On sent que, par tournure d’esprit comme par position, ils sont bien plus voisins de la France d’avant Louis XIV, de la vieille langue et du vieil esprit français ; qu’ils y ont été bien plus mêlés par leur éducation et leurs lectures, et que, s’ils sont moins appréciés des étrangers que certains écrivains postérieurs, ils le doivent précisément à ce qu’il y a de plus intime, de plus indéfinissable et de plus charmant pour nous dans leur accent et leur manière. Si donc aujourd’hui, et avec raison, l’on s’attache à réviser et à remettre en question beaucoup de jugements rédigés, il y a quelque vingt ans, par les professeurs d’Athénée ; si l’on déclare impitoyablement la guerre à beaucoup de renommées surfaites, on ne saurait en revanche trop vénérer et trop maintenir ces écrivains immortels, qui, les premiers, ont donné à la littérature française son caractère d’originalité, et lui ont assuré jusqu’ici une physionomie unique entre toutes les littératures. […] Elle s’est placée ainsi, sans le vouloir ni s’en douter, au premier rang des écrivains de notre langue. […] On a un charmant portrait de Mme de Sévigné jeune par l’abbé Arnauld ; il faut qu’elle ait eu bien de l’éclat et de la couleur pour en communiquer un moment au style de ce digne abbé, qui ne paraît pas avoir eu, comme écrivain, tout le talent de la famille : « Ce fut en ce voyage, dit-il en ses Mémoires (à l’année 1657), que M. de Sévigné me fit faire connoissance avec l’illustre marquise de Sévigné, sa nièce… Il me semble que je la vois encore telle qu’elle me parut la première fois que j’eus l’honneur de la voir, arrivant dans le fond de son carrosse tout ouvert, au milieu de M. son fils et de mademoiselle sa fille : tous trois tels que les poëtes représentent Latone au milieu du jeune Apollon et de la jeune Diane, tant il éclatoit d’agrément dans la mère et dans les enfants !
Ainsi, occupé à chercher des armes « contre les tendances réactionnaires du gouvernement », Thierry ne voulait encore que faire l’histoire « à la manière des écrivains de l’école philosophique, pour extraire du récit un corps de preuves et d’arguments systématiques ». […] Il rêvait d’allier « au mouvement largement épique des historiens grecs et romains la naïveté de couleur des légendaires, et la raison sévère des écrivains modernes ». […] Ce style de Michelet, âpre, saccadé, violent, ou bien délicat, pénétrant, tendre, en fait un des deux ou trois écrivains supérieurs de notre siècle. […] Michelet est un des écrivains de notre siècle qui me semblent destinés à grandir dans l’avenir, quand dans son œuvre trop riche on aura fait une part à l’oubli, à la mort : le reste, et un reste considérable, une fois allégé, n’en montera que plus haut.
le pauvre professeur et le pauvre écrivain. […] [Saint-Georges de Bouhélier] Saint-Georges de Bouhélier, jeune réclamiste habile, mais écrivain inférieur même à son père, le pauvre Lepelletier de l’Écho de Paris, est, comme vous savez sans doute — il s’est fait faire tant de publicité — le chef de « l’école naturiste ». « Naturisme » peut sembler aux malveillants une imitation de « naturalisme ». […] Saint-Georges de Bouhélier, le plus gélatineux des écrivains, et Fernand Hauser, le plus puant des reporters, furent frappés les premiers. […] » On ne peut imaginer la mollesse de Saint-Georges de Bouhélier écrivain, son imprécision et son bavardage.
Aussi, quoique aucun écrivain n’ait plus agi sur lui que Pascal, quoiqu’il l’ait étudié et quelquefois imité quant au style, qu’il l’ait célébré magnifiquement comme le plus étonnant génie et le plus fait pour confondre, « comme l’homme de la terre qui savait mettre la vérité dans un plus beau jour et raisonner avec le plus de force », il se sépare de lui à l’origine sur un point capital, et l’on peut dire qu’il tend à être le réformateur de Pascal bien plus encore que son élève. […] » Il a résumé toute sa théorie à cet égard dans ce mot si souvent cité, et qui, déjà dit par d’autres13, restera attaché à son nom, comme au nom de celui qui était le plus digne de le trouver et de le dire : « Les grandes pensées viennent du cœur. » Comme critique littéraire, et dans les jugements qu’il porte au début sur les écrivains qui ont été le sujet favori de ses lectures, Vauvenargues n’est pas sans inexpérience : sur Corneille, dont l’emphase lui répugne jusqu’à lui masquer même les hautes beautés, sur Molière dont il ne sent pas la puissance comique, Voltaire le redresse avec raison, avec une adresse de conseil délicate et encore flatteuse : Vauvenargues reprend ses avantages quand il parle de La Fontaine, de Pascal ou de Fénelon. […] Mais ce qu’il est surtout et dès l’abord, c’est un excellent écrivain, ne participant en rien aux défauts du jour, et puisant dans la sincérité de sa pensée une expression nette et lumineuse. […] C’eût été un trop grand contraste et une trop grande infraction aux lois d’une époque, qu’un écrivain de cette pureté, de cette hauteur et de cette simplicité, persistant sous des cieux si différents et dans un climat de plus en plus contraire.
Aujourd’hui il s’agit de sortir une bonne fois des petites idées d’une rhétorique par trop littéraire, de retrouver l’homme et le roi dans l’écrivain, et de saluer en lui l’un des meilleurs historiens que nous possédions. […] Écrivain en prose, Frédéric est un disciple de nos bons auteurs, et, en histoire, c’est un élève, et certes un élève original et unique, et par endroits passé maître, de l’historien du Siècle de Louis XIV. […] Ces motifs, tous puisés dans l’intérêt de sa cause et de sa nation, n’ont rien qui semble en désaccord avec les maximes de Frédéric et avec ses idées favorites ; en tant que philosophe et écrivain. […] Henry, pasteur de l’Église française à Berlin, a écrit une dissertation où il traite de l’irréligion de Frédéric ; sans prétendre l’absoudre sur ce point, le digne écrivain croit qu’on a fort exagéré ce côté français de Frédéric, par lequel il regardait et flattait les philosophes du xviiie siècle ; il cherche à démontrer que Frédéric, avec une sorte de fanfaronnade, s’est plu à l’exagérer lui-même.
Rulhière a sa physionomie à part ; il a un talent réel, un style ; c’est un écrivain non seulement spirituel, mais savant et habile, qui, après avoir longtemps disséminé ses finesses et ses élégances sur des sujets de société, a essayé de rassembler finalement ses forces, de les appliquer aux grands sujets de l’histoire, et y a, jusqu’à un certain point, réussi. […] Comme historien et comme écrivain honorablement sérieux, il prit rang en 1788 par ses Éclaircissements historiques sur les causes de la révocation de l’édit de Nantes et sur l’état des protestants en France. […] Cette histoire de Rulhière, si considérable et pourtant incomplète, fait le plus grand honneur à sa mémoire, et achève de montrer en lui l’écrivain habile et l’esprit sérieux qui ne s’était point laissé absorber dans les frivolités élégantes. […] Daunou, dans son analyse des mérites de Rulhière, est allé jusqu’à remarquer que, dans les phrases courtes comme dans les plus longues, l’auteur varie sans cesse le ton, le rythme, les constructions, les mouvements : Il y a des livres, ajoute-t-il ingénieusement et en rhéteur consommé, où la plupart des phrases ressemblent plus ou moins, si l’on me permet cette comparaison, à une suite de couplets sur le même air ; et ce n’est pas sans quelque effort qu’un écrivain se tient en garde contre ce défaut ; car l’esprit ne s’habitue que trop aisément à un même genre de procédés, le style aux mêmes formes, l’oreille aux mêmes nombres.
Lui-même il a, comme homme, un caractère à part et modestement original dans sa nuance, entre tous les écrivains célèbres du xviiie siècle. […] Avant d’être célèbre comme écrivain par son Voyage du jeune Anacharsis, qu’il publia seulement à l’âge de soixante-douze ans, Barthélemy ne fut longtemps qu’un antiquaire en effet, et c’est à ce titre qu’il avait acquis sa première et toute paisible renommée. […] Ce désir du retour finit par l’emporter sur celui qu’il avait eu d’abord de rester, et qui lui faisait dire énergiquement : « J’abandonnerai ce pays avec les regrets de Pyrrhus quand il fut contraint d’abandonner la Sicile. » Durant ce voyage d’Italie, il me semble voir deux instincts aux prises et en lutte au sein de l’abbé Barthélemy : il y a l’instinct pur de l’antiquaire, de l’amateur des vieux débris et du zélé collectionneur de médailles, qui se dit d’épuiser la matière et de rester ; et il y a l’écrivain, l’homme d’art moderne et de style, qui, à la vue de ces monuments épars et de cette ruine immense couronnée d’une Renaissance brillante, sent à son tour le besoin de se recueillir, de rentrer dans sa ruche industrieuse, et de composer une œuvre qui soit à lui. […] Apportant à cette étude, comme en toutes celles qu’il abordait, un esprit philosophique, il avait su pourtant se préserver de ce qu’on appelait la philosophie du siècle, et, par sentiment de convenance autant que par réflexion, il avait de tout temps estimé ruineuses et funestes les attaques irréligieuses auxquelles se livraient les beaux esprits et les principaux écrivains d’alentour.
Eh bien, dans ce volume qui contient Rossini, Ernest Renan, Émile Augier, Hérold, Jules Simon, Grisar, Scribe, Donizetti, Octave Feuillet, Weber, Ponsard, Boïeldieu, Adolphe Adam, Champfleury, Mozart, Henri Monnier (à propos du type de Prudhomme), et Shakespeare en profil (à propos d’Hamlet), il n’y a pas que les œuvres de ces écrivains et de ces artistes qui soient examinées ; il n’y a pas que leur génie, supérieur ou médiocre, qui soit caractérisé ! […] III Mais cette réserve faite sur le fond des choses, mais ce desideratum, posé, ce desideratum dont Aubryet, avec la libéralité de son esprit, ne méconnaîtra pas l’exigence, je n’ai plus qu’à louer, même sur le fond des choses, l’écrivain qui vient de montrer en critique tant d’aperçu et de fécondité. […] Mais si le critique n’a pas encore tout son développement de doctrine et de génie sévère dans l’auteur des Jugements nouveaux, s’il n’a pas encore atteint cette carrure et ce poids, cette maturité et cette élévation définitive qui font le critique tout-puissant dans une compréhension et une exclusion également souveraines, l’écrivain, qui apparaît toujours plus tôt chez les hommes parce qu’il tient bien plus à des spontanéités qu’à des expériences, et à des jaillissements qu’à des replis, l’écrivain est venu chez Xavier Aubryet, et son développement est si complet et si superbe qu’il aura plus à faire désormais pour s’émonder que pour s’accroître.
Il commença à se déclarer comme écrivain politique par son Projet de paix perpétuelle (1713), et surtout par son Discours sur la Polysynodie ou pluralité des conseils (1718). […] Il devrait être content aujourd’hui. — Projet pour rendre l’Académie des bons écrivains plus utile à l’État… bien encore ; il a l’idée du lien entre les diverses Académies, l’idée de l’Institut. […] n’allons pas trop citer de l’abbé de Saint-Pierre : il a ce malheur des écrivains sans style, il ne supporte pas la citation.
Monluc ; l’homme et l’écrivain. […] Enfin, sans y penser, sans y prétendre, Palissy est un écrivain : il y a dans son style si net et si spontané, une force d’imagination qui fait jaillir l’expression non seulement adéquate à l’idée, mais représentative de la vie. […] Le hasard d’une chute de cheval qui l’immobilise, en fait un écrivain : il raconte ce qu’il a vu, entendu, sans critique, sans probité d’historien, avec une sécurité d’indifférence morale qui garantit sa véracité.
L’écrivain lui-même renonce aux exactes et fines analyses : il déborde de sensibilité comme ses personnages, il s’abandonne à des transports délirants ; son inspiration est fiévreuse, troublée, intempérante. […] L’écrivain prend sa règle dans son tempérament personnel. […] Un écrivain, à la fin du xviiie siècle, nous aide à mesurer de quel poids le monde, le goût et la langue pesaient sur les esprits.
