Sauf quelques inexactitudes, il connaît fort bien la littérature de sa nation, marque aux auteurs leur rang, classe les genres, remonte jusqu’au vieux Chaucer, qu’il traduit et rajeunit. […] Les disputes de dogme, un instant rejetées dans l’ombre par les mœurs débauchées et sceptiques, avaient éclaté de nouveau, enflammées par le catholicisme bigot du prince et par les craintes justifiées de la nation. […] Quand il aborda l’Énéide, « la nation, dit Johnson, parut se croire intéressée d’honneur à l’issue. ». […] Le roi pour lequel il avait écrit était détrôné et chassé ; la religion qu’il avait embrassée était méprisée et opprimée ; catholique et royaliste, il était confiné dans un parti vaincu, que la nation considérait avec ressentiment et avec défiance comme l’adversaire naturel de la liberté et de la raison. […] The nation is in too high a ferment for me to expect either fair war, or even so much as fair quarter, from a reader of the opposite party.
4° Mémoire sur les prétendus Émigrés savoisiens, dédié à la Nation française et à ses législateurs. […] Heureux mille fois les hommes qui ne sont appelés à contempler que dans l’histoire les grandes révolutions, les guerres générales, les fièvres de l’opinion, les fureurs des partis, les chocs des empires et les funérailles des nations ! […] Or, cette réunion à la France la gêne, et le vœu de la nation, quoiqu’il n’ait jamais existé que dans la boîte à l’encre du citoyen Gorin 193, forme cependant un obstacle très-fort aux yeux de la C. […] Raymond, un religieux dominicain, Lithuanien de nation et professeur de langues orientales. […] La Constitution de l’an III, dont l’auteur des Considérations se moque, tenait déjà compte à sa manière, autant qu’elle le pouvait dans l’effervescence, de cette moyenne encore informe de la nation que les journées de Fructidor et autres coups d’État refoulèrent.
Il fut un temps où le second semblait réunir autour de lui toutes les espérances de la nation. […] le courage des Grecs ne m’était pas connu, s’écrie-t-il ; c’est une nation pleine de valeur ; je l’ai éprouvé contre mon attente ! […] Il est sans doute plus facile d’inventer que de chercher les véritables causes qui jettent tant de diversité dans le goût de quelques nations voisines. […] C’était là que la Divinité, toujours présente, recevait les hommages de toutes les nations, c’est de là qu’elle jetait un coup d’œil égal sur toutes les parties de la terre soumise à son empire. […] L’ennemi pousse des cris de victoire, le destin de l’armée chancelle, la nation tremble pour son roi.
que la Nation a placés au rang des Grands Hommes qui l’honorent ; si un Livre dont on a fait vingt éditions dans le Royaume, dont cinq dans la Capitale, est un Livre très-obscur, &c.
Nous avons d’abord cru que cette primauté étoit pour suivre l’ordre alphabétique ; mais le Compilateur assure très-positivement que c’est par ordre de mérite & de distinction : c’est parce que je crois , dit-il très-sérieusement, pouvoir assigner à cet Auteur estimable la premiere place parmi les Philosophes de nos jours, non seulement de ma Nation, mais de toutes celles de l’Europe .
Les ouvrages de Rabelais sont depuis plus de deux cens ans entre les mains de la nation, qui y cherche le sel de la plaisanterie, & qui n’y trouve souvent que le dégoût & l’ennui.
Plus les édifices publics sont durables, plus longtemps ils attestent le bon ou le mauvais goût d’une nation, plus il convient que ceux qui président à cette partie de l’administration aient le goût sûr et grand.
C’est le grand Pompée, le vainqueur de tant de nations, et la terreur des rois de l’Orient, massacré par de vils esclaves.
Comme on le pouvait prévoir, une simple institution politique, un simple corps d’État, un ordre de la nation. […] Pour ruiner l’autorité pontificale, « ils ont transporté aux nations l’infaillibilité du pape ». […] L’état d’esprit anachronique dans une partie de la nation empêche la nation de marcher d’un pas égal. […] Ce qu’il faut faire cesser, c’est cet état présent d’une nation qui est essentiellement industrielle et qui est menée par une noblesse. […] Ce qui était jadis une classe immense de la nation n’est plus qu’une portion minime de la population.
Là, s’il n’y a plus de langue, c’est qu’il n’y a plus de nation. […] On reconnaît que ses bienfaits sont admirables pour la vie sociale et politique, que son impulsion est toute-puissante sur le bien-être des nations, mais, sitôt qu’il s’agit de littérature, on la désavoue. […] Est-ce assez d’un grand poète, en nos temps modernes, pour distraire les nations du sentiment de leurs maux domestiques ? […] Grande et étrange nation que la nôtre ! […] Béranger, c’est le type le plus parfait, le plus ingénieux, le plus aimé du caractère de notre nation.
Un esprit aussi frivole et aussi superficiel que celui de Voltaire, n’était pas capable de saisir la différence qu’il y a entre un peuple de marchands et une nation telle que la nôtre ; il ne voyait pas qu’il se mêle toujours dans la profession du commerce un intérêt sordide très opposé à l’honneur, qui était le principe de la monarchie. […] Que vient-il donc faire ce forcené avec une douzaine de misérables, contre une nation victorieuse, puisque six cents hommes de cette nation ont suffi pour détruire en un instant tout son empire ? […] Ainsi se fabriquaient, ainsi se disposaient ces prétendus prodiges de poésie et de philosophie, destinés à subjuguer la première nation de l’univers, ces chefs-d’œuvre qu’une admiration aveugle a longtemps consacrés. […] Cela ressemble assez à cette doctrine du tyrannicide, autrefois enseignée par des moines, quelquefois pratiquée par des furieux imbéciles, mais toujours abhorrée de la saine partie de la nation française. […] Un prince qui, dans une assemblée de la nation, ferait un étalage aussi ampoulé de ses faits et gestes, ne serait défendu des sifflets que par le respect dû à la majesté royale.
Elle a semblé vivre à de certains moments sous de grands papes ; mais c’étaient des cabinets superposés : comme nation, elle n’a cessé d’être morte. » Et encore : « Rome est morte et bien morte.
Il n’est permis de suivre toutes les années d’un Prince, & toutes ses actions en détail, que quand on entreprend d’écrire sa Vie en particulier ; alors on peut ne parler des affaires, que pour le faire paroître tel qu’il a été : mais en écrivant l’Histoire d’une Nation, il ne faut parler des Princes, que pour faire paroître quels ont été les différens ressorts de l’Etat.
L'Auteur y expose tout ce qui a rapport aux anciens exercices si chers autrefois à la Nation, comme les joûtes, les combats, les triomphes, les tournois, les carrousels, les courses de bague ; il y parle aussi des cartels, des duels, des dégradations des noblesse, de chevalerie, & de mille autres objets aussi curieux qu'intéressans.
En attendant, il appelle sur ces questions l’attention de tous les critiques qui comprennent quelque chose au mouvement progressif de la pensée humaine, qui ne cloîtrent pas l’art dans les poétiques et les règles, et qui ne concentrent pas toute la poésie d’une nation dans un genre, dans une école, dans un siècle hermétiquement fermé.
À la voix du premier, les fleuves rebroussent leur cours, le ciel se roule comme un livre, les mers s’entrouvrent, les murs des cités se renversent ; les morts ressuscitent, les plaies descendent sur les nations.
Il y a pour les nations comme pour les hommes des chutes grotesques.
Il n’y a encore que les juifs qui avaient des privilèges qui sont admis ; mais vous verrez bientôt que toute la nation aura les mêmes avantages. Il était réservé à notre siècle de recevoir comme amie la seule nation que Dieu ait marquée d’un signe de réprobation, d’oublier la mort qu’elle a fait souffrir à Notre-Seigneur et les bienfaits que ce même Seigneur a toujours répandus sur la France, en faisant triompher ses ennemis et leur ouvrant avec joie notre sein. […] C’est là un triste état moral pour une nation et le plus grand symptôme de l’énervement intellectuel. […] Il y a longtemps que je l’ai pensé : la seule garantie de l’avenir, d’un avenir de progrès, de vigueur et d’honneur pour notre nation, est dans l’étude, — et surtout dans l’étude des sciences naturelles, physiques, chimiques et de la physiologie.
