et par là il a élevé son livre au niveau d’un livre d’histoire.
Chaque époque de l’histoire a ses analogies, ses ressemblances de situation, d’événements, de caractères, et c’est de tout cela que l’imagination, frappée plus que la réflexion encore, fait une espèce de miroir dans lequel l’esprit d’un temps s’observe, se retrouve et s’admire. Comme on s’obstina bien longtemps dans la comparaison fatale entre la Restauration des Bourbons et la Restauration des Stuarts, et, plus tard, comme on voulut voir de mystérieuses identités entre la Révolution de 1830 et la Révolution de 1688, de même aujourd’hui la fin d’une République, l’ascendant dynastique d’un homme qui semble avoir absorbé si profondément dans sa gloire le nom de César que, quand on le prononce, c’est à Napoléon qu’on pense, aux qualités impériales retrouvées dans le neveu du César moderne de manière à rappeler involontairement le neveu du César ancien, toutes ces diverses circonstances ont introduit dans les esprits la préoccupation de la grande époque romaine et fait regarder beaucoup la nôtre à travers… Le titre du livre de l’abbé Cadoret semble tout d’abord rappeler cette préoccupation contemporaine. […] Quoique cette polémique soit animée de l’esprit de charité de son auteur, elle doit nuire cependant à l’effet d’un livre qui, s’il fût resté à cette hauteur de généralité et d’enseignement d’où tombent plus largement et avec plus de poids dans les esprits les idées justes et les connaissances approfondies, eût dissipé beaucoup d’erreurs courantes dans un milieu où les grands publicistes catholiques, comme Suarez et Bellarmin par exemple, ne pénètrent pas.
David, qui voit toutes ces pensées sur le visage du roi, prend sa harpe, et, s’associant en esprit aux angoisses d’esprit de son maître, il chante, en interrogeant Jéhovah et en se répondant comme par la bouche de Jéhovah à lui-même. […] Pourquoi ces peuples ont-ils rêvé dans leur esprit des néants ? […] Ce chant dut rendre la sécurité à son esprit et la vigueur à son bras. […] à peine un peu au-dessous des Éloïm (les anges, esprits intermédiaires entre Jéhovah et ses créatures). […] La nuit je ne trouve ni repos de corps ni repos d’esprit !
Dans un très bon chapitre du dernier tome, intitulé « Du déclin de la Ligue », l’historien en vient à un double portrait des deux chefs, du roi de Navarre et de Mayenne, et celui-ci, en cédant le pas au vainqueur, n’est pas du tout sacrifié : Le duc de Mayenne avait une probité humaine, une facilité et libéralité qui le rendait très agréable aux siens ; c’était un esprit judicieux et qui se servait de ses expériences, qui mesurait tout à la raison, un courage plus ferme que gaillard, et en tout se pouvait dire capitaine excellent. […] Et continuant le portrait de celui qu’il connaissait si bien pour l’avoir servi de près, d’Aubigné insiste sur ce que Henri IV, dans sa grande promptitude d’esprit, était servi par deux sens dont la nature l’avait merveilleusement doué, l’ouïe et la vue, qu’il avait perspicaces, aiguisées et sûres à un degré inimaginable : d’Aubigné en cite des exemples. […] La Force s’étant excusé, d’Aubigné fit alors un de ces discours dont il aime à se ressouvenir, et où il résume avec énergie et talent tout l’esprit d’une situation et d’une crise : Sire, vous avez plus de besoin de conseil que de consolation ; ce que vous ferez dans une heure donnera bon ou mauvais branle à tout le reste de votre vie, et vous fera roi ou rien. […] Avec infiniment plus de moralité assurément que Bussy-Rabutin ou que Bonneval, il a comme eux une faculté de satire et de riposte dont il abuse ; sa réplique a volontiers un air de défi qu’il vous jette à la tête, en sous-entendant à peine : « Prenez-le comme vous voudrez. » Et puisque j’en suis à rassembler autour de lui les noms qui peuvent servir à le mesurer et à le définir, je dirai encore qu’il participe à cette démangeaison de Henri Estienne et de ces gens d’esprit pétulants qui se donnent avant tout la satisfaction d’imprimer leurs fantaisies, sauf à s’attirer bientôt des affaires sur les bras et à ne trop savoir comment en sortir. […] Sa femme disait de lui, dans une lettre qui nous le peint le même jusqu’à la fin : La grande promptitude de Monsieur n’est point amoindrie avec l’âge, ni son excellent esprit, à qui il donne quelquefois plus de liberté que les affaires de ce temps ne permettent.
Les forces disponibles de la société, refaites à peine des excès et des prodiges de l’action, se portèrent à la tête ; on se jeta dans les travaux et les luttes de l’esprit. […] Mme de Staël et son école, tous ces esprits distingués qui concoururent à introduire en France de justes notions des théâtres étrangers ; qui, les premiers, nous expliquèrent ou nous traduisirent Shakespeare, Goethe, Schiller, ce sont relativement des romantiques ; en ce sens M. de Barante, M. de Sainte-Aulaire même, M. de Rémusat en seraient, et je ne crois pas que ces fins esprits eussent jamais désavoué le titre entendu de la sorte. […] Alfred de Vigny et à qui il a, le premier, donné d’en haut le signal, cherchaient, un peu systématiquement eux-mêmes, à relever l’esprit pur, les tendances spiritualistes, à traduire les symboles naturels, à satisfaire les vagues élancements de l’être humain vers un idéal rêvé, de l’autre côté on s’est trop tenu sans doute à ce qui se voit, à ce qui se touche, à ce qui brille, palpite et végète sous le soleil. […] Personne n’a converti les romantiques ; en gens d’esprit et de talent, ils se sont convertis tout seuls. […] Jay, homme de sens et fort estimable, mais qui n’avait certes fait preuve, dans l’écrit dont il s’agit, ni d’intelligence de la question, ni d’esprit, ni d’agrément, et qui n’y avait surtout pas mis le plus petit grain d’urbanité ; ce sont là des éloges sur lesquels on doit être coulant et qui sont presque imposés dans un discours de réception.
Est-ce que ce Cours familier de Littérature, ouvrage essentiellement neutre et étranger aux querelles du temps, ne laisse pas scrupuleusement en dehors toutes ces questions inviolables de conscience et toutes ces questions irritantes de partis qui ne sont propres qu’à distraire, hors de propos, la jeunesse de l’étude des belles œuvres de l’esprit humain ? […] Qu’est-ce qu’un homme qui sait un métier quelconque, un métier de la main ou un métier de l’esprit ? […] Je le crois ; dans le miel plante et goût ne sont qu’un : L’esprit du jardinier parfume le parfum ! […] … Te souviens-tu du temps où tes Guêpes caustiques, Abeilles bien plutôt des collines attiques, De l’Hymète embaumé venaient chaque saison Pétrir d’un suc d’esprit le miel de la raison ? […] Tu regardais la peur en face, en homme libre, Et ta haute raison rendait plus d’équilibre À mon esprit frappé de tes grands à-propos Que le bain n’en rendait à mes membres dispos !
Ces problèmes, sortant en quelque sorte de terre et venant effrayer le monde, s’emparèrent de mon esprit et devinrent une partie intégrante de ma philosophie. […] Ce voyage, qui dura huit mois, eut sur mon esprit la plus grande influence. […] La culture intensive, augmentant sans cesse le capital des connaissances de l’esprit humain, n’est pas la même chose que la culture extensive, répandant de plus en plus ces connaissances, pour le bien des innombrables individus humains qui existent. […] La France, qui a marché la première dans la voie de l’esprit nationaliste, sera, selon la loi commune, la première à réagir contre le mouvement qu’elle a provoqué. […] Combien de temps l’esprit national l’emportera-t-il encore sur l’égoïsme individuel ?
On ne sait pas où l’esprit humain a été chercher cela ; les routes pour arriver à ce sublime sont inconnues102. […] » Un esprit passa devant ma face, et le poil de ma chair se hérissa d’horreur. […] Sur la phrase elle sera transportée, l’esprit demeure suspendu, et attend quelque grande comparaison, lorsque le prophète ajoute, comme une tente dressée pour une nuit. […] Ce grand conseil de Dieu, qui conduit les affaires humaines, alors qu’elles semblent le plus abandonnées aux lois du hasard, surprend merveilleusement l’esprit. […] Il traduit : Un esprit vint se présenter devant moi, et les cheveux m’en dressèrent à la tête.
I C’est une des plus désagréables puissances de ce temps-ci ; mais, il faut bien en convenir, quoique le cœur en saigne pour l’honneur de l’esprit français, c’est une puissance. […] … On me dit que la Revue Contemporaine n’a pas rendu l’esprit et je le crois bien, mais cela veut dire qu’elle n’est pas morte… Presque soufflée un jour par le mécontentement d’un ministre, elle a protégé assez adroitement contre ce vent tout-puissant son petit bout de bougie et elle s’obstine à existe. […] Or, justement, l’Angleterre et l’Allemagne pullulaient de revues, sérieuses et variées, véritables encyclopédies, mensuelles ou hebdomadaires, de l’esprit humain. […] Ils jugeaient l’esprit de leur temps par le leur, et voilà pourquoi ils se trompèrent… Le public de ce temps-ci est très indifférent au talent. […] Faut-il invoquer le témoignage de ceux qui sont sortis de sa Revue sans esprit de retour, ou de ceux qui en sont sortis pour y rentrer, sous l’empire de je ne sais quelle terreur ; car Buloz exerce sur quelques-uns de ses écrivains un véritable terrorisme.
J’aime cette audace, et elle a parfois réussi à des esprits perçants et robustes. […] Il a beaucoup vécu en Italie, et son esprit a dû s’y italianiser, sans rien perdre de toutes ses qualités françaises… C’est un latin, — comme la France fut une nation latine. […] Trente-deux ans évêque à la même place, il a déployé dans ses fonctions d’évêque ce que j’oserai appeler « l’esprit papal ». La toute-puissante situation qui élève souvent à son niveau les esprits les plus au-dessous d’elle et qui leur communique soudainement les grâces d’état les plus inattendues, n’avait point à faire à Léon XIII de ces fécondes violences. […] C’est là une hypothèse hardie, mais l’Église a bien accepté le gouvernement des Césars, et des Césars abominables, pour le pénétrer de son esprit, et nous vivons là-dessus, nous qui vivons encore.
Fustel de Coulanges, par la nature de son esprit, tend vers elles. […] de ces esprits éperdus : Commode, Néron, Caligula, ne purent dégoûter la tête ferme des Romains de cette chose toute romaine : — le pouvoir absolu. […] Si elle se transforma, si elle se romanisa, si elle s’imprégna de l’esprit romain au point que le Druidisme, c’est-à-dire ce qui devait être le plus profond en elle, disparut en deux générations, c’est que sa volonté, à elle, était dans cette transformation. […] Et je dis contemporains, car, dans une époque confisquée par l’esprit moderne, il n’a pensé à prendre son histoire que dans les écrivains des six premiers siècles. […] Il opposa le romanisme vrai du pouvoir absolu au romanisme faux de la Révolution française, dont l’esprit démocratique ne pouvait rien comprendre à la constitution romaine.
