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917. (1875) Premiers lundis. Tome III « De la loi sur la presse »

Il n’est pas bon de recourir, comme on le fait trop souvent, à ces armes législatives de ce que j’appelle les mauvais temps de la Restauration et qui lui ont si peu réussi. […] Aux yeux du moraliste, cet article inscrit dans une loi paraîtra un jour bien digne d’une époque où ceux qui respectent le moins la règle des mœurs, qui sont les plus habitués à manquer aux devoirs de la famille, à préférer constamment la mauvaise compagnie à la bonne, à violer les convenances et à friser le scandale, qui semblent même les plus disposés par moments à s’en faire gloire avec fatuité, sont en même temps les plus jaloux d’être soustraits à la médisance publique et se montrent les plus offensés si la chronique les effleure. […] Par quantité de règlements qui ne sont pas tous mauvais ni inutiles, et qui sont même, quelques-uns, d’une bonne police, la France, la nouvelle France, s’est vue réduite et rangée à un régime quotidien où ne s’était jamais vue la vieille France, celle de nos grands-pères ; à bien des égards elle a été mise en classe, et il n’est pas impossible qu’elle s’accoutume à y rester.

918. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXIXe entretien. Œuvres diverses de M. de Marcellus (2e partie) » pp. 5-63

M. de Chateaubriand avait une grande âme, une imagination splendide, un accent antique, une conscience d’apparat et un mauvais caractère. […] Disons franchement le mot, c’est mauvais en masse, souvent beau en détail ; cela n’honore pas M. de Chateaubriand, et cela déshonore autant qu’il le peut tout son siècle. Eh bien, ce livre, mauvais de forme, même de fond, a servi de texte à un excellent livre.

919. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre IV. Racine »

Étudiez Phèdre, la grande passionnée : amour, pudeur, espoir, honte, remords, jalousie, repentir, il n’y a rien, dans ce rôle si riche, qui soit donné simplement comme modification sentimentale de l’être intime ; tout est évalué comme quantité d’énergie, produisant un certain travail, pour éloigner ou approcher tour à tour le personnage d’une action irréparablement bonne ou mauvaise. […] A côté d’elle, Néron, une âme mauvaise, égoïste, vaniteuse, lâche, en qui l’amour est une fureur sensuelle, un transport de l’imagination, sans tendresse, sans estime, sans pitié : il va à son premier crime, poussé par son instinct, fouetté par la jalousie, retenu par ses peurs, peur de sa mère, peur de son gouverneur, peur des mille voix du peuple, enlevé enfin par l’aigreur de sa vanité, sans étonnement après le crime, et d’une belle impudence, mais affolé soudain d’une peur toute physique, dans la détente de ses nerfs après l’action, et déprimé de voir la femme pour qui il avait fait le coup, lui échapper. […] Isaac de Benserade (1612-1691) débuta par de mauvaises tragédies.

920. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre I — Chapitre premier »

Qui ne sent à première vue combien l’espèce de relâchement dans lequel nous vivons, par des causes qui ne sont pas toutes mauvaises, rend nécessaire une ferme croyance sur ce point ? […] Vous n’appellerez pas l’esprit français, l’esprit de certaines époques où soit à la suite de conquêtes, soit par les fautes d’un mauvais gouvernement, la France a copié, avec l’ardeur qui lui est propre, tantôt les défauts du peuple conquis, tantôt ceux de la nation étrangère dont elle subissait l’influence. […] Notre royauté était à demi espagnole triste époque où, en expiation d’une mauvaise politique, l’emphase castillane et le faux bel esprit de l’école de Gongora ont gâté tous les écrits de la fin du seizième siècle et du commencement du dix-septième.

921. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre quinzième. »

Où la plupart des esprits ne voient que les mauvais côtés, soit manque d’élévation, soit envie, il voit les bons, et son admiration n’est que la forte impression qu’il en reçoit. […] Je préfère pourtant, même à cette brièveté sublime, la fougue du pinceau de Saint-Simon ; cette abondance négligée qui n’est jamais vaine ; ces portraits qui peignent et qui racontent, qui nous montrent la physionomie des gens, le tour de leur visage et jusqu’à leur démarche, et qui nous introduisent dans leur vie cachée ; cette succession, sur la même toile, des qualités et des défauts, se suivant, se démentant, comme dans la vie réelle ; enfin ce pêle-mêle de la peinture et du récit, dans lequel surnage le trait principal du héros, le trait qui domine toutes les contradictions de son caractère et de son humeur, et qui est comme le mot de sa bonne ou de sa mauvaise renommée. […] Grand enseignement d’ailleurs pour les gouvernements, qu’un pays si fécond encore après avoir tant produit, et où la décadence ne venait que du mauvais emploi de forces inépuisables.

922. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 janvier 1886. »

Endormez-vous, les mauvais rêves, abimés Dans l’éveil évoquant la Vision jolie : L’Oiseau chante, la Gloire enivre, l’Ame oublie ; Et le Joyeux Orgueil s’épand aux bleus sommets ! […] VIII Ainsi le morne Dieu connaissant la Fin proche, Entrevoyant la fin des grands Ors superflus, S’acheminait vers les achèvements voulus ; — Ainsi Tristan criait au Jour son long reproche, Et son désir au Jour mauvais plus ne s’accroche, Aspiration à des hymens absolus ; — Ainsi le Pur, en qui les Mondes ne sont plus, Planait, extatique Colombe, sur la Roche… Ô mépriseur, nieur serein, ô attesté Blasphémateur de l’Ordinaire, en l’Unité Vivant, ô découvreur des réels récifs, Mage, — À nous, ainsi, l’esprit hautain et le pervers Génie, ainsi le rêve et la non-vaine image Et l’idée où se meut l’autre et l’autre univers ! […] Nous avons une foule de petits concerts bons, mauvais, et médiocres mais on ne veut entendre vers Noël presque rien que le Messie ou les nouvelles cantates produites à Birmingham.

923. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — V. — article » pp. 457-512

Examinons avec quels succès, en défiant quiconque d'oser nous taxer avec fondement de méconnoître ce qu'il y a de bon dans cet Ecrivain, ou d'outrer la censure contre ce qu'il y a de mauvais. […] Qu’on ne s’imagine pas que nous voulions faire entendre par-là, que sa Prose soit mauvaise ou inférieure à sa Poésie : ce seroit être absurde, que de méconnoître dans le Prosateur les mêmes qualités qui brillent dans le Poëte. […] Ils conviennent que parmi les Ouvrages de M. de Voltaire, il y en a quelques-uns d’excellens ; mais ils soutiennent [on commence à les croire, & on les croira de plus en plus] qu’il y en a beaucoup de médiocres & un grand nombre de mauvais : que le talent de saisir les rapports éloignés des idées, de les faire contraster, semble lui être particulier ; mais qu'il y met trop d'affectation, & que les productions de l'art sont sujettes à périr : qu'il n'a que l'éloquence qui consiste dans l'arrangement des mots, dans leur propriété, & non celle qui tire sa force des pensées & des sentimens, qui est la véritable : qu'il n'a aucun systême suivi, & n'a écrit que selon les circonstances, & presque jamais d'après lui-même : que le plus grand nombre de ses Ouvrages ne sont faits que pour son Siecle, & que par conséquent la Postérité n'en admettra que très-peu : que si la gloire du génie n'appartient qu'à ceux qui ont porté un genre à sa perfection, il est déjà décidé qu'il ne l'obtiendra jamais, parce qu'il ressemble à ce fameux Athlete, dont parle Xénophon, habile dans tous les exercices, & inférieur à chacun de ceux qui n'excelloient que dans un seul : que son esprit est étendu, mais peu solide ; sa lecture très-variée, mais peu réfléchie ; son imagination brillante, mais plus propre à peindre qu'à créer : qu'il a trop souvent traité sur le même ton le Sacré & le Profane, la Fable & l'Histoire, le Sérieux & le Burlesque, le Morale & le Polémique ; ce qui prouve la stérilité de sa maniere, & plus encore le défaut de ce jugement qui sait proportionner les couleurs au sujet : qu'il néglige trop dans ses Vers, ainsi que dans sa Prose, l'analogie des idées & le fil imperceptible qui doit les unir : que ses grands Vers tomdent un à un, ou deux à deux, & qu'il n'est pas difficile d'en composer de brillans & de sonores, quand on les fait isolés : enfin, que la révolution qu'il a tentée d'opérer dans les Lettres, dans les idées & dans les mœurs, n'aura jamais son entier accomplissement, parce que les Littérateurs qu'il égare, & les Disciples qu'il abuse, en les amusant, peuvent bien ressembler à Charles VII, à qui Lahire disoit, On ne peut perdre plus gaiement un Royaume ; mais qu'il s'en trouvera parmi eux, qui, comme ce Prince, ouvriront les yeux, chasseront l'Usurpateur, & rétabliront l'ordre.

924. (1863) Le réalisme épique dans le roman pp. 840-860

N’est-elle pas victime, la pauvre femme, de sa curiosité d’Ève, de ses instincts d’élégance, de ses aspirations continuelles à des sphères plus élevées, de la vulgarité immorale et niaise de son mari, de la stupidité du prêtre à qui elle demande secours contre ses mauvais penchants ? […] Quant à l’impression dernière qui résulte de cette lecture, en vérité, tout en condamnant le déplorable système de l’auteur, on ne saurait dire qu’elle soit mauvaise. […] À écrire une œuvre sans âme, à peindre des scènes atroces, à se complaire dans la splendeur de l’horrible, à mêler ensemble le sang et la volupté, comme s’il y avait chez lui un penchant mauvais, — disons le mot, le mot terrible, puisqu’un des maîtres de la critique n’a pas craint de le prononcer à voix haute, — comme s’il y avait chez ce peintre des choses corrompues un coin d’imagination sadique.

925. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre XII, les sept chefs devant Thèbes. »

— « Je ne vous blâme point d’honorer les dieux, mais n’empêchez pas les citoyens de courir aux armes par vos cris de mauvais augure. » — Et il leur dicte une vaillante prière, pareille à celles que les grands preux de l’Iliade lancent à pleine poitrine vers le ciel, dans l’anxiété du combat. — « Aux Dieux de la ville, aux Dieux du pays, aux Dieux des champs et de l’Agora, je jure, si la victoire est à nous, si Thèbes est sauvée, d’égorger des brebis sur leurs autels, de leur sacrifier des taureaux, et de consacrer en trophée, dans leurs demeures divines, les armures et les dépouilles prises à l’ennemi !  […] Quelles exécrations il lance contre cette ville et quels mauvais sorts ! […] Sa chevelure s’envole vers le ciel, son sang pleut sur la terre, ses jambes et ses bras tournent comme les rayons de la roue d’Ixion, et le tronc calciné retombe sur le sol. » Chose étrange, Capanée n’avait pas laissé un mauvais renom dans l’antiquité.

926. (1899) Esthétique de la langue française « La métaphore  »

Ces rapprochements paraîtront moins invraisemblables lorsqu’on saura que les idées de beau, de blanc, de doux sont, dans la tradition populaire, les antiphrases naturelles de l’idée de mauvais. En Roumanie, les malae divae, les mauvaises fées, les Ièlé, ne sont jamais appelées que les Bonnes, les Puissantes, les Belles, les Blanches, les Douces 169. […] Mais pour le fourmi-lion, aucun doute n’est possible, puisque ce mot n’est que le résultat d’une trop bonne prononciation de l’l mouillée ou d’une mauvaise lecture du mot latin.

927. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XIX. M. Cousin » pp. 427-462

Amas d’épithètes, mauvaise louange ! […] Il n’aurait pas écrit l’histoire des mauvaises mœurs d’une plume si légère qu’on dirait qu’il ne s’en doute pas et qu’il est voué au blanc de la plus singulière innocence ! […] Il fallait, puisqu’on l’osait, — puisqu’on ne laissait pas dans leur oubli et dans leur tombe les cadavres qui sentent mauvais, — boire fièrement et courageusement toute honte, être spirituel, mordant, de bonne humeur, chaud de peinture et écrire à la cardinal de Retz l’histoire plus détaillée que la sienne de cette Amazone de l’intrigue qui s’affuble de la casaque d’un mousquetaire non pour charger, mais pour s’enfuir, et qui dit (mais pour l’héroïque M. 

928. (1879) L’esthétique naturaliste. Article de la Revue des deux mondes pp. 415-432

Le ridicule des déclamations retentissantes, des tirades à effet, des grands sentiments étalés à faux, nous le connaissons depuis longtemps, il n’est personne qui ne s’en moque aujourd’hui ; et si l’on veut chercher qui a tué le mauvais romantisme, ce n’est pas à nos novateurs littéraires qu’en revient l’honneur : c’est l’opérette qui a fait cette besogne salutaire. […] Edmond de Goncourt s’est même du coup frappé quelque peu la poitrine : il est convenu que si son frère et lui avaient donné le mauvais exemple qu’on avait trop suivi et commencé par écrire Germinie Lacerteux, c’est qu’ils avaient succombé à la tentation de traiter d’abord les « sujets faciles ». […] On leur montre des filles de trottoir, des mauvais lieux, des ouvriers ignobles et des souteneurs.

929. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre VI. Milton. » pp. 411-519

Un peu plus haut, celui-ci posait ce dilemme : « Dites-moi, cette liturgie est-elle bonne ou mauvaise ? —  Elle est mauvaise. […] Ô soyez les bienvenues, Foi aux regards purs, Espérance aux blanches mains, —  ange, qui voles au-dessus de ma tête, ceint de tes ailes d’or, —  et toi, Chasteté sainte, forme sans tache, —  je vous vois clairement, et maintenant je crois — que lui, le Bien suprême, qui ne souffre les êtres mauvais — que pour faire d’eux les serviles ministres de sa vengeance, —  enverrait un ange lumineux, s’il le fallait — pour garder ma vie et mon honneur contre tout assaut. —  Me trompé-je ? […] Cette nuit, par exemple, la pauvrette a fait un mauvais rêve, et Adam, en bonnet carré, lui administre cette docte potion psychologique508 : « Sache que dans l’âme il y a beaucoup de facultés inférieures qui servent la Raison comme leur souveraine. […] Il s’agit d’une loi qui a de mauvais effets, et sur laquelle il veut justifier son gouvernement.

930. (1910) Muses d’aujourd’hui. Essai de physiologie poétique

Voici quelques pincées de cette cendre, encore chaude : Les yeux, les yeux, ne plus se souvenir des yeux, Les yeux qu’on a aimés, mauvais comme des pierres ! […] Puisqu’il est, paraît-il, urgent et nécessaire De revoir le mauvais rayon d’un mauvais jour Et de voir s’échapper l’espoir d’un bel amour,       Que bientôt nos draps blancs se changent en suaire ! […] Les écrivains les plus aimés du public le furent par ce qu’ils avaient de plus mauvais en eux, par ce qu’ils détestaient le plus en eux. […] Et on devine déjà que cette prédilection pour Werther lui jouera un mauvais tour. […] Donc il est mauvais, à tous les points de vue.

931. (1891) Politiques et moralistes du dix-neuvième siècle. Première série

Un gouvernement arbitraire n’est pas un mauvais gouvernement, c’est l’absence de gouvernement. […] Qu’il fût bon ou mauvais que cette personnalité existât, c’est là qu’est la question. […] Mais il n’eût pas été mauvais pourtant qu’il connût davantage, en son détail, la doctrine qu’il combattait. […] Chantez votre Dieu. » Ils n’ont point beaucoup pris cette habitude ; mais ils en ont perdu de mauvaises. […] On sent bien que ce qu’il a d’inférieur est assez mauvais, et que ce qu’il a de bon n’a rien de sublime.

932. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XII » pp. 47-52

 » — « Il paraît décidément, dit Hugo, que c’est du mauvais Saint-Félix.

933. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Troisième partie. Disposition — Chapitre III. Du meilleur plan. — Du plan idéal et du plan nécessaire. »

À Paris, écouté d’une assemblée de riches, de grands seigneurs, de courtisans, il étonne, il menace : il prédit les tortures sans fin du mauvais riche.

934. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Stéphane Mallarmé »

Il ne serait peut-être pas mauvais de la rétablir d’abord.

935. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — G — Giraud, Albert (1848-1910) »

En tout cas, cela lui vaut de n’avoir aucun mauvais volume de vers à son actif.

936. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » pp. 512-518

Nous ne saurions trop le répéter ; il est avantageux, & même nécessaire au maintien de la République des Lettres, qu’il s’éleve de temps en temps des esprits assez éclairés pour connoître les regles du bon goût, assez habiles pour démêler les usurpations du mauvais, & assez fermes pour en arrêter les progrès.

937. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préface de « Marie Tudor » (1833) »

Demain il quittera l’œuvre faite pour l’œuvre à faire ; il sortira de cette foule pour rentrer dans sa solitude ; solitude profonde, où ne parvient aucune mauvaise influence du monde extérieur, où la jeunesse, son amie, vient quelquefois lui serrer la main, où il est seul avec sa pensée, son indépendance et sa volonté.

938. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre troisième. »

Ce que je vous dis-là, on le dit à bien d’autres : La Fontaine, avec sa délicatesse ordinaire, indique les traitans d’alors, tourne court bien vite, comme s’il se tirait d’un mauvais pas.

939. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre XVI. Des Livres nécessaires pour connoître sa Religion. » pp. 346-352

Les Œuvres spirituelles de Fénelon, sont le fruit d’une belle ame & d’un cœur sensible qui aime & qui fait aimer la vertu ; mais il y a une petite teinture de quiétisme, qui pourroit produire de mauvais effets sur les esprits foibles.

940. (1763) Salon de 1763 « Peintures — Carle Vanloo » pp. 183-186

C’est le mauvais effet de couleurs qui tranchent, et ne participent point les unes des autres.

941. (1763) Salon de 1763 « Peintures — Restout » pp. 187-190

Le fond du salon est percé de niches qui font sans doute un bel effet en peinture, mais qui en font un mauvais en gravure, parce qu’on n’y distingue pas assez les statues qui les remplissent, des personnages intéressés à la scène.

942. (1763) Salon de 1763 « Peintures — Vernet » pp. 227-230

Il y a à Avignon un certain Balechou, assez mauvais sujet, qui court la même carrière qu’eux, et qui les écrase.

943. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 17, s’il est à propos de mettre de l’amour dans les tragedies » pp. 124-131

Racine a mis plus d’amour dans ses pieces que Corneille, et la plûpart de ceux qui sont venus depuis Racine, trouvant qu’il étoit plus facile de l’imiter par ses endroits foibles que par les autres, ont encore été plus loin que lui dans la mauvaise route.

944. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « XII »

Je m’avise même qu’il emprunte, en oubliant de me citer, quelques-uns de mes paragraphes, qui ne font point mauvaise figure dans sa prose.‌

945. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « XVII »

. — Les mauvais clichés. — L’usage des clichés.

946. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Madame de La Fayette ; Frédéric Soulié »

Il avait jusque dans le plus mauvais de son talent, laborieux et déréglé, comme dans son caractère, quelque chose de magnanime, et pourtant il ne sera point compté parmi les grands artistes ; car qui n’a pas de style doit périr.

947. (1908) Promenades philosophiques. Deuxième série

C’est très beau une machine à vapeur, mais, dans l’échelle des œuvres de génie, ce n’est pas plus beau que cette lame de mauvais fer que martèle un homme nu avec un mauvais marteau de bronze. […] Les villes sont à ce point de vue de mauvaises écoles philosophiques. […] La loi cessera de donner le mauvais exemple aux assassins. […] Ce n’est plus une vision qui nous annonce une nouvelle lointaine, généralement mauvaise. […] Mauvais signe vital, quand ces réveils mornes deviennent fréquents.

948. (1893) Des réputations littéraires. Essais de morale et d’histoire. Première série

Ou l’on n’en ferait plus, ou l’on n’en ferait que de bien mauvais. […] Je tâche aussi de m’expliquer à moi-même et à mes semblables ; car je n’ai de moi une opinion ni assez mauvaise ni assez vaine pour me croire une exception morale à mon époque parmi les gens de lettres. […] Cependant La Fontaine a écrit quelques mauvaises fables, mais si peu ! […] La postérité, à la fois très affairée et très paresseuse, n’a de temps à donner ni aux jolies bagatelles ni aux trésors obscurément enfouis sous l’amas du mauvais langage. […] Garnier, Hardy, Rotrou, Mairet, sont de mauvaises épreuves de Corneille.

949. (1896) Impressions de théâtre. Neuvième série

Au moment où Ion va boire, « un des serviteurs prononce une parole de mauvais augure ». […] Et, en même temps, un mouvement populaire renverse du trône le mauvais roi Palaka. […] — C’est d’être puissant comme vous. — Et celle des mauvaises ? […] Cela offusque par une mauvaise économie, une espèce de gaspillage des « moyens » dramatiques. […] Va-t-il en accueillir les mauvaises tentations et glisser à l’affreuse vie d’un Vaneuse ?

950. (1825) Racine et Shaskpeare, n° II pp. -103

Molière, dans le Misanthrope, a cent fois plus de génie que qui que ce soit ; mais Alceste n’osant pas dire au marquis Oronte que son sonnet est mauvais, dans un siècle où le Miroir critique librement le Voyage à Coblentz, présente à ce géant si redoutable et pourtant si Cassandre, nommé Public, précisément le portrait détaillé d’une chose qu’il n’a jamais vue et qu’il ne verra plus. […] Je ne demande pas, monsieur, que l’on dise que mon idée est juste, mais je désire qu’on veuille bien avouer que bonne ou mauvaise on la comprend. […] On s’étonnerait de votre courage ; mais ce serait un pauvre succès pour votre esprit ; car, dès qu’il y a censure dans un pays, la plus mauvaise plaisanterie contre le pouvoir réussit. […] Tout opéra nouveau, quelque mauvais qu’il soit, se donne trois fois, c’est le droit du maestro, vous dit-on. […] non seulement elle siffle ce qui lui semble mauvais, rien de plus juste ; mais elle empêche les spectateurs, qui s’amusent de ce qui lui semble mauvais, de jouir de leur plaisir.

951. (1896) Journal des Goncourt. Tome IX (1892-1895 et index général) « Année 1892 » pp. 3-94

Mercredi 3 février Ce soir, chez la princesse, mauvaises nouvelles de Maupassant. […] Mercredi 15 juillet De mauvais jours, vendredi dernier et aujourd’hui, des jours de colique hépatique. […] Flore, sa vieille femme de chambre, qui avait sur le nez un pois chiche, paraissant sautiller, quand les choses allaient mal à la maison, me disait que sa maîtresse avait passé une mauvaise nuit. […] Ni Méténier. ni Paul Alexis ne sont arrivés, et cependant il faut un rien adoucir la transformation coquine de la femme, au quatrième acte, et surtout modifier la fin du troisième qui est mauvaise, et que les journalistes doivent emboîter, pour ne pas paraître seulement siffler l’acte du journal. […] Koning, je le trouve étonné, presque stupéfait de cet insuccès, et l’attribuant seulement à la mauvaise presse.

952. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre IV. Des Livres nécessaires pour l’étude de l’Histoire. » pp. 87-211

Cet ouvrage est aussi défectueux par les fables dont il est rempli, par le défaut de critique, par le mauvais choix des matériaux, que dégoutant par la bassesse & l’incorrection du style. […] On a dit qu’il n’en étoit que plus propre à corriger l’ouvrage d’un Compilateur ; mais c’est une mauvaise plaisanterie qui ne doit pas diminuer l’estime qu’on doit avoir pour l’ouvrage de ce sçavant Bénédictin qui écrit avec beaucoup d’exactitude, de netteté & de simplicité. […] La version françoise que d’Ablancourt a donné de son histoire, est la moins mauvaise que nous ayions. […] Il a l’air trop chagrin contre sa patrie & trop mauvaise opinion des hommes ; son style est peut-être plus dur que fort, & sa briéveté lui ôte un peu de sa clarté. […] Son style est fort mauvais, quoique l’auteur passât pour avoir beaucoup d’esprit ; mais ses mémoires sont instructifs pour les courtisans & les philosophes.

953. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre premier. La structure de la société. — Chapitre III. Services locaux que doivent les privilégiés. »

Voyant son canton stérile et ses colons paresseux, il les enrégimente, hommes, femmes, enfants, et, par les plus mauvais temps, lui-même à leur tête, avec ses vingt-sept blessures, le col soutenu par une pièce d’argent, il les fait travailler en les payant, défricher des terres qu’il leur donne à bail pour cent ans, enclore d’énormes murs et planter d’oliviers une montagne de roches. « Nul n’eût pu, sous aucun prétexte, se dispenser de travailler qu’il ne fût malade, et en ce cas secouru, ou occupé à travailler sur son propre bien, article sur lequel mon père ne se laissait pas tromper, et nul ne l’eût osé. » Ce sont là les derniers troncs de la vieille souche, noueux, sauvages, mais capables de fournir des abris. […] Ils adoucissent, ils tempèrent les poursuites parfois trop rigoureuses des fermiers, des régisseurs, des gens d’affaires54. » — Une Anglaise qui les voit en Provence au sortir de la Révolution dit que, détestés à Aix, ils sont très aimés sur leurs terres. « Tandis que devant les premiers bourgeois ils passent la tête haute, avec un air de dédain, ils saluent les paysans avec une courtoisie et une affabilité extrêmes. » Un d’eux distribue aux femmes, enfants, vieillards de son domaine de la laine et du chanvre pour filer pendant la mauvaise saison, et, à la fin de l’année, il donne un prix de cent livres aux deux meilleures pièces de toile. […] Dans vingt villages circonvoisins d’Oisy où il chasse, c’est à cheval et à travers les récoltes. « Ses gardes toujours armés ont tué plusieurs personnes, sous prétexte de veiller à la conservation des droits de leur maître… Le gibier, qui excède de beaucoup celui des capitaineries royales, mange chaque année l’espoir de la récolte, vingt mille razières de blé et autant d’autres grains. » Dans le bailliage d’Évreux, « le gibier vient tout détruire jusqu’au pied des maisons… À cause du gibier, le citoyen n’est pas même libre dans le cours de l’été d’aller retirer les mauvaises herbes qui étouffent le grain et qui gâtent les semences… Combien de femmes restées sans mari et d’enfants sans père pour un malheureux lièvre ou lapin !  […] Les trente ou quarante braconniers qu’ils poursuivent aujourd’hui sur leurs terres marcheront demain contre leur château à la tête de l’émeute. — Absence des maîtres, apathie des provinces, mauvais état des cultures, exactions des fermiers, corruption des justices, vexations des capitaineries, oisiveté, dettes et exigences du seigneur, abandon, misère, sauvagerie et hostilité des vassaux, tout cela vient de la même cause et aboutit au même effet.

954. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLIIIe entretien. Vie et œuvres du comte de Maistre (2e partie) » pp. 5-80

D’un autre côté, nul être intelligent ne peut aimer le mal naturellement ou en vertu de son essence : il faudrait pour cela que Dieu l’eût créé mauvais, ce qui est impossible. […] Il y a un mauvais symptôme de gloire ; ce mauvais symptôme, c’est l’engouement. […] (Ici un mauvais quolibet que nous rougirions de reproduire.)

955. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLVIIe entretien. Littérature latine. Horace (1re partie) » pp. 337-410

Ils ne se ressemblent que par leurs mauvais côtés, le côté immoral et le côté licencieux. […] S’il avait étudié plus profondément la nature des choses, il aurait compris pourquoi le succès est presque toujours ici-bas du côté des mauvaises causes : c’est que le nombre fait le succès, et que, le plus grand nombre des hommes étant ignorant ou pervers, il est toujours facile aux méchants de trouver des complices et d’écraser la justice, la vérité ou la vertu sous le nombre. […] Virgile se joignait quelquefois à ce triumvirat ; il accompagnait Horace et Mécène dans leur voyage d’été sur les belles côtes de Tarente ; mais sa mauvaise santé et la réserve de ses mœurs à l’égard des courtisanes (quoique moins pures qu’on ne les représente sous d’autres rapports) le rendaient un convive moins agréable dans les festins et un poète moins recherché des femmes de cette cour. […] Les repas qu’il donnait à ses amis étaient de la plus extrême simplicité ; il les égayait seulement pour ses convives d’un peu de musique. » Horace, informé par Mécène de ce désir d’Auguste, qui eût été pour tout autre un ordre, s’excusa sur sa mauvaise santé, préférant son indépendance à une fortune tardive et inutile à son bonheur.

956. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CVIIe entretien. Balzac et ses œuvres (2e partie) » pp. 353-431

Vous verrez un marchand de merrain assis à sa porte, et qui tourne ses pouces en causant avec un voisin : il ne possède en apparence que de mauvaises planches à bouteilles et deux ou trois paquets de lattes ; mais sur le port son chantier plein fournit tous les tonneliers de l’Anjou ; il sait, à une planche près, combien il peut de tonneaux si la récolte est bonne ; un coup de soleil l’enrichit, un temps de pluie le ruine : en une seule matinée, les poinçons valent onze francs ou tombent à six livres. […] Pour une fille des champs qui dans sa jeunesse n’avait récolté que de mauvais traitements, pour une pauvresse recueillie par charité, le rire équivoque du père Grandet était un vrai rayon de soleil. […] « — Cette affaire doit être mauvaise, si vous ne pouvez pas la dire à votre père, mademoiselle Grandet. […] mauvaise graine, tu sais bien que je t’aime, et tu en abuses.

957. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « VI »

Le Rheingold : l’artiste a été ému de ce fait moral, la lutte dans l’âme entre le désir des apparences et le désir du bien véritable, la contamination par le désir mauvais en l’attente dès lors de la rédemption dernière. […] Gœtterdæmmerung écrite en la pleine tempête de l’édification du théâtre de Bayreuth, est l’essor d’un génie las de compromis, las de mauvaises luttes, las de se contrarier, las des obstacles, las d’être autre chose que le pur musicien qu’il devait être, et las par les matérielles batailles presque autant que par les intellectuelles ; c’est l’essor d’une âme qui se libère au dehors des contingences vers l’absolu natal de son art. […] Le second acte : — Maléfices psychologiques, crie le prélude ; le désir qui tout-à-l’heure criait dans la concupiscence et la contrition crie maintenant dans la seule concupiscence et vers de mauvais accomplissements ; cependant que se débat l’âme possédée sous le démon de son désir. […] j’ai erré, et vois que j’erre. — Voici le printemps des renaissances ; tes larmes ont été rosée : je t’apporte le baptême des mauvais désirs effacés, et le sacre des bons désirs offerts, et le baiser des vrais désirs en leur exaucement ; et : en un recueillement bien heureux béatifie-toi.

958. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre neuvième. Les idées philosophiques et sociales dans la poésie (suite). Les successeurs d’Hugo »

 » Il s’accomplit tout seul, artiste, œuvre et modèle ; Ni petit, ni mauvais, il n’est ni grand, ni bon. […] Pour toi qui fais servir chaque être à tous les autres, Rien n’est bon, ni mauvais, tout est rationnel… Ne mesurant jamais sur ma fortune infime Ni le bien, ni le mal, dans mon étroit sentier J’irai calme, et je voue, atome dans l’abîme, Mon humble part de force à ton chef-d’œuvre entier. […] Et c’est du sein même de l’homme que naîtra l’idée de la justice, et cette idée détrônera celle de Dieu, de l’être prétendu parfait et bon dont l’œuvre est imparfaite et mauvaise. […] Dans Une mauvaise soirée, la pensée s’élève à des considérations morales et sociales.

959. (1857) Cours familier de littérature. III « XVIIIe entretien. Littérature légère. Alfred de Musset » pp. 409-488

Tout le monde se croyait capable d’écrire des Haïdé, parce qu’on se sentait très capable de rimer en français les prosaïques obscénités et les grossières plaisanteries de cette longue et mauvaise rapsodie du poète anglais. […] Don Juan, en un mot, c’est l’étourdi blasé de l’univers, c’est le mauvais sujet de l’espèce humaine, c’est le vice séduit et séduisant, éprouvant quelquefois la passion, la jouant plus souvent par caprice et la finissant toujours par un éclat de rire. […] Tour à tour libéral, monarchiste, allemand, français, radical, napoléoniste, orléaniste, républicain, communiste, blasphémant la société quand elle règne, sapant le trône quand il est debout, impréquant la république quand elle sort pour un jour de ses propres vœux, cynique d’impiété quand il s’amuse, dévot quand il souffre, ambigu quand il meurt, indéchiffrable partout, ce n’est pas un homme, c’est une plume, ou plutôt c’est une griffe, mais c’est la griffe d’un aigle de ténèbres, d’un singe de l’enfer amuseur des mauvais esprits : cette griffe égratigne jusqu’au sang tout ce qu’elle touche et elle brûle tout ce qu’elle a égratigné. […] Mon livre cette fois se ferme moins gaiement ; En vérité, ce siècle est un mauvais moment.

960. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « III. M. Michelet » pp. 47-96

Malheureusement ces deux mots expriment deux choses bonnes partout ailleurs, mais mauvaises, détestables en histoire. […] Michelet, non pas un historien correct et sérieux, mais un prestigieux dessinateur d’arabesques historiques, qu’on est tenté de lui pardonner les passions mauvaises qui viennent incessamment enrouler leurs têtes de couleuvres autour de ces merveilleuses arabesques, dont elles compromettent l’innocence. […] Grâce à ce livre qui parlait aux plus mauvaises et aux plus ignorantes passions d’une époque viciée, il recruta autour de sa chaire un public qui lui donna le vertige, — en l’applaudissant. […] Le livre qu’il publie aujourd’hui, comme pourraient être publiés les plus mauvais et les plus chétifs par le talent et par la forme, n’en est pas moins relativement dangereux.

961. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « De la dernière séance de l’Académie des sciences morales et politiques, et du discours de M. Mignet. » pp. 291-307

Mais tout cela, d’abord, ne vint pas à la fois ni tout d’un coup ; ceux qui vivaient alors et qui parlent si bien aujourd’hui étaient les premiers à se plaindre des années mauvaises, des mauvais jours, comme on les appelait, du pouvoir oppresseur, et ne se cachaient pas de l’espoir qu’ils avaient d’en être délivrés.

962. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Nouveaux voyages en zigzag, par Töpffer. (1853.) » pp. 413-430

Töpffer était né peintre, paysagiste, et son père l’était ; mais, forcé par les circonstances, et surtout par le mauvais état de sa vue, de se détourner de l’expression directe que réclamait son talent et où le conviait l’exemple paternel, il n’y revint que moyennant détour, à travers la littérature et plume en main : cette plume lui servit à deux fins, à écrire des pages vives et à tracer, dans les intervalles, des dessins pleins d’expression et de physionomie. […] [NdA] Ce n’est pas sans dessein que j’indique la littérature grecque, car Töpffer était helléniste ; il a même donné une édition des Harangues de Démosthène, et il se souvient évidemment du grec dans cette phrase de ses Voyages en zigzag, par exemple : C’est là mieux qu’ailleurs (dans une excursion en commun du maître avec ses élèves) qu’il dépend de lui, s’il veut bien profiter amicalement des événements, des impressions, des spectacles et des vicissitudes, de fonder de saines notions dans les esprits, de fortifier dans les cœurs les sentiments aimables et bons, tout comme d’y combattre, d’y ruiner à l’improviste, et sur le rasoir de l’occasion, tel penchant disgracieux ou mauvais.

963. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Correspondance de Buffon, publiée par M. Nadault de Buffon » pp. 320-337

Ainsi encore, à propos des attaques dernières dont Les Époques de la nature furent l’occasion, et de je ne sais quel manuscrit de Boulanger qu’on l’accusait d’avoir pillé : « Il vaut mieux, disait-il, laisser ces mauvaises gens dans l’incertitude, et comme je garderai un silence absolu, nous aurons le plaisir de voir leurs manœuvres à découvert… Il faut laisser la calomnie retomber sur elle-même. » À M. de Tressan qui s’était, un jour, ému et mis en peine pour lui, il répondait : « Ce serait la première fois que la critique aurait pu m’émouvoir ; je n’ai jamais répondu à aucune, et je garderai le même silence sur celle-ci. » Ainsi pensait-il, et il ne se laissait pas détourner un seul jour du grand monument qu’il édifiait avec ordre et lenteur, et dont chaque partie se dévoilait, successivement à des dates régulières et longtemps à l’avance assignées. […] Et cependant il ne saurait se contraindre à être le collecteur, l’investigateur minutieux, l’observateur de détail ; ses sens même y faisaient obstacle ; ses yeux étaient mauvais ; sa taille droite et haute était d’un maréchal de France, on l’a dit, plus que d’un homme de laboratoire ou de cabinet.

964. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Correspondance de Voltaire avec la duchesse de Saxe-Golha et autres lettres de lui inédites, publiées par MM. Évariste, Bavoux et Alphonse François. Œuvres et correspondance inédites de J-J. Rousseau, publiées par M. G. Streckeisen-Moultou. — II » pp. 231-245

Rien ne ressemble à du mauvais ou à du médiocre Rousseau comme du bon Lamennais. […] Après sa fuite de Motiers, après sa tentative manquée d’établissement en Angleterre, revenu en France, réfugié pendant quelque temps à Trie sous la protection du prince de Conti, il s’alarme, il se figure que la main du maître est insuffisante à le soutenir contre le mauvais vouloir des subalternes ; déjà il lit dans la contenance des habitants que la conjuration tramée contre lui opère : ce ne sont qu’allées et venues souterraines ; que va-t-il sortir des conseils caverneux de ces taupes ?

965. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Essais de politique et de littérature. Par M. Prevost-Paradol. »

Hauréau pour ses travaux d’érudit et pour autre chose encore, il ajoutait : « … Son cœur ne cessant pas de battre pour toutes les nobles causes au milieu de ses arides travaux, on pourrait craindre qu’il ne fît une aussi mauvaise fin que M. de Tocqueville, s’il ne paraissait vraiment destiné par la nature à vivre très longtemps… » J’avoue que je conçois peu l’ironie prolongée en telle matière. […] Le vieux Michaud de l’Académie, journaliste spirituel, celui que l’empereur Napoléon appelait un mauvais sujet, avait une maxime : « On ne dit bien que ce qui est difficile à dire. » 21.

966. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « M. de Pontmartin. Les Jeudis de Madame Charbonneau » pp. 35-55

Je ne savais pas, je l’avoue, M. de Pontmartin en si piètre état et en si mauvaise posture ; je le croyais sur un meilleur pied dans tous ses mondes ; il me semblait qu’il avait, littérairement, une réputation assez en rapport avec ses mérites, qu’il n’avait pas grand-chose à demander de plus ; et quant à l’Académie, son désir ou son regret aujourd’hui avoué, j’estimais à vue de pays que, du train dont nous y allons et pour peu que nous mourions encore, il avait chance d’y arriver à son tour, — après M.  […] Son erreur a été de sophistiquer ce qu’il aurait pu faire tout simplement…, de traiter la littérature comme une mauvaise guerre où il faudrait constamment avoir un fleuret à la main et un stylet sous son habit.

967. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Daphnis et Chloé. Traduction d’Amyot et de courier »

Il fallait être un bien mauvais païen, un vrai fils de Lucien et comme qui dirait de Voltaire, pour chercher chicane à un conteur dévot, de si bon goût en fait de superstitions et si bien appris. […] Si l’on voulait se donner le spectacle de l’incertitude et de la fragilité du goût, même chez les plus savants hommes, et même en ces matières classiques, il suivrait de lire le jugement que porte le docte Huet de ce joli roman ; c’est dans sa Lettre à Segrais, en tête de  ; il vient de parler de deux mauvais romans composés par des Grecs byzantins : « Je fais à peu près le même jugement, dit-il, des Pastorales du sophiste Longus ; car, encore que la plupart des savants des derniers siècles les aient louées pour leur élégance et leur agrément, joint à la simplicité convenable au sujet, néanmoins je n’y trouve rien de tout cela que la simplicité, qui va quelquefois jusqu’à la puérilité et à la niaiserie.

968. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. LE COMTE MOLÉ (Réception à l’Académie.) » pp. 190-210

Et pourtant l’Académie a subsisté, a revécu du moins, et sans trop se modifier encore ; elle a peu dévié de l’esprit de sa fondation, elle y est revenue dès qu’elle a pu ; elle a même gardé de son prestige, et le mot de d’Alembert, dans son ingénieuse préface des Éloges, qui répond d’avance à tout, reste parfaitement vrai : « L’Académie française, dit-il, est l’objet de l’ambition secrète ou avouée de presque tous les gens de lettres, de ceux même qui ont fait contre elle des épigrammes bonnes ou mauvaises, épigrammes dont elle serait privée pour son malheur, si elle était moins recherchée101. » Montesquieu, Boileau lui-même, Charles Nodier, avaient commis bien des irrévérences contre le corps ou contre les membres immortels, et ils en ont été ; et, chose plaisante ! […] C’est que dans ce temps de mœurs littéraires si mauvaises et si gâtées, en ce temps de grossièreté où la littérature, ce qu’on ose appeler ainsi, trop souvent imite la rue et n’en a pas la police, il importe que l’Académie reste un lieu où la politesse, l’esprit de société, les rapports convenables et faciles, une transaction aimable ou du moins suffisante, la civilisation enfin en littérature, continuent et ne cessent jamais de régner.

969. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Notes sur l’Ancien-Régime »

Il faudrait « écurer le bié du moulin et la rivière dont les débordements gâtent la grande prairie, réparer les chaussées des deux étangs, réparer l’église qui est à la charge du seigneur, et dont les couvertures notamment sont dans un état affreux, les eaux pénétrant à travers la voûte », réparer les chemins qui sont aussi à la charge du seigneur, et qui pendant l’hiver sont dans un état déplorable. « Il paraît qu’on ne s’est jamais occupé du rétablissement et réparation de ces chemins. » Le sol de la terre de Blet est excellent, mais il faudrait des saignées et fossés pour l’écoulement des eaux, sans quoi les bas-fonds continueront à ne produire que des mauvaises herbes. […] On estime que les ventes se font une fois tous les 80 ans ; ces droits portent sur 1 356 arpents qui valent, les meilleurs 192 livres l’arpent, les moyens 110 livres, les mauvais 75 livres.

970. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre I. La littérature pendant la Révolution et l’Empire — Chapitre III. Madame de Staël »

De là l’insuffisance de ses Considérations sur la Révolution, où l’on trouve tant de jugements pénétrants et d’idées intéressantes : elle voit très bien beaucoup de détails, elle attribue trop aux individus, à leur action bonne ou mauvaise ; mais d’où vient cette Révolution ? […] Je ne sais si ce n’est pas un mauvais tour que lui a joué son trop sociable esprit : elle n’admet à partager les bénéfices de la Révolution que les gens bien élevés, les « messieurs » qu’on peut recevoir dans un salon.

971. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Légendes françaises. Rabelais par M. Eugène Noël. (1850.) » pp. 1-18

Après toutes les folies du début, la naissance de Gargantua par l’oreille gauche, la description mirifique de sa layette, les premiers signes qu’il donne de son intelligence et certaine réponse très coquecigrue qu’il fait à son père et à laquelle celui-ci reconnaît avec admiration le merveilleux entendement de son fils, on lui donne un maître, un sophiste en lettres latines ; et c’est alors que commence la satire la plus ingénieuse et la plus frappante de la mauvaise éducation de ce temps-là. […] Il raconte qu’un jour le duc d’Orléans, régent, au sortir de l’Opéra, causant avec lui, s’était mis à lui faire un grand éloge de Rabelais : « Je le pris pour un prince de mauvaise compagnie, dit-il, qui avait le goût gâté.

972. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Les Gaietés champêtres, par M. Jules Janin. » pp. 23-39

Tu n’as suivi que mes mauvais exemples, tu n’as marché que dans le sentier de mes égarements. […] Imprudent, qui n’as pas compris toutes les ruines que peut couver une parole mauvaise, et toutes les révolutions que peut enfanter une conduite coupable !

973. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Madame la duchesse d’Angoulême. » pp. 85-102

Incapable d’une mauvaise pensée, mais aussi d’une feinte, si elle ne vous aimait pas, il lui était impossible de vous dire ou de vous laisser croire le contraire. « C’était le plus loyal gentilhomme, me dit-on, et qui n’a jamais menti. » Elle aimait ses amis, elle pardonnait à ses ennemis ; mais, dans la religion de sa race et de son malheur, elle croyait aux fidèles et aux infidèles, aux bons et aux méchants : peut-on s’en étonner ? […] Cette jeune fille royale, qui croit naturellement au droit de sa race, veut exprimer par là que la fidélité à ses rois dans le malheur est un devoir et une vertu ; mais, même quand il n’en serait pas tout à fait comme elle le pense, son expression droite et naïve ne l’a point trompée ; elle dit vrai encore : car ce qui n’était plus un devoir de fidélité peut-être, en était un pour le moins d’humanité, et quiconque a passé le seuil du Temple en ces trois années et y a paru compatissant à de telles infortunes, mérite l’estime, de même que quiconque y a passé sans être touché au cœur ni serviable, a une mauvaise marque.

974. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « J. K. Huysmans » pp. 186-212

III En cette psychologie du pessimiste, qui juge la vie mauvaise en soi, répugne aux contacts sociaux, méprise ou bafoue les êtres les plus sains, plus bornés et robustes, plus aptes à agir et à jouir de concert, M.  […] Folantin, dans A Vau l’eau, ou le passage suivant de A Rebours, qui est un exemple parfait du paralogisme pessimiste, consistant à ôter d’un ensemble toute bonne qualité, et à le déclarer ensuite mauvais : « Il ne put s’empêcher de s’intéresser au sort de ces marmots et de croire que mieux eut valu pour eux que leur mère n’eût pas mis bas.

975. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre III : La science — Chapitre I : De la méthode en général »

Bacon, nous dit-on, n’a pas fait d’expériences, ou en a fait de mauvaises. […] Ou la différence serait-elle uniquement dans la pratique, les uns tombant sur de bonnes hypothèses, les autres sur de mauvaises ?