À peine osent-ils se montrer dans les rues sans être hués… Comme notre nation et notre siècle sont bien autrement éclairés » qu’au temps de Luther, « on ira jusqu’où on doit aller ; on bannira tous prêtres, tout sacerdoce, toute révélation, tout mystère… » — « On n’ose plus parler pour le clergé dans les bonnes compagnies ; on est honni et regardé comme des familiers de l’inquisition… Les prêtres ont remarqué cette année une diminution de plus d’un tiers dans le nombre de leurs communiants. […] À la fin les économistes d’un côté et les parlementaires de l’autre donnent le signal. — « Vers 1750, dit Voltaire524, la nation rassasiée de vers, de tragédies, de comédies, de romans, d’opéras, d’histoires romanesques, de réflexions morales plus romanesques encore, et de disputes sur la grâce et les convulsions, se mit à raisonner sur les blés. » D’où vient la cherté du pain ? […] Dans l’esprit public et par leurs études, s’établit l’opinion que la nation est au-dessus du roi, comme l’Église universelle est au-dessus du pape. » — Le changement est frappant, presque subit. […] Le sacrifice est voté par acclamation ; ils viennent d’eux-mêmes l’offrir au Tiers-état et il faut voir dans les procès-verbaux manuscrits leur accent généreux et sympathique. « L’ordre de la noblesse du bailliage de Tours, dit le marquis de Lusignan545, considérant que ses membres sont hommes et citoyens avant que d’être nobles, ne peut se dédommager, d’une manière plus conforme à l’esprit de justice et de patriotisme qui l’anime, du long silence auquel l’abus du pouvoir ministériel l’avait condamné, qu’en déclarant à ses concitoyens qu’elle n’entend plus jouir à l’avenir d’aucun des privilèges pécuniaires que l’usage lui avait conservés, et qu’elle fait par acclamation le vœu solennel de supporter dans une parfaite égalité, et chacun en proportion de sa fortune, les impôts et contributions générales qui seront consenties par la nation. » — « Je vous le répète, dit le comte de Buzançais au Tiers-état du Berry, nous sommes tous frères, nous voulons partager vos charges… Nous désirons ne porter qu’un seul vœu aux états et, par là, montrer l’union et l’harmonie qui doivent y régner.
Ce sont deux conquérants pacifiques qui ont planté le drapeau de leur langue et de leurs idées bien au-delà des limites de leur nation et de leur langue. […] Ce fut une autre nation qui les révéla à ses yeux. […] Voltaire plaça les fonds provenant de cette munificence de la nation anglaise dans les opérations de finances et de fournitures d’armée du fameux Pâris du Vernet, le plus habile et le plus heureux des spéculateurs du temps en France. […] Tout ce qu’il y a de plus immortel en lui, comme talent et comme caractère, date de Ferney, à l’exception de Zaïre et de Mérope ; mais le Siècle de Louis XIV, le Dictionnaire philosophique, l’Essai sur l’histoire et sur les mœurs des nations, cette véritable histoire universelle en fragments retrouvés sous des ruines, l’Orphelin de la Chine, Tancrède, les romans philosophiques, les contes en prose et en vers, les articles improvisés pour l’Encyclopédie, les épîtres horatiennes, les satires légères sans modèle dans l’antiquité, les stances reposées comme une eau limpide dans une coupe d’or, les lettres familières, où le vers accidentel se mêle involontairement à la prose comme l’écume pétillante au vin généreux sur les bords du verre, les Commentaires sur Corneille et Racine, la Correspondance enfin, cette véritable encyclopédie du cœur, de l’âme, de l’esprit, du bon sens, de l’amitié, du charme, des passions de ce grand homme universel, tout cela date du bord du Léman, tout cela est le fruit de ce qu’on appelle la caducité dans les hommes vulgaires.
Nulle âme n’était plus faite que celle de Bonstetten pour sentir et pour exprimer avec fraîcheur la douceur de la société, pour respirer la fleur de sociabilité dans son parfum et l’esquisser avec ses différentes nuances. « En passant d’une nation à l’autre, disait-il, on distingue bien vite le sentiment par lequel on est abordé. […] Bonstetten parlait ainsi de Voltaire pour l’avoir entendu et après l’avoir pu comparer à tant d’autres intéressants causeurs de toute nation ; on croit sentir cependant qu’il songeait surtout à Mme de Staël en écrivant cela, et qu’il se souvenait de la brillante virtuose, de la grande harmoniste de Coppet. […] Toutes les nations civilisées ont commencé par l’imitation de bons modèles étrangers.
C’est que trente ans, en effet, sont un long intervalle, même dans la vie des nations : la constitution de l’atmosphère morale a le temps de s’y modifier. […] les pauvres Indiens prennent leurs vieux parents dans leurs bras ; les femmes chargent leurs enfants sur leurs épaules ; la nation se met enfin en marche, emportant avec elle ses plus grandes richesses. […] Les Espagnols, en vrais brutaux, lâchent leurs chiens sur les Indiens comme sur des bêtes féroces ; ils tuent, brûlent, massacrent, pillent le Nouveau Monde comme une ville prise d’assaut, sans pitié comme sans discernement… Les Américains des États-Unis, plus humains, plus modérés, plus respectueux du droit et de la légalité, jamais sanguinaires, sont plus profondément destructeurs, et il est impossible de douter qu’avant cent ans il ne restera pas dans l’Amérique du Nord, non pas une seule nation, mais un seul homme appartenant à la plus remarquable des races indiennes… » L’exposition ainsi faite, le moral et l’esprit de la scène ainsi expliqués complètement, il la raconte si bien que cela finit par être une peinture navrante : « Six à sept mille Indiens ont déjà passé le grand fleuve, ceux qui arrivaient à Memphis y venaient dans le dessein de suivre leurs compatriotes.
Cette idée d’une descendance espagnole sourit à son imagination ; elle n’en est pas bien certaine, mais elle tâche de se le persuader, et elle convie son frère à l’aider à y croire : « Je me suis toujours sentie attirée vers l’étude de la langue espagnole, parce que Douai est tout rempli des vestiges de cette nation. — Nous-mêmes, je crois, mon bon frère, nous en sortons du côté de la mère de mon père. […] On consacre tous les jours de longues pages aux hommes soi-disant de puissance et d’action qui, bien souvent gouvernés eux-mêmes, passent pour avoir gouverné le monde, à ceux qui ont traité et souvent trafiqué des nations : pourquoi regarderait-on à quelques pages de plus ou de moins, quand il s’agit de ces êtres d’élite qui ont habité et véritablement régné dans la sphère spirituelle, dans le monde du cœur, et qui n’ont cessé toute leur vie de cultiver et de cueillir la fleur des meilleurs sentiments ; êtres innocents et brisés, mais qui parlent par leurs blessures et qui apprennent ou rappellent de douces choses, — ou des choses amères, exprimées avec douceur, — aux hommes leurs semblables ? […] L’irritation patriotique contre notre nation que l’on confondait avec son gouvernement était extrême : c’était un mauvais signe, en arrivant dans une ville, que d’être Français.
Voltaire, Essai sur le poème épique [‘légère’]. « Notre nation, regardée comme si légère par les étrangers, est de toutes les nations la plus sage, la plume à la main. […] C’est que, de toutes les nations polies, la nôtre est la moins poétique.
Les estampes431 représentent dans une chaumière délabrée deux enfants, l’un de cinq ans, l’autre de trois, auprès de leur grand’mère infirme, l’un lui soulevant la tête, l’autre lui donnant à boire ; le père et la mère qui rentrent voient ce spectacle touchant, et « ces bonnes gens se trouvent alors si heureux d’avoir de tels enfants qu’ils oublient qu’ils sont pauvres » « Ô mon père432, s’écrie un jeune pâtre des Pyrénées, recevez ce chien fidèle qui m’obéit depuis sept ans ; qu’à l’avenir il vous suive et vous défende ; il ne m’aura jamais plus utilement servi. » — Il serait trop long de suivre dans la littérature de la fin du siècle, depuis Marmontel jusqu’à Bernardin de Saint-Pierre, depuis Florian jusqu’à Berquin et Bitaubé, la répétition interminable de ces douceurs et de ces fadeurs L’illusion gagne jusqu’aux hommes d’État. « Sire, dit Turgot en présentant au roi un plan d’éducation politique433, j’ose vous répondre que dans dix ans votre nation ne sera plus reconnaissable, et que, par les lumières, les bonnes mœurs, par le zèle éclairé pour votre service et pour celui de la patrie, elle sera au-dessus des autres peuples. […] Les adresses de l’Assemblée nationale à la nation seront des harangues de ce style. […] Ce sont des composés de laboratoire qui restent inoffensifs dans le cabinet et sous la main du chimiste, mais qui deviennent terribles dans la rue et sous les pieds du passant. — On ne s’en apercevra que trop bien tout à l’heure, quand les explosions iront se propageant sur tous les points du territoire, quand, au nom de la souveraineté du peuple, chaque commune, chaque attroupement se croira la nation et agira en conséquence, quand la raison, aux mains de ses nouveaux interprètes, instituera à demeure l’émeute dans les rues et la jacquerie dans les champs.
Cette souple nature s’est développée à travers trois quarts de siècle, recueillant toutes les influences, frémissant à tous les souffles ; les acquisitions, les transformations, les progrès de cet esprit sont exactement les acquisitions, les transformations, le progrès de l’esprit public ; et il n’a été si puissant que parce que son développement interne coïncidait avec le mouvement des idées de la nation : son rôle fut de lancer aux quatre coins du monde les pensées fraîchement écloses dans toutes les têtes. […] Comme Newton enterré à Westminster, Molière, Racine, protégés de Louis XIV, feraient voir au public de quelle façon devaient être traités les penseurs, les poètes qui sont l’honneur d’une nation : ce passé jugerait le présent. […] Ainsi établi dans sa forme définitive, il n’eut pas de peine à prendre place en 1756 dans l’Essai sur l’Histoire générale, et sur les mœurs et l’esprit des nations depuis Charlemagne jusqu’à nos jours.