Si cette remarque est vraie du sourire et de l’esprit, que sera-ce s’il s’agit du rire et de la franche gaieté ? […] Je me suis surpassé en gaieté, je ne dirai pas et en esprit, mais je puis dire qu’on m’en soupçonne beaucoup. […] Son esprit à ressources excellait à ces jeux de circonstance, à ce travail en commun de quelques matinées. […] On y trouve tout entier le chantre original et populaire de cette époque, dont nous avons défini l’esprit au dedans. […] Merle, et je dois de plus à la parfaite obligeance de cet homme d’esprit plus d’un souvenir dont j’ai profité.
La nature est le Quintilien des bons esprits ; faisons comme elle, et nous serons sûrs de frapper l’œil, de satisfaire l’esprit et de toucher le cœur. […] Sa biographie, plus romanesque qu’un roman, attache tout de suite le lecteur, par toutes les curiosités de l’esprit et par toutes les émotions de l’âme, au drame dont ce grand acteur va remuer la scène. […] C’est dans cet esprit que je veux les raconter. […] L’histoire et l’expérience m’ont mûri l’esprit ; ce n’est nullement une répudiation de principes, c’est un progrès. […] Essentiellement spiritualiste, elle n’affecta d’autre empire pour la France que l’empire volontaire de l’imitation sur l’esprit humain.
Condorcet, à la fin du siècle, 1794, dans son Essai sur les progrès de l’esprit humain, résumait, précisait, arrêtait ou fixait la doctrine : on peut même dire qu’il la codifiait. […] Ils n’ont eux-mêmes d’autre « relation » avec ce qu’ils expriment, et avec nous, que de le représenter dans sa « relation » avec la nature de l’esprit humain. […] Et ce n’est pas à dire que la recherche soit inutile, — on le verra bien tout à l’heure, — mais cela signifie que la science n’est investie, par nature ou par définition, d’aucun privilège qui lui soit propre, ni surtout qui lui confère un droit supérieur au gouvernement des esprits. […] Ce n’est pas, à la vérité, que la solution de la difficulté soit aisée, et ce n’est pas non plus qu’en s’efforçant de la donner, de nombreux philosophes n’aient fait preuve d’infiniment d’esprit. […] Descartes, Règles pour la direction de l’esprit, Œuvres, t.
Eutrope était un favori tout-puissant auprès de l’empereur Arcade, et qui gouvernait absolument l’esprit de son maître. […] Quand il s’en aperçut, il continua ainsi : « Ai-je calmé vos esprits ? […] À l’effronterie des cyniques, ils joignent la noble impudence de débiter tous les paradoxes qui leur tombent dans l’esprit ; ils se targuent de géométrie, et soutiennent que ceux qui n’ont pas étudié cette science ont l’esprit faux ; que par conséquent ils ont seuls le don de bien raisonner : leurs discours les plus communs sont farcis de termes scientifiques. […] Tantôt c’est en lui découvrant l’origine des préjugés, tantôt c’est un livre sur l’esprit, tantôt le système de la nature ; cela ne finit point. […] Il nous a vendu cher ce brillant héritage, Quand, libre en son exil, rassuré par son âge, De son esprit fougueux l’essor indépendant Prit sur l’esprit du siècle un si haut ascendant.
Les épisodes sont nés dans les premiers âges de la grossièreté des esprits, incapables de distinguer et d’écarter les choses qui ne vont pas au but. […] La lenteur des esprits, la difficulté du langage, voilà ce qui dut le rendre spondaïque ; et il a conservé quelque chose de ce caractère, en exigeant invariablement un spondée à son dernier pied. Plus tard, les esprits et les langues ayant plus de facilité, le dactyle entra dans la poésie ; un nouveau progrès détermina l’emploi de l’iambe, pes citus, comme dit Horace. […] Corollaires relatifs à la logique des esprits cultivés 1. […] La topique rend les esprits inventifs, comme la critique les rend exacts.
Pourquoi n’étendrions-nous pas cette humanité aux choses qui ne regardent que l’esprit ? […] Il peut le choisir seulement pour l’utilité des faits ou comme une époque de l’état et des progrès de l’esprit dans certains siecles. […] Qu’on nous marque donc au juste, combien il faut de siecles pour oster aux hommes la liberté de juger d’un ouvrage d’esprit. […] L’esprit géometrique vaut bien l’esprit commentateur. […] L’esprit balance en vain ; le coeur plus prompt décide ; il est prest à frapper, etc.
« S’il est vrai, dit-il, comme les chrétiens l’assurent, que le pape soit assisté par les inspirations du saint Esprit, c’est Maigrot qui est le saint Esprit des chrétiens ». […] Leur esprit est ce feu précieux dérobé par Promethée à la divinité. […] Le livre de l’Esprit leur a porté le dernier coup. […] Ce sont eux que la passion anime, & qui soufflent l’esprit de discorde ». […] La passion y tient lieu d’art, d’esprit, de méthode & de vérité ».
Ils ont été des esprits scientifiques, qui n’ont pas abouti au Scientisme. […] En la montrant vivante et souveraine dans son propre esprit et son propre cœur. […] De là une constante défense de l’esprit et sa limite. […] Or, en quoi consiste essentiellement l’esprit scientifique ? […] La critique ambitionne de devenir un chapitre de la botanique des esprits.
Qu’est-ce, en effet, qu’un secrétaire perpétuel, s’il remplit toutes les conditions de son office et s’il en a l’esprit ? […] Villemain qui vint s’y asseoir dès 1835, l’Académie, comme par enchantement, dépouilla le vieil homme : elle parut, d’un jour à l’autre, avoir changé subitement d’esprit comme de ton. […] Lebrun, esprit judicieux et caractère équitable, qui possède à un haut degré ce qu’on peut appeler le patriotisme de l’Académie, je veux dire qu’il est tout dévoué au bien et à l’honneur du Corps. […] nous avons bien reculé en effet, nous sommes en arrière de la fermeté d’esprit de nos pères, et par ce seul exemple on peut mesurer la distance. […] Misère et infirmité de l’esprit humain !
La secte de Luther remplaça presque généralement celle de Jean Huss ; mais la mémoire du supplice atroce infligé à ce dernier continua d’animer les esprits des novateurs, même après qu’ils se furent écartés de sa doctrine. […] On a vu sans doute, depuis cette guerre, plusieurs monarques entreprendre des expéditions belliqueuses et s’illustrer par la gloire des armes ; mais l’esprit militaire, proprement dit, est devenu toujours plus étranger à l’esprit des peuples. […] Tous les esprits sont pleins de lui ; tous célèbrent ses louanges, s’inquiètent des bruits répandus sur le mécontentement de la cour, se jurent de ne pas abandonner le général qui les protège. […] Cette scène, dans laquelle Tersky, pour les amener à son but, leur rappelle tous les bienfaits qu’ils ont reçus de leur chef, bienfaits dont l’énumération seule forme un tableau piquant de l’état de cette armée, de son indiscipline, de son exigence et de l’esprit d’égalité qui se combinait alors avec l’esprit militaire ; cette scène, dis-je, est d’une originalité remarquable, et d’une grande vérité locale ; mais elle ne pouvait être rendue qu’avec des expressions que notre style tragique repousse. […] La tragédie française est, selon moi, plus parfaite que celle des autres peuples ; mais il y a toujours quelque chose d’étroit dans l’obstination qui refuse à comprendre l’esprit des nations étrangères.
Mais j’ai pour excuse la nécessité même, car, dans un problème si délicat, il est impossible de parler d’après l’expérience des autres, et nul ne saurait noter avec certitude la marche de pareilles idées, si ce n’est dans son propre esprit. […] La seconde opération de l’esprit est bien différente, celle de la mise au point, l’approfondissement des caractères, la combinaison des scènes, la création des personnages accessoires que l’idée maîtresse n’a pas nécessairement évoqués. […] Il est perçu par l’esprit beaucoup mieux que l’effort dont il procède. […] » Un geste d’inconnu, un mot frappe l’esprit, et une voix intime s’élève et dit : « Il m’appartient par droit d’harmonie ! […] À un moment, ils sont parfaits, de la perfection relative que chaque esprit peut leur donner.
Tout ce qui est sorti de sa plume, porte la marque d’un esprit réfléchi, & du bon goût. […] Il est si rare de trouver des esprits aussi pénétrans que sages, pour saisir dans une juste précision ce qui constitue la vraie beauté de chaque genre ; il est si ordinaire de voir des esprits présomptueux donner leurs rêveries pour des découvertes, les égaremens de leur goût pour des regles sûres, les productions de leur plume pour des modeles irréprochables, qu’on doit regarder les Ecrits des vrais Littérateurs comme des préservatifs contre la décadence des Lettres, ou comme ces colonnes milliaires qui, chez les Romains, indiquoient les grandes routes, & éloignoient les voyageurs des chemins détournés.
Cette tournure d’esprit peut avoir son agrément, mais le goût en passe vîte, & il n’est pas à propos que la Nation préfere ces Productions légeres à des Ecrits plus utiles & plus conformes à son génie. On doit cependant rendre justice à Vadé ; quelques-uns de ses Opéra bouffons, un grand nombre de ses Chansons, sur-tout ses Vaudevilles, fourmillent de traits de naïveté, de finesse, de gaieté, & ont par-dessus tout une tournure qui peut plaire à l’esprit, dans des momens de délassement. […] Ils pourroient faire honneur à son esprit, mais ils n’en feroient point à ses mœurs.
Molière n’avait aucune coquetterie d’esprit. […] … Si lord Melvil avait l’esprit de crier : « Bravo ! […] L’esprit de M. […] L’esprit de M. […] J’ai rarement vu tant d’esprit en si peu d’espace, ni un esprit plus cinglant, ni tant d’observation sous des traits d’esprit.
Ces renaissances de l’esprit précieux sont périodiques. […] Cependant Molière y a fait preuve d’ingéniosité, d’esprit et même d’imagination. […] Or, quels sont ces endroits où il s’est montré homme d’esprit et sérieux. […] Puisqu’on en est à jouer son jeu, elle a tout son sang-froid, toute sa présence d’esprit et tout son esprit ; mais elle a commencé presque maladroitement. […] Elle est peuple, avec de l’esprit et de l’élégance bourgeoise.
Cette école des poètes administratifs se composait d’une centaine d’hommes d’esprit et de talent parmi lesquels primaient au-dessus de tous les Fontanes, les Arnault, les Étienne. […] C’était naturel à un jeune employé de bureau qui débordait d’esprit et qui ne savait où le répandre. […] Jamais peut-être, dans aucun esprit supérieur de nos jours, ce travail intérieur du temps, qui tue les illusions, qui convertit les faiblesses, qui fait éclore les vérités du sein de l’expérience et qui régénère les vertus naturelles dans les résipiscences d’esprit ; jamais, disons-nous, ce travail de vivre pour s’améliorer ne fut aussi sensible et aussi réussi que dans Béranger. […] Cette action qui concourt à ses desseins et à sa bonté, je tâche de m’y conformer le plus que je peux par ma charité d’esprit et de main (quand, hélas ! […] Un homme de bon cœur et de bon esprit, M.