976. (1903) Considérations sur quelques écoles poétiques contemporaines pp. 3-31

Il ne fait que de mauvais vers ! […] Ils auraient, par exemple, bravement écrit : Le verger vert avec son odeur d’estragons — (s à la fin du mot) ; à moins que, par égard pour la rime aux yeux, ils n’aient découvert quelque chose de ce genre : Le verger vert et ses odorants estragons, composant ainsi un vers absolument mauvais, tout en croyant respecter la Muse.

977. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XXXVIII » pp. 158-163

Marie-Joseph Chénier a eu sans doute un caractère difficile, irritable ; il a cédé parfois à de mauvaises passions, il a traversé une époque orageuse et souillée en y payant trop largement son tribut.

978. (1874) Premiers lundis. Tome II « Li Romans de Berte aus Grans piés »

Mais voilà que Margiste, mauvaise conseillère, imagine de dire à l’oreille de Berte que Pépin est un mari à craindre, et qu’elle sait de bonne part, qu’il pourrait bien la tuer dès cette nuit.

979. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Le théâtre annamite »

Je revois toujours la bouche grande ouverte de celui qui portait sur ses yeux des boules de cuivre avec une fente de grelot ou de tirelire ; et j’entends le cri mauvais, indéfinissable, le cri de xylophone exaspéré qui jaillissait entre ces deux rangées de dents noires, comme d’une bouche de poisson… Je n’ai jamais senti un plus vaste, un plus infranchissable abîme entre une autre créature et moi  Ça, mes frères ?

980. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — P — Ponsard, François (1814-1867) »

On lui a joué, de son vivant, le mauvais tour de l’opposer à Victor Hugo et de le sacrer chef de l’« école du bon sens ».

981. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « Une petite revue ésotérique » pp. 111-116

Les bureaux en étaient chez Clerget, boulevard Montparnasse, nº 13, chiffre fatidique où Moréas, superstitieux, lisait un mauvais présage.

982. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » pp. 79-87

Il le trouve occupé au Grec, à la vérité, mais à du Grec à côté duquel étoit une mauvaise Traduction.

983. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » pp. 196-203

Nous ne parlerons pas de ses Poésies : on convient généralement qu’elles sont mauvaises, quoiqu’elles fourmillent de pensées ingénieuses, galantes, philosophiques ; ce qui prouve combien M.

984. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Appendice. Note concernant M. Laurent-Pichat, et Hégésippe Moreau. (Se rapporte à la page 395.) » pp. 541-544

Je crains bien maintenant d’avoir fait une mauvaise action gratuite.

985. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre XVIII. Des Livres sur l’Art Militaire & sur les sciences qui y ont rapport. » pp. 370-378

Les Fortifications de tout le monde, trois tomes, in-4° à Dresde 1737 par Landsberg, donnent une idée de tous les systêmes de fortification, & découvrent ce qu’il y a de bon ou de mauvais.

986. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 5, que Platon ne bannit les poëtes de sa republique, qu’à cause de l’impression trop grande que leurs imitations peuvent faire » pp. 43-50

Platon appuie de sa propre experience les raisonnemens qu’il fait sur les mauvais effets de la poësie.

987. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 25, des personnages et des actions allegoriques, par rapport à la poësie » pp. 213-220

Mais ou la raison ou l’instinct nous ont fait quitter ce goût très-propre à faire composer de mauvaises pieces par de bons auteurs, et les poëtes qui depuis quelques années ont voulu le renouveller n’y ont pas réussi.

988. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 19, qu’il faut attribuer aux variations de l’air dans le même païs la difference qui s’y remarque entre le génie de ses habitans en des siecles differens » pp. 305-312

Pourquoi ne veut-on pas que les enfans élevez en France en certaines années, dont la temperature aura été heureuse, aïent le cerveau mieux disposé que ceux qui auront été élevez durant une suite d’années dont la temperature aura été mauvaise.

989. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 6, que dans les écrits des anciens, le terme de chanter signifie souvent déclamer et même quelquefois parler » pp. 103-111

Ce n’est point certainement parce que cette maniere de representer les pieces dramatiques soit mauvaise.

990. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XII. Des panégyriques ou éloges des princes vivants. »

Quand on remercie, il faut louer ; et quand on loue, on veut plaire : rien de plus naturel ; et ce qui ne l’est pas moins, c’est de vouloir ajouter chaque année à ce qui a été dit l’année précédente ; ce qui n’était donc qu’un remerciement devint peu à peu un discours, et le discours devint un panégyrique, et le panégyrique fut ce qu’il devait être, c’est-à-dire, qu’on y louait toujours un peu plus les mauvais princes que les bons.

991. (1895) La comédie littéraire. Notes et impressions de littérature pp. 3-379

La fureur est toujours mauvaise conseillère, fureur d’invectives et fureur de réaction. […] Colin a de mauvaises intentions. […] Il me remit un in-18 jaune, imprimé sur assez mauvais papier. […] Ils sont complètement bons ou complètement mauvais. […] Un soldat exténué dépose son sac le long d’une haie ; un autre jette son fusil, tous suivent le mauvais exemple.

992. (1891) Enquête sur l’évolution littéraire

cette intelligence douloureuse du mauvais moment ou l’on vient ? […] À la sortie, une casquette criminelle l’attend… on se partagera un mauvais coup. […] C’est de la prose tout bonnement, — et de la mauvaise, puisque les vers y sont ! […] C’est une mauvaise plaisanterie. […] Il n’est pas mauvais, pour que le niveau s’en maintienne haut, qu’un peu d’ésotérisme l’entoure.

993. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre IV. Addison. »

Quand il a voyagé en Italie, ç’a été à la manière anglaise, notant les différences des mœurs, les particularités du sol, les bons et mauvais effets des divers gouvernements, s’approvisionnant de mémoires précis, de documents circonstanciés sur les impôts, les bâtiments, les minéraux, l’atmosphère, les ports, l’administration, et je ne sais combien d’autres sujets902. […] Il découvre que les mauvais livres sont pernicieux, parce que leur durée porte leur venin jusqu’aux générations futures. […] Ils écartent les jeux de mots, les grossièretés sensuelles, les écarts d’imagination, les invraisemblances, les atrocités et tout le mauvais bagage de Shakspeare933 ; mais ils ne le suivent qu’à demi dans les profondes percées par lesquelles il entre au cœur de l’homme pour y dévoiler l’animal et le Dieu. […] Elles ne sont plus élues dans les clubs quand on nomme les belles dont on boit la santé ; elles sont obligées par leurs principes de se coller une mouche sur le côté du front où cela va le plus mal ; elles se condamnent à perdre les toilettes du jour de naissance ; il ne leur sert de rien qu’il y ait une armée et tant de jeunes gens porteurs de chapeaux à plumes ; elles sont forcées de vivre à la campagne et de nourrir leurs poulets, juste dans le temps où elles auraient pu se montrer à la cour et étaler une robe de brocart, si elles voulaient se bien conduire… Un homme est choqué de voir un beau sein soulevé par une rage politique qui est déplaisante même dans un sexe plus rude et plus âpre… Et cependant nous avons souvent le chagrin de voir un corset près d’être rompu par l’effort d’une colère séditieuse, et d’entendre les passions les plus viriles exprimées par les plus douces voix… » Mais, heureusement, ce chagrin est rare ; « là où croissent un grand nombre de fleurs, la terre de loin en semble couverte ; on est obligé d’avancer et d’entrer, avant de distinguer le petit nombre de mauvaises herbes qui ont poussé dans ce bel assemblage de couleurs. » Cette galanterie est trop posée ; on est un peu choqué de voir une femme touchée de si près par des mains si réfléchies. […] Nous ne trouvâmes rien de remarquable dans l’œil, sinon que les musculi amatorii, ou, comme on peut traduire, les muscles qui lorgnent, étaient fort diminués et altérés par l’usage, tandis que l’élévateur, c’est-à-dire le muscle qui tourne l’œil vers le ciel, ne paraissait pas avoir du tout servi. » Ces détails anatomiques, qui nous dégoûteraient, amusent un esprit positif ; la crudité n’est pour lui que de l’exactitude ; habitué aux images précises, il ne trouve point de mauvaise odeur dans le style médical.

994. (1896) Journal des Goncourt. Tome IX (1892-1895 et index général) « Année 1893 » pp. 97-181

Mercredi 4 janvier Robert de Montesquiou, venu aujourd’hui chez moi, pour me remercier d’une lettre écrite à son sujet à la comtesse Greffulhe, devient bientôt expansif, me parle avec une horreur rétrospective de son enfance passée chez les jésuites de Vaugirard, me dit que ses premières années auraient eu besoin d’un bain-marie de jupes de femmes, au lieu des sales soutanes de ces prêtres, me conte qu’à l’âge de quatorze ans, faisant déjà des vers amoureux de la lune, un jour, en se rendant au réfectoire, où l’on mangeait de si mauvais veau, le gros jésuite qui les conduisait, lui avait jeté avec une ironie asthmatique, « lueur rêveuse et blême, le morceau d’un vers sur la lune, que l’espionnage de l’endroit avait surpris en fouillant dans son pupitre, et que le sifflement méprisant de l’ironie de ce gros jésuite, l’avait fait se recroqueviller sur lui-même, et soigneusement en cacher la tendresse et l’exaltation. […] Je ne puis m’empêcher de leur dire, dans un petit accès de nervosité : « Vous allez trouver que c’est prétentieux, eh bien, j’attribue cette disposition du public, à ce que, dans le moment, en France, on commence à avoir horreur et peur de l’honnêteté, qui devient gênante pour la masse du public, du public qui n’a pas à apporter dans ma vie, ou dans mon métier, l’indulgence pour une action basse, pour une faiblesse, pour une trahison de principe… car je crois être le type de l’honnête homme littéraire, du persévérant dans ses convictions, et du contempteur de l’argent… et j’oserai affirmer que je suis le seul, l’unique lettré de l’heure présente, qui, avec l’autorité de mon nom, ayant pu faire encore pendant dix ans, des romans bons ou mauvais, mais très bien payés, ne les a pas faits, dans la crainte qu’ils fussent inférieurs à ceux écrits, dans les années antérieures. […] C’était dans le jardin des Missions Étrangères, la nuit presque tombée, un chœur d’hommes chantant des Laudate, un chœur de mâles voix s’élevant — Montesquiou suppose, que c’était devant de mauvaises peintures, représentant les épouvantables supplices dans les pays exotiques — s’élevant et s’exaltant en face de ces images du martyre, comme si les chanteurs du jardin étaient pressés de leur faire de sanglants pendants. […] Il croit son cœur en mauvais état, et va consulter un médecin, son livre fini. […] C’est curieux cette tête, à l’ovale ramassé, aux yeux retroussés, aux grosses lèvres, et qui a quelque chose de féminin qu’il doit à sa coiffure ; et à deux mèches de cheveux, lui faisant des espèces d’accroche-cœurs aux tempes : tête tantôt égayée de vrais rires d’enfant, tantôt s’enfermant dans un sérieux, mauvais, perfide.

995. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre dixième. Le style, comme moyen d’expression et instrument de sympathie. »

Veut-on des exemples d’une organisation déséquilibrée par trop de recherche et de prétention : on en trouvera dans les mauvaises pages d’Alphonse Daudet, qui a su pourtant, en maint endroit, animer la phrase d’une vie sympathique. […] Tandis que ce vers est mauvais : Je suis la froide et la méchante souveraine ; l’oreille ici est attrapée par l’article la à cheval sur les deux hémistiches. […] L’air du siècle est mauvais aux esprits ulcérés. […] Je n’ai rien tu de mauvais, rien ajouté de bon. […] C’est mal comprendre cette évolution que d’écrire délibérément en prose poétique, si on entend par là une prose ornementée et à la recherche des images, comme celle de Chateaubriand dans ses mauvaises pages.

996. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre V. Comment finissent les comédiennes » pp. 216-393

À ce nouvel arrêt de la mauvaise fortune impitoyable, le Prince des Sots opposa un front calme et serein. […] Celui-là avait le grand défaut de mettre son nom à des comédies qu’il n’avait pas faites et qui étaient de bien mauvaises comédies. […] quelle est cette voix qui sort de ce nez de mauvais augure, un pied de nez, autant que de cette bouche pincée en cœur ? […] Quel patois des plus mauvais lieux ! […] On ne traiterait pas autrement une mauvaise fille qui aurait volé une paire de gants ou un pot de fard.

997. (1765) Articles de l’Encyclopédie pp. 5482-9849

Quand on veut par ce mot exprimer le defaut ou le mauvais emploi de quelque chose, on ajoûte l’adverbe trop. […] Le style très-familier admet encore, force gens, forces gibier, force fripons, force mauvais critiques. […] Se glorifier est tantôt pris en bonne part, tantôt en mauvaise, selon l’objet dont il s’agit. […] C’est, dit-on, un mauvais fruit de l’excellent arbre de la liberté. […] On ne peut donc laisser à Joseph le tems d’aller à Jérusalem & de-là à Nazareth, avant que d’avoir prévenu par sa fuite les mauvais desseins d’Hérode.

998. (1882) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Deuxième série pp. 1-334

La recommandation est mauvaise auprès de la postérité. […] La Beaumelle n’est pas un historien ; ce n’est qu’un mauvais romancier. […] Examinons, si vous le voulez, le sermon Sur le mauvais riche. […] Massillon, encore ici, construit son sermon comme le sermon Sur le mauvais riche. […] Nous ne valons probablement ni mieux ni pis que nos pères ; bons ou mauvais, nous sommes bons de la même manière et mauvais pour les mêmes raisons ; mais nous nous sommes créé des moyens nouveaux d’être bons ou mauvais.

999. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Mort de M. Vinet »

Mais le cours des destinées humaines est tel, et l’ironie des événements, l’indifférence du sort est si parfaite en soi et si profonde que, de cette révolution essentiellement mauvaise dans son principe, est sorti, après quelque temps, un nouvel état de choses paisible, animé et assez reflorissant pour qu’à dix-sept ans de distance, et en nous relisant aujourd’hui, cet excès de plaintes nous étonne un peu nous-même et amène sur nos lèvres un triste sourire (1864).

1000. (1874) Premiers lundis. Tome I « Mémoires de madame du Hausset, femme de chambre de madame de Pompadour. »

Louis XV, dont la faiblesse mal entourée ne reçut de son siècle que les influences mauvaises, subit et consacra ce coupable exemple.

1001. (1874) Premiers lundis. Tome I « Mémoires de madame de Genlis sur le dix-huitième siècle et la Révolution française, depuis 1756 jusqu’à nos jours — III »

Ces derniers volumes éclairent enfin notre jugement ; nous étions, ce nous semble, et trop incrédules et trop sévères ; nous imputions obstinément à madame de Genlis un vieux péché de philosophie, et même quelques mauvaises pensées de patriotisme dont elle ne se souilla jamais ; jamais idées pareilles ne furent faites pour elle, et n’égarèrent son intelligence : cela nous est démontré, et le sera, nous l’espérons pour elle, & quiconque lira ses récits, d’une si inaltérable et si innocente frivolité.

1002. (1874) Premiers lundis. Tome II « Dupin Aîné. Réception à l’Académie française »

C’est une veine inégale, capricieuse, qui court et roule bons et méchants mots, érudition et lazzi, dictons du peuple et centons latins : il y a du l’Intimé aux mauvais endroits ; aux excellents, c’est beau comme le paysan du Danube, mais comme le paysan du Danube qui aurait fait ses études du temps d’Étienne Pasquier, à l’Université de Paris.

1003. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Les brimades. » pp. 208-214

L’esprit d’école me semble, ici, mauvais, parce que c’est, ici, l’esprit d’un groupe artificiel, et qu’il est moins efficace pour ceux qui sont de ce groupe que contre ceux, bien plus nombreux, qui n’en sont pas.

1004. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Bergerat, Émile (1845-1923) »

Il n’y lit pas long feu ; les injustices le crispaient ; puis, il avait déjà la mauvaise habitude de dire sa pensée tout entière.

1005. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XII. Mort d’Edmond de Goncourt » pp. 157-163

Ce n’est pas autrement que Manet, dont certes le génie n’admettait nulle complaisance, nulle flagornerie pour la foule, allait chaque jour au Salon se faire une pinte de mauvais sang à écouter les drôleries débitées devant ses cadres.

1006. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des romans — Préface et note de « Notre-Dame de Paris » (1831-1832) — Note ajoutée à l’édition définitive (1832) »

Voici donc maintenant son œuvre entière, telle qu’il l’a rêvée, telle qu’il l’a faite, bonne ou mauvaise, durable ou fragile, mais telle qu’il la veut.

1007. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Girac, et Costar. » pp. 208-216

L’auteur y disoit librement sa pensée, & s’y moquoit des suffrages donnés au ton précieux & à la mauvaise plaisanterie.

1008. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 6, des artisans sans génie » pp. 58-66

Le public regarde un ouvrage dont il est en possession, comme un bien qui lui seroit devenu propre, et il trouve mauvais qu’on lui fasse acheter une seconde fois ce qu’il croit avoir déja païé par ses loüanges.

1009. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre ii »

De l’Argonne, Roger Cahen, jeune israélite, libre penseur, écrit : « Le manque de sommeil auquel je suis dès à présent habitué, la mauvaise nourriture qui gâte mon estomac dont j’étais si fier, tout cela n’a rien de dur en comparaison du manque de conversation.

1010. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Renan — I »

Tropmann eût été un mauvais adversaire de la peine de mort ; signés de ce grand criminel, les beaux plaidoyers de Jules Simon et de Victor Hugo, encore que leur logique et leur véhémence ne fussent pas diminuées, eussent perdu de leur autorité.

1011. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand (suite et fin.) »

Je ne voudrais point paraître faire une mauvaise plaisanterie, mais cet Éloge du comte Reinhard m’a tout naturellement rappelé le célèbre roman de Renart, cette épopée satirique du moyen âge, — cette Bible profane du moyen âge, comme Goethe l’a baptisée, — dans laquelle l’hypocrite et malin Renart joue tant de tours au lion et à tous les animaux, se déguise sous toutes les formes, en clerc, en prêcheur, en confesseur, et, après avoir mis dedans tout son monde, finit par être proclamé roi et couronné. […] Les mauvais restent toujours mauvais. » 60.

1012. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « George Farcy »

Ta confidence est déjà pour lui un mauvais exemple et une excuse. » Et encore : « Ne nous plaignons jamais de notre destinée : qui se fait plaindre se fait mépriser. » Mais nous avons trouvé, dans un journal qu’il écrivait à son usage, quelques détails précieux sur cette année de solitude et d’épreuves : « J’ai quitté Londres le lundi 2 juin 1828 ; le navire George et Mary, sur lequel j’avais arrêté mon passage, était parti le dimanche matin ; il m’a fallu le joindre à Gravesend : c’est de là que j’ai adressé mes derniers adieux à mes amis de France. […] Si je m’étais décidé à quelque dépense, j’avais la Grèce sous les yeux, où je vivais avec Molière (le philhellène), avec qui j’aimerais mieux une mauvaise tente qu’un palais avec l’autre. […] En ce faisant, j’ai cru accomplir un grand acte de sagesse, me préparer de grands éloges de la part de la prudence humaine, et, l’événement arrivé, il se trouve que je n’ai fait qu’une grosse sottise… Enfin me voilà à deux mille lieues de mon pays, sans ressources, sans occupation, forcé de recourir à la pitié des autres, en leur présentant pour titre à leur confiance une histoire qui ressemble à un roman très-invraisemblable ; — et, pour terminer peut-être ma peine et cette plate comédie, un duel qui m’arrive pour demain avec un mauvais sujet, reconnu tel de tout le monde, qui m’a insulté grossièrement en public, sans que je lui en eusse donné le moindre motif ; — convaincu que le duel, et surtout avec un tel être, est une absurdité, et ne pouvant m’y soustraire ; — ne sachant, si je suis blessé, où trouver mille reis pour me faire traiter, ayant ainsi en perspective la misère extrême, et peut-être la mort ou l’hôpital ; — et cependant, content et aimé des Dieux. — Je dois avouer pourtant que je ne sais comment ils (les Dieux) prendront cette dernière folie.

1013. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre premier. La structure de la société. — Chapitre IV. Services généraux que doivent les privilégiés. »

La famille a représenté au roi le mauvais état des affaires de M. le prince de Pons, et Sa Majesté a bien voulu accorder à M. le prince Camille, son fils, 15 000 livres de la pension vacante par la mort de son père, et 5 000 livres d’augmentation à Mme de Marsan. » — M. de Conflans épouse Mlle Portail : « En faveur de ce mariage, le roi a bien voulu que, sur la pension de 10 000 livres accordée à Mme la présidente Portail, il en passât 6 000 à M. de Conflans après la mort de Mme Portail. » — M. de Séchelles, ministre qui se retire, « avait 12 000 livres d’ancienne pension que le roi lui conserve ; il a, outre cela, 20 000 livres de pension comme ministre ; et le roi lui donne encore outre cela 40 000 livres de pension »  Parfois les motifs de la grâce sont admirables. […] — Voyez par contraste le luxe des prélats qui ont un demi-million de rente, la pompe de leurs palais, les équipages de chasse de M. de Dillon, évêque d’Evreux, le confessionnaux garnis de satin de M. de Barrai, évêque de Troyes, l’innombrable batterie de cuisine en argent massif de M. de Rohan, évêque de Strasbourg. — Tel est le sort des curés à portion congrue, et il y en a beaucoup qui n’ont pas la portion congrue, que la mauvaise volonté du haut clergé en exclut, qui, avec leur casuel, ne touchent que 400 à 500 livres, qui réclament en vain la maigre pitance à laquelle ils ont droit par le dernier édit. « Une pareille demande, dit un curé, ne devrait-elle pas être acceptée de bon gré par MM. du haut clergé qui souffrent des moines jouir de 5 à 6 000 livres de rente par chaque individu, tandis qu’ils voient les curés, au moins aussi nécessaires, réduits à la mince portion, tant pour eux que pour la paroisse ?  […] En effet, sur trois cents députés du clergé, on compte aux États généraux deux cent huit curés, et, comme la noblesse de province, ils apportent avec eux la défiance et le mauvais vouloir qu’ils nourrissent depuis si longtemps contre leurs chefs.

1014. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série «  M. Taine.  »

Mme de Rémusat est une coquette dépitée et une femme de chambre mauvaise langue. […] Ce monde vous paraît mauvais ; et cependant vous ne sauriez l’imaginer autre qu’il n’est, à moins de l’arrêter dans sa marche et de lui retirer tous ses ferments de vie et de progrès. […] Le monde, qui est mauvais, est bon néanmoins, puisqu’il ne peut être conçu meilleur sans déchéance.

1015. (1902) Le culte des idoles pp. 9-94

que l’ancien régime fut un temps de corruption, de mauvais raisonnements et d’abstractions froides qui devaient préparer la révolution. […] L’égoïsme et l’orgueil ne sont ni bons ni mauvais. […] C’est sans doute pour ces mauvais lecteurs que Nietzsche avait écrit cette page : « Une culture supérieure ne peut vraiment naître que là où la société forme deux classes distinctes : celle des travailleurs et celle des oisifs, capables d’un véritable loisir ; ou, pour mieux dire, la classe du travail forcé et la classe du travail libre.

