/ 3414
2057. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre quinzième. »

C’est ainsi qu’un document administratif, une dépêche diplomatique, deviennent littéraires par le soin même qu’on a pris d’en exclure tout ornement. […] Les caractères abaissés, les influences des cabinets secrets, la servitude des courtisans, les ministres portés au conseil par leur habileté au jeu de billard, les gens de guerre qui ont peur du feu187; une vieille femme qui se rend puissante auprès du maître le plus jaloux, en affectant de ne vouloir que ce qu’il veut ; les fortunes faites par les petits moyens, depuis que les grands sont devenus suspects ; les anecdotes innombrables, depuis que les grandes actions sont devenues rares ; voilà la matière où se plaît Saint-Simon et où il excelle. […] Tacite ne paraît souhaiter qu’une chose : de bons princes dans l’empire, devenu légitime héritier de la république.

2058. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 août 1885. »

Et je ne suis pas devenu philologue. […] par son plus vaillant acte, à toi si utile et désiré, tu vouais celui qui l’accomplissait, à la malédiction par qui tu tombes : il m’a dû, lui, le plus pur, trahir, à fin que Sachante devînt une femme. […]   Tout, tout, je sais tout : tout me devient clair. […] Ce résidu musical du déterminisme dramatique qu’est l’orchestre wagnérien, cette force physiologique qui associe si profondément notre organisme sensitif au devenir de l’action vivante, nous ignorons d’où elle sort, nos sens sont en désarroi, car cette musique semble ne plus avoir d’existence objective, elle nous semble aussi bien être le propre mouvement de notre pensée qu’un enchaînement orchestral : aucun point d’appui qui nous permette de le décider.

2059. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Août 1886. »

., 1883, 337) ; il en avait éliminé Parsifal, devenu le héros d’un nouveau drame, il lui fallait trouver un autre dénouement. […] Il dit : « … le Gral, tel que les poètes allemands l’ont interprété, prend la place du trésor des Nibelungs et devient son successeur idéalisé … la recherche du Gral remplace les combats pour s’emparer de l’Or… »38. […] Bl., 1878, 100), et le sommeil de Kundry, d’où elle se réveille sans force, est analogue à celui de Brunnhilde ; Klingsor, qui se mutile pour s’approcher du Gral et qui devient ainsi la cause efficiente du drame, est évidemment conçu d’après le prototype Alberich, qui « maudit l’amour » pour se saisir de l’Or du Rhin … Connaissant cette intention, on pourrait poursuivre ces analogies sans crainte d’aller trop loin : la lance, par exemple, qui a donné tant de mal aux savants critiques, parce qu’ils ne la retrouvaient pas (sous cette forme) dans les poèmes qui racontent les légendes de Parsifal et du Gral, cette lance que Parsifal conquiert par la chasteté on l’aurait trouvée, si on avait songé à la « sainte lance » de Wotan, taillée dans le bois de « l’arbre du monde » … Nous expliquerons la raison de cette intention poétique ; pour le moment, il nous suffît d’avoir établi par quelques indications précises, l’existence dans Parsifal d’une parenté, ou antithèse, voulue avec le Ring39. […] À partir de 1886, c’est Cosima Wagner qui assura la direction du festival et devint « la gardienne du temple », l’idée de fidélité correspondant pour elle à une absence totale de changement, en particulier dans les mises en scène.

2060. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Chamfort. » pp. 539-566

Je ne le connais pas d’ailleurs ; mais s’il fallait deviner son caractère d’après sa petite comédie, je parierais qu’il est petit-maître, bon enfant au fond, mais vain, pétri de petits airs, de petites manières, ignorant et confiant à proportion ; en un mot, de cette pâte mêlée dont il résulte des enfants de vingt à vingt-cinq ans assez déplaisants, mais qui mûrissent cependant, et deviennent, à l’âge de trente à quarante ans, des hommes de mérite. […] Jeune, pauvre et fier, il ne présageait pourtant en rien le républicain et l’admirateur du 10 août, qu’il est devenu depuis. […] Mais comme le hasard a fait que ma société est recherchée par plusieurs personnes d’une fortune beaucoup plus considérable, il est arrivé que mon aisance est devenue une véritable détresse par une suite des devoirs que m’imposait la fréquentation d’un monde que je n’avais pas recherché. […]  » La plupart des maximes de Chamfort, relatives à la société, ne s’appliquent qu’au très grand monde dans lequel il vivait, à la société des grands ; et heureusement elles deviennent fausses dès que l’on considère un monde moins factice, plus voisin de la famille, et où les sentiments naturels ne sont pas abolis.