Rousseau dit en parlant de certaines lettres de Saint-Preux : « Quiconque ne sent pas amollir et fondre son cœur dans l’attendrissement doit fermer le livre. » Les apostrophes, les élans passionnés, les effusions lyriques, les explosions d’éloquence, d’indignation, d’enthousiasme animent mille pages fiévreuses ; et si l’emphase, les tirades creuses et sonores les phrases ampoulées abondent également, si la sentimentalité fade et la sensiblerie fausse donnent une saveur écœurante à des ouvrages médiocres et gâtent çà et là ceux des meilleurs écrivains, c’est que, à toute époque, défauts et qualités sont intimement unis, c’est que toute forme d’esprit a, comme toute médaille, un revers et que ce revers est d’ordinaire la caricature de l’autre face. […] De même que ces crises tragiques, un changement dans la nourriture, dans la manière de vivre se répercute en sentiments et en idées que les écrivains expriment, sans en soupçonner souvent l’origine. « Savez-vous, disait Edmond de Goncourt à Taine50, si la tristesse anémique de ce siècle-ci ne vient pas de l’excès de son action, de ses prodigieux efforts, de son travail furieux, de ses forces cérébrales tendues à se rompre, de la débauche de sa production et de sa pensée dans tous les ordres ? […] La France y est malade de nervosisme : elle passe par des alternatives épuisantes de surexcitation et de dépression fébriles ; elle a comme des accès d’épilepsie ; les cerveaux se détraquent aisément ; la folie envahit les palais des puissants de la terre comme les logis des artistes ou des écrivains.
Plusieurs écrivains, et en dernier lieu, M. […] Peu de gens ignorent le mérite des écrivains qui formèrent la société de Rambouillet dans la première période de son existence. […] Vaugelas est appelé par Boileau le plus sage de nos écrivains.
Mais, dira-t-on, des traductions faites par des écrivains sçavans et habiles, ne mettent-elles point, par exemple, ceux qui n’entendent pas le latin en état de juger par eux-mêmes, en état de juger par voïe de sentiment de l’éneïde de Virgile ? […] Il est toujours difficile de traduire avec pureté, comme avec fidelité, un auteur, même celui qui ne fait que raconter des faits, et dont le stile est le plus simple, principalement quand cet écrivain a composé dans une langue plus favorable pour les expressions fortes et précises que la langue dans laquelle on entreprend de le traduire. Il est donc très difficile de traduire en françois tous les écrivains qui ont composé en grec et en latin.
N’entendez-vous pas déjà répéter de tous les côtés, et jusque dans nos chaires publiques, que nos grands écrivains du siècle de Louis XIV ne furent pas à leur aise dans les institutions de leur temps, que leur génie a manqué d’indépendance et de liberté, qu’ils ont imposé à la langue et à la littérature nationale des entraves dont elles gémissent, qu’ils nous ont mis à l’étroit dans leurs pensées trop circonscrites ? […] Voilà pourquoi nous sommes si disposés à accueillir les jugements dépréciateurs que les étrangers portent de la plupart de nos grands écrivains ; et ces détracteurs ont parmi nous plus de complices qu’on ne pense. […] Un petit nombre d’écrivains dominés par l’ascendant de la pensée se sont réellement trouvés à l’étroit dans une langue où les limites de l’expression ne sont point assez incertaines ; ils ont voulu franchir cette borne immobile : il en est résulté quelques succès et bien des revers.
Les femmes peuvent être et ont été des poëtes, des écrivains et des artistes, dans toutes les civilisations, mais elles ont été des poëtes femmes, des écrivains femmes, des artistes femmes. […] En effet, dans l’ordre des écrivains, vous chercheriez en vain une femme qui vaille, dans l’ordre des danseuses, Mlle Taglioni IV Et voilà justement ce que l’Histoire et la Critique que nous allons faire ici devront constater.
Quoi qu’en aient dit les écrivains européens qui se prennent, comme des oisillons au miroir, au mirage de leurs désirs et de leurs propres pensées, elle n’a pas d’autre caractère. […] Pour en juger, il n’est pas besoin d’avoir recours à des écrivains exceptionnels. Tout grand écrivain, dans un pays, est bien plus un aérolithe qui y tombe qu’une plante qui y pousse.
L’écrivain du dix-neuvième siècle n’hésite pas plus que Grégoire de Tours… Et en fin de compte, pourquoi hésiterait-il ? […] Avec une sagacité singulière et une puissance de rapprochement qui n’oublie rien et centralise tout, il est allé chercher jusque dans le nom de Christophe Colomb (Christum ferens) et la légende du géant saint Christophe, qui passe le Christ sur ses épaules, à travers les eaux, des analogies prophétiques, comme la tradition catholique a toujours permis à l’écrivain d’en dégager… Par-là, il a complété le profond mysticisme de son œuvre. […] Quoique là où l’enthousiasme tient l’écrivain, ce style ait une splendeur touffue de savane, et qu’il s’élève et se balance puissamment comme la mer qui portait les caravelles de Colomb, il ne se soutient pas toujours, et il nous choque parfois par des inégalités singulières.
Mais, si ce n’est pas le même malheur et le même sentiment d’impuissance qui unissent si tendrement, pour le quart d’heure, les écrivains philosophiques de ce temps et M. l’abbé Mitraud, il faut donc qu’il y ait dans le livre de ce dernier un fonds de choses qui soit un terrain commun où ils se rencontrent et s’embrassent, une petite île des Faisans quelconque où le prêtre et le philosophe passent leur traité des Pyrénées. […] Pousser un esprit de bonne foi et de bonne volonté, mais sans connaissance de la profondeur des partis et de leurs desseins, sur la voie dangereuse où il s’est imprudemment avancé, lui retourner un jour ses idées contre ses intentions, compromettre un prêtre, compromettre Dieu, dans cette question du socialisme contre laquelle un gouvernement d’énergie ferait plus que tous les écrivains réunis, voilà ce que M. l’abbé Mitraud, dans les illusions de sa charité, ne voit pas au fond des éloges donnés à son livre par tous ceux-là qui devraient le plus le repousser. […] Il est écrivain, il est nerveux, il est ému, il est éloquent.
Cette pierre est souvent du diamant ; mais du diamant, malgré son éclat, c’est dur et monotone, quand il s’agit des nuances spirituelles de l’écrivain. […] Un détail aussi enragé détruit l’effet même projeté par l’écrivain. […] Les procédés habituels d’un écrivain donnent la nature de son esprit.
nos premiers écrivains n’ont pas su dire les paroles viriles et douces que nous espérions. […] Et cela suffit à montrer combien est efficace l’action des écrivains, lorsqu’ils comprennent ainsi leur office. […] Les écrivains les y encouragèrent un peu, en leur répétant que cette occupation était infiniment aristocratique. […] Des critiques allemands et même français proclament Frédéric Nietzche le premier écrivain de l’Allemagne contemporaine. […] J’en ai dit assez pour montrer au lecteur quelle est la manière de cet écrivain corrosif.
C'est un homme instruit sans un grain de pédantisme, un esprit vif et un écrivain de la meilleure littérature. […] Il est vrai que ces résultats si évidents sont amenés par les déductions les plus ingénieuses et les plus imprévues du monde : c’est une des formes de l’esprit de l’écrivain.
Ce n’est pas seulement un deuil pour l’Angleterre ; c’en doit être un pour la France et pour le monde civilisé, dont Walter Scott, plus qu’aucun autre des écrivains du temps, a été comme l’enchanteur prodigue et l’aimable bienfaiteur. […] Écrivain, poëte, conteur avant tout, il a obéi, dans le cours de sa longue et laborieuse carrière, à une vocation facile, féconde, indépendante des questions flagrantes, étrangère aux luttes du présent, amoureuse des siècles passés, dont il fréquentait les ruines, dont il évoquait les ombres, y recherchant toute tradition pour la raviver et la rajeunir.
Et plus tard, sans doute, les enfants venus à Paris, et y ayant pris d’autres habitudes, peuvent sourire de cette mesquinerie campagnarde ; mais c’est à elle pourtant, c’est à leur enfance à la fois indigente et tendrement choyée qu’ils doivent leur persistante fraîcheur d’impression et cette sensibilité qui les a faits artistes ou écrivains. […] J’aurais mieux aimé que ce fût Péché mortel ou Amour d’automne qui me fournît l’occasion de vous parler un peu de ce sincère et cordial écrivain.
Ainsi le snobisme, parallèlement à la série des écrivains novateurs, forme tout le long de notre histoire littéraire une chaîne ininterrompue. […] Par là, le critique même le plus loyal est conduit à s’exagérer ce qu’il sent de beauté dans un écrivain, et presque à l’inventer.
Mais dire que — païen et, malgré son bon vouloir, nullement métaphysique — l’auteur des Reposoirs est notre Victor Hugo, c’est dire qu’il est, à notre sens, de cette demi-douzaine d’écrivains nouveaux qui sont les maîtres du Futur et dont les moins contestés sont Henri de Régnier et… et qui ? […] Emmanuel Signoret Saint-Pol-Roux n’est point, comme Jean Moréas, un parfait écrivain.
Les pièces espagnoles, autant qu’on peut le conjecturer, ne devaient pas figurer dans ce chiffre pour une quantité égale à celle des pièces italiennes ; mais il est certain qu’il y avait là un certain nombre de tomes de Lope de Vega, de Moreto, de Calderon, et d’autres écrivains espagnols. […] J’arrive, au contraire, après beaucoup d’autres écrivains du siècle dernier et du siècle présent.
Qu’est-ce qu’on trouve dans ces deux écrivains si fêtés autrefois ? […] Cet écrivain en mourut le 19 octobre 1691, âgé de soixante-dix-huit ans.
Je pourrois alléguer en preuve, Commine et plusieurs autres écrivains, mais je me contenterai de citer un témoin sans reproche et dont la déposition est tellement circonstanciée, qu’elle ne laisse plus aucun lieu au doute. […] Il me souvient bien d’avoir lû dans les écrivains italiens plusieurs passages qui le prouvent, mais je crois devoir épargner au lecteur la peine de les lire, et à moi celle de les retrouver.
Les écrivains catholiques se dressent plus ardents : Drumont, Villiers de l’Isle-Adam, Verlaine et tant d’autres. […] Jules Claretie un habile administrateur, avait fait perdre à la littérature un de nos écrivains les plus estimés ; tout au moins était-ce à craindre. […] L’écrivain convaincu, ému, émotionnant, se retrouve parfois dans ce livre troublant et dangereux pour qui ne saura pas le lire. […] René Maizeroy, écrivain un peu trop mondain (jadis !) […] Adagiettos, prélude, tout cela dit bien que nous avons affaire à un écrivain à qui la musique n’est pas antipathique.
La connaissance de lui-même, en le délivrant de la vanité, l’avait soustrait à la double servitude des écrivains qui s’ignorent : l’influence des personnes, et le tour d’imagination du moment. […] Déterminer avec rigueur ce que chacun de ces quatre grands écrivains a retiré de ce commerce, personne n’y pense ; nier qu’ils y aient tous beaucoup gagné serait un paradoxe insoutenable. […] Bon nombre des pensées de ce poète n’ont pas toute la clarté dont les écrivains de son temps étaient capables. […] L’écrivain moderne crée dans sa langue ce que, dix-sept siècles avant lui, un autre écrivain de génie a créé dans la sienne. […] L’imitation, au sens défavorable qu’on y attache, n’existe pas entre écrivains de génie ; je ne la reconnais que chez un esprit médiocre qui fait des emprunts à un esprit excellent.
Il ne conteste pas « l’admirable talent d’écrivain » de Pascal, et tout le monde lui saura bon gré de cette concession. […] Auguste Molinier ne lui conteste point son talent d’écrivain. […] Et je sais tels écrivains qu’il ne faudrait pas pousser beaucoup pour qu’ils lui fissent un crime de sa conversion. […] Bientôt cette poursuite acharnée devient le labeur unique de l’écrivain. […] Tout écrivain a calculé que son talent est une force, comme la fortune, comme la naissance, et une force dont il faut savoir se servir.
Croiriez-vous qu’un tel écrivain fait le joli, qu’il veut nous égayer, qu’il prétend être agréable ? […] Mais le héros de ce monde fut William Wycherley, le plus brutal des écrivains qui aient sali le théâtre. […] La Renaissance finit, l’âge classique s’ouvre, et l’artiste fait place à l’écrivain. […] Ses façons d’écrivain sont conformes à ses maximes de politique. […] L’écrivain est un philosophe qui nous fait toucher dans un exemple particulier une vérité universelle.