Toute nation, où brilla l’écrit (à défaut de fondations au pieux ciment que j’admirai), possède une somme, pas dénommable autrement que son « Fonds » littéraire : nous, Français. […] Tous, je m’en fais garant, ont, d’eux-mêmes, douté d’une spéciale largesse de la nation en faveur de leur personne — soit, qu’aient éclairé de sublimes écrivains morts, à vente certaine : mais, l’habitude acquise et une distraction prolongée au maniement de vastes affaires ! […] MESDAMES, MESSIEURS Jusqu’ici et depuis longtemps, deux nations, l’Angleterre, la France, les seules, parallèlement ont montré la superstition d’une Littérature.
De même que l’Essai sur les mœurs et l’esprit des nations, l’Encyclopédie sera plutôt débattue que définitivement jugée. […] Je ne suis pas si inquiet sur la gloire de Bernardin de Saint-Pierre que cet apologiste qui, trouvant sans doute Paul et Virginie un trop petit bagage, nous renvoie aux Études, « non pour y voir le grand peintre, dit-il, ce qui est n’y rien voir, mais pour y admirer la pensée supérieure qui unit l’homme aux nations, les nations au monde, et le monde à Dieu125. » Si Bernardin de Saint-Pierre avait à attendre sa gloire jusqu’au jour où le monde sera d’accord avec son apologiste sur « la pensée supérieure » des Études, il l’attendrait longtemps.
Mais aussi la combinaison de ces éléments éternels varie incessamment ; vices et vertus changent suivant les temps et de forme et d’intensité ; la moralité dans l’humanité et même dans une seule nation a son va-et-vient, sa hausse et sa baisse, autrement dit son évolution. […] Dans ce qui reste après cette grave amputation, l’écrivain est condamné au perpétuel dilettantisme, qui jongle avec les opinions et dit tour à tour blanc et noir ; impassible, il risque de composer des ouvrages qui ont le froid et le poli de la glace ; détache de la lutte des idées, il est réduit au souci exclusif de la forme ; forcé de s’abstenir en toute question qui touche à la vie profonde de la nation, il s’abâtardit en une sorte de veulerie et de lâcheté intellectuelles ; il en arrive à fabriquer de jolis riens, des bibelots de décadence, flacons ciselés où ne demeure plus une goutte de liqueur, plus un atome de parfum ni de pensée. […] Je n’ai point à discuter ici ces deux théories, qui alternent dans le développement d’une nation.
La légitimité, la grâce de Dieu, la monarchie pharamonde, les nations marquées à l’épaule de la fleur de lys, la possession des peuples par fait de naissance, la longue suite d’aïeux donnant droit sur les vivants, ces choses-là luttent encore sur quelques points, à Naples, en Prusse, etc., mais elles se débattent plutôt qu’elles ne luttent ; c’est de la mort qui s’efforce de vivre. […] La double identification du roi avec la nation et du roi avec Dieu, c’est là le travail de l’histoire courtisane. […] Sans doute, pour rendre ce que nous disons ici sensible par les faits, il est utile qu’un homme puissant ait marqué le temps d’arrêt entre l’écroulement du monde latin et l’éclosion du monde gothique ; il est utile qu’un autre homme puissant, venant après le premier comme l’habileté après l’audace, ait ébauché sous forme de monarchie catholique le futur groupe universel des nations, et les salutaires empiétements de l’Europe sur l’Afrique, l’Asie et l’Amérique ; mais il est plus utile encore d’avoir fait la Divine Comédie et Hamlet ; aucune mauvaise action n’est mêlée à ces chefs-d’œuvre ; il n’y a point là, à porter à la charge du civilisateur, un passif de peuples écrasés ; et, étant donnée, comme résultante, l’augmentation de l’esprit humain, Dante importe plus que Charlemagne, et Shakespeare importe plus que Charles-Quint.
Renan, on voit les différentes nations tributaires du roi de Perse représentées par un personnage qui porte le costume de son pays et tient entre les mains les productions de sa province pour en faire hommage au souverain. Telle est l’humanité : chaque nation, chaque forme intellectuelle, religieuse, morale, laisse après elle une courte expression qui en est comme le type abrégé et expressif, et qui demeure pour représenter les millions d’hommes à jamais oubliés qui ont vécu et qui sont morts groupés autour d’elle. » Cette conscience, cette mémoire du genre humain, c’est donc comme une Arche de Noë perpétuelle dans laquelle il ne peut entrer que les chefs de file de chaque race, de chaque série.
(A comparative view of the French and of the English nation, by John Andrews, 257.) […] Mon peuple n’est qu’un avec moi ; les droits et les intérêts de la nation, dont on ose faire un corps séparé du monarque, sont nécessairement unis avec les miens et ne reposent qu’entre mes mains ».
L’histoire de chaque chef-d’œuvre contient en raccourci une histoire du goût et de la sensibilité de la nation qui l’a produit et des nations qui l’ont adopté.
leur fut-il répondu ; toute cette foule, qui ne connaît pas la Loi, est une canaille maudite 967. » Jésus restait ainsi à Jérusalem un provincial admiré des provinciaux comme lui, mais repoussé par toute l’aristocratie de la nation. […] Il est probable, en effet, que sans l’exaspération causée par tant de traits amers, Jésus eût pu longtemps rester inaperçu et se perdre dans l’épouvantable orage qui allait bientôt emporter la nation juive tout entière.
Après tout, on n’a jamais tant d’efforts à faire en France pour revenir à cette netteté, car elle n’est pas seulement de forme chez nous, elle constitue le fond de la langue et de l’esprit de notre nation ; elle en a été la disposition et la qualité évidente durant des siècles, et, au milieu de tout ce qui s’est fait pour l’altérer, on en retrouverait encore de nombreux et d’excellents témoignages aujourd’hui. J’irai même plus loin et je dirai que, quoi qu’on fasse, la netteté est et sera toujours de première nécessité chez une nation prompte et pressée comme la nôtre, qui a besoin d’entendre vite et qui n’a pas la patience d’écouter longtemps.
Elle a célébré les héros, les conquérans : les fondateurs des empires, les législateurs des nations. […] Elle en fut indignée, & s’écria : « Il est tombé absolument en démence ; accident si ordinaire aux gens qui, comme lui, se mêlent de faire des vers, que j’aurois dû le prévoir, & ne pas souffrir qu’un pareil homme pût se vanter d’être connu de moi. » On en appelloit aux autres nations qui font plus de cas que nous des poëtes, & qui ne dédaignent pas quelquefois de les mettre à la tête du gouvernement.
Siécle, contenant ce qu’il y a de plus curieux, de plus utile & de mieux vérifié dans toutes les rélations des différentes Nations du monde : ouvrage d’abord traduit de l’anglois, & continué depuis par ordre de Monseigneur le Chancelier de France, 1745. […] & 1630. , sous la conduite du Commandeur de Razielli, décrits par Jean Armand, dit Mustapha, Turc de nation, in-8°.
De même, l’étude la plus attentive ne pourra relever les innombrables rapports de cause, d’effet, de coïncidence, que cette littérature soutient avec la constitution physique et mentale d’une nation, avec la nature du pays où elle se développe, avec toutes les branches de la civilisation dont elle fait partie.
Les Productions de l’esprit ont toujours eu une influence marquée sur le génie des Nations, sur leurs mœurs, sur les révolutions qu’elles ont éprouvées, & peuvent même être la source de ces révolutions.
Il fait aimer le premier, par l'adresse avec laquelle il présente, d'un côté, la douceur & la politesse ingénieuse de ses mœurs, & de l'autre, les divers agrémens de son style ; il fait admirer Montesquieu, en le représentant sous les traits précieux qui caractérisent l'Homme bienfaisant, le Moraliste profond, le Philosophe conséquent, & le Législateur des Nations.
Ces mouvements d’agrégation des masses autour de l’homme qui sait se révéler leur maître ont lieu sans acception de frontière, brisent le moral des nations et suscitent souvent au héros d’une race des sectateurs d’une autre.
Les nations ne jettent pas à l’écart leurs antiques mœurs, comme on se dépouille d’un vieil habit.
On n’était obligé qu’à peindre, et non pas à réfléchir ; les vices et les vertus des nations n’en étaient encore qu’à leur âge poétique.
Toutes nos sagesses et toutes nos folies ont été mobilisées avec toute la nation.