Les novateurs allaient s’adresser aux yeux avant d’atteindre l’esprit. […] L’expérience nous démontre que malgré de vives souffrances, on peut conserver toute la vitalité de son esprit. […] Ils n’ont à appliquer à leurs observations que les procédés de l’esprit dont tout cerveau richement organisé et amplement cultivé dispose. […] Sans doute, Diderot, esprit philosophique, esprit de science, préfère encore la vérité crue à l’ornement de convention. […] Zola, puisque l’esprit français se glorifie de Rabelais.
L’état de grossièreté où reste, chez nous, par suite de notre vie isolée et tout individuelle, celui qui n’a pas été aux écoles est inconnu dans ces sociétés, où la culture morale et surtout l’esprit général du temps se transmettent par le contact perpétuel des hommes. […] La délicatesse des manières et la finesse de l’esprit n’ont rien de commun en Orient avec ce que nous appelons éducation. […] Il ne connut rien hors du judaïsme, son esprit conserva cette franche naïveté qu’affaiblit toujours une culture étendue et variée. […] Les fréquentes ressemblances qu’on trouve entre lui et Philon, ces excellentes maximes d’amour de Dieu, de charité, de repos en Dieu 135, qui font comme un écho entre l’Évangile et les écrits de l’illustre penseur alexandrin, viennent des communes tendances que les besoins du temps inspiraient à tous les esprits élevés. […] Ce livre, composé par un Juif exalté du temps d’Antiochus Épiphane, et mis par lui sous le couvert d’un ancien sage 137, était le résumé de l’esprit des derniers temps.
Ce qui la sauva de tout cela, ce fut la piété, la piété, mère surnaturelle de cette simplicité, d’ordinaire si peu naturelle dans les femmes d’amour-propre et d’esprit, quand elles sont cuites à l’infernale chaleur de serre chaude de ces horribles éducations ! […] Seulement le Pape, par égard pour ses vertus et ses bonnes œuvres, lui avait conféré le privilège d’avoir le Saint Sacrement chez elle, et cette distinction fait bien symbole à tout ce qu’elle fut… En littérature, elle ne voulut jamais être une femme qui aurait pris rang, de par son esprit, parmi les esprits littéraires. […] … Il faut être voué au lieu commun pour répéter, à propos de Swetchine, la phrase immémoriale au double grelot que les sots ne manquent jamais, quand l’occasion s’en présente, de faire tinter dans le vide : « Homme par l’esprit, elle resta toujours femme par le cœur. » Non, le cœur et l’esprit étaient trop spirituels chez Mme Swetchine pour faire cette antithèse de rhétorique si peu imprévue… Dans les pages que l’on a réunies et qui se sont détachées de sa pensée comme des fruits longs à mûrir, mais mûris enfin, et comme elle l’a dit : « venus sous la neige », car dans Mme Swetchine c’est encore moins la femme que la vieille femme qu’on doit adorer, eh ! […] Elle a dit quelque part : « Il y a des esprits qui font comme les dames chinoises.
Venu en même temps que le Père Didon et ayant sauté comme lui sur le dos de la circonstance, mais plus vieux de théâtre et ayant plus que lui l’habitude des parterres, il a effacé dans l’esprit du public l’impression qu’y avait laissée le Père Didon, en opposant à la médiocre argumentation philosophique du moine toutes les misérables petites raisons et toutes les grandes insolences de la Libre Pensée. […] On lui a fait crédit, avec une facilité généreuse, de toutes les facultés qu’il n’a pas, et il a été reconnu comme l’homme d’esprit d’une époque, qu’il vaut encore mieux être en France que d’être un homme de génie. […] L’homme d’esprit féroce aurait pu rire de cette ridicule idolâtrie, mais l’homme flatté s’arrêta au sourire… Assurément, les hommes sont moins expressifs, mais ils le sont terriblement encore ! […] Dumas une partie de son talent et de sa distinction native, et elles ne lui ont pas donné que leur logique, mais leurs passions ignorantes et basses et si dégradantes pour un esprit comme le sien ! […] », mais il l’imite sans en parler… Les dilettanti de l’impiété, qui ont des exigences, ont trouvé que ce n’était pas digne d’un des grands esprits du xixe siècle, — du siècle immense des Darwin et des Renan !
Il s’est rencontré de très bons esprits, peu philanthropes et ne se faisant pas grande illusion sur les puissances de méchanceté ou de sottise qui sont dans cette aimable créature qu’on appelle l’homme, qui croyaient que Suétone et même le grave Tacite s’étaient moqués de la postérité en écrivant leurs histoires. […] Voici une histoire qui n’est ni de Tacite ni de Suétone, mais d’un de nous, d’un moderne, à l’esprit sobre, aux besoins de vérité positive, sagace, de bon sens, et surtout de bonne humeur, ce que n’étaient ni Suétone ni Tacite, et qui de sa plume sans prétention, mais non pas, certes ! […] D’un autre côté, d’Alaux est un esprit qui nous plaît. […] Il ne sied pas à cet esprit viril, qui n’hésite jamais devant un fait, et pour les formes détachées duquel nous nous sentons une vive sympathie, de demander ainsi presque pardon aux préjugés actuels du mordant de sa plume ou de son sujet. […] Mais comment un esprit si positif et si renseigné a-t-il pu placer sur cet ascendant une espérance ?
C’était son état d’âme, à lui, sa tournure d’esprit. […] Elle l’a bien trouvée ; car elle a l’esprit net. […] Il y a comme antipathie naturelle entre les esprits de ce genre et les esprits religieux. […] Que d’esprits dans ce groupe, sans compter les gens sans esprit ! […] Joas a bien plus de présence d’esprit qu’elle.
On y reconnoît partout la même tournure d’esprit, le même caractere, & il falloit que chaque personnage y eût le sien particulier. […] Ce n’est pas qu’elle n’offre plusieurs traits d’esprit ; mais cet esprit est si volatil, qu’il n’est pas capable de soutenir un Ouvrage.
S’il est vrai que la Métaphysique soit une espece d’anatomie du cœur & de l’esprit humain, cet Académicien peut être regardé comme le Physiologiste le plus profond & le plus lumineux. Dans son Essai sur l’origine des connoissances humaines, dans son Traité des Sensations, &c. les idées les plus abstraites, les principes les plus subtils, les nuances les plus délicates sont mises à la portée de tous les esprits. […] C’est ainsi qu’il faudroit savoir penser & écrire, quand on entreprend de développer les mysteres de l’esprit humain.
Un jour, en 1648, il a une velléité de voyage, quoique en général il goûte peu les voyages et les estime « une agitation de corps et d’esprit en pure perte ». […] Évitons ce travers et ne présentons jamais comme burlesque un homme d’esprit original que goûta si constamment M. de Lamoignon. […] scribere plura vetant lacrymae… » Gui Patin pleure en effet quelquefois ; il pleure quand les parties sérieuses de son esprit ou de son âme sont remuées. […] » et que c’est bien la marque d’un vigoureux et bon esprit de se sentir ému à en pleurer par la considération d’une perte de cette nature ! […] Arnauld, et en général tous les écrivains de Port-Royal, non par communion de sentiments ou de doctrine, mais par une sorte de complicité d’esprit et de sympathie morale.
Mais avec ces esprits emportés et mobiles, qui sont toujours à l’extrémité de leur expression ou de leur pensée, rien ne nous étonne ; on n’en est jamais à une contradiction près. […] Or, sans fatiguer inutilement l’esprit d’autrui, il me semble que chacun peut aisément trouver dans le sien des choses si neuves. […] Comment et par quel secret revirement l’enfant docile et soumis d’hier est-il redevenu subitement l’esprit amer et mâle, le Breton farouche et indompté, l’homme entier et naturel ? […] Mais la recette avec La Mennais était insuffisante : il versait du noir avec éclat dans ses pages, et il en gardait encore de reste dans son esprit. […] Et ce grand esprit écrit ces choses sans que la plume lui bronche !
Sue, si l’on prend l’ensemble de ses œuvres et si l’on se représente bien la famille de romans dont il s’agit, se trouve en combiner en lui l’esprit, la mode, la fashion, l’habitude, avec distinction, je l’ai dit, avec sang-froid, avec fertilité, avec une certaine convenance. […] Il exploita, en homme d’esprit et d’imagination, ses rapides voyages et les impressions dont sa tête était remplie. […] Il est douteux qu’en commençant son fameux ouvrage, cet homme d’esprit et d’invention ait prétendu autre chose que de persister plus que jamais dans sa voie pessimiste, et, rassemblant tous ses secrets, en faire un roman bien épicé, bien salé, à l’usage du beau monde. […] Sue est en voie d’aboutir au saint Vincent de Paul en passant par le Ducray-Duminil. » C’est ce qui faisait dire encore à une femme d’esprit : « Toutes les fois que M. […] Nous avons regret de clore avec un homme d’esprit, et si peu entêté de son succès, par un post-scriptum qui peut paraître sévère ; mais lui-même, s’il disait son secret et son jeu, et tout ce qu’il sait de la gobe-moucherie humanitaire (la plus gobe-mouches de toutes), que ne dirait-il pas ?
Dupin l’a envisagé, selon les habitudes de son esprit, avec vigueur, bon sens, et une sorte de résolution de coup d’œil : s’emparant de quelques objections adressées aux idées premières de M. de Malesherbes, il n’a pas seulement loué, il a discuté. […] Ces critiques nous montrent un esprit ferme, judicieux, « souverainement droit », a dit M. Flourens, l’esprit qui convient aux sciences d’observation ; le style y est abondant, naturel, sain, médiocrement élégant, mais souvent spirituel par le bon sens : c’est là un des traits qui caractérisent Malesherbes. […] En 1758, Helvétius voulut publier le livre De l’esprit, mauvais ouvrage, superficiel, indécent en bien des endroits, et plus fait pour scandaliser encore un vrai philosophe qu’un évêque. […] Grâce aux difficultés que lui opposa la censure, Fréron, obligé de se contraindre et de passer de l’injure à l’allusion, a véritablement acquis de la finesse et de l’esprit plus qu’il ne s’en accorde ordinairement.
Tel est le vœu auquel il attache son bonheur et dont toute l’ingéniosité de son esprit tend à lui procurer la réalisation. […] Le vieux roi a changé de demeure, mais il vit toujours dans l’esprit de son fils et dans l’esprit de sa tribu. […] Elle se propose de préciser le pouvoir et de déterminer les limites de l’esprit. […] Si pourtant on rencontre dans l’esprit moderne une résistance à ces conclusions, c’est, semble-t-il, en raison de la violence et du caractère religieux du préjugé contraire. […] Il est donc naturel que cette source d’énergie ait été captée et utilisée à son profit par le Génie de la Connaissance, et de fait, il semble bien qu’un tel souci soit une des premières sources de l’esprit scientifique.