Cet officier, qui est un écrivain, s’est dit que peut-être son journal de voyage ne serait pas sans offrir quelque intérêt. […] Il est un des nombreux écrivains qui souffrent actuellement de la pauvreté de la langue. […] Brunetière conclut de l’écrivain à sa personnalité morale. […] Paul Bourget diffère de celle du commun et même de celle de la majorité de nos écrivains. […] Je me place exclusivement au point de vue littéraire et je demande : que va devenir l’écrivain qui est dans M.
Eugène Yung, écrivain distingué, possédait deux grandes qualités, véritables dons de nature : il savait manier la publicité et donner une direction aux foules ; il possédait en outre les qualités d’un administrateur. […] Cette fois, en effet, au lieu de l’écrivain que l’on connaît, de l’irréprochable, de l’impeccable écrivain, dont on sait la langue constamment exemplaire et définitive, la verve serrée, l’essor hardi, mais toujours sûrement réglé, nous offrons un autre J. […] Cela légitimerait presque les représailles qu’a entreprises un écrivain catholique de nos jours, M. Louis Veuillot. — Je ne veux pas, moi, faire de représailles ici ; je veux étudier l’homme en lui-même, tel qu’il est, et essayer de juger l’écrivain. […] Non ; est-ce d’un écrivain laïque du xviie siècle ?
Elle habitait Rome ; son palais était une cour de distinction en tout genre : hommes d’État, poètes, écrivains, peintres, sculpteurs, savants de toutes les nations s’y réunissaient à toute heure. […] Aimée d’un grand écrivain, ce grand écrivain l’avait transportée avec lui dans l’empyrée des lettres et de la gloire ; elle avait ce qu’on appelle un salon ; ce salon était un sanctuaire plutôt qu’une exposition d’esprit et de célébrités, un culte plutôt qu’une cour. […] C’étaient presque tous les jeunes hommes de lettres, poètes, écrivains, orateurs, publicistes, qui ont illustré depuis la tribune et la presse en France. […] XXVI Il y avait plus de bienséance que d’émotion dans ces applaudissements ; les mains battaient sans le cœur ; on payait en complaisance pour madame Récamier et en respect pour un grand écrivain le privilège qu’on avait eu d’assister à cette demi-publicité d’initiés dans un salon tenu par la beauté et décoré par le génie. Ces applaudissements, au reste, étaient fortifiés par le grandiose de cette pièce sacrée, écrite dans la haute langue de Racine par l’écrivain du Génie du Christianisme.
Tout en prenant peu de goût à cette sobriété filiale par ce coin de curiosité maligne et oblique qui est dans chacun, nous ne saurions en faire un sujet de reproche à l’écrivain consciencieux. […] Tout le génie d’écrivain, tout l’éclat des couleurs, ne sauraient me décider à en passer par là : arcs de triomphe pour quelques-uns, et pans de murailles abattus ; puis, au-dessous d’une certaine taille, fourches caudines pour le grand nombre, pour tout ce qui n’est pas la foule du cortège95 ! […] Victor Hugo ; jamais notre langue n’avait rendu tant de chocs et d’éclairs ; jamais le despotisme du génie tribunitien n’avait été inauguré dans une telle pompe ; jamais cette sorte de bête fauve, comme l’écrivain l’appelle, ne s’était montrée si puissamment déchaînée : nous regrettons un certain souffle moral que nous n’avons nulle part senti circuler. […] Comme écrivain, M. […] Je sais que c’est une défense peu avantageuse à prendre que celle du Système de la Nature et de cette faction holbachienne ; mais je ne veux soutenir d’Holbach ici que comme un homme d’esprit, éclairé quoique amateur, sachant beaucoup de faits de la science physique d’alors, n’ayant pas si mal lu Hobbes et Spinosa, maltraité de Voltaire qui le trouvait un fort lourd écrivain et un fort ennuyeux métaphysicien, mais estimé de d’Alembert, de Diderot, et dont l’influence fut grande sur Condorcet et M. de Tracy.
… Cette longue scène, mouvementée, émouvante, pleine de surprises et de péripéties qui se passent dans la pensée et n’en sont que plus réelles (car rien de matériel n’est vrai), est une élégie tragique de la plus grande beauté, écrite d’un style précis dans l’idéal et dans le raffinement, et qui, à elle seule, accueillie comme elle l’a été par mille bravos enthousiastes, eût suffi à établir la réputation d’un écrivain. […] Sous le prétexte de faire parler les gens à la scène comme ils parlent dans la vie, on nous a depuis longtemps habitués à toutes les trivialités, à tous les bégaiements de la phrase, et il faut savoir gré aux écrivains qui protestent contre cette tradition funeste à la littérature dramatique. […] Le lyrisme dispose d’effets sublimes dont notre époque s’est privée on ne sait pourquoi, par une vague crainte du ridicule qui a paralysé bien des écrivains. […] Catulle Mendès par les jeunes écrivains (22 avril 1897).] […] [Discours prononcé à la soirée offerte par les jeunes écrivains (22 avril 1897).]
Il s’agit d’une femme, et, entre toutes les femmes, de celle-là qui, par sa naissance, ses mœurs, sa vie tout entière, son esprit et son âme, devait le moins tenter la plume brillante et sèche d’un écrivain, qui n’avait jusqu’ici exprimé que des idées et qui, sur le tard de la vie, quand le rayon divin pâlit chez les autres hommes, s’essaie à peindre des sentiments. […] Des écrivains fort spirituels, mais qui se sont un peu trop moqués du public ou de M. […] C’est un écrivain qui travaille les poses de son style, mais c’est un généralisateur, sans originalité, par le style comme par la pensée. […] Aussi, partout ailleurs que dans l’exposition et la discussion philosophique, où il a ce que Mirabeau disait l’éloquence de la chose, le célèbre professeur n’est-il qu’un écrivain d’imitation, de pastiche réussi, qui se donne de grands airs, mais qui n’ose prendre la langue de son siècle, parce qu’elle est trouble encore, malgré tout ce que son siècle y a déversé de puissant ! […] Cousin, on se demande ce qu’on peut admirer en elle, et quelle gloire un écrivain croit se tailler dans le jupon de cette extravagante !
Nous allons tâcher de le faire ici, en nous tenant pour plus de simplicité à l’écrivain, et en laissant en dehors l’orateur et l’homme politique qui a grandi depuis, et qui s’est de plus en plus développé à travers des phases diverses, et qui n’a pas encore donné son dernier mot. […] » Certes la conviction, le sentiment profond de ce que j’appellerai la vérité sociale, éclate dans ces pages où le jeune écrivain, si prononcé pour les choses, ne se montre guère disposé à de grandes illusions sur les hommes. […] L’auteur ne raffine jamais sur le détail, et on ne s’arrête pas un instant chez lui à l’écrivain. […] Ce fut lui-même qui rédigea la protestation ; il y mit l’idée essentielle : « Les écrivains des journaux, appelés les premiers à obéir, doivent donner l’exemple de la résistance. » Là était le signal. […] Thiers comme écrivain.
Nous autres écrivains, académiciens, nous disons sans scrupule : Je vais là ce soir ; irez-vous ? […] La licence et même l’impiété se mêlent sans cesse à la vivacité naïve et à l’imagination piquante des écrivains. […] Il serait aisé, comme l’a fait un écrivain célèbre, d’en détacher même des témérités philosophiques. […] Cependant les écrivains du dix-septième siècle sont encore parfaitement et heureusement intelligibles pour nous. […] C’est le premier écrivain qu’on cite partout, et dont les vers puissent s’entendre et se lire.
Le comte Roederer, dont le nom auprès des générations nouvelles ne réveillait guère que l’idée d’un personnage politique mêlé aux grands événements de la Révolution et du Consulat, s’est révélé tout d’un coup comme un écrivain très littéraire par son Mémoire sur la société polie et sur l’hôtel Rambouillet, imprimé en 1835. […] Dans les mois qui précédèrent la chute des Girondins, Roederer avait reparu, et il faisait à l’Athénée un cours dans lequel il réfutait les écrivains qui attaquaient la propriété ; il s’appliquait à en démontrer le fondement d’après des notions positives et prises de moins haut qu’on ne l’a fait depuis. […] Elle applique assez pour distraire ; elle n’exige pas assez d’application pour être impossible à un homme dont le malheur n’a pas affaibli la raison. 2º Depuis longtemps je désirais m’exercer à la langue latine que j’ai mal apprise dans ma jeunesse : ce que je comprends de Tacite, de Tite-Live, de Salluste, d’Horace et de Virgile m’a donné une grande curiosité pour le reste. 3º Hobbes m’a paru avoir un mérite éminent comme écrivain politique, etc. […] Il y avait des écrivains et des orateurs pour toutes les opinions, pour toutes les passions démocratiques ; les écrits, les harangues s’envoyaient du midi au nord et du nord au midi.
Voltaire, dans sa liste des écrivains français du siècle de Louis XIV, lui accorde du moins ce genre de mérite : « Michel, abbé de Villeloin, composa soixante-neuf ouvrages, dont plusieurs étaient des traductions très utiles dans leur temps. » Un écrivain de ce temps-là même, Sorel, dans sa Bibliothèque française, semble mettre ce fait d’utilité hors de doute, lorsque dans une page laudative, et que Marolles n’eût pas écrite autrement si on la lui eût demandée, il disait : Entre tous les auteurs qui se sont occupés à traduire dans ce siècle-ci, on n’en saurait nommer un qui ait travaillé à plus d’ouvrages et avec une assiduité plus grande qu’a fait M. de Marolles, abbé de Villeloin. […] Colbert, il le définissait très bien en peu de mots : C’est un écrivain rapide, dont le style est ce qu’il a de moins mauvais ; il n’est pas sans savoir, mais il est sans aucun jugement, traduit mal, ne fait rien raisonnablement que les généalogies. […] Le fait est qu’il y avait beau jour qu’on ne regardait pas plus à lui, écrivain, que s’il n’existait pas.
C’est un agréable parleur et qui a montré du talent de tribune : ce n’est pas un écrivain proprement dit. […] M. de Chateaubriand était trop le dieu présent et régnant dans unlieu, pour qu’on ne trouvât pas étrange que M. de Maistre parût le premier des grands écrivains modernes dans l’autre. […] On a recouru pour cela à des témoignages venus d’écrivains protestants. […] Cet honorable écrivain qui, en publiant le Journal intime de Maine de Biran, a pris sur lui de retrancher tous les passages relatifs à M.
Comment Malouet, modéré en tout, en vint-il à contracter une liaison si intime avec un aussi fougueux écrivain que l’abbé Raynal, au point d’en faire son hôte, son commensal, sa société de chaque jour ? […] Demander à l’Assemblée, par une motion spéciale, le rappel à Paris d’un écrivain célèbre, frappé d’un arrêt injuste sous le précédent régime, était chose toute simple et jouable, de la part surtout d’un ami de quinze ans ; mais voir là une occasion de faire la leçon à l’Assemblée, présenter, ériger tout d’un coup un pareil homme en censeur de la Révolution, lui l’écrivain en nom et l’endosseur avoué de tant de tirades révolutionnaires, ce n’était pas une idée heureuse ni un à-propos. […] Ce n’est point seulement par ce discours, dont le thème philosophique était « les vérités et les sentiments qu’il importe le plus d’inculquer aux hommes pour leur bonheur », que le nom de Bonaparte se trouve à bon droit rattaché au souvenir de l’abbé Raynal : le jeune lieutenant d’artillerie, dans sa première veine d’enthousiasme, avait désiré connaître le célèbre écrivain et lui avait rendu visite en passant à Marseille.
Il est si doux de le prouver qu’un écrivain se met sans le vouloir en quête de phrases ingénieuses, et défigure sa pensée pour la parer. […] 190 Ces heureuses antithèses font l’éloge de l’écrivain. […] Ce n’est pas un écrivain que nous venons voir, c’est un homme, ou plutôt c’est l’objet lui-même ; le véritable artiste est celui qui fait voir son sujet sans laisser voir sa personne. […] Les écrivain du siècle sont soutenus ; ils gardent le même ton, noble ou plaisant.
Nous venons de le lire tout entier, et il nous paraît impossible que la jeunesse de l’écrivain ne promît pas une force étonnante quand la pensée l’aurait mûrie. […] Atala avait trouvé sa nouveauté et sa vérité dans les déserts d’Amérique ; René, dans l’abîme du cœur du jeune écrivain ; le Dernier des Abencérages ne fut qu’un conte de Marmontel. […] Bonaparte l’agréa et le nomma secrétaire d’ambassade à Rome, heureux d’adresser au pape le jeune écrivain restaurateur de la religion. […] L’écrivain oublia trop vite l’infériorité du diplomate.