Dans tout son ouvrage on le voit qui guette en chaque état politique le vice secret par ou la nation pourra s’y laisser surprendre. […] Une nation n’est pas poussière humaine, avec un trône au milieu. […] Il sait que les nations se développent selon le mouvement naturel des puissances qu’elles portent en elles, et ces puissances, il montre ce qu’elles étaient en France, et ce qu’il importe qu’elles restent. […] C’est le sentiment que le passé a une vertu propre, que les institutions du passé sont bonnes, même quand elles sont un peu mauvaises, comme maintenant dans la nation l’idée de la continuité des efforts, de la longueur de la tâche, et de la patience commune. […] Cette force est l’origine de tout pouvoir chez les hommes ; par cette supériorité seule les nations du Nord ont conquis notre hémisphère depuis la Chine jusqu’à l’Atlas. » Voilà à quoi sert de savoir quelque chose.
Nations ! […] Il y en a de toutes les nations et de toutes les langues, anglais, espagnols, allemands, italiens, provençaux, etc. […] quel soufflet à la nation ! […] Chez les nations germaniques, ce mot emporte ridée de probité, d’énergie ; voyez la belle ballade de Bürger, intitulée : Der brave Mann. En France, à côté de cette acception, qui se trouve dans brave homme, en paraît une autre, plus particulière à la nation, dans homme brave, c’est-à-dire homme vaillant.
Son amour ne s’adressait pas seulement à cet être collectif qu’on appelle la nation ou à cette abstraction qu’on appelle l’humanité. […] Il lui fallait une Bible plus vaste, où toutes les nations auraient mis le meilleur de leur âme et de leur histoire. […] Il appelle les bains de mer la vita nuova des nations. […] Ils sentent tous que, tant qu’ils ne seront pas une grande nation armée, ils seront, comme autrefois, à la merci de tout envahisseur. […] Si pendant dix ans encore la France empêche l’Autriche d’envahir l’Italie, ils comptent que le nombre des libéraux sera doublé et que la nation sera faite.
Son nom peut servir à deux époques différentes dans l’Histoire, chez notre Nation : au développement de la Philosophie, & à la corruption du goût.
Qu’on lise avec attention son Epître sur la décadence de notre Littérature, on y reconnoîtra sans peine le danger des travers qu’il condamne, la nécessité des préservatifs qu’il leur oppose, la sagesse des réflexions qu’il présente ; on y admirera sur-tout un Athlete vigoureux, luttant avec avantage contre les Champions de la nouveauté & du mauvais goût ; témoin ce morceau qu’on ne sauroit trop souvent opposer à la hardiesse des Novateurs & à la légéreté de notre Nation : Oui, nous verrons bientôt de petits Conquérans, Du Parnasse François audacieux Tyrans, De leurs Maîtres fameux proscrire les merveilles, Et leur orgueil briser le sceptre des Corneilles.
Nous le répéterons encore, malgré cela, le Duc de la Rochefoucauld doit être regardé comme un Génie qui fait honneur à sa Naissance, à son Siecle, à sa Nation.
Tel est le caractere de notre Nation : quelques Auteurs agréables, en l'amusant par des Contes ou des Opéra comiques, suffisent pour lui faire oublier les Auteurs vraiment estimables.
Une nation est grande, une famille petite ; ce qui n’est rien pour l’une est tout pour l’autre.
Il fut mis en prison à Toulouse, l’an 1553, pour un discours qu’il eut l’audace d’y débiter contre le parlement & contre la nation Toulousaine, qu’il taxoit d’ignorance & de barbarie.
Mais c’est en traitant de la Comédie chez les Modernes, que l’on donnera une connaissance plus étendue des principes de ce bel art, et des moyens imaginés pour varier l’instruction et les amusements que la bonne comédie doit offrir à la société chez une nation policée.
Or, c’est un autre principe de toute vérité, qu’il faut travailler sur un fonds antique, ou, si l’on choisit une histoire moderne, qu’il faut chanter sa nation.
Ce livre est d’autant plus cher aux lecteurs françois, que presque tous les exemples sont tirés des Ecrivains de la nation.
Il est pour un grand peintre une infinité de joïes et de douleurs differentes qu’il sçait varier encore par les âges, par les temperamens, par les caracteres des nations et des particuliers, et par mille autres moïens.
n’ont pas les proportions aussi élegantes, ni le corsage et l’air aussi nobles que les chevaux que les sculpteurs ont faits depuis qu’ils ont connus les chevaux du nord de l’Angleterre, et que l’espece de ces animaux s’est embellie dans differens païs par le mêlange que les nations industrieuses ont sçû faire des races.
Manéthon, grand pontife d’Égypte, avait donné à l’histoire des premiers âges de sa nation, écrite en hiéroglyphes, l’interprétation d’une sublime théologie naturelle ; les philosophes grecs donnèrent une explication philosophique aux fables qui contenaient l’histoire des âges les plus anciens de la Grèce.
Maintenant, éclairés sur tant de points par la philosophie et par la philologie, nous allons dans ce quatrième livre esquisser l’histoire idéale indiquée dans les axiomes, et exposer la marche que suivent éternellement les nations.
Ce n’était pas une petite affaire de transporter dans une tragédie française, sur le théâtre d’une nation noble et généreuse, le bourreau de Polyxène et le barbare assassin du vieux Priam. […] C’était l’ancien droit de la guerre, et ce droit existe encore chez quelques nations. […] Britannicus eut le destin du Misanthrope : la nation n’était pas encore mûre pour ces deux chefs-d’œuvre. […] Esther, la faible et timide Esther ne risque-t-elle pas sa vie pour le salut de sa nation, en paraissant devant Assuérus sans être mandée ? […] Et de même que l’épopée est le plus sublime des poèmes, l’histoire des Juifs est la plus sublime des histoires, quoique la nation juive ait été elle-même une des moins estimables nations du monde.
L’offense d’un esprit juste à voir un tel ramas d’incohérences, la douleur d’un jeune homme à voir un vieillard s’égarer si violemment, le ressentiment d’un homme nouveau qui prend sa part dans l’injure proférée par le patricien endurci, et le zèle du futur historien à venger des noms vénérés, le respect aussi des cheveux blancs qui, sans l’amortir, rehausse plutôt et aggrave la vigueur de la réplique, tous ces sentiments très-mesurés, très-apparents, respirent dans l’excellent article que le jeune publiciste, par une forme anticipée, convertit volontiers en une sorte de discours directement adressé à l’adversaire : « Non, s’écrie-t-il, non, nous n’avions pas, avant 89, tout ce que nous avons eu depuis ; car il eût été insensé de se soulever sans motif, et toute une nation ne devient pas folle en un instant. […] Depuis quand a-t-on vu qu’un char, aveuglément lancé, portât-il une nation, ne pouvait verser à un tournant ? […] La nation anglaise se souleva une première fois, et, la seconde, elle se soumit à la plus avilissante oppression, elle laissa mourir Sidney et Russel, elle laissa attaquer ses institutions, ses libertés, ses croyances, mais elle se détacha de ceux qui lui faisaient tous ces maux. Et quand Jacques II, après avoir éloigné ses amis de toutes les opinions et de toutes les époques, se trouva isolé au milieu de la nation morne et silencieuse ; quand, éperdu, effrayé de sa solitude, ce prince qui était bon soldat, bon officier, prit la fuite, personne ne l’attaqua, ne le poursuivit, ne lui fit une offense : on le laissa fuir en le plaignant. […] Mignet, insistant sur le même rapprochement historique, écrivait le 12 février : « Elle (la nation anglaise) fit donc une simple modification de personnes en 1688, pour compléter une révolution de principes opérée en 1640, et elle plaça sur un trône tout fait une famille qui avait la foi nouvelle.
Il a régénéré l’art, puis le théâtre ; il doit régénérer encore la nation. […] L’esprit allemand allait avec Luther s’imposer au monde, lorsque la guerre de Trente ans détruisit la nation allemande ; la légèreté latine envahit le monde ; mais dans le peuple l’esprit national persista, et il créa la musique allemande de Sébastien Bach, le Gœtz de Goethe, l’art allemand qui, à son tour, refera la nation allemande. […] Par suite, l’influence de l’auteur de la sublime Passion et de tant d’autres immortels chefs-d’œuvre sera toute puissante, car en eux se trouvera résumé l’esprit propre de la nation dans toute son essence. C’est en vain que la guerre de Trente-Ans accomplira son œuvre de destruction, détruisant la nation elle-même ; c’est en vain que l’élément étranger le plus frivole, s’insinuera dans les cours des princes, allant jusqu’à trouver des complices dans de nobles et vastes génies comme Haydn et Mozart : l’esprit national subsistera ; il fera surgir l’immortel Beethoven, le pauvre et grand solitaire, le légitime et glorieux héritier de Sébastien Bach !
Je vous retirerai donc d’entre les nations, et je vous rassemblerai de tous les pays, et je vous ramènerai dans votre terre (Ézéchiel, XXXVI, 2448). […] Au cours des trois ères racontées sommairement dans ce livre, le groupe de contiguïté dans lequel les principes se réalisent est toujours le même : la nation. La nation, disais-je p. 202, est « d’abord un but, ensuite une réalité, et plus tard un point de départ ». Lorsque le groupe de contiguïté, en dehors duquel il n’y a point de réalisation, ne sera plus une nation, mais un groupe de nations, n’y aurait-il pas là des difficultés toutes nouvelles, qui pourraient allonger la durée des époques ?