Il a sur eux l’avantage des vers, il a celui de l’esprit. […] Mais à force d’esprit, l’auteur d’Hudibras a trouvé le secret d’être fort au-dessous de Dom-Quichote. Le goût, la naïveté, l’art de narrer, celui de bien entremêler les aventures, celui de ne rien prodiguer valent bien mieux que l’esprit. […] Celui de Leonidas est très-beau, mais en général on trouve dans ce Poëme plus d’esprit que de goût. […] Il avoit l’esprit très-facile, & il abusoit de cette facilité.
Il avoit un esprit pénétrant & fécond, une facilité étonnante pour tout apprendre & tout retenir, l’art de développer & de communiquer ses idées ; ce qui l’a rendu, à juste titre, un des plus célebres Professeurs en Droit que la France ait eus. On remarque dans ses Ouvrages le même caractere d’esprit qui présidoit à ses leçons ; même profondeur dans les idées, même clarté dans les expressions, même ordre dans les matieres, même érudition dans les discussions. Outre cela, Cujas avoit une trempe d’ame qui le rendoit encore plus estimable que ses talens ; non seulement il aidoit de ses lumieres ses Ecoliers, il soutenoit de plus, par ses dons, l’émulation de ceux qui, nés avec de l’esprit, trouvoient, dans leur peu de fortune, des obstacles à la perfection de leurs études ; générosité qui le fit nommer le Pere des Etudians.
Généralement, c’est là l’histoire de tous les chefs-d’œuvre de l’esprit humain. […] Sa décadence s’accentue à mesure que l’esprit, le génie de la Musique s’éloigne d’elle. […] Il l’est par la tendance hautement philosophique de son esprit, par le caractère synthétique de son génie. […] Je ne sache qu’une œuvre moderne qui approche véritablement de l’esprit wagnérien : c’est le Fervaal de M. […] La question de son avenir a tourmenté vainement bien des esprits.
Il avait dans le visage l’air de Cicéron, et dans l’esprit le caractère de Rabelais. » Du Rabelais, à la bonne heure ! […] Ces nouvelles se trouvent souvent fausses ou défigurées par la malignité ; d’ailleurs cette multitude de petits faits n’est guère précieuse qu’aux petits esprits. […] En avançant dans la lecture de Gui Patin, nous verrons qu’il n’avait point sans doute l’esprit philosophique et méthodique dans le sens général du mot ; il n’est point à cet égard de la famille de Descartes, il est de ces esprits à bâtons rompus, si je puis dire, et qui ne vont pas jusqu’au bout d’une conséquence ; mais il a tout ce que le bon sens à première vue saisit et appréhende, et il le rend avec des jets de verve, avec des éclats de causticité qui sont amusants. […] J’ai à peine, dans tout ce qui précède, donne idée de Gui Patin, qui n’est nullement un homme tout d’une pièce ni un esprit d’une seule venue. […] Réveillé-Parise, on disait que c’était un homme d’esprit : c’est une manière abrégée de se dispenser de rien dire de plus de quelqu’un.
Lorsqu’on lit les réflexions et fragments de cet autre généreux écrivain enlevé comme lui dès le début, de Vauvenargues, et qu’on en pénètre l’esprit, l’inspiration secrète, on voit certes un homme de pensée, mais on reconnaît encore plus un homme de caractère et d’action qui a manqué sa destinée et qui en souffre. […] Si l’on peut faire quelque part distincte entre eux, Montaigne serait plutôt le juge de l’esprit et des écrits de son ami, et La Boétie le juge des mœurs. […] Je ne dis pas que le libertinage d’esprit, qui fait la plaie du talent de Voltaire, eût jamais pu être corrigé ; il eût été modéré du moins, comme le fut celui de Montaigne. […] Cet attrait intérieur qui les porta ainsi tout d’abord à une mutuelle rencontre était bien celui d’esprit à esprit, d’âme à âme. […] Combien d’esprit, de bonté de cœur, d’attachement, de services et de complaisance dans les amis, pour faire en plusieurs années bien moins que ne fait quelquefois en un moment un beau visage ou une belle main !
Le rôle que le peuple romain a tenu dans l’art, l’esprit qu’il a porté dans ses bâtisses et ses monuments, tel que nous l’avons défini d’après M. […] Viollet-Le-Duc, dans cette façon d’écrire l’histoire d’une conquête sur une spirale de marbre, terminée par la statue du conquérant, quelque chose d’étranger à l’esprit grec. […] Nous nous asservissons à eux, et nous importons pour d’autres mœurs, pour d’autres usages et sous un autre climat, des formes toutes faites dont nous méconnaissons le principe originel et l’esprit. C’est l’esprit et la manière de raisonner des anciens architectes, non la lettre et la forme qu’il faut prendre. […] On comprend les avantages et le profit qu’un esprit juste, élevé, a pu tirer ensuite de tous ces détails et de tout cet acquit pour la pratique de son art.
Le point de vue auquel se place l’auteur pour juger de la Révolution est celui d’un esprit modéré et judicieux qui, né et élevé dans une république, s’est pourtant dégagé avec les années des maximes démocratiques, mais sans cesser pour cela d’être libéral. […] On était très bien placé en 1820, quand on avait un bon esprit, et libre de passions, pour juger des hommes et des choses de notre grande Révolution, dont tant de témoins et d’acteurs principaux étaient encore vivants. […] On redoutait par-dessus tout l’esprit révolutionnaire, et l’on n’aimait pas les baïonnettes intelligentes. Les projets rédigés par Jomini furent donc peu à peu altérés dans leur esprit, au point que l’exécution dut en être remise à d’autres. […] Son esprit toujours lucide et présent se posait le problème sous sa forme renouvelée ; on sentait qu’il eût aimé à le reprendre et à le discuter à fond70.
On ne rencontre que de bons esprits qui en sont préoccupés comme d’un débordement. […] sur certaines questions courantes et vives, à n’avoir plus pour sentinelle hardie que l’esprit et le caprice de M. […] L’idée première de cette Société est due à un écrivain d’esprit, M. […] Les bons esprits que renferme l’association ont dû y réfléchir déjà, et par expérience. […] C’est le cas surtout de retrouver le courage d’esprit et de savoir braver.
D’une fleur repliée qui s’entr’ouvre il sort des parfums et non des pétards et des fusées volantes : or, à peine réveillée de ce long sommeil du cœur et des sens où elle a dormi la grasse matinée de sa jeunesse, Philiberte se met à faire de l’esprit comme si c’était son métier, de l’esprit à pile ou face, envers et contre tous, en veux-tu, en voilà, de l’esprit rédigé, limé, aiguisé, barbelé, pointu par les deux bouts. […] Quel est donc la raison d’être de son grand succès : le dialogue, l’esprit, la poésie, le style ? […] Augier, de la verve comique, de l’esprit, de vives boutades, une belle humeur dont le nez nous déplaît parce qu’il est trop rouge, mais qui a parfois de larges éclats et de francs entrains. […] L’esprit gaulois de M. Augier est un compagnon quelque peu bruyant pour l’esprit délicat et doux de M.
Un matin qu’assise dans le jardin parfumé et silencieux, elle rêvait à son isolement, l’idée de Goethe se présenta à son esprit ; elle ne le connaissait que par sa renommée, par ses livres, par le mal même qu’elle entendait quelquefois dire autour d’elle de son caractère indifférent et froid. […] Aussi cet amour ne faisait nullement son tourment à elle, mais plutôt son bonheur : « Je sais un secret, disait-elle : quand deux êtres sont réunis et que le génie divin est avec eux, c’est là le plus grand bonheur possible. » Et il lui suffisait le plus souvent que cette réunion fût en idée et en esprit. […] Quelquefois cette effusion à laquelle elle se livre est bien étrange et touche de près au ridicule : « Quand je suis au milieu de la nature, dont votre esprit, lui écrit-elle, m’a fait comprendre la vie intime, souvent je confonds et votre esprit et cette vie. […] Il reconnaît qu’il lui doit un rajeunissement d’esprit et un retour à la vie spirituelle. […] Elle voudrait se donner tout entière en esprit, mais qu’on se donnât aussi en retour : « Peut-on recevoir un présent sans se donner, soi aussi, en présent ?
Marmont, par son esprit, par ses lumières, par cette rapidité d’impressions dont il était susceptible, s’y laissa gagner plus qu’il n’eût convenu à un homme qui n’eût voulu rester que dans sa ligne de soldat. […] Ce récit fit révolution sur l’esprit de Napoléon et changea à l’instant le cours de ses idées : il revint à la résolution de combattre en désespéré : « Eh bien ! […] Tous les généraux lui conseillent de rétrograder : il n’en fait rien, il envoie aide de camp sur aide de camp pour tâcher de préparer les esprits, et lui-même il rejoint les soldats en désordre à Trappes. […] À force de présence d’esprit, d’émotion et de cordialité, il ramène à l’ordre ce corps d’armée, qui reprend les armes et le salue d’un dernier cri. […] Je crois que ces deux points, pour qui désormais examinera en détail et dans un esprit d’entière impartialité, seront résolus en faveur de Marmont.
Mercure, c’est tout le vice possible, plein d’esprit ; Mercure, le dieu vice, sert Jupiter, le dieu crime. […] L’hésitation livide est dans son esprit. […] C’est l’aparté d’un esprit plus encore que l’escarpement d’un prince. […] Cela du reste est vrai de tous les esprits de cet ordre. […] Le poëte rend ce service à votre esprit.
Le prêtre, dont le corps, le cœur et l’esprit demeurent ensevelis sous le fardeau de la règle à laquelle il s’est attaché, est donc bien un malade, un être pitoyable, qui appelle tous nos soins. […] Il reçut dans les yeux, en plein visage, une éclaboussante gifle de lumière. » La conclusion s’impose aussitôt à son esprit ; la simple honnêteté lui commande de quitter le sacerdoce. […] « Quand donc elle a marqué un enfant pour le sacerdoce, écrit un clairvoyant esprit, — et elle marquerait volontiers tous ceux qui lui sont commis, — l’Église le surveille et l’épie avec une méthode et une persévérance qu’on ne comprend point sans les avoir vues à l’œuvre, afin d’étouffer en lui tout abandon à ce qu’il pourrait ressentir, dans l’esprit ou dans le cœur, de spontané et de fort, et même de l’en faire rougir. […] Tel est l’avenir du prêtre : devenir un objet de pitié ou de mépris pour le monde, pauvre d’esprit ou charlatan. […] Et ce qui est terrible, c’est que tu en arriveras toi-même à prendre ces mensonges pour des vérités, auxquelles ton esprit faussé s’attachera comme la plante à l’arbre.