Inimitiés politiques ou religieuses, routine ou légèreté de la foule, jalousies ou cabales de rivaux, timidité de l’écrivain ou fierté qui lui interdit certains moyens de parvenir, mille autres causes peuvent priver une œuvre de l’estime qui lui est due. […] Sa devise est le mot connu : « Tous les genres sont bons, hors le genre ennuyeux. » A son esprit doivent toujours être présentes ces paroles que deux grands écrivains n’ont pas craint d’émettre, alors que l’autorité, même en matière littéraire, s’affirmait avec énergie. […] Parmi ces juges du passe comme parmi les autres écrivains, il s’est produit peu à peu un classement. […] Au nom de ce principe, nous pouvons comprendre et accepter deux conditions qui s’imposent à tout écrivain et qui se limitent l’une l’autre.
Mais, dès cette première lettre, il prend ses précautions et se peint déjà avec ses variations bizarres : « J’espère, madame, malgré le début de votre lettre, que vous n’êtes point auteur, que vous n’eûtes jamais intention de l’être, et que ce n’est point un combat d’esprit auquel vous me provoquez, genre d’escrime pour lequel j’ai autant d’aversion que d’incapacité. » Il entre alors très au sérieux dans ce jeu prolongé des Claire, des Julie et des Saint-Preux ; il ne fait pas semblant, comme ce serait de bon goût à un écrivain bien appris, de traiter légèrement les personnages de son invention ; il continue de leur porter respect, et d’en parler dans le tête-à-tête comme s’ils étaient de vrais modèles : À l’éditeur d’une Julie, vous en annoncez une autre, une réellement existante, dont vous êtes la Claire. […] L’instinct de son sexe, c’est-à-dire son bon sens, lui dit bien tout bas par instants qu’elle a peu à attendre de lui, qu’elle peut à peine en tirer quelque réponse, qu’il n’est guère séant après tout à une femme de se jeter ainsi à la tête d’un homme bourru (fût-il grand écrivain), qui ne se soucie nullement d’elle et qui la rebute. […] Homme étrange, écrivain puissant et prestigieux, il faut faire sans cesse double part en le jugeant. […] En entourant les demi-vérités d’un faux jour d’évidence, il a plus qu’aucun autre écrivain contribué à mettre les orgueilleux et les faibles sur la route de l’erreur.
De même, Mazarin, à l’heure de sa mort, désigne-t-il Colbert à Louis XIV par ce mot si connu : « Sire, je vous dois tout, et je crois m’acquitter en partie en vous donnant Colbert » ; l’écrivain, gâtant la belle simplicité du mot, et dénaturant l’inspiration toute politique de Mazarin, dira : « Dans ce moment terrible où l’Éternité qui s’ouvre à nos yeux étouffe nos passions, et nous presse de dévouer un dernier instant à la justice et à la vérité, Mazarin adressa ces paroles à Louis XIV… » Les médisants prétendaient avoir trouvé de la ressemblance entre la manière du nouvel écrivain et celle de Thomas, avec qui on le savait très lié ; si toutes les phrases avaient été dans cette forme, la médisance aurait pu prendre crédit ; mais la plupart des défauts de M. […] Necker moraliste est un écrivain très fin, très piquant, et trop oublié. […] La langue, cette fois, a servi l’écrivain observateur avec une précision rare ; il était en face de son objet, et il a fait son dessin trait pour trait
Necker redevient un écrivain et un dissertateur politique très distingué ; il analyse et il critique les diverses Constitutions qui se sont succédé en France, celles de 91, de 93, de l’an III, de l’an VIII ; il en relève aisément les vices ou les défauts : c’est alors qu’il propose et confectionne à loisir son idéal de monarchie tempérée et de gouvernement à l’anglaise, dont il s’était assez peu avisé dans le temps où il tenait le gouvernail. […] Comme écrivain, il s’était beaucoup formé par l’usage, et il était arrivé à se faire un style : style singulier, fin, abstrait, qui se grave peu dans la mémoire et ne se peint jamais dans l’imagination, mais qui atteint pourtant à l’expression rare de quelques hautes vérités. […] Necker a prévalu depuis lui dans une école politique et littéraire ; on le reconnaîtrait à l’origine des principaux écrivains doctrinaires de ce temps-ci, et jusque dans bien des parties de la langue imposante et forte de M. […] Plusieurs de ces écrivains, assez doctrinaires d’abord, se sont guéris d’eux-mêmes en continuant d’écrire et en corrigeant leur premier style par l’habitude de la parole.
Mais si la question qui se pose en France a son importance extrême, elle est bien désagréable par toutes les grossièretés qu’elle soulève de la part de notre parti prêtre et de ses écrivains, les plus injurieux de tous les insulteurs en un temps et dans un pays où il y en a tant. […] La parole et l’accent sont là pour déterminer le sens quand on a affaire à l’orateur ; mais un écrivain, c’est autre chose, et je cours risque de me noyer dans ces grandes flaques d’eau douce qui ne me portent plus en aucun sens. — Après tout, c’est un bon et méritant ouvrage, qui dispense de beaucoup d’autres et qu’il faut conseiller aux gens du métier.
Or, cette disposition du lecteur à accepter les événements comme des effets inévitables de causes connues, et à s’y résigner, doit-elle être reprochée à l’écrivain ? […] Ses taches nombreuses disparaissent sans doute et pour ainsi dire s’effacent parmi tant de mouvement et d’éclat ; mais qu’il eût été moins incorrect et négligé, loin de distraire du récit, il l’eût mieux fait ressortir encore : la pensée de l’écrivain, qui quelquefois s’affaiblit dans ses formes indécises, eût été plus sûre, gravée de la sorte, d’arriver pleinement intelligible et franche à cet avenir auquel elle a droit de s’adresser.
Cuvier, se levant aussitôt, a répondu que l’Académie n’avait jamais fait autre chose que d’accueillir tous les génies, toutes les illustrations, et il a énuméré à l’appui nos grands écrivains académiciens, depuis Racine jusqu’à Buffon, en omettant, je ne sais pourquoi, Molière, Diderot et Jean-Jacques ; il a prétendu qu’aucun novateur de vrai talent, aucun nova leur raisonnable n’avait été exclu de l’Académie et qu’en nommant M. de Lamartine, c’était précisément l’alliance du goût et du génie, la juste mesure de la nouveautés de la correction qu’on avait voulu reconnaître et couronner. […] Auteur dramatique, écrivain monarchique et religieux, l’un des fondateurs de la Société des Bonnes-Lettres, nommé de l’Académie française en 1817.
Il est donc loisible de le considérer un instant à l’état isolé, en une sorte de monographie des termes médicaux utilisés par les écrivains précédents. […] Cette dernière donnée, négligeable chez tous les écrivains qui ne furent qu’« hommes de lettres », prend ici une importance première.
Tous ces dialectes sont d’abord égaux, et souverains chacun en son domaine : ils s’équivalent comme instruments littéraires, et l’emploi de l’un par préférence aux autres dans un ouvrage révèle seulement l’origine de l’écrivain. […] Je ne parle point d’une expansion d’un autre genre : celle où la littérature porte la langue avec elle au lieu de la suivre, celle qui résulte de l’éclat de la civilisation française et de l’influence intellectuelle exercée à l’étranger par nos écrivains.
Il est remarquable que, malgré ses liaisons avec feu M. de Voltaire & d’autres Ecrivains licencieux, M. le Comte de Tressan soit non seulement toujours resté fidele aux vrais principes, mais qu’il les ait défendus contre les attaques de ces mêmes Ecrivains.
D’ailleurs, cet écrivain, quoique caché, continuoit à médire d’elles. […] Cette maxime doit surtout avoir lieu à l’égard des écrivains d’un mérite distingué.
Mais, au défaut du succès, on ne nous ravira point à vous, à moi, et à quelques autres écrivains qui m’ont précédé dans la même carrière, et dont le travail ne m’a pas été inutile, la gloire de la tentative. […] Sénèque le père dit que les écrivains arides et stériles suivent facilement le fil de leurs discours ; que rien no les détourne, ne les amuse, ne les distrait en chemin, ne les embarrasse, ni les figures, ni le choix des mots, ni la manie des réflexions.
Dans cette revue des écrivains, Tacite mérite d’être traité avec le même honneur. […] À l’égard du style, il est hardi, précipité, souvent brusque, toujours plein de vigueur ; il peint d’un trait ; la liaison est plus entre les idées qu’entre les mots ; les muscles et les nerfs y dominent plus que la grâce ; c’est le Michel-Ange des écrivains ; il a sa profondeur, sa force, et peut-être un peu de sa rudesse.
Il professait en effet cette opinion que nous ne connaissons pleinement un écrivain que lorsque nous avons lu tout ce qui est sorti de sa plume, jusqu’au moindre billet. […] Depuis longtemps nous souffrions à voir l’ingénieux écrivain dans les liens d’une espèce de polythéisme littéraire. […] Bien d’autres écrivains du siècle ont, avant celui-ci, parlé du christianisme avec amour, avec vérité même, sans pouvoir être pour cela comptés parmi les chrétiens. […] Sainte-Beuve est peintre plus délicat qu’il n’est exact écrivain. […] Mais ce goût de psychologie subtile a entraîné l’écrivain loin des grandes lignes qu’il serre toujours de près dans les Pensées d’Août.
Les écrivains : Arnauld et Nicole. — 3. […] Mais il a eu des écrivains, de bons et solides écrivains, un seul grand, mais tel que ni en ce temps-là ni en aucun temps il n’y en a de supérieur. […] Mais il n’eut ni la volonté ni la puissance d’être un artiste : il fit œuvre de théologien, de philosophe, de logicien, jamais pour ainsi dire œuvre d’écrivain ; dans aucune de ses polémiques, il ne fit un de ces livres « absolus » qui dépassent l’occasion d’où ils naissent et lui survivent. […] Vie de Pascal S’il est inutile pour comprendre le théâtre de Corneille d’étudier les circonstances de sa vie, la biographie de Pascal est inséparable de son œuvre ; il n’y a pas d’écrivains qui soit plus engagé dans ses livres de toute sa personne et de toutes les parties de son humanité. […] Tout est subordonné à la démonstration que l’écrivain veut faire : il n’applique son rare génie qu’à choisir les meilleurs moyens de l’opérer.
Excuse menteuse des mauvais écrivains ! […] Chez les grands écrivains n’a-t-il pas tous les tons, ne s’adapte-t-il pas à tous les sujets avec une merveilleuse aisance ? […] Le mauvais écrivain ne voit les choses que par à peu près et d’une manière vague : il n’est pas étonnant que la langue se refuse à ses demi-pensées. […] Déjà Lamartine, Victor Hugo, l’avaient retrempée à des sources intérieures, découvertes par leur génie d’écrivain ; elle en était sortie avec une souplesse et un éclat nouveaux. […] Sully-Prudhomme a eu raison de croire que le vers est la forme la plus apte à consacrer ce que l’écrivain lui confie, et que l’on peut lui confier, outre tous les sentiments, presque toutes les idées.
On devine aisément que la nature des qualités d’écrivain de M. […] Hermant, autant de discrétion et de mesure dans un récit plein de dangers pour un écrivain inexpérimenté. […] Catulle Mendès, l’élégant écrivain, vient de publier chez Charpentier. […] Eu écrivain qui a étudié toutes les ressources de la tactique actuelle, M. […] Francis Chevassu parmi les écrivains de talent du jour qui ne font pas fi de l’esprit, et pour cause.
« On ne cesse pas sans peine de citer un pareil écrivain », dit-il en un endroit (page xxviii) ; et, en vérité, je crains que ces mots, un pareil écrivain, ne s’appliquent, dans sa pensée, non pas à Bossuet, mais à M. […] Le mot de timide jure avec l’idée seule de Bossuet, écrivain et orateur ; c’est une impropriété, un contresens.