Dès que l’écrivain aborde la biographie d’une nation, dès qu’il cherche dans cette biographie les éléments d’un poème ou d’un roman, il ne peut, sans manquer au dessein qu’il a conçu, bannir de la scène la nation à laquelle appartiennent les personnages de son poème ou de son roman. Or, dans Latréaumont, la nation proprement dite ne paraît pas une seule fois. Tous les incidents du drame se préparent et s’accomplissent sans que la nation intervienne comme acteur ou comme témoin. Latréaumont n’est donc pas un roman historique ; car toutes les fois que la nation est absente, l’histoire disparaît et fait place à l’anecdote. […] La tragédie, en effet, chez quelque nation qu’on la prenne, en Grèce, en Italie ou en France, n’a en vue que la passion.
Ecraser le génie sous prétexte qu’il n’était pas chez Wagner doublé d’un grand caractère, c’est une besogne ingrate : peut-être bien, en allant au fond des choses, tomberons-nous d’accord sur un point, à savoir que la ville réputée la plus intelligente du monde, et que la nation réputée la plus chevaleresque du globe se compromettent singulièrement aux yeux de l’Europe attentive en se montrant si cruelles pour la mémoire d’un grand compositeur qui a fait craquer toutes les musiques, même la musique française, et qui, qu’on le veuille ou non, a sa place marquée dans notre admiration d’artiste. […] Mais moi, bonhomme, qui vais au théâtre pour mon plaisir et qui le prends où je le trouve, je suis la nation tout entière. […] Vous vous rappellerez sans doute, monsieur le directeur, que quand vous eûtes l’intention, si je ne me trompe, en 1881, de faire représenter Lohengrin à Paris, au théâtre des Nations, je fis tout ce qui était en mon pouvoir pour faire aboutir cette tentative, et vous savez que cette fois aussi, si j’ai cru devoir rester neutre vis-à-vis des passions trop excitées, je n’ai cependant pas pris une attitude hostile qui aurait pu me mettre en conflit avec les éditeurs d’Henry VIII, lesquels sont aussi ceux de Lohengrin. […] Camille Saint-Saëns a été un de ceux qui ont cherché le plus vivement à faire aboutir mon projet de représentations de Lohengrin, en 1881, au théâtre des Nations, à Paris.
sentiment du départ guerrier, cher à tous les hommes jeunes et vaillants, et à notre nation en particulier, Villehardouin est le premier qui a eu l’honneur de l’exprimer chez nous, il y a plus de six cents ans, dans sa prose simple, nue et grave. […] Ils n’estiment rien que la vaillance, dit toujours Nicétas des Français d’alors et de ceux qu’il appelle Barbares, mais c’est la vaillance séparée des autres vertus ; ils la revendiquent pour eux comme infuse par nature et corroborée par un long usage, et ne souffrent qu’aucune autre nation puisse se comparer à eux en ces choses de guerre ; d’ailleurs étrangers aux Muses et n’ayant aucun commerce avec les Grâces, ils sont d’un naturel farouche, et ont la colère plus prompte que la parole.
Là aussi, « dans cet ordre littéraire comme dans l’ordre religieux, a dit un pieux et savant Anglais44, un peu de foi et beaucoup d’humilité au point de départ sont souvent récompensés de la grâce et du don qui fait aimer, c’est-à-dire comprendre les belles choses. » Je n’irai pourtant pas jusqu’à dire, avec un autre critique de la même nation, « qu’il faut feindre le goût que l’on n’a pas jusqu’à ce que ce goût vienne, et que la fiction prolongée finit par devenir une réalité. » Ce serait donner de gaîté de cœur dans la superstition et l’idolâtrie. […] Chaque nation d’ailleurs, même en matière de fées, a sa note et sa gamme.
Volney, dans le programme de ses leçons d’histoire aux Écoles normales (an iii, 1795), se propose d’examiner quel caractère présente l’histoire chez les différents peuples, quel caractère surtout elle a pris en Europe depuis environ un siècle : « L’on fera sentir, disait-il, la différence notable qui se trouve dans le génie historique d’une même nation selon les progrès de sa civilisation, selon la gradation de ses connaissances exactes. » Notez bien cette sorte de traduction qui définit le sens. […] Mille écluses maîtriseraient et distribueraient l’inondation sur toutes les parties du territoire ; les huit ou dix milliards de toises cubes d’eau qui se perdent chaque année dans la mer, seraient réparties dans toutes les parties basses du désert, dans le lac Mœris, le lac Maréotis et le Fleuve sans eau, jusqu’aux Oasis et beaucoup plus loin du côté de l’ouest, — du côté de l’est, dans les Lacs Amers et toutes les parties basses de l’Isthme de Suez et des déserts entre la mer Rouge et le Nil ; un grand nombre de pompes à feu, de moulins à vent, élèveraient les eaux dans des châteaux d’eau, d’où elles seraient tirées pour l’arrosage ; de nombreuses émigrations, arrivées du fond de l’Afrique, de l’Arabie, de la Syrie, de la Grèce, de la France, de l’Italie, de la Pologne, de l’Allemagne, quadrupleraient sa population ; le commerce des Indes aurait repris son ancienne route par la force irrésistible du niveau… » Le mot de civilisation ne s’est pas rencontré encore ; il n’échappe qu’à la fin et aux dernières lignes, comme le résumé de tout le tableau ; il introduit avec lui et implique l’idée morale, qui a pu paraître jusque-là assez absente : « Après cinquante ans de possession, la civilisation se serait répandue dans l’intérieur de l’Afrique par le Sennaar, l’Abyssinie, le Darfour, le Fezzan ; plusieurs grandes nations seraient appelées à jouir des bienfaits des arts, des sciences, de la religion du vrai Dieu ; car c’est par l’Égypte que les peuples du centre de l’Afrique doivent recevoir la lumière et le bonheur !
M. de Talleyrand fut à l’Assemblée le principal agent et l’organe de la motion qui avait pour objet la vente des biens du clergé au profit de la nation. […] Quoi qu’il en soit, la part considérable que M. de Talleyrand avait prise non seulement aux actes du clergé, ou concernant le clergé, mais encore aux importantes questions de finance et aux travaux du comité de Constitution, l’esprit de décision et de vigueur dont il avait fait preuve, non moins que le tour habile et mesuré de sa parole, le désignèrent au choix de l’Assemblée pour être son organe dans le manifeste ou compte rendu de sa conduite, qu’elle jugea à propos d’adresser à la nation en février 1790.
Un siècle, une nation, un homme, sous le seul rapport des lumières, sont très longtemps à se relever du fléau de l’esprit de parti. […] L’esprit de parti est la seule passion qui se fasse une vertu de la destruction de toutes les vertus, une gloire de toutes les actions qu’on chercherait à cacher, si l’intérêt personnel les faisait commettre ; et jamais l’homme n’a pu être jeté dans un état aussi redoutable, que lorsqu’un sentiment qu’il croit honnête, lui commande des crimes ; s’il est capable d’amitié, il est plus fier de la sacrifier ; s’il est sensible, il s’enorgueillit de dompter sa peine : enfin, la pitié, ce sentiment céleste, qui fait de la douleur un lien entre les hommes ; la pitié, cette vertu d’instinct, qui conserve l’espèce humaine, en préservant les individus de leurs propres fureurs, l’esprit de parti a trouvé le seul moyen de l’anéantir dans l’âme, en portant l’intérêt sur les nations entières, sur les races futures, pour le détacher des individus ; l’esprit de parti efface les traits de sympathie pour y substituer des rapports d’opinion, et présente enfin les malheurs actuels comme le moyen, comme la garantie d’un avenir immortel, d’un bonheur politique au-dessus de tous les sacrifices qu’on peut exiger pour l’obtenir.
Je vais droit à la loi essentielle, j’appelle ainsi celle qui préside au passage d’une époque à une autre, à la succession des divers genres de beauté qui règnent tour à tour chez une nation. […] On peut répéter, avec l’antique sagesse des nations, que les extrêmes se touchent et l’on peut dire mieux encore que les extrêmes s’appellent et s’engendrent.
Cette épître, monument élevé à la gloire de la nation & de son roi, avoit été reçue avec de grands applaudissemens, & devoit l’être, à cause de son propre mérite & celui de l’à-propos. […] Ces chefs-d’œuvre qui firent les délices de la nation, le réconcilièrent avec elle & avec Despréaux : car cet excellent maître, en matière de goût ; fut toujours le premier à revenir de ses idées quand il s’apperçut qu’elles n’étoient pas justes.