1016. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre IX. Le trottoir du Boul’ Mich’ »

Il sent moins mauvais que bien des vivants. […] Il fait œuvre de professeur, non de critique, et ses leçons ne constituent pas de trop mauvais résumés. […] Même quand le pastiche est adroit — et c’est le cas de ceux de M. le professeur Gebhart — il reste un bien pauvre et facile jeu de société, — de mauvaise société.

1017. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre sixième. La volonté — Chapitre deuxième. Le développement de la volonté »

Si l’ammophile apportait une chenille à ses larves et que la chenille, piquée une fois trop faiblement ou à un mauvais endroit, ne fût pas paralysée, il fallait la piquer de nouveau et trouver le bon endroit. […] Les jugements qui déterminent la volonté ne sont jamais entièrement abstraits, car ils sont toujours relatifs à quelque action, que nous affirmons être agréable ou pénible, utile ou nuisible, bonne ou mauvaise ; tout jugement, pratique est la représentation anticipée d’un acte et de son rapport avec notre sensibilité, avec notre intelligence, avec notre volonté. […] Non seulement, avant d’agir, nous trouvons de bonnes ou mauvaises raisons pour faire ce qui nous plaît, mais, alors même que nous avons agi sans connaître les vraies causes de nos actes, nous leur imaginons encore telles et telles raisons.

1018. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « Division dramatique. » pp. 64-109

Les mauvais poètes tombaient dans ce défaut par ignorance, et les bons par leur complaisance pour quelques acteurs aimés du public, à qui l’on voulait donner des rôles, sans que la contexture de la pièce l’exigeât ou le permît. […] Je dirai seulement ce que j’estime qu’il faut observer pour faire un monologue avec vraisemblance ; et si l’on approuve mes sentiments, l’on pourra juger quels sont les bons et les mauvais, tant chez les anciens que chez les modernes. […] En ces rencontres donc, il faut trouver des couleurs pour obliger un homme à faire éclater tout haut sa passion, ou bien lui donner un confident avec lequel il puisse parler comme à l’oreille ; en tout cas, le mettre en lieu commode pour s’entretenir seul et rêver à son aise, ou enfin lui donner un temps propre pour se plaindre à loisir de sa mauvaise fortune.

1019. (1913) La Fontaine « V. Le conteur — le touriste. »

J’avais, en effet, laissé de côté les Contes de La Fontaine qui sont contenus dans le recueil des Fables, et certainement je n’aurais pas voulu les passer sous silence ; car ce ne sont, certainement, pas les contes les plus mauvais de La Fontaine ; je vous dirai même qu’incontestablement, et toute question de pudeur mise à part, ce sont certainement les meilleurs. […] Ce n’est pas une bonne qualité pour une femme d’être savante ; et c’en est une très mauvaise d’affecter de paraître telle. » Voilà la petite semonce par laquelle commencent les lettres de La Fontaine à sa femme ; voilà qui nous porte déjà à croire que ce sont bien des lettres domestiques, des lettres familiales que La Fontaine a écrites là. […] Je prétends les surpasser tous et que vous ne sauriez vous acquitter envers moi, si vous ne me souhaitez d’aussi bonnes nuits que j’en aurai de mauvaises avant que notre voyage soit achevé. » Vous verrez, quand je vous lirai ce qu’il dit de sa cousine de Châtellerault, qu’il la donne comme grande liseuse de romans et qu’il ajoute : « C’est à vous, qui les aimez fort aussi, de juger quelle conséquence on en peut tirer. » Il a déjà fait ce reproche à sa femme dans sa première lettre.

1020. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Villemain » pp. 1-41

Il se tint fort coi dans cette gloire qui lui avait si peu coûté, écrivant rarement pour qu’elle ne lui coûtât pas davantage, et aussi pour deux raisons, excellentes toutes deux : la première, c’est qu’au fond il était un esprit sec sous une forme péniblement travaillée, et la seconde parce que se faire rare c’est se faire précieux aux yeux des imbéciles, économisant ainsi son talent pour qu’on le crût immense, et prenant la pose, laquelle n’est pas mauvaise, d’un homme qui, malgré sa richesse, ne peut cependant pas détacher tous les matins un diamant de sa cravate pour nous le donner. […] Il ne pouvait pas comprendre la nature éloquente, violente et passionnée jusqu’aux larmes de Fox, de ce fastueux et furibond mauvais sujet de Fox, de ce Mirabeau anglais qui eut le hasard d’avoir un père aussi fou de tendresse pour son fils que le marquis de Mirabeau avait de dureté pour le sien. […] Mais l’âme de cet éclatant mauvais sujet, que fut Fox, resta, au milieu de ses incroyables excès, indestructiblement généreuse, et c’est cette générosité indestructible qui fit son éloquence.

1021. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Émile Zola »

II Et je ne me permets ici aucune mauvaise plaisanterie. […] — il semblait que c’étaient les paroles mauvaises de madame Lecœur et de mademoiselle Saget qui puaient si fort !  […] Il a flairé quelque mauvaise affaire venant des scandalisés de son livre, qui, en feuilleton, a déjà eu l’honneur du scandale.

1022. (1940) Quatre études pp. -154

— Non, nos mœurs actuelles — ne sont vraiment pas mauvaises — sur les bancs de la brasserie. […] Encore faut-il, pour trouver le port paisible où n’arrivent plus les vents mauvais, le vouloir d’abord ; et ensuite, le mériter. […] Rousseau, que par les Essais de Pope, que par les tragédies de Voltaire, que par les vers agiles dont les correspondances s’ornent encore quelquefois : et ce sont les moins mauvais peut-être, puisqu’ils sont sans prétention. […] Aux plus mauvais moments, une humble flamme vacille encore. […] Celui-ci veut, en effet, que la nature soit bonne ; si elle était mauvaise, comme l’affirmait la loi chrétienne, il ne pourrait s’épanouir.

1023. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Notes et pensées » pp. 441-535

Liris a commencé par de mauvais vers qui, trop bien recommandés par des amis trop serviables, ont trouvé et ruiné un libraire novice. […] Si le maître est astucieux et déloyal, le disciple est capable contre vous de toutes mauvaises menées et calomnies sourdes, et lettres anonymes. […] LXIII Je ne connais pas de plus mauvais vers (entre les vers de poètes distingués, s’entend), plus mal faits, plus au-dessous de leur réputation, plus médiocres de sentiments comme de facture et de rime, que les strophes ou couplets intitulés Le Rhin, d’Alfred de Musset. […] — Il est honorable en France d’être mauvais sujet. […] CLXI Musset a dit dans La Coupe et les lèvres : Vous trouverez, mon cher, mes rimes bien mauvaises ; Quant à ces choses-là, je suis un réformé ; Je n’ai plus de système, et j’aime mieux mes aises ; Mais j’ai toujours trouvé honteux de cheviller… etc.

1024. (1896) Le livre des masques

On pense bien que je ne m’amuserai pas à citer tels vers qui me paraissent mauvais ; et surtout je n’irai pas les chercher dans les poèmes de M.  […] Laurent Tailhade L’individualisme, qui nous donne en littérature de si agréables corbeilles de fleurs nouvelles, se trouve assez souvent stérilisé par la poussée des mauvaises herbes de l’orgueil. […] Cela pourrait être un système de composition (pas encore mauvais), mais non pas ici : les chuchotements de l’instinct sont écoutés et accueillis ; la nécessité de la catastrophe s’impose à cet esprit lucide (qui n’a point troublé son miroir en soufflant dessus) et il relate clairement les conséquences des mouvements sismiques de l’âme humaine. […] Pareillement belle, quoique d’une beauté cruelle, la tragique histoire appelée simplement Une mauvaise rencontre où l’on voit la transfiguration héroïque de l’âme pitoyable d’un frêle rôdeur dompté par la puissance d’un geste d’amour et, sous le magnétisme impérieux du verbe, fleuri martyr, jet de sang pur jaillissant en miracle des veines putréfiées de la charogne sociale. […] Il abuse un peu de son pouvoir, donnant à tels mots des significations trop d’à côté, pliant les phrases à une syntaxe trop sommaire, mais ce sont de mauvaises habitudes qui ne lui sont pas exclusivement personnelles ; il n’emprunte à nul sa science du rythme et sa maîtrise à manier le vers rénové.

1025. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Deuxième partie. — L’école critique » pp. 187-250

Car on n’a, pour y parvenir, que la grande méthode des contraires, qui n’est qu’une mauvaise plaisanterie de la logique. […] Il est libre de ne point trouver une sauce excellente ; mais à ceux qui la trouvent bonne, c’est perdre son temps et sa peine que de démontrer qu’elle est mauvaise, et qu’une autre est meilleure au goût, d’après l’idée de la sauce en général. […] Elle s’est ainsi formé un sens esthétique (mais ce mot n’est pas de sa langue), un instinct du bon et du mauvais, du beau et du laid, du vrai et du faux, un véritable tact littéraire. […] Vous avez sur la France un grand avantage : vous goûtez les comédies de Shakespeare ; vous comprenez qu’on peut être comique autrement que Molière, par les caprices de l’invention libre, par la gaieté folle des situations, par l’exubérance d’un style tout étincelant des richesses les plus contraires, par les boutades philosophiques et morales d’un bouffon ou d’un mauvais sujet raillant les misères de l’humanité.

1026. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCVIe entretien. Alfieri. Sa vie et ses œuvres (1re partie) » pp. 413-491

« Cependant le mauvais temps continuait avec une obstination incroyable ; depuis plus de quinze jours que j’étais à Paris, je n’avais pas encore salué le soleil, et mes jugements sur les mœurs, plus poétiques que philosophiques, se ressentaient toujours un peu de l’influence de l’atmosphère. […] Enfin, on y parvint ; il est probable que le roi se vit sans trop de peine délivré d’un sujet excentrique, mauvais poète, grand déclamateur, qui méprisait son pays, et qui s’en allait toscaniser chez un autre souverain. […] Concevoir une tragédie, ce que j’appelle ainsi, c’est donc distribuer mon sujet en scènes et en actes, établir et fixer le nombre des personnages ; puis, en deux petites pages de mauvaise prose, résumer, pour ainsi dire, scène par scène, ce qu’ils diront et ce qu’ils doivent faire. […] Que si j’y remarquai aussi des erreurs ou des déclamations, ce sont filles d’inexpérience et non de mauvaise volonté que je voulus également y laisser.

1027. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXe entretien. Mémoires du cardinal Consalvi, ministre du pape Pie VII, par M. Crétineau-Joly (2e partie) » pp. 81-159

Il ne pouvait se consoler en réfléchissant qu’une rupture qui aurait de si funestes suites allait éclater, parce qu’on n’avait pu s’entendre réciproquement, et il manifestait une très amère douleur en voyant sacrifier des hommes qui n’affichaient aucune mauvaise intention, — ce sont ses propres termes, — et qui n’agissaient que contraints par leurs propres devoirs. […] Je devais, disait-il, aller assurer le premier consul que si le Souverain Pontife ne pouvait pas adhérer à ses demandes au-delà de certaines limites, ce n’était point par mauvaise volonté, — Sa Sainteté étant animée des meilleurs sentiments à son égard, — mais uniquement parce qu’elle y était forcée par la nécessité la plus impérieuse. […] Sa mauvaise santé ne lui avait pas permis d’aller au mariage civil ; il s’efforça, malgré ses douleurs, de se rendre à la chapelle, et il assista à la solennité. […] Je réussis ainsi à nous tirer de ce mauvais pas, et tous ensemble nous nous rendîmes chez le cardinal Mattei, qui demeurait à très peu de distance.