On sort du collège, et, à peine sorti, on a déjà choisi son point de mire, son modèle dans quelque écrivain célèbre, dans quelque poète préféré : on lui adresse son admiration, on, lui porte ses premiers vers ; on devient son disciple, son ami, pour peu qu’il soit bon prince ; on est lancé déjà ; à sa recommandation peut-être, un libraire consent à imprimer gratis vos premiers vers ; un journal du moins les insère ; on y glisse de la prose en l’honneur du saint qu’on s’est choisi et à la plus grande gloire des doctrines dont on a le culte juvénile : comment revenir après cela ? […] De tout temps, on l’a observé, les gens de lettres n’ont pas été des mieux et n’ont pas fait très bon ménage avec les hommes politiques, même avec ceux qu’ils ont servis ; on l’a remarqué des plus grands écrivains, gens de fantaisie ou d’humeur, de Chateaubriand, de Swift ; écrivains et gouvernants, ils peuvent s’aimer comme hommes, ils sont antipathiques comme race.
Elle saisit trop volontiers le sujet, l’idée, pour en donner un développement qui substitue le travail de l’écrivain au travail du peintre ou du sculpteur. […] De même les artistes et les écrivains vivaient à part, chacun de leur côté : Mme Geoffrin avait son dîner des artistes et son dîner des écrivains, qui n’avaient pas beaucoup de convives communs.
Les écrivains les plus ardens à crier contre un projet aussi bisarre, furent ceux qui n’avoient jamais rien donné qu’en prose. […] Quoi qu’il en soit de la source & de l’établissement des fables, elles tiennent essentiellement au paganisme, & c’est assez pour que leur emploi devienne un crime aux yeux de quelques écrivains. […] Cet écrivain, dont les ouvrages respirent la religion, qui n’a jamais presque chanté qu’elle & les dogmes de la grace, prétend que les fables ne sont qu’un abus de la poësie ; qu’elle a dégénéré du moment qu’elles ont commencé d’être de mode, en Egypte, dans la Grèce, en Italie, chez les Gaulois, & même chez les peuples de la Chine & de l’Amérique.
Mais si on avait, comme je le suppose, un désir sincère de les convertir en les effrayant, on pouvait, ce me semble, faire agir un intérêt plus puissant et plus sûr, celui de leur vanité et de leur amour-propre ; les représenter courant sans cesse après des chimères ou des chagrins ; leur montrer d’une part le néant des connaissances humaines, la futilité de quelques-unes, l’incertitude de presque toutes ; de l’autre, la haine et l’envie poursuivant jusqu’au tombeau les écrivains célèbres, honorés après leur mort comme les premiers des hommes, et traités comme les derniers pendant leur vie ; Homère et Milton, pauvres et malheureux ; Aristote et Descartes, fuyant la persécution ; le Tasse, mourant sans avoir joui de sa gloire ; Corneille, dégoûté du théâtre, et n’y rentrant que pour s’y traîner avec de nouveaux dégoûts ; Racine, désespéré par ses critiques ; Quinault, victime de la satire ; tous enfin se reprochant d’avoir perdu leur repos pour courir après la renommée. […] J’ai été traité d’écrivain dangereux par les intéressés, et d’étourdi par les indifférents ; les critiques m’ont assailli de toutes parts ; et au lieu d’un peu de fumée sur quoi je comptais, je n’ai recueilli que des chagrins et des ridicules. […] Une seule espèce d’écrivains m’a paru posséder un bonheur sans trouble ; c’est celle des compilateurs et commentateurs, laborieusement occupés à expliquer ce qu’ils n’entendent pas, à louer ce qu’ils ne sentent point, ou ce qui ne mérite pas d’être loué ; qui pour avoir pâli sur l’antiquité, croient participer à sa gloire, et rougissent par modestie des éloges qu’on lui donne.
Si des paroles aussi graves avaient été prononcées par tels autres écrivains de réputation moins assise, il est évident qu’elles auraient passé pour de puériles exagérations. […] La tâche la plus importante, à cet égard, consiste peut-être dans l’étude des penseurs et des écrivains étrangers. […] Et, si intelligente que soit la nation qu’on veut enrichir, elle s’indigne… » La connaissance des langues étrangères est d’une nécessité vitale, puisqu’elle seule nous permet de pénétrer les écrivains et les peuples.
Il n’y a guère de savant français, ni même d’écrivain français, qui n’ait apporté sa contribution à la philosophie. […] Ce fut d’abord un merveilleux écrivain, si toutefois on peut encore appeler écrivain celui qui nous fait oublier qu’il emploie des mots, sa pensée paraissant s’insinuer directement dans la nôtre.
Nous venons de voir Julien écrivain et panégyriste, voyons-le maintenant comme empereur, et objet lui-même des panégyriques de son siècle. […] On lui a reproché aussi de l’obscurité ; il faut en convenir, ce n’est pas celle de quelques grands écrivains comme Tacite, qui voyant à une grande profondeur, ou rassemblant beaucoup d’idées en peu d’espace, fatiguent la faiblesse des hommes ordinaires, et que la médiocrité calomnie, parce qu’elle aime mieux blâmer les forces dans un autre, que de s’avouer l’insuffisance des siennes. […] Passionné pour les Grecs, nourri jour et nuit de la lecture de leurs écrivains, enthousiaste d’Homère, fanatique de Platon, avide et insatiable de connaissances ; né avec ce genre d’imagination qui s’enflamme pour tout ce qui est extraordinaire ; ayant de plus une âme ardente, et cette force qui sait plus se précipiter en avant que s’arrêter ; d’ailleurs, accoutumé dès son enfance à voir dans un empereur chrétien le meurtrier de sa famille, et, dans le fond de son cœur, rendant peut-être la religion complice des crimes qu’elle condamne ; placé entre l’ambition et la crainte, inquiet sur le présent, incertain sur l’avenir ; ses goûts, son imagination, son âme, les malheurs de sa famille, les siens, tout semblait le préparer d’avance à ce changement qui éclata dans la suite.
Cette manie va si loin qu’elle a passé des écrivains et des artistes jusqu’au grand public. […] L’écrivain n’était plus celui qui charme, qui exalte ou qui instruit. […] Les vérités au nom desquelles elle juge ne répondent plus aux réalités sur lesquelles s’appuie l’écrivain. […] Le champ des connaissances s’est tellement agrandi, la part de l’homme s’y est tellement rétrécie devant celle de plus en plus envahissante de la nature, que nos écrivains s’y égarent et ne savent plus où se prendre. […] Nous nous trouvons aujourd’hui, à l’égard de nos devanciers, dans une position semblable à la leur vis-à-vis des écrivains de la Renaissance.
Je sais bien qu’il y a, de nos jours aussi, quelques écrivains que la société a fini par traiter un peu en bouffons et en grotesques ; mais à qui la faute ? […] Cousin l’exemple et le modèle des écrivains de son temps. […] Villemain, ou plutôt ceux de son héros (car remarquez que l’éminent écrivain n’est que l’interprète de M. de Narbonne !) […] Mignet et de ses Notices historiques, c’est-à-dire d’un écrivain supérieur et d’un ouvrage excellent. […] Caro analyse le mysticisme, faisant la part des qualités de l’homme et des défauts du système, des faiblesses du penseur et des grâces de l’écrivain.
Une heureuse fortune a voulu que ces questions, dans notre histoire, au lieu d’être uniquement traitées par des docteurs, l’aient au contraire été par nos plus grands écrivains. […] Mais, d’autre part, la notoriété de quelques-unes de leurs plus brillantes aventures ôtait à l’écrivain tout scrupule d’invraisemblance. […] Mais il y en a d’autres, comme Gil Blas, qui ne dépendent guère moins du temps et de la circonstance que du talent de l’écrivain qui les signe. […] Les efforts sont diversement heureux, et il arrive aux écrivains de valoir mieux que leur œuvre. […] Tant il y a quelquefois de choses dans un seul mot, si ce mot est mis en sa place, et par le choix d’un grand écrivain !
Pourtant, Laplace, Biot, alors jeune, plein de zèle et de vivacité pour les sciences (comme il l’est encore aujourd’hui), ne l’agréaient pas ; les hommes du coin de Fontanes, et dont le cœur était pour les grands écrivains du xviie siècle, ne le pouvaient agréer non plus. […] Roederer a donné son Mémoire, combien d’écrivains n’ont-ils pas recommencé l’histoire de l’hôtel de Rambouillet ou de quelques-unes des héroïnes qui y figurent ! […] L’histoire politique le nommera ; mais ce qui est mieux encore, sans être précisément un écrivain et en ne paraissant qu’un amateur, il a marqué par ses idées et ses vues sa place dans l’histoire de la littérature et de la société françaises68. […] Génin, dans la Vie de Molière qu’il a mise en tête de son Lexique comparé de la langue de Molière et des écrivains du xviie siècle, p.
Duclos a fait quelques ouvrages qui prouvent ou supposent de l’érudition : comme membre de l’Académie des inscriptions et belles-Lettres, il y lut plusieurs mémoires sur des points d’Antiquité ou de Moyen Âge ; mais la première production importante, par laquelle il rompit avec les romans et se déclara un écrivain tout à fait sérieux et solide, fut son Histoire de Louis XI, publiée en 1745 avec la nouvelle année. […] Duclos ici s’est piqué d’honneur et, rentrant dans ce genre de tour énergique et bref qui est à lui, il a dit : « Il s’en faut beaucoup que Louis XI soit sans reproche, peu de princes en ont mérité d’aussi graves ; mais on peut dire qu’il fût également célèbre par ses vices et par ses vertus, et que, tout mis en balance, c’était un roi. » On a là le plus frappant exemple du genre de supériorité que Duclos a sur l’abbé Le Grand comme écrivain. […] Dans sa préface, Duclos regrette de n’avoir pu jeter plus de lumière sur la partie financière de son sujet : La politique, dit-il, la guerre, la finance, exigeraient chacune une histoire particulière et un écrivain qui eût fait son objet capital de l’étude de sa matière. […] Duclos historien n’a qu’un procédé, il n’est qu’un abréviateur ; il l’est avec trait, je l’ai dit, quand il a affaire à l’abbé Le Grand ; il l’est avec un certain goût et avec un adoucissement relatif quand il a affaire à Saint-Simon ; dans l’un et dans l’autre cas pourtant, il n’a pas toutes les qualités de son office secondaire, et il ne porte au suprême degré ni les soins délicats du narrateur, ni même les scrupules du peintre qui dessine d’après un autre, et de l’écrivain qui observe les tons : il va au plus gros, au plus pressé, à ce qui lui paraît suffire ; c’est un homme sensé, expéditif et concis, et qui se contente raisonnablement ; il a de la vigueur naturelle et de la fermeté sans profondeur ; nulle part il ne marche seul dans un sujet, et jamais il ne livre avec toutes les forces de sa méditation et de son talent une de ces grandes batailles qui honorent ceux qui les engagent, et qui illustrent ceux qui les gagnent.
» Il se demande pourquoi ces livres traduits de l’anglais ont tant d’attrait pour lui ; il s’aperçoit bien de ce qui y manque pour l’ordre, pour la méthode, et combien « à décliner les choses par les règles » les écrivains français paraissent supérieurs ; il sent le besoin de s’expliquer cette action si réelle sur les esprits sérieux : C’est qu’ils raisonnent avec grande force, dit-il, et qu’il n’y a jamais de lieux communs comme dans nos auteurs, même comme dans ceux des nôtres qui raisonnent le plus à l’anglaise. La Bruyère seul découvre et raisonne à neuf… Ce qui caractérise les écrivains anglais, et toute cette nation si approfondissante, si réfléchissante, c’est un grand sens en tout. […] Les jugements et témoignages de d’Argenson sur les écrivains qu’il a connus et les livres d’eux qu’il a lus sont plus sûrs et ont beaucoup de prix à nos yeux. […] On a là au vrai le jugement d’un ami impartial et clairvoyant sur Voltaire homme et écrivain, à cette époque déjà si avancée de sa carrière, mais avant qu’il fût devenu cette espèce de personnage amplifié de la légende philosophique et le patriarche de Ferney.