Pour nous, inclinons la tête devant le Très-Haut, qui voulut laisser sur cet homme la plus vaste empreinte de son esprit créateur. […] peut-être sous ce grand désastre, en lui s’abattait l’esprit hors d’haleine ; et il désespérait. […] Les âmes les plus fières, les esprits les plus inventifs, y succombent. […] Déjà, dans le siècle dernier, ces lointains climats nous avaient envoyé plus d’un témoignage de l’influence qu’y prenait l’esprit français. […] L’enfant qui devait illustrer le nom d’Heredia était malingre, difforme, à demi paralysé ; mais la vigueur de son esprit surmonta tous les obstacles du corps.
. — L’Esprit d’Alphonse Karr (1877) […] Sainte-Beuve Je concevrais plutôt encore une indignation réelle, sincère, ardente, souvent injuste, une vraie Némésis ; mais ces guêpes, si acérées qu’elles soient d’esprit, pourtant sans passion aucune, ces guêpes-là ne peuvent aller longtemps sans se manquer à elles-mêmes. […] On voudrait voir tant d’esprit et d’observation employé à d’autres fins. […] Alphonse de Lamartine Te souviens-tu du temps où tes Guêpes caustiques, Abeilles bien plutôt des collines attiques, De l’Hymète embaumé venaient chaque saison Pétrir d’un suc d’esprit le miel de la raison ?
Le Parti Philosophique, dont il est un des Sous-Chefs, a mis ses Eloges de plusieurs Membres de l’Académie des Sciences bien au dessus des Eloges de Fontenelle, parce qu’il est d’usage parmi les Philosophes de ne louer que par comparaison & par intérêt : mais les Littérateurs, que l’esprit de parti n’aveugle point, trouvent que les Eloges du Secrétaire actuel ne sont propres qu’à faire mieux sentir le mérite de ceux de son prédécesseur. Et véritablement celui-ci a su dominer, par la supériorité de son esprit, les matieres les plus ingrates, & répandre sur les plus abstraites la clarté & les agrémens du style ; tandis que M. de Condorcet n’offre, dans les sujets les plus faciles, qu’un style aride, sentencieux, plein de morgue, & dépourvu de toute espece d’intérêt. […] Ne soyez point étonné, Monsieur, de voir ensuite ces bienfaits qualifiés d’aumône : l’esprit de la Philosophie est d’ennoblir tout ce qui la concerne, & de dégrader tout ce qui a rapport à ses adversaires……. […] Qu’ont-ils espéré en formant avec tant de fiel & de maladresse un tas de Libelles qui décelent bien davantage leur esprit d’intrigue & d’orgueil, qu’ils n’ont fait de tort à mes sentimens ?
. ; mais l’auteur a trop cherché l’esprit & les belles phrases. […] C., le plus bel ouvrage qui soit sorti de la main des hommes, dit Fontenelle, & certainement le plus propre à calmer les troubles du cœur & les inquiétudes de l’esprit. […] On voudroit seulement que ses phrases fussent moins coupées, & que son esprit ne roulât pas sans cesse sur les mêmes réfléxions. […] Les Œuvres spirituelles de Fénelon, sont le fruit d’une belle ame & d’un cœur sensible qui aime & qui fait aimer la vertu ; mais il y a une petite teinture de quiétisme, qui pourroit produire de mauvais effets sur les esprits foibles.
Il faut penser lentement ; il faut lire lentement ; il faut penser avec circonspection sans donner à grand’erre dans sa pensée et en se faisant sans cesse des objections ; il faut lire avec circonspection et en faisant constamment des objections à l’auteur ; cependant il faut d’abord s’abandonner au train de sa pensée et ne revenir qu’après un certain temps à la discuter, sans quoi l’on ne penserait pas du tout ; il faut faire confiance provisoire à son auteur et ne lui faire des objections qu’après qu’on s’est assuré qu’on l’a bien compris ; mais alors, lui faire toutes celles qui nous viennent à l’esprit et examiner attentivement et s’il n’y a pas répondu, et ce qu’il pourrait y répondre. […] Mais pour ceux qui sont entre les deux extrêmes, et c’est le cas, je pense, de la plupart d’entre nous, le livre, ce petit meuble de l’intelligence, ce petit instrument à mettre en activité notre entendement, ce moteur de l’esprit qui vient au secours de notre paresse et plus souvent de notre insuffisance, et qui nous donne la délicieuse jouissance de croire que nous pensons, alors que nous ne pensons peut-être pas du tout, le livre est un ami précieux et bien cher. […] Le sot livre impose, étant très souvent goûté par une multitude de gens dont le nombre fait impression sur vous, et l’on ne sait pas le discuter avec la pleine liberté d’esprit que suppose Montaigne, ce qui est la seule condition à laquelle il deviendrait de profit. […] Au lieu de cueillir des fleurs, il cueillait avec délicatesse les plus belles idées, les plus beaux récits, les plus beaux dialogues qui aient germé dans l’esprit humain.
Cependant, la fin de la poésie étant d’adoucir la férocité du vulgaire, de l’esprit duquel les poètes disposent en maîtres, il n’était point d’un homme sage d’inspirer au vulgaire de l’admiration pour des sentiments et des coutumes si barbares, et de le confirmer dans les uns et dans les autres par le plaisir qu’il prendrait à les voir si bien peints. […] Admettons cependant qu’Homère a été forcé de les choisir ainsi pour se faire mieux entendre du vulgaire, alors si farouche et si sauvage ; cependant le bonheur même de ces comparaisons, leur mérite incomparable, n’indique pas certainement un esprit adouci et humanisé par la philosophie. […] Je n’ai pas besoin de dire qu’on ne peut guère comprendre comment un esprit grave, un philosophe habitué à combiner ses idées d’une manière raisonnable, se serait occupé à imaginer ces contes de vieilles, bons pour amuser les enfants, et dont Homère a rempli l’Odyssée. Ces mœurs sauvages et grossières, fières et farouches, ces caractères déraisonnables et déraisonnablement obstinés, quoique souvent d’une mobilité et d’une légèreté puériles, ne pouvaient appartenir, comme nous l’avons démontré (livre II, Corollaires de la nature héroïque), qu’à des hommes faibles d’esprit comme des enfants, doués d’une imagination vive comme celle des femmes, emportés dans leurs passions comme les jeunes gens les plus violents.
En rentrant dans sa maison, il se sent plus à l’aise, il sent plus vivement par le contraste ; il chérit son étroit horizon, où il est à l’abri de ce qui le gêne, où son esprit n’est pas vaguement égaré par une trop vaste perspective. […] Je crois que Raphaël dessine bien, et que Titien est un admirable coloriste, que Voltaire écrit comme pense un homme d’esprit, et que Byron chante comme l’humanité pleure, surtout dans Don Juan ! […] Tes feux intérieurs sont calmés, tu reposes ; Mais ton cœur reste ouvert au vif esprit des choses. […] » Quand l’amitié revient ainsi à un cœur qui n’a jamais cessé d’aimer, il y a un festin de l’enfant prodigue dans l’esprit d’un homme d’Israël. […] Votre critique ne s’est plus bornée au mot, comme celle de La Harpe, ce pédant estimable de la jeunesse ; la pédagogie n’est pas votre fait ; vous allez aux choses ; vous êtes moraliste plus que critique dans vos considérations, vous êtes le Quintilien des idées ; votre littérature est une histoire de l’esprit humain dans ces derniers temps ; votre Cours est le cours du siècle, et les anecdotes personnelles dont vous l’enrichissez le rendent aussi intéressant pour l’esprit qu’instructif.
L’ancienne théorie du jugement, à laquelle se rattache celle de Kant, supposait que l’esprit commence par des idées sans lien entre elles et sans affirmation, qu’on appelait de pures conceptions ; on croyait que l’esprit, par la comparaison de ces idées, — vraies idées sans force, — les unissait en jugements, et qu’ensuite, par la comparaison des jugements entre eux, l’esprit réunissait les jugements en raisonnements. […] Les partisans de l’esprit pur, qui supposent que la pensée pure établit seule un lien entre les intuitions sensibles et les compare du haut de son unité, retournent en somme à l’ancienne théorie du jugement ; ils traitent les sensations, appétitions et motions consécutives comme des atomes sans lien qui auraient ensuite besoin d’être reliés par l’esprit. […] Si je vois successivement une certaine quantité d’arbres, il me reste dans l’esprit une représentation confuse de tronc, de branches, de feuilles, qui est l’image générique de l’arbre. […] En un mot, l’esprit n’est pas immobile sur une image immobile ou sur un mot immobile. […] Binet croit qu’on saisit sur le fait « le travail logique de l’esprit qui tire toutes les déductions possibles du thème qu’on lui impose ».
C’est avec son esprit tout-puissant, dont nous ne pouvons rien déduire que ceci : « C’était un esprit tout-puissant ! […] J’aime mieux le Shakespeare rayonnant, avant d’être réduit à une seule force vitale des diverses facultés qui font l’esprit de l’homme comme les astres font le firmament. […] Ces erreurs d’un très noble esprit pourtant, François Hugo, qui ne les partage pas expressément, me les a rappelées par la préface de son tome VIII, et j’ai cru devoir les signaler. […] Il est évident que l’écrivain qui a pour la famille une adoration si éloquente est plus sain et plus fort que beaucoup d’esprits de son temps. […] à ce moment, la Raison apparut comme un ange et chassa de lui le coupable Adam, faisant de sa personne un paradis destiné à contenir et à envelopper des esprits célestes.
Et n’y aurait-il pas pour l’humanité une autre vie possible, en dehors de cette éternelle soumission d’esprit et de corps à une poignée de prévaricateurs, forts d’insolence et d’hypocrisie ? […] Cette folie était bien digne de germer dans l’esprit d’un Le Tellier ou d’un Louvois, qui, pour étouffer l’hérésie, étaient décidés à tout. […] N’est-ce pas là une basse condescendance pour l’esprit despotique de son temps ? […] L’esprit obstinément fermé à toutes les voix humaines, il ne connaît que la « parole divine », orgueilleusement campé sur le Dogme, dont il claironne la doctrine à tous les échos. […] A cette époque, ce sont les protestants qui représentent la vraie France, industrieuse et sagace, d’esprit ouvert et de forte activité.
Repliement sur soi, cohésion, hiérarchie, autorité absolue du chef, tout cela signifie discipline, esprit de guerre. […] Mais il faudrait d’abord se demander si l’esprit d’invention suscite nécessairement des besoins artificiels, ou si ce ne serait pas le besoin artificiel qui aurait orienté ici l’esprit d’invention. […] Nous ne leur prêterons pas davantage la vision de ce que l’esprit d’invention recelait en lui de puissance. […] Mais l’esprit ? […] Nous avons indiqué pourquoi l’étude scientifique de la matière avait précédé celle de l’esprit.
— L’Esprit qui passe (1897). — Les Bijoux de Marguerite (1899). […] Gustave Kahn Le sujet de ce poème, car l’Esprit qui passe est bien une sorte d’épopée à la fois enchaînée et variée, c’est-à-dire composée de poèmes simplement juxtaposés d’après une unité de sujet, de rythme et de mouvement, en somme la forme actuelle du poème, ce serait la vie en un poète de l’Esprit, se cherchant dans le passé pour prendre conscience de lui-même.