» L’adulateur moderne qui renouvelait ce souvenir pour l’inexorable cardinal, ajoutait : « Aux paroles de ces hommes obscurs, proférées sans contrainte et sans flatterie, César fut si touché que, par comparaison, il comptait pour peu les plus honorifiques décrets du sénat, les noms inscrits des nations subjuguées, les trophées qu’on lui élevait et ses propres triomphes. » On le croira sans peine : le pouvoir d’Octave était fondé sur la réalité de la dictature et l’apparence de la démocratie. […] « En te faisant petit devant les dieux, tu commandes aux nations : c’est là le principe de tout ; là tu dois tout ramener.
Autrefois, les libertés de la nation étaient mal définies, obscures, discrètes, obérées sous des formes minutieuses et confuses ; la voix de l’opposition, qui sort des entrailles de tout gouvernement non despotique, n’avait pas de quoi se faire jour.
Quinze ans son dur sabot, dans sa course rapide, Broya les générations ; Quinze ans, elle passa, fumante, à toute bride, Sur le ventre des nations.
On fut étonné de cette force majestueuse dont il a décrit les mœurs, le Gouvernement, l’accroissement & la chute des grands Empires, & de ces traits rapides d’une vérité énergique dont il peint & dont il juge les Nations.
Il fait juger des choses par les principes, & non par les succès ; il se rappelle, dans ces momens de délire général, que les alimens les plus contraires sont quelquefois agréables aux estomacs dépravés, que la disette ou l’amour de la nouveauté donne du prix à la médiocrité, au vice même ; & connoissant tout à la fois les sources de la bizarrerie dominante, de la nature des objets qui l’entretiennent, le génie de la Nation qui l’encense, il attend, & pourroit prédire avec certitude, le moment de la révolution qui doit guérir de cette frénésie.
Elles offrent en effet une tournure d’esprit agréable, de la finesse, des détails piquans, des comparaisons ingénieuses, des images riantes, un coloris brillant, une touche délicate & facile, & une peinture assez vraie des travers aimables qui caractérisent notre Nation.
Linguet l’a bien senti lui-même par le désaveu glorieux qu’il en a fait, & par les éloges vrais qu’il a donnés depuis à ce grand homme d’Etat, dont la Nation & les Etrangers admirent également la sagesse & la probité ; qui ne doit son élévation qu’à son mérite ; dont tous les pas dans la carriere politique, où il est entré dès l’âge le plus tendre, ont été marqués par des services rendus à la Patrie ; qui, malgré sa grande modestie, jouit de toute sa réputation ; & dont la gloire, appuyée sur l’estime générale de ses contemporains, ne pourra qu’augmenter par la succession des temps.
Puissent, puissent les nations, au défaut d’amour pour nous, entretenir ainsi dans leur cœur les unes contre les autres une haine éternelle178 !
Lorsque le goût des beaux-arts est général chez une nation, savez-vous ce qui arrive ?
S’il est vrai que les nations sont constituées par une poussière de fellahs, Taine en prend trop aisément son parti ; il a trop peur que la raison pure intervienne et dérange ces sommeils, cette belle ordonnance animale… Mais à peine ai-je écrit ces lignes et ces mots « servilité, servage » que, sans pouvoir rien en effacer, je proclame combien je suis injuste envers un homme qui, le seul, avec Fustel de Coulanges, et mieux que Fustel de Coulanges, m’a fait toucher des réalités dans l’histoire de mon pays.
Puis défilent les députés, le front bas, soucieux, doutant que la nation les approuve. […] Et il est mort d’avoir assumé tout l’espoir et toute la crainte dont palpitait la nation. […] — s’applique à toutes les nations également ; le droit biologique favorise et met dans une situation délicieusement privilégiée la nation la plus forte et la plus féconde : c’est l’Allemagne ! […] Il importe que la nation qui s’est juré de violer toutes nationalités n’ait rien à revendiquer de ce qu’elle s’acharne à méconnaître : au nom même des nationalités diverses, la nation allemande sera condamnée. […] La vie des hommes et des nations est soumise à un rythme de ce genre, — la dure, la terrible vie des hommes et des nations, trempée de larmes, tachée de sang, — farouche aventure, et que seul l’héroïsme, aux plus mauvais jours, dispense d’être scandaleuse.
La Chine, l’Inde, l’Arabie, la Syrie, la Grèce, Rome, les nations modernes ont connu ce moment où le travail intellectuel de spontané devient savant et ne procède plus sans consulter ses archives déposées dans les musées et les bibliothèques. […] Mais, outre que nos créations sont plus vivaces que celles des anciens et que chaque nation moderne peut fournir de la sève à deux ou trois littératures superposées, notre manière de concevoir la philologie est bien plus philosophique et plus féconde que celle de l’antiquité. […] Entraîné vers l’antiquité par ce besoin nécessaire qui porte toutes les nations néo-latines vers leurs origines intellectuelles, il n’a pu la connaître dans sa vérité, faute de l’instrument nécessaire 73.
Il dit : Je t’établis pour être la lumière des nations ; ainsi parle l’Eternel à celui qu’on méprise. » On peut dire de la haute pensée philosophique et morale ce que Victor Hugo a dit de la nature même : elle mêle Toujours un peu d’ivresse au lait de sa mamelle. […] Je suis très grand, mes pieds sont sur les nations… J’élève mes regards, votre esprit me visite, La terre alors chancelle et le soleil hésite ; Vos anges sont jaloux et m’admirent entre eux. […] « Je roule avec dédain, sans voir et sans entendre A côté des fourmis les populations Je ne distingue pas leur terrier de leur cendre, J’ignore en les portant les noms des nations.
À part quelques martyrs, quelques nobles têtes comme Morus et Fisher, que le Tibère théologique jeta au bourreau, les hautes classes qui alors menaient la nation reçurent, dans le silence de la conscience anéantie, une religion toute faite des mains de ce cuistre sanglant qui osait inventer contre Dieu… Jamais, dans les annales du genre humain, si magnifiques en lâchetés, on n’avait eu le spectacle d’une chose si lâche… Et cependant, disons-le pour être juste, de toutes les hérésies dont le Protestantisme de Luther fut la semence, celle de Henri VIII, de ce révolté de la débauche, est la moins funeste dans ses conséquences définitives. […] Ce qui se passait dans le sein de l’Université anglicane devait avoir son contrecoup dans la nation tout entière, et plusieurs années dépensées dans une guerre de plume fort active l’avait merveilleusement disposée à le ressentir. […] … Après l’intérêt sacré de la conscience, — le plus haut intérêt pour les peuples comme pour les individus, — on peut parler de l’intérêt politique à une nation qui entend la puissance et qui n’a pas dit le dernier mot de ses destinées.
Ces hommes d’État, ces nations ont pu choisir ; il y a eu un moment où la délibération était libre entre la conduite qui mène à la durée et celle qui mène à la ruine. […] Cette monarchie donnait à la France, au prix d’imperfections inévitables, les deux biens que notre nation prise le plus haut : la gloire au dehors et l’unité au dedans. […] Les jansénistes ne raffinaient que sur le dogme ; mais leurs arrière-pensées d’inquiétude et de suspicion contre la puissance publique affaiblissaient l’esprit d’unité qui fait la force de notre nation. […] Ces combats n’ont été stériles ni pour la nation, qui en était témoin, ni pour les combattants eux-mêmes. […] Mais c’est surtout pour la nation que le spectacle n’en était pas sans fruit : l’esprit français s’enrichissait des qualités de tous.
Et comme la France doit être fière d’être, en Europe, à peu près la seule nation qui ait des corps constitués, dépositaires de ce précieux trésor ! […] Thiébault s’arrête au 13 Vendémiaire, au moment où Bonaparte sauve les représentants de la nation, en attendant qu’il les chasse. […] Il parle quelque part du mouvement effréné qui emporte les nations et il écrit : Hélas ! […] pour ce produit-là nous sommes en retard sur plus d’une nation voisine, il faut avoir le courage de l’avouer. […] Je ne dis rien de cette grande veillée des armes où les nations, qui se guettent, épuisent leurs forces et leur patience.
C’est sans doute pour mieux honorer notre Nation, qu’il se plaît à grossir ainsi le nombre des victimes de cette affreuse journée.
Tant qu'on aura parmi nous l'idée de la belle Poésie, & le goût des véritables beautés, Rousseau sera regardé comme le Génie le plus étonnant que notre Nation ait produit.
Allons-nous, sur les conseils des comités coloniaux, devenir une nation polyglotte, sans même nous apercevoir que cela serait un véritable suicide linguistique, et demain un suicide intellectuel ?
Suivant leur sentiment ce sont des hommes moins propres à joüer un rolle sur la scene, qu’à être reclus dans ces maisons où les nations polies renferment une partie de leurs fols.
Mais nonobstant tous les moïens que nos experts peuvent avoir pour discerner nos écritures, leur art est encore si fautif, que les nations plus jalouses de proteger l’innocence que de punir le crime, défendent à leurs tribunaux d’admettre la preuve par comparaison des écritures dans les procez criminels ; et dans les païs où cette preuve est reçûë, les juges en dernier ressort la regardent plûtôt comme un indice que comme une preuve parfaite.