Pierre Corneille En fait de critique et d’histoire littéraire, il n’est point, ce me semble, de lecture plus récréante, plus délectable, et à la fois plus féconde en enseignements de toute espèce, que les biographies bien faites des grands hommes : non pas ces biographies minces et sèches, ces notices exiguës et précieuses, où l’écrivain a la pensée de briller, et dont chaque paragraphe est effilé en épigramme ; mais de larges, copieuses, et parfois même diffuses histoires de l’homme et de ses œuvres : entrer en son auteur, s’y installer, le produire sous ses aspects divers ; le faire vivre, se mouvoir et parler, comme il a dû faire ; le suivre en son intérieur et dans ses mœurs domestiques aussi avant que l’on peut ; le rattacher par tous les côtés à cette terre, à cette existence réelle, à ces habitudes de chaque jour, dont les grands hommes ne dépendent pas moins que nous autres, fond véritable sur lequel ils ont pied, d’où ils partent pour s’élever quelque temps, et où ils retombent sans cesse. […] Il n’en a pas été toujours ainsi ; et lorsque nous venons à nous enquérir de la vie, surtout de l’enfance et des débuts de nos grands écrivains et poëtes du dix-septième siècle, c’est à grand’peine que nous découvrons quelques traditions peu authentiques, quelques anecdotes douteuses, dispersées dans les Ana. La littérature et la poésie d’alors étaient peu personnelles ; les auteurs n’entretenaient guère le public de leurs propres sentiments ni de leurs propres affaires ; les biographes s’étaient imaginé, je ne sais pourquoi, que l’histoire d’un écrivain était tout entière dans ses écrits, et leur critique superficielle ne poussait pas jusqu’à l’homme au fond du poëte. […] Or, cependant, le point essentiel dans une vie de grand écrivain, de grand poëte, est celui-ci : saisir, embrasser et analyser tout l’homme au moment où, par un concours plus ou moins lent ou facile, son génie, son éducation et les circonstances se sont accordés de telle sorte, qu’il ait enfanté son premier chef-d’œuvre.
Et en général recueil, le malheur de Mme de Girardin comme écrivain, ça été qu’une organisation aussi forte, qui semble même puissante par accès, et qui, dans tous les cas, est si pleine de ressources, s’est jouée toujours dans un cercle artificiel et factice duquel, plume en main, ou lyre en main, elle n’est point sortie. […] Un grand sage, Confucius, disait, et je suis tout à fait de son avis quand je lis nos écrivains à belles phrases quand j’entends nos orateurs à beaux discours, ou quand je lis nos poètes à beaux vers : « Je déteste, disait-il, ce qui n’a que l’apparence sans la réalité ; je déteste l’ivraie, de peur qu’elle ne perde les récoltes ; je déteste les hommes habiles, de peur qu’ils ne confondent l’équité ; je déteste une bouche diserte, de peur qu’elle ne confonde la vérité… » Et j’ajoute, en continuant sa pensée : Je déteste la soi-disant belle poésie qui n’a que forme et son, de peur qu’on ne la prenne pour la vraie et qu’elle n’en usurpe la place, de peur qu’elle ne simule et ne ruine dans les esprits cette réalité divine, quelquefois éclatante, d’autres fois modeste et humble, toujours élevée, toujours profonde, et qui ne se révèle qu’à ses heures. […] Pour ceux qui, comme nous, ont la manie de chercher encore autre chose et mieux que ce qu’on leur offre, il reste à regretter que l’esprit, chez Mme de Girardin, si brillant qu’il soit, ait pris dès longtemps une prédominance si absolue sur toutes les autres parties dont se compose l’âme du talent, et qu’elle se soit perfectionnée comme écrivain dans un sens qui n’est pas précisément celui du sérieux et du vrai. Telle qu’elle est, il manquerait quelque chose d’essentiel à la société, à la poésie et au journalisme de ce temps-ci, et les trois ensemble n’auraient pas donné leur dernier mot, s’ils ne s’étaient entendus pour produire ce composé singulier, étrange, élégant, qui, dans sa forme habile et précise, se jouant du fond, associe à son gré avec malice, avec gaieté, naturel et même un reste de naïveté, la femme d’esprit, le cavalier à la mode, l’écrivain consommé, et l’amazone parfois encore et la muse.
Sur ceux qui ont beaucoup écrit et surtout qui ont jugé les écrivains, on écrit beaucoup. […] Il faut que M. de La Harpe ait un secret particulier pour se faire plus d’ennemis qu’un autre. » En tête de sa seconde tragédie, Timoléon, lorsqu’il l’imprima, La Harpe se crut obligé de mettre une justification expresse sur les couplets de collège qui lui étaient imputés à crime, et il ajouta quelques réflexions sensées qui nous peignent très bien le moment où il parut : La mode dominante, disait-il, est aujourd’hui d’avoir de l’esprit… Tandis qu’un petit nombre d’écrivains illustres honore et éclaire la nation, un bien plus grand nombre d’écrivains obscurs, possédés de la manie d’être littérateurs, sans titres et sans études, ont fait une espèce de ligue pour se venger du public qui les oublie, et des véritables gens de lettres qui ne les connaissent pas. […] Il semblait, en effet, que, comme cet empereur romain qui voulait mourir debout, La Harpe se fût dit dans sa passion littéraire : « Il convient qu’un critique (même converti) meure en jugeant. » Depuis une quinzaine de jours que je vis avec La Harpe, je me suis demandé (à part les bonnes parties du Cours de littérature qui sont toujours utiles à lire dans la jeunesse) quelles pages de lui on pourrait aujourd’hui offrir à ses amis comme à ses ennemis, quel échantillon incontestable de son talent de causeur, d’écrivain, d’homme qui avait au moins, en professant, un certain secret dramatique, et qui savait attacher.
Racine est celui de tous nos écrivains dont les sentiments étaient le plus en harmonie avec la langue française. […] L’écriture paraît avoir donné lieu à la prose : les premiers écrivains furent sans doute les premiers prosateurs. […] « L’absence du merveilleux, dit Thucydide, sera cause peut-être que les événements que je décris plairont moins à la lecture. » Le même écrivain dit encore : « Les anciens historiens ont plus songé à plaire à la lecture, qu’ils n’ont songé à dire la vérité. » Ces deux phrases sont remarquables en ce qu’elles indiquent bien les deux genres d’altérations que les premiers historiens ont apportées dans leurs rédactions en prose, altérations dont on leur a su gré, et qui ont cependant conduit à l’arbitraire. […] On a été livré à l’esprit individuel de chaque écrivain, au lieu d’être soumis à l’esprit général des traditions.
Il ne s’agit que d’événements communs, de règlements de chancelleries, de diplomatie plus ou moins fine, de guerres régulières en douze temps, comme l’exercice, mais, quand il est question d’Attila, du maillet du Seigneur, comme disaient les moines, qui avaient le sentiment plus juste de leur époque que les écrivains du xixe siècle, venus maintenant pour l’expliquer ; quand il est question du monde romain qui s’écroule sous cet effroyable maillet emmanché dans une si compacte masse d’hommes, il n’y a plus de Gibbon ni de Montesquieu qui puissent arracher le sens à cette exceptionnelle histoire ! […] Si donc ils retrempèrent le monde, s’ils le régénérèrent, et s’ils devinrent, selon l’expression de l’écrivain goth, une fabrique de nations, ce ne fut ni par la pureté acérée de leurs mœurs, ni par la fierté de leur caractère. […] Amédée Thierry n’a pas le sens artiste dans une histoire où il ne s’agit pas uniquement d’être un correct et un assez propre écrivain. […] Amédée Thierry, lequel n’a mis, en ces vastes et ambitieuses histoires, ni le portrait d’un homme fièrement tracé, ni une page touchante ou grandiose, ni rien de ce qui fait qu’on lit Montesquieu, par exemple, quand on ne lit plus Boulainvilliers ; rien enfin de ce qui fait qu’un écrivain ne périt pas sur ses idées en ruine, parce qu’il avait, dans ce misérable brimborion qu’on appelle une plume, une goutte d’immortalité !
Rival parfois heureux de Millevoye dans les concours en vers, il parut triompher sans partage dans les concours d’éloquence ; sont Éloge de Corneille (1808), son Tableau du dix-huitième Siècle (1809), son Éloge de La Bruyère (1810) promettaient décidément à la France un écrivain de plus. […] Les anciens expliquaient aux plus jeunes de quoi il s’agissait au juste : était-ce un grand écrivain, décidément, qui nous revenait de Jaujac ?
Pour ceux qui lisent les Pensées, le génie de l’écrivain a quelquefois donné le change sur la méthode et sur le fond. […] Il me semble qu’après beaucoup d’éloges un peu de sympathie doit vous plaire ; j’offre la mienne à l’emploi que vous faites de votre talent, qui ne s’est pas contenté d’intéresser l’imagination et d’effleurer l’âme, mais qui veille aux intérêts sacrés de la vie humaine ; et moi, qu’une espérance sérieuse a pu seule faire écrivain, je suis heureux que vous ayez reconnu en moi cette intention, que vous l’ayez aimée ; et j’accepte avec reconnaissance les vœux par où vous terminez votre article.
Il a eu beau représenter que les quatre ou cinq malencontreuses pages vides qui escortaient la première édition, et dont le libraire s’est obstiné à déparer celle-ci, lui avaient déjà attiré les anathèmes de l’un de nos écrivains les plus honorables et les plus distingués1, lequel l’avait accusé de prendre le ton aigre-doux de l’illustre Jedediah Cleishbotham, maître d’école et sacristain de la paroisse de Gandercleugh ; il a eu beau alléguer que ce brillant et judicieux critique, de sévère pour la faute, deviendrait sans doute impitoyable pour la récidive ; et présenter, en un mot, une foule d’autres raisons non moins bonnes pour se dispenser d’y tomber, il paraît qu’on lui en a opposé de meilleures, puisque le voici maintenant écrivant une seconde préface, après s’être tant repenti d’avoir écrit la première. […] Cela prouve qu’on a au moins l’intention d’être un jour un écrivain illustre et considérable.
Cet écrivain judicieux observe encore en un autre endroit que dans les temps precedens la profession d’enseigner la musique et celle d’enseigner la grammaire avoient été unies, et qu’elles étoient alors exercées par le même maître. […] Cependant j’espere qu’en m’aidant des faits racontez par les écrivains anciens qui par occasion ont parlé de leurs arts musicaux, je pourrai venir à bout de donner une notion ; si non pleine et entiere, du moins claire et distincte de ces arts, et d’expliquer comment les pieces dramatiques étoient representées sur le théatre des anciens.
Comme écrivain (uniquement comme écrivain, bien entendu), Vallès est le jeune homme dont Proudhon est l’homme fait.
Sans un don supérieur, sans l’ironie qu’il manie en maître, il faudrait le classer, comme penseur et comme écrivain, bien au-dessous de Diderot, l’homme du feu sacré et des grosses belles larmes, de Diderot dont il rappelle parfois le style érudit, la déclamation, l’hyperbole, et, j’en suis bien fâché pour un socialiste comme lui ! […] Il n’y a pas d’écrivain qu’on puisse opposer mieux à Proudhon que Louis Couture, l’auteur d’un livre qui s’achève en ce moment, et dont la première partie est publiée : Du Bonapartisme dans l’histoire de France 3.
On peut dire que par elle le génie s’étend, l’âme s’élève, l’homme tout entier multiplie ses forces ; et de là les travaux, les méditations sublimes, les idées du législateur, les veilles du grand écrivain ; de là le sang versé pour la patrie, et l’éloquence de l’orateur qui défend la liberté de sa nation. […] Nous indiquerons le caractère et le mérite ou la bassesse des écrivains qui ont travaillé dans ce genre.
L’Homme contre la Société, voilà le vrai titre de cet ouvrage, ouvrage d’autant plus funeste qu’en faisant de l’homme individu un être parfait, il fait de la société humaine, composée pour l’homme et par l’homme, le résumé de toutes les iniquités humaines ; livre qui ne peut inspirer qu’une passion, la passion de trouver en faute la société, de la renouveler et de la renverser, pour la refondre sur le type des rêves d’un écrivain de génie. […] C’est ainsi qu’ont procédé tous les écrivains dits socialistes de nos jours, avec de bonnes intentions et des têtes faibles, depuis Saint-Simon qui veut réhabiliter la chair et la boue, jusqu’à Fourier qui veut passionner l’instinct brutal et moraliser l’immoralité, pour que tout soit vertu et volupté sur la terre ; jusqu’à cet homme sans nom qui veut anéantir le fait accompli, les droits antécédents et le travail de cinq ou six mille ans dans le monde qui nous précède et nous engendre, et qui déclare que la propriété c’est le vol, et qu’il faut recommencer sans elle ; jusqu’au grand pontife des Mormons, qui recrée le harem religieux pour le plaisir de quelques prêtres de la population, et traîne des troupeaux de femelles à la suite du mâle dans les steppes des États-Unis d’Amérique, ce pays vacant et pratique de toutes les absurdités impraticables et bientôt punies, je l’espère. […] Relisons-le pour y sympathiser avec une sensibilité pathétique qui n’existait pas au même degré dans les années tendres de l’écrivain, et qui semble en vieillissant participer davantage à cette mélancolie de l’espèce humaine, à cette tristesse des choses mortelles, à ce mentem mortalia tangunt , à ce sublime lacrimæ rerum de Virgile, qui, lui aussi, avait vu des révolutions, des proscriptions, des déceptions humaines. […] C’est là qu’il faut éclairer, si on ne veut pas la maudire, la pensée évidemment tout autre de l’écrivain. […] « Si le radical c’est l’idéal, oui, je suis radical, disait-il dans les justifications éloquentes de ses intentions d’écrivain ; oui, à tous les points de vue, je comprends, je veux et j’appelle le mieux ; le mieux, quoique dénoncé par un proverbe, n’est pas l’ennemi du bien, car cela reviendrait à dire : Le mieux est l’ami du mal….