Il s’est principalement attaché aux Parodies, genre, si c’en est un, qui ne demande qu’un esprit médiocre & de pitoyables talens. […] Il existe un autre Auteur de ce nom, de l’Académie des Sciences & de l’Institut de Bologne, à qui le Public doit une Histoire de l’Astronomie ancienne, depuis son origine, jusqu’à l’établissement de l’Ecole d’Alexandrie ; Ouvrage systématique, mais qui annonce un esprit profond, un Dialecticien habile, & un Ecrivain très-exercé & plein de goût. […] Ses Lettres sur l’Atlantide de Platon & sur l’ancienne Histoire de l’Asie, pour servir de suite à l’Ouvrage précédent, ne lui cedent en rien du côté du style, qui en est vif, animé, rapide, & plein de chaleur ; mais quelquefois défiguré par une affectation d’esprit qui approche du précieux.
Un style pétillant, maniéré ; une métaphysique trop subtile ; des sentimens recherchés ; des réflexions trop peu naturelles, ont beaucoup nui au succès de ses Ouvrages dans l’esprit des Gens de goût. […] Cet Ecrivain étoit capable de très-bien développer les différens ressorts du cœur & de l’esprit humain. […] Nous croyons que la subtilité de ses idées vient de ce que son esprit n’étoit pas assez vigoureux pour penser solidement.
Montmaur avoit cependant de l’esprit, mais un esprit satirique qui ne respectoit rien, ce qui lui attira l’inimitié de tous les Gens de Lettres. Son talent principal consistoit à disserter sur tous les Ouvrages nouveaux nouveaux, à les critiquer sans ménagement, à tourner en ridicule les Auteurs, à amuser les Sociétés où sa malignité le faisoit rechercher : pauvre genre de distinction, qui fait le seul mérite de tant d’Aristarques ambulans, dont les lumieres se bornent à prononcer, dans les Cafés & autres Bureaux d’esprit, sur tout ce qui paroît ; Etres déterminés à ne rien approuver que ce qui est marqué au coin des Fabriques qu’ils protégent, mais dont le Public rejette les censures, comme il ignore leur existence.
Elle étoit de la Cour de Madame la Duchesse du Maine, & a laissé plusieurs Ouvrages qui font conjecturer qu’elle devoit en être l’ornement par les charmes de son esprit. On a réimprimé, depuis peu, un de ses Romans, intitulé, les Lutins de Kernosi, où l’esprit, l’imagination & les graces du style se disputent l’avantage de plaire au Lecteur. […] Les Chansons & les autres Poésies de Madame la Comtesse de Murat ne font pas moins d’honneur à son esprit.
. — Sa sécheresse d’esprit. — Opposé à M. de Rémusat 133 XXXIV. — Lerminier. — Lamartine. — Disette de nouveautés en librairie. — M. Arthur Ponroy. — Début des frère et sœur de mademoiselle Rachel. — L'esprit humain peu inventif. — Eve, par Léon Gozlan. — La fille d’Alexandre Soumet. — Un poëme de six mille vers 141 XXXV. — Vente des livres catholiques. — Lamennais. — Raphaël et Rébecca Félix, frère et sœur de mademoiselle Rachel. — Léon Gozlan. — Voyage de Chateaubriand à Londres. — Visite d’Eugène Sue à George Sand. — Béranger. — Quatre grandes puissances du jour. — Dupin 144 XXXVI. — Voyage du duc de Bordeaux en Angleterre. — Craintes de l’Université en face du clergé. — Montalembert. — Cousin sur Vanini. — Catholicisme et Éclectisme 147 XXXVII. — Parade et comédie légitimistes. — Chateaubriand vieux bonhomme. […] Forcade sur le parti légitimiste. — Maladie de Charles Nodier. — Sympathie universelle et goût de la France pour l’esprit 167 XLII. — Félix Pyat contre Jules Janin 172 XLIII. — Suite de la polémique entre Félix Pyat et Jules Janin. — Mademoiselle Rachel dans Bérénice 173 XLIV. — Le bon Nodier 175 XLV. — Suites et conséquences de la visite des députés légitimistes au comte de Chambord en Angleterre. — Explosions de la Chambre. — Les flétris. […] — Considérations sur l’esprit du temps. — Mollesse et apologie. — Optimisme 279 LXXI. — Transformation du journal La Presse et des mœurs littéraires. — Son prospectus. — Chateaubriand, Alexandre Dumas, Napoléon, principaux collaborateurs. — Influence sur les lettres 281 LXXII. — M. […] Villemain sur cet ouvrage. — Esprit des institutions militaires, par le duc de Raguse. — Mort d’Alexandre Soumet. — Jules de Rességuier. — Latour de Saint-Ibar. — Virginie 306 LXXVIII. — La question des jésuites à la Chambre des députés. — MM.
Aujourd’hui le débat peut être considéré comme à peu près clos ; et, sans parler de l’état des esprits qui ont assez à faire ailleurs, toutes les raisons, tous les arguments sont sortis tour à tour, tellement que la question semble épuisée. […] J’indique l’esprit du travail de M. […] La nouvelle apologétique qu’on pourrait déduire des Pensées de Pascal, telles qu’on les possède actuellement, ne saurait s’adresser en réalité qu’à un petit nombre d’esprits et de cœurs méditatifs ; et elle mériterait moins le nom d’ apologétique que de s’appeler tout simplement une forte étude morale et religieuse faite en présence d’un grand modèle. […] Jamais je n’ai goûté autant la sobre et pure jouissance de l’esprit, et je n’ai eu plus vif le sentiment moral de la pensée. […] Je ferais plaisir peut-être à votre esprit de délicate observation, si je vous disais le secret historique de certains défauts de mon style et même de certaines erreurs de mon jugement.
L’apostasie de nos gouvernants, l’impudente palinodie de certains hommes qui se retournent aujourd’hui contre les idées dont ils sont issus ; l’hésitation de la société à se reconnaître et à reprendre son train progressif au milieu du désappointement qui a suivi la dernière secousse ; toutes ces circonstances ont favorisé chez quelques esprits élevés, mais trop absolus, trop prompts, le dénigrement inconsidéré des principes et des garanties qui sont pourtant devenus plus que jamais l’indispensable condition de la société moderne. […] Mais on sent combien il est profitable pour l’accélération des esprits que de telles questions de philosophie politique se traitent dans un recueil accrédité, avec développement, avec science, amour du bien, et un talent d’expression qui y répand lumière et chaleur. […] Aussi, tout en félicitant les écrivains de la Revue de leur noble effort pour replanter un véritable arbre encyclopédique au milieu de notre sol poudreux et tant de fois balayé, nous les louons de ne pas négliger les morceaux de science et de littérature positive qui s’adressent à tous les bons esprits, et qui sont, d’ici à un assez long temps encore, les seuls produits toujours possibles et d’une culture qui ne trompe jamais. […] Avec la capacité philosophique éminente qui distingue les écrivains de cette école, s’ils savent tempérer leur ardeur à généraliser, ne pas forcer les conséquences encore lointaines de principes seulement entrevus, ne pas les étendre dès l’abord à tout ; s’ils continuent d’exercer cette faculté de comprendre, cette chaleur sympathique de leur esprit, sur les sujets nombreux susceptibles de solutions partielles et incontestables, nul doute qu’ils ne fondent un honorable centre où bien des esprits se rallieront et où l’élite du public s’habituera de plus en plus.
Larroque, voyant combien il avoit soulevé les esprits dans tous les pays du protestantisme, imagine que ce sera tout le contraire dans ceux de la catholicité. […] Cette femme, de beaucoup d’esprit & de mérite, se prit, dit-on, de passion pour l’homme qui avoit le plus de génie. […] L’une étoit écrite dans un stile extravagant, & l’autre étoit pleine de raison, d’esprit & de sel. […] Ses ouvrages sont un mélange de bon & de mauvais, qui en rend la lecture dangereuse à ceux qui n’ont pas l’esprit formé. […] Tout l’esprit de ce grand homme peut être mis dans un seul volume.
Il y a bien des raisons pour relire ; j’en choisis trois qui me viennent plus précisément à l’esprit. […] Le plaisir de mieux comprendre met, du reste, dans l’esprit un certain feu, une certaine chaleur qui excite l’imagination elle-même. […] Si nous voulons travailler nous-mêmes, rien, évidemment, n’est plus utile ; mais, même si nous n’avons pas cette intention, surprendre quelques secrets de l’art est s’affiner singulièrement l’esprit, ce qui est déjà un plaisir, et le rendre capable de mieux, de plus sûrement, de plus finement juger l’auteur que demain nous lirons pour la première fois. […] Où avais-je l’esprit ? […] On dirait qu’on a trouvé une clef dans son esprit.
L’Esprit humain est naturellement lourd. […] Et About, qui est un homme d’esprit, semble l’avoir compris ; car c’est à la personnalité qu’il a visé dans son ouvrage. […] Il est désillusionné, dénigrant, sans foi et sans espérance, souvent spirituel, mais sans le bouillonnement de la verve et la longueur de l’haleine exigés pour que l’esprit ne s’évapore pas dans un mot. […] … About, qui nie même la poésie de la Grèce, qui arrache ce dernier haillon d’or et de pourpre aux fils d’Homère, et qui, par le fait de son genre d’esprit encore plus que de ses observations personnelles, se range du côté de l’opinion acceptée sur ce pays durement jugé ; Edmond About n’a plus qu’à la justifier et à la faire saillir. […] Car si des hommes d’esprit qui, en courant le monde, ont rapporté quelques commérages, nous donnent des livres comme La Grèce contemporaine, que devons-nous attendre de messieurs les sots ?