Usage barbare dont les nations se seraient constamment abstenues si l’on en croyait les auteurs qui ont écrit sur le droit des gens, et qui pourtant était alors pratiqué par ces Grecs auxquels on attribue la gloire d’avoir répandu la civilisation dans le monde.
En voulant devenir une nation, les Français ont renoncé à être un empire. […] Ce que l’on appelle la sûreté d’une nation n’est pas autre chose, en effet, que la sécurité garantie au développement des familles. […] Voyons donc quelle est la part de l’idéal démocratique chez ces quatre nations ? […] Nous voici amenés à conclure que la démocratie n’a fait — politiquement — aucun progrès dans ces quatre nations directrices du monde. […] Il s’évanouit, pour nous montrer à l’œuvre des nations en train d’agir, comme toutes les nations ont agi de tout temps, d’après des lois d’inégalité et des principes de tradition, en vue d’un avenir de combat.
Militaire français s’il en fut, esprit français, saillie française, il était fait pour conduire et enlever des soldats de notre nation. […] Un moment, au plus fort des débats Pritchard, il croit à une rupture inévitable avec l’Angleterre : « Il faudra en venir aux coups tôt ou tard, parce que l’esprit national et la masse de la nation, raisonnable ou non, entraînera et débordera le gouvernement lui-même… Enfin, tout se complique tellement que la bombe éclatera, et ses éclats tueront bien des médiocrités, et nous… nous monterons. » Nous monterons ! […] Avec les Arabes, c’est à recommencer toujours : « Cette nation-là naît un fusil à la main et un cheval entre les jambes. » Au point où il est arrivé, Saint-Arnaud sent ses vues s’agrandir, et se multiplier les occasions d’agir comme il l’entend. […] Je serai le 23, au plus tard, sous Sébastopol. » Le 20 septembre se livre cette glorieuse bataille de l’Alma qui restaure, en face de l’Europe, l’honneur des armes de la France, et à laquelle il n’a manqué que mille sabres des chasseurs d’Afrique pour être la plus merveilleuse par les résultats : « Malgré tout, belle et magnifique journée, qui a mis au grand jour la valeur et les qualités de chacun, nation et hommes, a donné à l’armée un moral de 99 degrés et tué les Russes. » Saint-Arnaud écrit ces mots triomphants sur le champ de bataille même et la tête encore ardente de l’action.
Elle habitait Rome ; son palais était une cour de distinction en tout genre : hommes d’État, poètes, écrivains, peintres, sculpteurs, savants de toutes les nations s’y réunissaient à toute heure. […] La séve de la nation, activée par la liberté, bouillonnait d’indépendance et d’émulation littéraire. […] Beugnot, la plus spirituelle des chroniques vivantes de la Révolution et de l’Empire ; les amis de M. de Talleyrand ; la belle duchesse de Dino, sa nièce ; quelques Orléanistes du Palais-Royal, beaucoup de libéraux, un groupe de doctrinaires cherchant les recoins dans les salons comme dans la nation, et méditant de refaire en politique une secte au lieu d’une religion : voilà, avec un grand nombre de femmes jeunes, belles, lettrées, et élégantes, ce qui composait ce salon. […] XXXIV Celui de madame Récamier était, par la nature neutre des affaires de son mari, accessible à toute cette jeunesse ; un banquier est l’homme de toutes les nations et de tous les partis ; tout le monde a besoin de lui et il prospère de ses relations avec tout le monde.
Alors, au contraire, la nation n’était point éclairée sur ses intentions tyranniques ; et, comme chacun de ceux qui avaient souffert de la révolution espérait de lui le retour d’un frère ou d’un ami, ou la restitution de sa fortune, on accablait du nom de Jacobin quiconque osait lui résister, et la bonne compagnie se retirait de vous en même temps que la faveur du gouvernement : situation insupportable, surtout pour une femme, et dont personne ne peut connaître les pointes aiguës sans l’avoir éprouvée. […] Elle ne fut pas un débris à cette époque, elle fut une puissance ; son salon, où se groupaient pour l’entendre tous les hommes éminents de toutes les opinions et de toutes les nations réunies par la coalition de Paris, devint la tribune du monde. […] « Un homme d’un esprit supérieur disait que la prose était factice, et la poésie naturelle : en effet les nations peu civilisées commencent toujours par la poésie, et dès qu’une passion forte agite l’âme, les hommes les plus vulgaires se servent, à leur insu d’images et de métaphores ; ils appellent à leur secours la nature extérieure pour exprimer ce qui se passe en eux d’inexprimable. […] « Les Allemands réunissant tout à la fois, ce qui est très-rare, l’imagination et le recueillement contemplatif, sont plus capables que la plupart des autres nations de la poésie lyrique.
L’examen des témoins ; le témoin oculaire, l’historien contemporain, l’historien moderne de faits anciens, les écrivains en tout genre, les philosophes, les orateurs, les poètes, les nations, la tradition. […] Je remarquerai seulement que chez toutes les nations, la langue a dû ses progrès aux premiers génies ; c’était le résultat des efforts qu’ils faisaient pour rendre fortement et clairement leurs pensées. […] J’en vais exposer beaucoup d’autres : je m’élève contre un ordre d’enseignement consacré par l’usage de tous les siècles et de toutes les nations, et j’espère qu’on me permettra d’être un peu moins superficiel sur ce sujet. […] L’enseignement d’une science, quelle qu’elle soit, pouvant être fait dans la langue de la nation, je conçois bien l’inconvénient, mais je suis encore à sentir l’avantage d’ajouter à la difficulté des choses celle d’un idiome étranger, dans lequel il est souvent difficile, quelquefois impossible, de s’expliquer sans employer des tours et des expressions barbares.
Mise debout sur l’industrie (qui oserait écrire le mot : assise, quand il s’agit de la nation américaine ?), appuyée sur le principe protestant de l’individualité qui fait donner au moi ces coups de collier prodigieux qui trompent les penseurs médiocres sur les futures destinées des nations protestantes, — car toute société qui n’a que l’orgueil pour fondement doit s’écrouler vite, — la patrie de Franklin, du bonhomme Richard, ne devait-elle pas nuire à l’expansion de la pensée plus ou moins mystique d’Edgar Poe, et, par instants, la matérialiser sous cette vaste main de Midas qui convertit en or ce qu’elle touche ? […] Le spiritualisme apparent de l’inspiration d’Edgar Poe est du matérialisme, passé au filtre d’un esprit poétique, mais l’Amérique, la nation matérialiste par excellence, ne pouvait pas avoir un fils plus pur. […] Né dans ce tourbillon de poussière que l’on appelle, par une dérision de l’Histoire, les États-Unis43 ; revenu, après l’avoir quittée, dans cette auberge des nations, qui sera demain un coupe-gorge, et où, bon an mal an, tombent cinq cent mille drôles plus ou moins bâtards, plus ou moins chassés de leur pays, qu’ils menaçaient ou qu’ils ont troublé, Edgar Poe est certainement le plus beau produit littéraire de cette crème de l’écume du monde.
La nation espagnole est plus compacte dans ses opinions, dans ses préjugés, dans son égoïsme national, qu’aucune autre de l’Europe… (Octobre 1810.) Aujourd’hui l’opinion est bouleversée ici, on ne sait que devenir ; on voyait un port en moi, on n’y voit plus aujourd’hui qu’un jouet de l’orage qui n’est bon à rien… Jamais je ne consentirai aux traitements horribles que lui font éprouver (à la nation espagnole) les gouvernements militaires ; jamais mes mains ne déchireront ses entrailles et ne démembreront ses provinces, et je mourrai digne du trône en le quittant lorsqu’il sera bien démontré que je ne puis pas y remplir les devoirs d’un roi… (Novembre 1810.)
» Et il en prend occasion d’exprimer à ce sujet ses propres idées et les conditions qu’il estime indispensables au progrès, à savoir : — alliance et union étroite des sciences et des lettres : « Sans les sciences la nation la plus lettrée deviendrait faible et bientôt esclave ; sans les lettres la nation la plus savante retomberait dans la barbarie ; » — enchaînement des sciences les unes aux autres : « Cette union fait leur force et leur véritable philosophie ; elle seule a été la cause de tous leurs progrès » ; — une certaine liberté et latitude laissée aux professeurs dans la pratique : « Il faut, disait-il, que les professeurs soient guidés et non pas asservis.