Chaumié, que de citer encore Marguerite d’Angoulême, Olivier de Magny, Jean de La Gessée, Nicolas Rapin « — Le favory d’Apollon et des Muses », — François Maynard, aussi pur écrivain que son maître Malherbe, et souvent plus pathétique, Claude de Trellon, Annibal de Lortigue, et, enfin, Théophile de Viau, qui eut une soixantaine d’éditions, de 1621 à 1656. […] Joachim Gasquet Évidemment… Mais les deux plus grands écrivains de langue d’oïl, c’est Montaigne et Pascal que je veux dire, leur langue maternelle était la langue d’oc. […] En ce cas, il faudrait voir dans l’énorme supériorité du nombre de grands écrivains nés dans la France du Nord un effet de l’histoire même de notre développement en tant que nation. […] Il est bien évident que le lieu de naissance d’un poète ou plus généralement d’un écrivain ne signifie pas grand’chose. […] C’est pour cela que la Normandie, la Champagne, dont les relations ont été faciles et continues avec le centre intellectuel qu’était et qu’est demeuré Paris, ont fourni à la littérature française tant de poètes et d’écrivains.
Et cependant, malgré les défauts les plus graves que puisse avoir un livre d’histoire, écrit avec la prétention d’expliquer, par une loi supérieure, les faits qu’il retrace, c’est-à-dire, en d’autres termes, malgré le vice radical de la théorie et l’inconsistance des assertions, ce livre des Révolutions d’Italie se lit avec un intérêt singulier ; et le talent de l’auteur, qui, comme écrivain, est incontestable, et la prestidigitation d’une érudition très rusée, ne sont pas toute l’explication à donner de l’intérêt de cette lecture. […] Ferrari n’est pas Français, et on le sent à je ne sais quoi qui ne marche pas tout à fait d’un pas égal au nôtre dans sa phrase, mais, excepté ce léger empêchement, ce manque de furie dans la démarche de sa pensée, il est écrivain comme le meilleur d’entre nous. […] Ferrari, qui est un autre docteur (mais non de Sorbonne), nous apprend que déjà du temps de Richelieu quatre cent soixante-dix écrivains, de compte fait, avaient planté dans leurs écrits, qu’il ornait très bien, ce mot sans réplique de Raison d’État, qu’un autre cardinal, le cardinal de La Casa, avait un jour prononcé pour la première fois devant Charles-Quint, tout en lui dénonçant la chose. […] Dans ces temps de batailles italiennes qui fermèrent le Moyen Âge, « au milieu des perpétuelles révolutions qui emportaient une multitude d’États sans diètes, de villes sans lien, de citoyens sans lois, d’hommes sans patrie », — c’est-à-dire bien avant que sa douce Éminence le cardinal de La Casa fût son parrain horripilé, la Raison d’État existait, monstre encore en bas âge, mais très bien venant et déjà fort en Italie, ce pays des poisons et des tragiques aventures, et beaucoup d’écrivains berçaient dans leurs livres cet affreux poupon dont ils faisaient leur Dieu. […] À chaque mouvement, répété aux deux bouts de l’échiquier du monde, et marqué en passant par l’écrivain avec cet éclair du regard qui peut-être éblouit le nôtre ou lui commande trop, nous sommes toujours tentés de nous écrier : Pas si vite !
Par toutes ces raisons, il reste démontré que les tropes, qui se réduisent tous aux quatre espèces que nous avons nommées, ne sont point, comme on l’avait cru jusqu’ici, l’ingénieuse invention des écrivains, mais des formes nécessaires dont toutes les nations se sont servies dans leur âge poétique pour exprimer leurs pensées, et que ces expressions, à leur origine, ont été employées dans leur sens propre et naturel. […] Le premier écrivain latin dont on fasse mention est le poète Livius Andronicus. […] Enfin l’Italie eut ses premiers écrivains dans les rimeurs de Florence et de la Sicile. […] Au rapport de Festus, les guerres puniques furent écrites par Nævius en vers héroïques, avant de l’être par Ennius ; et Livius Andronicus, le premier écrivain latin, avait écrit dans un poème héroïque appelé la Romanide, les annales des anciens Romains. […] Nous avons vu que les premiers écrivains dans les nouvelles langues de l’Europe, avaient été des versificateurs.
L’un, l’aîné, était le comte Joseph de Maistre, esprit original, paradoxal, superbe, déclamateur, fanatique, qui a laissé une immense réputation à réviser par son parti, homme de phrases magnifiques, mais de livres tantôt équivoques, tantôt scandaleusement faux, grand écrivain, pauvre philosophe. […] lui répondit Virieu : l’homme qui écrit cela n’est ni un écrivain, ni un poète ; c’est un traducteur de Dieu ! […] C’était beau, cela tombait avec bruit sur l’âme ; mais cela n’y pénétrait pas comme une pluie insensible qui amollit les sens et qui fait de la douleur non pas la déclamation de l’écrivain, mais l’impression même de celui qui souffre. […] Aussi je n’aime pas les écrivains de métier ; je les regarde comme des comédiens qui jouent un rôle. […] Mais celui qui, comme une harpe éolienne, s’abandonne au vent et ne sait pas d’avance l’effet qu’il veut produire, voilà l’homme qui ne manque jamais son coup, voilà ton oncle, voilà mon écrivain !
Le moins « bonhomme » des grands écrivains, Renan, n’a point échappé à cette espèce de suggestion. […] Cette intensité existe dans le livre, parce que l’écrivain en a trouvé l’expression. […] Néanmoins, j’aime à croire qu’Henrik Ibsen, ou tout autre écrivain moderne que tenterait le sujet, en pénétrerait mieux le sens humain et profond. […] L’écrivain a-t-il retiré les mêmes bénéfices de ce détachement ? […] Goethe et Schiller, qui sont alors les deux premiers écrivains de leur pays, semblent avoir réuni leurs forces pour en devenir les plus redoutables.
Ramond n’a rien de cette mollesse et de cette fadeur de teinte que nous avons souvent remarquée chez quelques écrivains de l’époque finissante de Louis XVI ; il a plutôt quelque chose de l’apprêt et de la roideur qui s’attacheront aux nobles tentatives de l’art régénéré, et auxquels Chateaubriand à sa manière n’échappe pas plus que David. […] Le Voyage en Syrie et en Égypte de Volney, qui avait paru en 1787, avait eu le temps de réussir et d’être apprécié, de classer son auteur parmi les écrivains : Ramond, qui est un Volney bien autrement éloquent et ému, qui n’est pas seulement un dessinateur, qui est un coloriste et parfois un Claude Lorrain ou un Carle Dujardin des montagnes (il y a de quoi justifier ces rapprochements), ne fut apprécié que de quelques-uns. […] Mais en même temps et en attendant que cette épopée encore à naître fut venue, Ramond, vers 1807, savait fort bien déterminer le caractère littéraire d’un siècle qui était le sien et qui a aussi sa force et son originalité : On le dépréciera tant qu’on voudra ce siècle, disait-il, mais il faut le suivre ; et, après tout, il a bien aussi ses titres de gloire : il présentera moins souvent peut-être l’application des bonnes études à des ouvrages de pure imagination, mais on verra plus souvent des travaux importants, enrichis du mérite littéraire… Nos plus savants hommes marchent au rang de nos meilleurs écrivains, et si le caractère de ce siècle tant calomnié est d’avoir consacré plus particulièrement aux sciences d’observation la force et l’agrément que l’expression de la pensée reçoit d’un bon style, on conviendra sans peine qu’une alliance aussi heureuse de l’agréable et de l’utile nous assure une place assez distinguée dans les fastes de la bonne littérature.
Selon lui, cette révolution poétique qui s’accomplissait alors serait extrêmement favorable à la littérature elle-même, bien que nuisible aux écrivains qui y prenaient la plus grande part. […] lisez mes Xénies… Écrivain allemand, martyr allemand ! […] Dès le commencement, avec les Bardes anglais et les Critiques écossais ; il blessa les meilleurs écrivains… Loin de reculer, dans son ouvrage suivant il continue son opposition et ses blâmes, il touche l’État et l’Église.
Je dirai donc un mot sur l’écrivain, puis un mot sur l’objet de ses études. […] Nous sommes plus proches, par le cœur et l’esprit, de Villon, de Joinville, de Villehardouin, de Téroulde, que ne l’ont été, du premier jusqu’au dernier, nos écrivains classiques, et nous renouons par-dessus leur tête la tradition nationale. […] Nous concevons peut-être mieux l’âme du moyen âge, mais nous en sommes encore plus loin que les écrivains des siècles classiques.
(Chroniqueurs parisiens III) Henri Rochefort Il est rare qu’en étudiant une œuvre, même celle d’un auteur dramatique ou d’un romancier, on puisse séparer nettement l’homme de l’écrivain et toucher à celui-ci sans effleurer au moins celui-là. […] Essayez de ne considérer que l’écrivain : la définition de son tour d’esprit tiendra en quelques lignes, et qui ne vaudront presque pas la peine d’être écrites. […] Rochefort se rencontre peut-être aussi chez d’autres ; mais il n’est pas d’écrivain, je pense, ni qui ait poussé plus loin cet esprit-là, ni qui s’y soit tenu plus étroitement.
Amédée Pigeon (1851-1905) est un poète et un écrivain français. […] Avocat, journaliste, critique d’art, écrivain et poète, il rencontra le poète Saint Pol Roux à la faculté de droit. […] Gabriel Mourey (1865-1943) est un écrivain, poète, critique d’art et traducteur.
Il n’y a point de règle pour mesurer ou limiter les emprunts qu’une science peut faire à une autre : cela dépend du tact et du génie des écrivains ; mais il est facile de comprendre qu’un certain excès changerait le caractère d’une science. Par exemple, s’il plaisait à un écrivain qui nous raconte l’histoire de Rome et qui analyse son gouvernement de s’arrêter tout à coup et d’introduire dans son ouvrage un traité approfondi sur les gouvernements mixtes, il cesserait d’être historien pour devenir publiciste. […] Le philosophe qui étudie les idées des autres est trop enclin à les voir à travers les siennes : il se retrouve lui-même partout, il impose aux écrivains du passé les cadres artificiels de son propre système, comme a fait Hegel dans son Histoire de la philosophie, ouvrage éminent, mais d’un philosophe plus que d’un historien ; ou bien il les juge avec une sévérité excessive, leur demandant ce qui est de son temps et non du leur, exigeant des réponses à des questions qu’ils n’ont point connues, ce qui a été quelquefois le tort de l’école française.
J’observerai seulement que, tant que les écrivains, soit en vers, soit en prose, mettront, dans leurs dédicaces, des idées ou des sentimens contraires à la morale énoncée dans leurs livres, les princes croiront toujours que la dédicace a raison et que le livre a tort ; que, dans l’une, l’auteur parle sérieusement, comme il convient ; et dans l’autre, qu’il se joue de son esprit et de son imagination ; enfin qu’il faut lui pardonner sa morale, qui n’est qu’une fantaisie de poète, un jeu d’auteur. […] L’habileté de l’écrivain consiste à sauver cette misère de la langue, par le naturel et l’exactitude de la phrase où ces mots sont employés. […] Le froid imitateur, le plagiaire même d’un grand écrivain peut d’ailleurs n’être ni mauvais mari, ni mauvais père, ni ivrogne, etc., enfin ne faire nul tort à la société, que de l’excéder d’ennui.