1028. (1922) Enquête : Le XIXe siècle est-il un grand siècle ? (Les Marges)

Lucien Descaves, de l’Académie Goncourt (Extrait d’un article paru dans La Lanterne) Le Blond a raison de rendre les auteurs de manuels scolaires en grande partie responsables de la mauvaise opinion qu’on a du siècle dernier. […] Je ne trouve pas mauvais que d’autres soient d’un avis et d’un goût différent. […] Ceux-ci sont filtrés, pour ainsi dire ; et ce qu’il y avait de mauvais, de négligeable en eux s’est desséché, évanoui. […] Les moroses écrits de ces « mauvais maîtres » n’ont-ils pas engendré ce délétère état d’esprit qui nous conduisit à Charleroi, au bord du gouffre, et qui aurait abouti au désastre final si Léon Daudet, en écrivant L’Avant-guerre, n’avait été le véritable vainqueur de la bataille de la Marne ?

1029. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre I — Chapitre troisième »

Tout y aurait servi, même les plus mauvais gouvernements, même les batailles perdues contre les Anglais, lesquels n’auraient pas vaincu la nation française, mais la féodalité. […] Les principaux sont cette même Christine de Pisan, dont on loue quelques vers gracieux qui sont restés en manuscrit ; George Chastelain, beaucoup plus goûté de son temps pour ses poésies inintelligibles que pour ses chroniques ; Martial d’Auvergne, auteur d’une sorte de poëme historique sur la mort du roi Charles VII, où sont exprimées en mauvaises rimes les sentiments de la nation pour la royauté malheureuse. […] Le basochien, espiègle, tapageur, libertin, larron, hauteur de mauvais lieux, détroussant les petits marchands, poursuivi par les soldats du guet, heureux des troubles publics, enchanté de la guerre parce que la police y est plus relâchée : tel est Villon. […] je fuyois l’eschole Comme fait le mauvais enfant.

1030. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre sixième »

Je ne vois dans toute la pièce que Regnard qui, sous le nom de Valère, me montre son esprit et rime agréablement ses souvenirs de mauvais sujet. […] Destouches voulut épurer la comédie de tout ce qui provoquait la grosse gaieté ou qui sentait la mauvaise compagnie. […] Mais, plus heureux et plus habile que Diderot, il sait se tirer à temps de la comédie sérieuse, comme il fait d’un mauvais procès, et il revient, sur les pas de Molière, à la comédie qui fait rire. […] La renommée douteuse du Philinte de Molière est comme le châtiment des mauvais sentiments de sa préface.

1031. (1887) Journal des Goncourt. Tome II (1862-1865) « Année 1864 » pp. 173-235

* * * — Les choses, depuis le commencement du monde, vont en étant toujours aussi mauvaises, mais en paraissant un peu meilleures. […] * * * — Tous ces jours-ci, à propos de notre livre, tristesse, ennui, angoisse sourde, inquiétude, disposition à voir noir, supputation des mauvaises chances, travail d’écureuil de l’esprit dans le même cercle de pensées de doute, de défaillance, de désespérance. […] Elle a le front petit, étroit, bombé, les sourcils forts, un peu plantés au hasard et se reliant à travers le haut du nez, le nez fin de ligne, mais canaille, mais ayant, au bout, le retroussement faubourien, la bouche petite, avec des fossettes aux coins, quand elle rit, les dents qui sont blanches, séparées comme si elles étaient limées, les pommettes pareilles à des pommettes fardées avec de la brique, d’un rouge qui annonce un mauvais estomac, se nourrissant de cochonneries, la peau épaisse et tiquetée sur un fond de hâle, une peau restée une peau de campagne, en dépit de toute la parfumerie parisienne. […] Donc ç’a été, pendant tout l’été, des courses de toute la journée, cahotées dans de mauvais fiacres sur les chemins de la banlieue, en compagnie de la dévouée Mlle Aimée, mourante de la poitrine, cette longue et maigre fille à l’éternelle robe noire : couple de moribonds s’appuyant l’un sur l’autre, et que les concierges voyaient, avec une curiosité étonnée, s’essouffler à monter des escaliers, pour visiter, haletants tous les deux, les maisons à vendre.

1032. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1872 » pp. 3-70

Jules Favre peut être un mauvais diplomate, mais il est moins coupable qu’on ne le croit. […] Ne sachant que faire, il entre dans la boutique d’un mauvais petit revendeur, chez lequel il trouve un joli morceau de tapisserie. […] Dimanche de Pâques 1er avril Au lit, où je passe ma journée, je pense combien cette semaine sainte m’est mauvaise, depuis des années, combien elle emporte de ma vitalité, à chaque renouveau des printemps. […] Du reste pour les gens superstitieux, les mauvais présages n’ont pas manqué.

1033. (1857) Cours familier de littérature. IV « XIXe entretien. Littérature légère. Alfred de Musset (suite) » pp. 1-80

Laissez-nous donc analyser lourdement et péniblement cette double ivresse, l’une saine, l’autre malsaine qui sort des coupes et des fleurs de ce charmant poète, et si nous sommes trop sévères, trop délicats, trop froissés par le mauvais pli d’une feuille de rose comme le Sybarite, ne vous y trompez pas, ce n’est pas mollesse, c’est conscience ; rien de ce qui froisse l’âme ou de ce qui ternit la pudeur ne doit être pardonné à celui qui écrit pour la jeunesse, ce printemps de la pureté. […] Poursuivons, car le poète ne se lasse pas lui-même de répandre les odeurs de l’Éden sur ce méphitisme du mauvais lieu. […] bon ou mauvais, inflexible ou fragile, Humble ou fier, triste ou gai, mais toujours gémissant, Cet homme, tel qu’il est, cet être fait d’argile, Tu l’as vu, Lamartine, et son sang est ton sang. […] Ce ne fut que cinq ou six ans après que, rouvrant par hasard à Saint-Point un tiroir longtemps fermé, je relus ce commencement de réponse, et que, me repentant de mon impolitesse involontaire, je résolus de la compléter ; mais il y avait apparemment ce qu’on appelle un guignon entre Musset et moi, car un nouvel incident m’arracha encore la plume de la main, et dans mon impatience d’être ainsi interrompu, je me hâtai de coudre à ce commencement un mauvais lambeau de fin, sans qu’il y eût ni milieu, ni corps, ni âme à ces vers : aussi restèrent-ils ce qu’ils sont dans mes œuvres, aussi médiocres et aussi indignes de lui que de moi-même.

1034. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Nouvelles lettres de Madame, mère du Régent, traduites par M. G. Brunet. — II. (Fin.) » pp. 62-79

Elle détestait ces conversations de pure politesse, où l’on parle sans avoir rien à dire : J’aime bien mieux être seule qu’avoir à me donner le tourment de chercher ce que j’aurai à dire à chacun ; car les Français trouvent mauvais qu’on ne leur parle pas, et alors ils s’en vont mécontents ; il faut donc se mettre en peine de ce qu’on peut leur dire ; aussi suis-je contente et tranquille lorsqu’on me laisse dans ma solitude… Elle faisait exception avec moins de déplaisir quand il s’agissait des Allemands de qualité, qui demandaient tous à être présentés chez elle et qu’elle accueillait fort bien. […] Je ne crois pas qu’il y ait dans Paris, tant parmi les ecclésiastiques que parmi les gens du monde, cent personnes qui aient la véritable foi chrétienne, et même qui croient en notre Sauveur ; cela me fait frémir. » Le peuple de Paris sentait dans Madame une princesse d’honneur, de probité, incapable d’un mauvais conseil et d’une influence intéressée ; aussi elle était en grande faveur auprès des Parisiens, et plus même qu’elle ne le méritait, disait-elle, se mêlant aussi peu des affaires.

1035. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Madame Dacier. — II. (Fin.) » pp. 495-513

Il se dit de part et d’autre beaucoup de choses bonnes et mauvaises, spirituelles et grossières, excellentes et ridicules ; chacun des combattants y dessina son caractère encore plus qu’il n’éclaircit la question. […] Méconnaissant dans Homère, ou plutôt n’estimant point cette langue si abondante et si riche, qui est comme voisine de l’invention et encore toute vivante de la sensation même, il préférait nettement la nôtre : « J’oserai le dire à l’avantage de notre langue, je la regarde comme un tamis merveilleux qui laisse passer tout ce que les anciens ont de bon, et qui arrête tout ce qu’ils ont de mauvais. » Enfin, s’emparant d’un mot de Caton l’Ancien pour le compléter et le perfectionner à notre usage, il concluait en ces termes : Caton le Censeur connaissait parfaitement l’esprit général des Grecs, et combien ils donnaient au son des mots, lorsqu’il disait que la parole sortait aux Grecs des lèvres, et aux Romains du cœur ; à quoi j’ajouterais, pour achever le parallèle, qu’aux vrais modernes elle sort du fond de l’esprit et de la raison.

1036. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Santeul ou de la poésie latine sous Louis XIV, par M. Montalant-Bougleux, 1 vol. in-12. Paris, 1855. — II » pp. 39-56

Les rieurs du dehors faisaient courir d’autre part des vers français, et pas trop mauvais, censés fait par les jansénistes courroucés : il était entre deux feux ; ou encore, comme on lui faisait dire en une métaphore gastronomique qui lui allait bien : « Que suis-je pour décider sur de si grands débats ? […] Ce ne serait donc qu’à un souper de l’avant-veille qu’il lui aurait fait cette mauvaise plaisanterie du tabac, et le mal ainsi aurait couvé trente-six heures sans éclater.

1037. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Le duc de Rohan — III » pp. 337-355

Richelieu reproche à Rohan d’avoir aidé au mécontentement des Grisons par son mauvais gouvernement et par des concussions, par des profits illicites dont il va jusqu’à nommer les intermédiaires et les porteurs ; et, flétrissant dans les termes les plus durs la capitulation finale en date du 26 mars 1637, qui fut consommée le 5 mai, et par laquelle, cédant aux Grisons révoltés, le duc leur remit la Valteline contrairement aux ordres du roi, Richelieu l’accuse d’avoir été pris d’une terreur panique : Il est certain, dit le cardinal, qu’il avait jusques alors porté à un haut point glorieusement les affaires du roi en la Valteline ; mais sa dernière action, non seulement ruina en un instant tout ce qu’il avait fait de bien les années précédentes, mais apportait plus de déshonneur aux armes de Sa Majesté que tout le passé ne leur avait causé de gloire. […] Le duc de Rohan était petit de taille et, dit-on, d’assez mauvaise mine.

1038. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Charles-Victor de Bonstetten. Étude biographique et littéraire, par M. Aimé Steinlen. — II » pp. 435-454

Le peuple opprimé se faisait à ce régime comme on se fait à un mauvais climat. […] Il n’y rencontrait à chaque pas que des visages mauvais et durs, qui consternaient sa bienveillance.

1039. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Mémoires de Mme Elliot sur la Révolution française, traduits de l’anglais par M. le comte de Baillon » pp. 190-206

Mme Elliott l’a instinctivement en horreur et nous le dénonce comme le mauvais génie du lieu. […] Ce marquis de Champcenetz, frère aîné de l’aimable mauvais sujet, fait dans tout ce récit, on en conviendra, une assez triste figure.

1040. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Études de politique et de philosophie religieuse, par M. Adolphe Guéroult. »

Si, sous un mauvais gouvernement ou une mauvaise administration, sous une faible police, fût-elle républicaine, je ne puis rentrer chez moi passé minuit sans risque d’être assailli et dévalisé, je n’ai pas pleinement la liberté de rentrer passé minuit, tandis que sous une administration vigilante, qui éclaire les rues, même les plus écartées, et qui les surveille par ses gardiens, j’ai cette liberté de rentrer à l’heure qu’il me plaît.

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