Mais aucun monarque et souverain ne s’était rencontré encore dans la situation extraordinaire de Napoléon, à la fois abdiquant et captif, — prisonnier sans avoir été pris et en quelque sorte de son propre choix, pour s’être allé asseoir au foyer de la nation son implacable ennemie ; détenu non dans une prison, mais sur le rocher le plus perdu de l’Océan ; non par la vengeance d’un seul adversaire, mais par la terreur de l’Europe entière conjurée ; et désormais élevé (seule élévation dernière qui lui manquât) à l’état de victime ; — ayant abdiqué pour la seconde fois et toujours forcément sans doute,, mais enfin de cœur comme de fait, et résigné ; ne nourrissant plus aucun espoir de retour, mais conservant jusqu’à la fin toute la sérénité de son coup d’œil, toute sa plénitude d’intelligence politique ; sevré de presque toute information actuelle, et se reportant avec d’autant plus d’impétuosité et d’ardeur aux grands événements récents ou passés, à l’histoire d’hier ou à l’histoire des siècles ; perçant de plus dans l’avenir et plongeant sur les horizons lointains avec la haute impartialité du conquérant apaisé, avec la vue épurée du civilisateur. […] Sa philosophie, à lui, restait toute pratique, non critique, non ironique, nullement pessimiste, mais toute en vue de l’usage qu’on peut faire, du parti qu’on peut tirer de ce merveilleux instrument qui s’appelle l’homme, dans une société, dans une nation.
Elle parla avec amertume des Anglais ; elle dit qu’elle avait peu d’estime pour cette nation de marchands, et finit par laisser pressentir qu’elle n’était pas éloignée de changer de système. […] Edouard Lefebvre put étudier de près le mouvement qui souleva et arma contre nous toute l’Allemagne, et dont le foyer s’alluma surtout en Prusse ; il fit plus que l’étudier, il en fut victime : au moment où le roi de Prusse, après bien des tergiversations et des anxiétés, se décida à faire signer à Kalish par son plénipotentiaire le traité qui le liait à la Russie, le même jour (28 février 1813), un piquet de Cosaques entrait à toute bride dans Berlin, cernait l’hôtel de M. de Saint-Marsan, ambassadeur de France, et « sous les yeux des autorités, au mépris du droit des gens et de tous les usages pratiqués entre nations policées, enlevait la personne du premier secrétaire de légation, M.
Et puis je m’arrêtais avec toi sur les pierres, Pour voir, pour méditer, pour pleurer les poussières Qui furent une fois cités et nations ! […] Il entra, dès lors, dans un ordre de considérations le plus antirévolutionnaire possible : il eut des théories et des perspectives sur l’avenir des nations catholiques ou protestantes, des vues historiques aussi vagues et aussi fausses peut-être qu’auparavant ; il prophétisa encore, et en sens inverse.
Quinet dont nous parlerons tout à l’heure, appartient comme lui à cette génération infatigable et généreuse, pure, avide d’espérance, insatiable de beaux désirs, de laquelle lui-même il a dit en un endroit : Toute une nation puissante qui s’éprend Pour le bien, pour le bon, pour le beau, pour le grand ; Et toute une jeunesse ardente et sérieuse, Qui pâlit de travail, et, les larmes aux yeux, Cherchant son avenir, au plus profond des cieux Suit l’étoile mystérieuse. […] Fais désormais, grand Dieu, les nations jumelles.
S’élevant hardiment au-dessus des préjugés de sa nation, il établira l’universelle paternité de Dieu. […] Jésus ne faisait en ceci que tirer les conséquences des grands principes que le judaïsme avait posés, mais que les classes officielles de la nation tendaient de plus en plus à méconnaître.
Tu m’auras montré le monarque protecteur des conditions subalternes, comme il le doit être ; car ce sont elles qui forment le troupeau et la nation. […] C’est que si les nations sauvages se civilisent imperceptiblement, il n’en est pas tout à fait de même des individus ; qu’on voit bien des hommes se dépouiller et se faire sauvages, mais rarement des sauvages prendre des habits et se civiliser.
Un des indices de la jeunesse relative du monde et de son éducation croissante, c’est le progrès des nations plus septentrionales et le lever tardif de la poésie dans le Nord. […] Là le génie de Young a retrouvé cette voix de la patrie, ces cris de cœur d’une nation belliqueuse qui avaient retenti jusque dans les accents du courtisan Waller, et inspiré de si beaux vers à Thompson.
Dans nos méditations même solitaires ne perdons jamais de vue l’état vrai de la nation et l’intérêt actuel de la France.
En laissant Berlin, M. de Ségur traversa la Pologne, qui du moins alors, toute démembrée qu’elle était, avait encore un roi de sa nation sinon de son choix, roi gracieux mais faible, tel qu’est d’ordinaire le dernier roi d’un empire.
Le vrai coupable de la mort de Jésus finit sa vie au comble des honneurs et de la considération, sans avoir douté un instant qu’il eût rendu un grand service à la nation.
Nous avons vu la corruption des mœurs générales se répandre de la cour de François Ier sur la nation entière1, et le spectacle de la société infectée de ces mœurs nous a laissé de pénibles impressions.
Aucun Tragique ne l’a égalé dans l’art unique d’imaginer des plans hardis, de les subjuguer, de les varier selon le choix du sujet, de donner à ses personnages une ame, une dignité, une chaleur, un caractere toujours conforme à leur siecle, à leur nation, à leurs mœurs, à leur situation.
Pour l’Architecture navale & la navigation, on estime l’Art de batir les vaisseaux avec les pavillons des différentes nations, à Amsterdam 1719., in-4°.
Mais l’humanité ne peut être sceptique et une nation, cette famille humaine, ne peut le demeurer longtemps. […] Il y a des idées et des sentiments moraux en circulation ; jamais moins il n’y eut une morale, même chez les nations les plus civilisées. […] Mais ce n’est pas la tournure d’esprit de ces grands hommes qui a le plus influé sur le caractère de l’ensemble de la nation. […] Faudra-t-il, par exemple, sacrifier la loi de la justice aux barbares coutumes, aux préjugés cruels d’une nation ? […] Il encourut la disgrâce de ses protecteurs en défendant aux États-Généraux les grands intérêts de la nation, et notamment la liberté de conscience.
Le lendemain, le sieur Belin, en qualité de chancelier, assembla la nation, les drogmans et quelques religieux, et fit signer une délibération par laquelle on me dépouilloit de mes fonctions pour en revêtir ledit sieur Belin, lequel, se voyant le maître avec le chevalier Gesson, se saisirent de ma personne le 27e, me mirent en prison dans une chambre, chassèrent mes domestiques affectionnés, et s’emparèrent de mes papiers et de mes effects, ne me donnant la liberté de voir personne que quelques religieux affidés. J’ay été dans ce triste estat plus d’un mois entier, d’où je crois que je ne serois pas sorti sans M. l’ambassadeur d’Holande, lequel m’ayant rendu visite et m’ayant trouvé avec ma santé et mon esprit ordinaires, fit tant de bruit du traitement qu’on me faisoit, qu’il me fut permis, après l’attestation que j’eus des médecins du parfait rétablissement de ma santé, d’assembler la nation, laquelle, sollicitée par le sieur Belin, et pour se mettre à couvert du blâme de la première délibération qu’elle avoit signée, ne voulut jamais me reconnoître qu’après m’avoir forcé d’aprouver ladite délibération par un acte que je fus obligé de signer le 1er du mois d’aoust dernier, pour obtenir ma liberté et reprendre les fonctions d’ambassadeur. […] Les deux personnes dont j’ay le plus à me plaindre sont les sieurs Meinard, premier député de la nation, et le sieur Belin, mon chancelier : pour le chevalier Gesson, mon parent, je sauray bien le mettre à la raison. « J’avois d’abord cru que le grand visir estoit entré dans cette affaire ; mais j’ay appris au contraire qu’il avoit détesté le procédé de la nation et de mes domestiques ; et depuis que je suis rentré dans les fonctions d’ambassadeur, il ne m’a rien refusé de tout ce que je luy ay demandé, tant pour l’extraction des bleds que pour les autres affaires que j’ay eu à traiter avec luy ; et s’il en avoit toujours usé de même, je n’aurois eu aucun lieu de m’en plaindre. […] Tandis qu’Aïssé, en France, cessait d’être un enfant, il avait maille à partir ailleurs ; l’extrait suivant, puisé aux sources, ne laisse rien à désirer : « En 1709, des plaintes ayant été portées contre lui par divers membres de la nation française, il est rappelé le 27 mars 1710.
Leur haine se tourna naturellement sur ces jeunes chefs, au profit desquels on déshéritait leurs services ; il y eut division dans chaque corps : et cependant la nation commençait de lutter avec la cour, celle-ci se couvrait de l’armée, à laquelle d’autre part on rappelait son origine citoyenne.
La renaissance des Grecs est un fait à part, essentiellement isolé de tous les faits européens, ayant ses causes propres et distinctes dans l’état même de la nation depuis la conquête ottomane.
Qu’il s’agisse de l’évolution politique, religieuse ou littéraire d’une nation, l’idéal pour quiconque veut la retracer est d’aboutir à des résultats certains et définitifs.
Elle fut envoyée à Londres en qualité de Secrétaire d’Ambassade, & se rendit si agréable à cette Cour, que, contre l’usage, le Roi de la Grande-Bretagne la choisit pour porter à Louis XV, & à M. le Duc de Bedford son Ambassadeur à Paris, la Ratification du Traité de paix conclu entre les deux Nations.