Or, c’est lui, Alfred de Musset, qui le premier, en France, nous apprit le nom fascinant et menteur de Leopardi, qui cache en ses huit lettres tout ce qu’il y a de moins léopard au monde… Sous le rayon de quelques vers de de Musset, lueur de lampe dans un caveau funèbre, le poète italien brillait mystérieusement, depuis ce temps-là, dans la pénombre d’une langue étrangère, toujours d’accès plus ou moins difficile ou désagréable à l’esprit français. […] Vernier… Poète, romancier, fantaisiste et sceptique, ayant dans l’esprit le je ne sais quoi de français qui répugne, non pas à la tristesse d’une heure, mais à la lamentation éternelle, à la complainte infinie, au Jobisme à poste fixe et bête, — qui n’a pas même Dieu pour excuse, car Leopardi est athée, — comme il a dû souvent s’interrompre, M. […] Vernier, qui m’étonne, je l’avoue : Pour un homme d’esprit, vraiment, vous m’étonnez ! […] Il n’y a dans le monde que deux familles d’esprits, ceux qui ont la puissance du rire, les légers, les aériens, les fiers, les ironiques et les charmants, qui sonnent les fanfares de l’esprit et la marche triomphale des sentiments humains les plus vainqueurs, et les plaintifs, les gémissants, les lourds, les ténébreux, les accroupis dans la lamentation et dans les larmes, les Job enfin, avec plus ou moins de femmes, d’amis, de lèpre et de fumier !
ou bien un philosophe qui était tout à la fois physicien, géomètre, naturaliste, politique, dialecticien, qui avait porté l’analyse dans toutes les opérations de l’esprit, assigné l’origine et la marche de nos idées, cherché dans les passions humaines toutes les règles de l’éloquence et du goût, et en qui le concours et l’union de toutes ces connaissances devaient former un esprit vaste et une imagination qui agrandissait tous les arts en réfléchissant leur lumière les uns sur les autres, ne devait-il pas en effet avoir moins d’estime pour un orateur qui avait plus d’harmonie que d’idées, et pour un maître d’éloquence qui savait mieux les règles de l’art, que l’origine et le fondement des arts même et des règles ? […] Cet ouvrage, comme on le voit par le titre, n’est et ne peut être qu’un misérable abus de l’esprit. […] Cette manière de chercher de petits rapports qui étonnent l’esprit sans l’éclairer, n’a dû être approuvée dans aucun siècle. […] Les arts et les plaisirs d’Athènes, un peuple facile, un caractère brillant, les grâces jointes à la valeur, la volupté mêlée quelquefois à l’héroïsme, de grands hommes populaires, des lois qui dirigeaient plus la nature qu’elles ne la forçaient, enfin des vertus douces et des vices même tempérés par l’agrément, devaient plaire bien davantage à un genre d’esprit qui ordonnait tout, et préférait la grâce à la force.
Il lui prête leur esprit, l’esprit français, l’ironie, la grâce, la vivacité du langage. […] C’est l’esprit de toutes ces béatifications qui m’étonne, tout en m’édifiant. […] Mais votre esprit s’y occupera et s’y délectera de diverses manières. […] Elle leur a donné l’esprit de justice et même à quelques-uns l’esprit évangélique ? […] Je tâcherais de me munir, auparavant, d’une agilité d’esprit suffisante.
J’ai vu une image coloriée qui le représentait dans cet esprit-là, sous l’emblème du mauvais goût le plus naïf : c’était une grosse face rubiconde de Béranger sortant du calice d’une fleur, et cette fleur était une pensée. Tel est le Béranger cher aux Prudhommes et aux Plumeretsde tous les temps, celui même qui est en horreur aux artistes, aux fantaisistes, à la fleur de la bohême ou des salons, aux amateurs du fin, aux lecteurs de Musset, aux aristocrates de race ou d’esprit, à Pontmartin comme à l’auteur de Madame Bovary, aux frères de Goncourt comme à M. […] Alors nous voyons tout en noir, hommes et choses… Mais employons-nous l’encre de notre écritoire à noircir du papier, aussitôt notre esprit se rassérène ; notre imagination se purge, et, nos œuvres fussent-elles œuvres de misanthrope, notre humeur, charmée par le travail, ferme cette plaie dont vous vous plaignez. […] Le mot souvent cité de Louis XIV à Mme de Sévigné, après une représentation d’Esther : « Il est vrai que Racine a bien de l’esprit », amène sous sa plume le commentaire que voici, à la portée de la jeune lectrice : « Le mot esprit pouvait s’appliquer ainsi alors. […] Tu préfères Béranger à Lamartine, parce que tu connais l’un et non l’autre ; mais juge de la différence : en parlant de Lamartine, on vante son génie, et de moi on ne doit vanter que l’esprit.
Ces esprits attiques sont parfois terribles dans leurs jugements : quoi ! […] L’atmosphère générale des esprits est, en quelque sorte, assainie dans ses grands courants, tandis qu’en ce temps-là les foyers de contagion étaient partout existants, rapprochés, échauffés, et l’on ne faisait guère que passer de l’un à l’autre. […] Les gens d’esprit comme Lucien s’en tiraient par des moqueries et des plaisanteries fines, mais ne faisaient pas école. […] Apulée avait l’esprit fortement atteint de superstition ; il avait du goût pour les Chaldéens, les Égyptiens, et leursliturgies secrètes ; il était initié à des mystères et associé à quelque confrérie religieuse du temps. […] À la Renaissance, il a été également l’un des grands et puissants moyens de l’émancipation des esprits.
Qu’on s’imagine la situation d’esprit d’un éditeur (car M. […] Les nouvelles indications dues à Daniel de Cosnac, futur archevêque et, pour lors, intendant des plaisirs du prince de Conti, les confessions du joyeux compagnon d’Assoucy, les moindres indices semés çà et là, rien n’est oublié ; mais surtout l’esprit des choses est ressaisi, et le Molière que M. […] avoir une garantie en soi contre bien des défauts, bien des travers et des vices d’esprit. […] Aimer et préférer ouvertement Corneille, comme le font certains esprits que je connais, c’est sans doute une belle chose et, en un sens, bien légitime ; c’est vouloir habiter et marquer son rang dans le monde des grandes âmes : et pourtant n’est-ce pas risquer, avec la grandeur et le sublime, d’aimer un peu la fausse gloire, d’aller jusqu’à ne pas détester l’enflure et l’emphase, un air d’héroïsme à tout propos ? […] c’est sans doute aimer avant tout l’élégance, la grâce, le naturel et la vérité (au moins relativement), la sensibilité, une passion touchante et charmante ; mais n’est-ce pas cependant aussi, sous ce type unique de perfection, laisser s’introduire dans son goût et dans son esprit de certaines beautés convenues et trop adoucies, de certaines mollesses et langueurs trop chères, de certaines délicatesses excessives, exclusives ?
É. de Barthélémy ne s’est pas arrêté en si beau chemin ; il s’est épris, je ne sais pourquoi, d’un zèle chevaleresque en faveur de M. de La Rochefoucauld, de tous les hommes et de tous les esprits assurément celui avec lequel il a le moins de rapports ; sous prétexte de le défendre devant la postérité, il a voulu écrire sa vie et rechercher littérairement ses moindres vestiges ; il a pris ainsi les devants sur une édition que prépare un autre littérateur très exercé et qui a fait ses preuves par Vauvenargues (M. […] Battu en politique et en intrigue, malheureux à la guerre, finalement malheureux en amour, étant allé de mécompte en mécompte, M. de La Rochefoucauld n’avait plus de ressource véritable que du côté de l’esprit, et il demanda, en effet, au sien, tout ce qu’il put lui offrir de consolation, de dédommagement et de vengeance permise. […] messieurs les gens d’esprit, que cette manière d’appliquer la doctrine de l’amour-propre aux Lettres est donc brutale et, autant qu’il me semble, injuste, à force de frapper à bout portant ! […] Je parle en ce moment des plus sincères, des plus élevés et de ceux qui ont le droit de se croire le plus désintéressés dans la critique des choses de l’esprit. […] Pour l’un, c’est la littérature morale et haute, sévère et abstraite, ce qu’il appelle l’esprit pur, qui lui fait illusion ; pour l’autre, c’est la littérature négligente, aimable et facile, la seule joyeuse et vraiment heureuse ; pour un autre, c’est la marotte d’une noble cause dont il se figure être la personnification vivante et le représentant tout chevaleresque.
J’ignore si la pièce qui m’a fait plaisir est susceptible d’être représentée à la scène ; je suis très-peu juge de la différence qui existe entre un drame fait pour rester écrit et un drame jouable ; un spectacle dans un fauteuil me suffît très-bien, à défaut d’autre : je m’attacherai donc ici simplement à un ouvrage d’esprit qui porte avec lui son caractère de distinction aisée et qui a un cachet moderne. […] M. d’Alton-Shée, par la bouche de sa Pompéa, nous a laissé à sa manière son tableau de Couture, L’autre jour, à propos de la Vérité dans le vin, cette jolie comédie de Collé, je parlais de ces œuvres d’esprit qui sont des témoins d’un temps et qui marquent une date dans l’histoire des mœurs et des plaisirs. […] Ce n’eût pas été trop d’un prince de Ligne pour être l’historiographe des princes de l’esprit, — un historiographe comme il en faut aux choses sacrées et dites sous la rose, … un écouteur qui entend à demi-mot, qui court et qui passe, qui ne note que quelques traits rapides et charmants. […] Je crois peu à la guérison des passions quand elles sont réelles, profondes, et qu’elles se sont logées plus avant encore que dans le tempérament, je veux dire dans l’esprit et dans l’imagination. […] Elle est toute trouvée : « L’ambition, a dit un autre moraliste des plus consommés, Senac de Meilhan, est une passion dangereuse et vaine, mais ce serait un malheur pour la plupart des hommes que d’en être totalement dénués ; elle sert à occuper l’esprit, à préserver de l’ennui qui naît de la satiété ; elle s’oppose dans la jeunesse à l’abus des plaisirs qui entraînerait trop vivement, elle les remplace en partie dans la vieillesse, et sert à entretenir dans l’esprit une activité qui fait sentir l’existence et ranime nos facultés. » Qu’Herman donc, s’il veut rester fidèle à sa femme, au moins dans l’essentiel (car je néglige tout ce qui ne tire pas à conséquence), devienne ambitieux ; il le faut à tout prix, et ce n’est que de ce jour-là que sa conversion me paraîtra assurée.
» Un bon ordinaire n’existe pas pour eux dans les choses de l’esprit : il leur faut le rare. […] Mme d’Épinay et Galiani les ont plus attirés que l’Esprit des Lois et le Dictionnaire philosophique de Voltaire. […] L’un est le dernier esprit de l’ancienne France : l’autre est le premier génie de la France nouvelle. » Ce n’est pas moi qui retirerai jamais rien à Diderot ; mais on conçoit que Voltaire soit immortel ; il ne l’a certes pas volé ! […] Sur tous ces points importants, ils sont bien du xviiie siècle encore, ils me rappellent des noms de gens d’esprit de ce temps-là par leur manière de juger. […] Et puisque j’ai commencé de me découvrir, je ne m’arrêterai pas en si beau chemin et j’achèverai, s’il le faut, de me perdre dans l’esprit, de beaucoup de mes contemporains et des plus chers : oui, en matière de goût, j’ai, je l’avoue, un grand faible, j’aime ce qui est agréable.