Nous trouvons la même remarque dans un grand nombre d’anciens écrivains. […] La premiere, est que les écrivains de l’antiquité qui ont vécu avant Apulée, ne parlent point, autant qu’il m’en souvient, de pieces dramatiques executées par une troupe de comédiens pantomimes. […] Ainsi contentons-nous de citer les écrivains en prose.
C’est là malheureusement un travers assez fréquent chez les écrivains qui aiment à compliquer l’histoire d’un peu de roman. […] La première condition pour un écrivain qui voulait trouver éditeur et lecteurs était de se mettre à la mode anglaise. […] Les écrivains de maintenant et de tout à l’heure, pour parler comme M.
L’écrivain met la Bible au-dessus de l’Univers, l’artiste met l’Univers au-dessus de toutes les Bibles et de toutes les fois. […] Huysmans a pour défenseur des écrivains aussi autorisés que M. […] … La foule, ici, communique avec l’écrivain par le côté de l’âme.
Visiblement, au poète et à l’écrivain, on demande quelque chose de plus que le « papier-journal », comme disait Du Bellay, de leurs impressions personnelles. […] Est-il nécessaire de faire observer maintenant qu’en effet, de quelque côté que l’on tourne les yeux, c’est au même but, prosateurs ou poètes, que nous voyons alors tendre tous les écrivains ? […] Heureux en France les écrivains, pour ne rien dire des hommes politiques, dont un nom de femme est inséparable ! […] Avec sa distinction des sept classes d’écrivains qui peuvent encourir l’accusation d’indécence, il épuisa le sujet, mais on vit clairement qu’il ne l’avait pas du tout entendu. […] C’est une des grandes erreurs que l’écrivain puisse commettre !
Les écrivains français se germanisèrent. […] Gœthe avait, en effet, la faculté la plus basse des écrivains de théâtre. […] Regnard est peut-être le seul écrivain dramatique qui ait pu faire passer à la scène un personnage aussi dégoûtamment odieux qu’un fripon ; Regnard est le seul génie d’un comique assez franc et assez emportant de gaîté pour faire passer au théâtre la coquinerie. […] Nous allons voir à présent s’il est davantage dans l’écrivain lyrique, où le poète — quand il y est — se juge mieux, parce qu’il ne s’inspire que de lui seul, parce que le lyrisme est le cri ou l’épanchement de la personnalité humaine dans sa plus intense énergie, et qu’où il n’est point il n’est pas, poétiquement, de réelle personnalité. […] Le vague sur les hommes et les choses est comme l’atmosphère de sa pensée, et c’est même l’indéfini, l’indéterminé de ce vague qui donne à sa phrase l’apparence de draperie flottante qu’on prend pour de la majesté d’écrivain, comme on prend son parti de s’intéresser petitement à tout et de ne s’émouvoir grandement de rien pour du calme olympien et de la jupitéréenne sérénité.
., etc… Beaucoup d’écrivains d’un réel talent commettent aujourd’hui des fautes de ce genre. […] Et pourtant j’ai aujourd’hui cette impression qu’à aucune époque de notre littérature il ne s’est trouvé, dans les livres d’écrivains encore jeunes, tant de sérieux, d’intelligence, de sagesse, d’observation curieuse, une science déjà si avancée de la vie et des hommes, et tant de compassion, une vue si sereine et si indulgente de la destinée6.
Paul Bourget Après les poésies, après les romans, voici que paraît le Journal d’un poète, ce précieux recueil de pensées intimes, choisies, avec un tact irréprochable, dans les papiers de l’écrivain mort, par M. […] Il dit quelque part, dans son Journal : « Le malheur des écrivains est qu’ils s’embarrassent peu de dire vrai, pourvu qu’ils disent.
Ils sont certainement écrits avec amour, et il est demeuré aux pages un peu de la fièvre sincère et communicative de l’écrivain, malgré la lourdeur unique du style, les gaucheries et les calinotades : M. […] Bourget sans dire quel sentiment de respect autre qu’artistique et presque personnel s’impose pour l’écrivain de cette préface et même de ce roman de moralisme un peu flou… III M.
Nous n’insinuerons pas qu’après s’être exercé dans tous les genres, ce célebre Ecrivain a voulu déprimer le seul Poëte qu’il eût tenté vainement d’imiter, & dont il n’a pas même essayé de suivre la carriere. […] Mais c’est précisément par la variété & le charme inexprimable de son style, que ce Poëte mérite, de l’aveu de tous les gens de goût, d’être placé parmi les Ecrivains du premier ordre.
Un grand nombre d’Ecrivains se sont consumés en comparaisons entre ces deux Poëtes. […] D’un autre côté son attention à ne choisir pour modeles que nos meilleurs Ecrivains, forma dans lui cette diction pure, élégante, correcte, harmonieuse, qui le rend le plus exact & le plus agréable de tous ceux qui ont écrit dans notre Langue.
À propos de « Fécondité1 » Certains écrivains de ce siècle ont eu une ambition profonde. […] C’est que pour faire toute l’œuvre immense des écrivains que j’ai cités, il suffit d’être un grand génie, et que pour prononcer une petite phrase humaine, il faut être une âme profonde.
Voyons, dans cet écrivain, rival des tragiques Grecs & de Corneille pour l’intelligence des passions, une élégance toujours soutenue, une correction admirable, la vérité la plus frappante, point ou presque point de déclamation ; partout le langage du cœur & du sentiment, l’art de la versification avec l’harmonie & les graces de la poësie porté au plus haut dégré. […] On eut l’indignité de substituer aux vers les plus heureux des vers plats & ridicules ; jalousie horrible, partage des ames noires & lâches ; mais jalousie renouvellée depuis en différentes occasions par des écrivains obscurs & forcenés ; jalousie semblable à celle de ces peintres scélérats, dont les mains odieuses défigurèrent les plus beaux morceaux de le Sueur.
Nous sommes persuadé que les grands écrivains ont mis leur histoire dans leurs ouvrages. […] Nous observerons encore que le chantre d’Éden, à l’exemple du chantre de l’Ausonie, est devenu original en s’appropriant des richesses étrangères : l’écrivain original n’est pas celui qui n’imite personne, mais celui que personne ne peut imiter.
C’est, en effet, pour cette Cause sacrée que le XVIe siècle combattit… malheureusement avec toutes armes, mais c’est précisément le fanatisme de cette Cause, — à qui tant d’écrivains ont imputé toutes les horreurs du temps, — c’est ce fanatisme religieux, dont l’indifférence d’un esprit moderne et sans croyance et froidi par l’étude des faits s’est tranquillement détournée, c’est ce fanatisme, qui, lui seul, a pourtant arraché le XVIe siècle à l’outrage mérité du genre humain, et qui l’a sauvé du mépris absolu de l’Histoire ! […] Henri IV n’a pas le fanatisme religieux qui fut la plus honorable passion du XVIe siècle, et pour cette raison, qui n’est pas la seule, du reste, mais qui est la plus puissante, il est peut-être la seule figure de son histoire qui soit entièrement sympathique à Forneron, l’écrivain politique de ce temps, qui, au temps de Henri IV, se serait certainement rangé dans le parti des politiques, qui mirent fin à la guerre civile et tirèrent de la vieille Constitution de la monarchie catholique, qui avait été la monarchie française, une monarchie d’un autre ordre, — la monarchie des temps modernes.
Ce n’est ni un écrivain ni un penseur. […] Il s’agit enfin de s’opposer une fois pour toutes à cette irruption d’écrivains qui, sans la vocation du talent et le droit de l’intelligence, touchent à un sujet historique réservé à la main des Maîtres.
… Eh bien, cette plaisanterie, qui est, en fin de compte, tout le livre, cette plaisanterie qui pourrait être originale et appartenir au tour d’esprit de l’écrivain, cette plaisanterie qui n’est pas française, puisqu’elle n’est pas gaie, il me semble que j’en connais l’accent, et qu’ailleurs je l’ai entendue ! […] Ce genre de raillerie qui touche au froid par son énormité même, ces hoax à la Swift, débités avec l’impassibilité et le sérieux d’un Anglais convaincu, et qu’écrit Rochefort dans une phrase qui ressemble à un visage où pas un muscle ne bouge, donnent toute la manière habituelle au spirituel écrivain ; mais, anglaise.
Si Junius, ce masque de fer épistolaire de la littérature anglaise, cet impatientant inconnu, qui avait pour devise les mots latins : Nominis umbra, n’était pas un magnifique écrivain politique ; si, par le talent à la changeante physionomie, il n’avait pas désespéré l’hypothèse, et fait dire tour à tour : « Serait-ce Burke ? […] Un traducteur comme Dieu ne devrait en envoyer qu’aux grands inventeurs et aux grands écrivains tire le livre de son obscurité.
L’enthousiasme n’est par un état d’âme d’écrivain. […] Ecrivain, il doit considérer l’architecture du même regard jaloux, inquiet et admiratif dont Mallarmé considérait la musique. […] Elle s’est flattée souvent, elle a coutume encore de se flatter, d’être utile aux écrivains, de les avertir sur eux-mêmes, de les faire mieux comprendre au public, et les écrivains, la prenant au mot, exigent que les critiques deviennent, comme disait Brunetière, les annonciers de la littérature. Mais il faut tenir compte aussi d’une critique beaucoup plus égoïste, d’une critique qui se soucie peu de servir aux écrivains, mais beaucoup de se servir d’eux. Le monde des écrivains est à la critique ce que le monde des personnages de la vie réelle est au romancier.
On voudrait seulement plus de rapidité dans l’ensemble du discours, et hâter par moments la marche de l’écrivain circonspect, qui ne fait grâce d’aucun des préparatifs et des appareils de sa pensée. […] Fauriel l’encourageait avec autorité et par d’illustres exemples empruntés à l’Italie même, dont les grands écrivains avaient eu de tout temps à triompher de difficultés plus ou moins semblables. […] Il manque complétement à ce pauvre écrivain ce sentiment, pour ainsi dire, de communion avec son lecteur, cette certitude de manier un instrument également connu de tous les deux. […] L’Italie avait toujours eu ses grands écrivains ; comment serait-il dit qu’elle n’en aurait pas encore ? […] Dans cette incertitude, que faire, quand on a la noble ambition d’être écrivain ?
C’est à cette conscience d’écrivain que nous devons le bloc énorme de détails curieux et effroyables qui forment le volume que nous venons de lire. […] Edmond Lepelletier est un écrivain de grand talent, mais aussi un romancier qui possède un rare don : l’intérêt. […] Le philosophe et le grand écrivain y est jugé et par sa vie et par ses œuvres. […] Daudet a voulu qu’on ne crût pas qu’il avait grandi du sien le talent de l’écrivain qu’il a découvert. […] Barrès n’intéresse plus seulement des écrivains d’une petite église, mais tous ceux qui lisent et suivent l’éclosion et la montée des idées.
Une réaction en sens contraire a fait ensuite de lui un écrivain de génie et un penseur de premier plan. […] D’abord, un écrivain se perfectionne lui-même, ou il ne se perfectionne pas du tout. […] Que des écrivains aient traité en écrivain ce façonnier d’ordures de même forme, de même trempe, et souvent (comble d’horreur !) […] L’intelligence, c’est la lumière de l’écrivain. […] S’il est arrivé à l’Académie française d’accueillir des écrivains expressifs au cours du siècle précédent, ce fut ou par inattention momentanée, ou parce que ces écrivains avaient forcé la porte du succès.
Tel doit être par lui-même, et sans le secours de cette bonne fortune, l’écrivain classique. […] On voit assez quels dons extraordinaires à la fois de force et de souplesse il faut à un écrivain pour avoir quelque chance de devenir un écrivain classique. […] On a beaucoup ri des formules de La Harpe : « Écrivain de premier rang dans un genre de second ordre ; écrivain secondaire dans un genre supérieur ; écrivain supérieur dans un genre secondaire, etc. » L’erreur ici est, en effet, de se perdre dans des classifications minutieuses ; mais le fond des choses est vrai, et il faut tenir compte de la hiérarchie des genres, surtout à une époque où le mépris, sincère ou concerté, de cette hiérarchie a souvent servi d’excuse aux demi-talents. […] Brunetière, très souvent exposée par lui, et qui vise le degré de personnalité ou d’impersonnalité que l’écrivain met dans son œuvre. […] Prenez Sarcey. — Mais… — Il n’est pas si bon écrivain que moi, mais il est bien meilleur journaliste. » Et c’était vrai.