Tout date pour nous de la Grèce dans les chefs-d’œuvre de la troisième époque de l’esprit humain. […] Eux, ayant entendu la lecture de ces divers poèmes, et les jugeant sans passion, sans esprit de rivalité, n’écoutant que l’intérêt de la vérité, et ne considérant que la convenance de l’art, déclarèrent unanimement que la compilation d’Aristarque et celle de Zénodote étaient les meilleures ; enfin, jugeant entre les deux, celle d’Aristarque eut la préférence. […] Il faut plus encore, il faut que les notes de cette gamme humaine soient très sonores et très vibrantes en lui, pour communiquer leur vibration aux autres ; il faut que cette vibration intérieure enfante sur ses lèvres des expressions fortes, pittoresques, frappantes, qui se gravent dans l’esprit par l’énergie même de leur accent. […] Sa mission est de faire aspirer les hommes au monde invisible et supérieur, de faire proférer le nom suprême à toute chose, même muette, et de remplir toutes les émotions qu’il suscite dans l’esprit ou dans le cœur de je ne sais quel pressentiment immortel et infini, qui est l’atmosphère et comme l’élément invisible de la Divinité. […] Puis vinrent les ténèbres des âges barbares, qui enveloppèrent pendant près de mille ans l’Occident d’ignorance, et qui ne commencèrent à se dissiper qu’à l’époque où les manuscrits retrouvés d’Homère, dans les cendres du paganisme, redevinrent l’étude, la source et l’enthousiasme de l’esprit humain.
La comédie semble chargée de familiariser l’esprit public avec les hardiesses de la critique rationnelle, en attendant que s’engage sérieusement la grande mêlée des idées et des doctrines. […] Marivaux est un peintre délicieux de la femme : ses Silvia, ses Araminte, ses Angélique sont exquises de sensibilité et de coquetterie, d’abandon ingénu et d’égoïsme en défense, de grâce tendre et d’esprit pétillant. […] C’est d’abord à propos de l’amour, de l’amitié, que ce goût s’exerce : puis la philosophie inonde les esprits ; à la place de l’amour de Dieu, elle met l’amour de l’humanité ; à la place de la nature corrompue, elle offre la nature toute bonne. […] Ils sont tous représentés par des œuvres ; il convient seulement de remarquer qu’ils correspondent à des états d’esprit très divers, qui ne peuvent guère se rencontrer dans une seule race ou un seul siècle. […] L’esprit analytique du siècle était impropre à la création poétique, qui est un acte de synthèse.
Mais non : il y en a une bonne moitié qui sont incontestablement des esprits ou des talents supérieurs (ce qui est une jolie proportion !) […] Ainsi les esprits, même les plus modérés, refusent d’entrer dans les sentiments de M. […] Le malheureux a conservé cette illusion, que c’est la faute de l’Université s’il n’y a pas plus d’esprits originaux en France, et qu’un professeur de rhétorique est un homme qui s’est donné pour tâche d’étouffer le génie chez les pauvres potaches confiés à ses soins. […] Il peut y avoir de la bonhomie et il y a toujours de la candeur dans leur pédantisme et dans leur étroitesse d’esprit… Enfin, n’en parlons plus. […] Je ne sais pas si c’est détachement chrétien, ou comble d’orgueil, ou esprit de contradiction, ou crainte de déplaire à des amis envers qui l’on se croit engagé.
Je voudrais que, dans le commerce de ces hommes ou de ces femmes d’esprit d’il y a un siècle, nous nous reprissions à causer comme on causait autrefois, avec légèreté, politesse s’il se peut, et sans trop d’emphase. […] Il me suffit, à moi, de raconter et d’exposer fidèlement, de manière que chacun puisse profiter des choses de l’esprit et du bon langage, et soit à même de faire justice des autres parties toutes morales que je n’ai garde de dissimuler. […] Leurs esprits se convinrent et s’éprirent. […] Mme du Châtelet échappait du moins à ces misères du dehors, et ses nobles études, ses hautes distractions mêmes, la mettaient à l’abri des petites vues où se consumaient autour d’elle des esprits si distingués. […] Il n’avait que des admirations d’esprit, et était surtout capable d’amitié.
Courier n’était pas un très grand caractère, nous le verrons ; je dirai même tout d’abord que ce n’était pas un esprit très étendu ni très complet dans ses points de vue. […] Vauvilliers, professeur au Collège de France ; cette dernière étude l’emportait de beaucoup sur l’autre dans son esprit. […] Par un jugement aussi absolu, Courier fait tort, ce me semble, à son esprit, je ne dirai pas militaire, mais historique, et il montre qu’il n’a pas embrassé un ensemble. […] Je crois, pour vous dire ma pensée, que ni moi ni autre aujourd’hui ne saurait faire œuvre qui dure ; non qu’il n’y ait d’excellents esprits, mais les grands sujets qui pourraient intéresser le public et animer un écrivain, lui sont interdits. […] On peut dire qu’il n’avait embrassé ni senti à aucun instant l’esprit et le génie de cette grande époque ; le côté héroïque comme le côté social lui avait échappé ; il n’y avait vu partout que les excès et les désordres, les bassesses ou les ridicules.
« Je m’étais de moi-même, dit-il, destiné à l’état ecclésiastique » ; et pour lui, l’Église, c’était ce qu’elle fut à tant d’époques, un asile de paix et d’étude, un abri pour les doctes et innocentes recherches dont un esprit orné et sage ne veut point être distrait. […] Il s’enhardit assez vite, se fit connaître et agréer de ces hommes plus ou moins distingués, et leur plut davantage à proportion qu’ils avaient plus d’esprit eux-mêmes. […] Voulant montrer que, parmi les différentes sortes d’esprits, celui de saillie et de légèreté est le plus opposé à l’amitié : Elle s’accommoderait mieux, ajoute-t-il, de cet esprit fin et délicat qui semble ne s’exprimer que pour plaire, et qui laisse entrevoir plus qu’il n’exprime. […] Outre un grand savoir, il a infiniment d’esprit et de polissonnerie (le mot est ainsi en français et souligné dans Walpole), et c’est une des meilleures espèces d’hommes qui soient au monde. […] Apportant à cette étude, comme en toutes celles qu’il abordait, un esprit philosophique, il avait su pourtant se préserver de ce qu’on appelait la philosophie du siècle, et, par sentiment de convenance autant que par réflexion, il avait de tout temps estimé ruineuses et funestes les attaques irréligieuses auxquelles se livraient les beaux esprits et les principaux écrivains d’alentour.
La psychologie anglaise contemporaine, qui s’intitule elle-même psychologie de l’association, va jusqu’à ramener toutes les lois de l’esprit à cette loi unique. […] Ravaisson et Ferri, confondent la force de cohésion, qui amène la consécution de telles idées dans la conscience, avec le jugement que l’esprit prononce sur les idées une fois apparues : « L’intelligence, dit M. […] Pourquoi, par exemple, l’étincelle électrique éveille-t-elle un certain jour dans l’esprit de Franklin l’idée de la foudre ? […] La fécondité de l’esprit vient de ce pouvoir, qui tient à la complexité des relations entre les cellules cérébrales. […] En troisième lieu, pour reconstruire un monde nouveau selon ses besoins, l’esprit est oblige, comme l’ont montré Martineau et W.
Là se remarque bien cette action générale de l’esprit d’un peuple conduit par degré à un point plus élevé de puissance et de culture sociale. […] Ami des Scipions, il avait trouvé pour l’art et pour le goût, dans le commerce de quelques nobles âmes, ce que la culture plus générale des esprits devait un jour étendre et renouveler sous le règne d’Auguste. […] Enfin Démocrite, lorsque le déclin de l’âge l’avertit que son esprit commençait à languir, vint par un choix volontaire se livrer à la mort. […] Nous, notre esprit est d’un côté, et nos oreilles ailleurs. […] Ainsi, à cette heure, tenez du moins vos esprits attentifs.
Nous venons d’essayer, dans cette étude, ce que souvent se plaît à faire l’impartiale curiosité de l’esprit français. […] Rien de moins vrai que d’imputer à ce facile génie, à cet esprit si juste et si naturel, les torts de l’affectation et de la subtilité. […] Si la Révolution, en se précipitant, roulait avec elle tout un torrent de scories impures et de flammes, parfois elle avait suscité, dans quelques esprits vulgaires en apparence, un accent de grandeur imprévue. […] « Les esprits sensuels et ténébreux se soulèvent en vain, asservis qu’ils sont par leur propre poids. […] « Une troupe glorieuse, ce petit nombre d’élus sur lesquels est descendu l’esprit de Dieu, douze saints courageux, sûrs de leur espérance et bravant la croix et le bûcher.
Après s’être exercé dans des genres de pur agrément, & avoir publié plusieurs Poëmes, qui annoncent de l’esprit & le talent d’écrire avec autant de correction que d’élégance, cet Auteur a consacré sa plume à un genre plus élevé & plus capable d’assurer sa réputation. […] L’ordre, la méthode, la précision & la clarté sont les qualités dominantes de cette Histoire : on y remarque aussi un esprit de critique & d’analyse, qui la distinguent avantageusement de tous les Ouvrages modernes de ce genre, si nous en exceptions celui de l’incomparable Abbé Fleuri. […] Sa morale est saine, toujours orthodoxe, quelquefois profonde, comme celle de son modele ; & annonce, en général, un esprit qui connoît également les passions du cœur & les ressorts de la politique.
Il avait bien de l’esprit, et un flair infaillible. […] L’esprit critique n’est pas une chimère. […] On doit assassiner en esprit et en vérité. […] Il n’en a pas fallu davantage au spirituel Capus pour le proclamer grand esprit. […] Mais des conquêtes nouvelles de l’esprit sont probables.
Un esprit gigantesque contrarié et taquiné par une mesquine fortune, voilà l’exacte définition de ce malheureux grand homme. […] Ces trois dons, beauté, esprit, bonté, en avaient fait la reine du siècle. […] Nul cœur et nul esprit n’était plus façonné pour lui plaire. […] Il vous ravissait l’esprit quand il parlait, même en se taisant il vous ravissait le cœur. […] « On le voit, les seules paroles qu’on a retenues des premières années d’Honoré révélaient plutôt la bonté que l’esprit.
D’abord on sait, par plusieurs passages de ces entretiens, que nous différons complétement d’idée avec les philosophes modernes du progrès indéfini et continu de l’esprit humain. […] Cuvier le géologue trouvait des mastodontes dans les couches antédiluviennes du globe ; Job est pour nous un mastodonte intellectuel et philosophique dans les couches antédiluviennes de l’esprit humain. […] Quelles sont ces conjectures, selon la raison, selon la foi de tous les grands esprits, depuis Job jusqu’à nos jours, les plus vraisemblables et les plus saintes ? […] Non, ce sont souvent des âmes très grandes et très altérées du beau idéal que leur grandeur et leur altération mêmes précipitent dans ces impiétés d’esprit. […] Un sceptique n’est jamais qu’un homme d’esprit qui n’a pas assez pensé.
Il démontrait les propriétés de l’antimoine dont Gui Patin se moquait avec plus d’esprit que de raison. […] Le Poëme Didactique d’éclairer l’esprit. […] L’esprit d’imitation ne fut jamais rare en France. […] Cependant il exige & beaucoup d’agrément & beaucoup de justesse dans l’esprit. […] Est-ce même de l’esprit ?
Volney, esprit exact et ferme, était fort plat courtisan. […] Vinet, dans son cours, a qualifié : cet esprit exquis et dur. […] Ces jeunes auteurs ont de l’esprit, mais absence complète de naturel.