2061. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Sieyès. Étude sur Sieyès, par M. Edmond de Beauverger. 1851. » pp. 189-216

Cependant on n’est pas du Midi impunément, et un coup d’œil positif et pratique, prompt à saisir les occasions, ne laisse pas de se mêler chez Sieyès à ce qui, chez un philosophe du Nord, deviendrait aisément du rêve. […] Il a complètement erré en croyant que la raison pouvait s’enseigner en masse aux hommes et devenir la loi des sociétés à venir. […] » Il essaye, à plus d’une reprise, de nouer alliance avec lui, il lui propose l’union : « Il devient bien important que je vous parle, que mon audace se réunisse à votre courage, et ma verve à votre admirable logique. » Mais Sieyès, selon son habitude, se réserve et se tient sur ses gardes. […] Des personnes qui l’ont approché dans ses dernières années (et le nombre en est petit) me le peignent immobile, renfermé, pratiquant plus que jamais cette opiniâtre passion de se taire : « Je ne vois plus, disait-il, je n’entends plus, je ne me souviens plus, je ne parle plus ; je suis devenu entièrement négatif. » Il s’arrêtait quelquefois au milieu d’une phrase commencée, et disait : « Je ne trouve plus le mot, il se cache dans quelque coin obscur. » Il revenait pourtant encore avec quelque plaisir sur ses anciens jours, et y rectifiait quelques points de récit qui appartiennent à l’histoire.

2062. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1858 » pp. 225-262

Il plaît, devient, quelques jours après, l’amant de l’une, l’épouse, donne bientôt à toutes les deux le goût du jeu, et les ruine. […] Son ami s’était rasé cheveux, sourcils, barbe, moustaches, et il confesse à de Belloy que, devenu amoureux de sa maîtresse, il a voulu se mettre dans l’impossibilité de la revoir. […] — Moi, Madame, pas du tout, au printemps j’adore Paris : les jours sont devenus longs et c’est le meilleur mois pour bien voir les petites filles qui sortent des magasins ! […] Un homme qui a fait sa carrière dans les intendances de Napoléon Ier, et qui, depuis rallié aux Bourbons et mêlé à de grands événements, et devenu le familier de nombre de personnages, est tout plein d’anecdotes donnant un relief aux faits historiques.

2063. (1888) Journal des Goncourt. Tome III (1866-1870) « Année 1870 » pp. 321-367

Je me suis rappelé Ménilmontant, le château donné par le duc d’Orléans à une danseuse d’Opéra, devenu une propriété de famille, et habité par mon oncle et ma tante de Courmont, M. et Mme Armand Lefebvre, et ma mère entre l’amitié des deux femmes. […] Je sentis qu’en pleurant Gavarni, il se pleurait lui-même, et la phrase : il dort à côté de nous au cimetière d’Auteuil , devint, sans que je puisse me l’expliquer, le souvenir fixe, et pour ainsi dire, bourdonnant de ma mémoire. […] * * * Depuis quelque temps — et cela est plus marqué tous les jours — il y a certaines lettres qu’il prononce mal, des r sur lesquels il glisse, des c qui deviennent des t dans sa bouche. […] voici l’heure des merles et de leur sifflement dans le ciel devenu rose, et toujours dans les rideaux, le blanc éclair de ses yeux demi-fermés, qui ne dorment pas dans leur calme apparence de sommeil.

2064. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1877 » pp. 308-348

Le gros homme politique devient, en ces jours, la bête curieuse que se disputent les salons. […] Elle disait à un ami d’un étudiant en médecine, qui était son amant dans le moment : « Eh bien, qu’est-ce qu’il est devenu votre ami… voici plus de quinze jours que je ne l’ai vu… et à mon âge, et avec mon tempérament… est-ce là, croyez-vous, de l’hygiène ?  […] Dimanche 3 juin Par la luminosité spectrale, que fait dans la pierre d’une capitale, un coucher de jour, des silhouettes noires marchant, un journal devant le nez, sur le bitume mou. — Un glissement, un bruissement d’êtres silencieux, dans la mort du jour, allant aux kiosques illuminés du rouge transparent des annonces de l’eau de Botot, et s’accumulant en un coin du boulevard. — Puis, tout à coup, de ces tas d’hommes sous les arbres, dont le gaz se met à éclairer le feuillage poussiéreux, s’élève un murmure de phrases, en une langue inintelligible, qui devient un braillement énorme. […] On va à l’ermitage, dans lequel est encastrée une maison abrupte, au jardin fruitier devenu sauvage, qui appartient à Nadar.

2065. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « I — L’avenir du naturalisme »

Il est impossible actuellement de ne pas posséder une notion singulièrement plus large du déterminisme vital et cosmique, conception qui est appelée à devenir la synthèse supérieure des deux termes anciens, si longtemps opposés l’un à l’autre : déterminisme, liberté. […] Si nous supposons, en effet, un expérimentateur pourvu de ce « sentiment particulier » jusqu’au génie, devenu lui-même sujet d’expérience pour un second expérimentateur, ce dernier pourra t-il analyser le génie de son sujet à l’aide de la méthode expérimentale ? […] Je ne sais si nos désirs et nos appétits deviennent plus conscients, mais nous exigeons toujours plus d’air, toujours plus de réalité, et nous souhaitons pour la France un homme nouveau, aussi puissant que Zola, mais plus largement vital, qui ne s’enchaîne pas à une méthode, qui ne compromette pas sa propre liberté, qui étreigne librement la vie, qui se plie à tous ses aspects, qui rende toutes ses couleurs et toutes ses variétés, qui comprenne d’une façon moins étroite la purification par la science de la pensée. […] Quel autre écrivain de l’heure présente aurait-on pu lui préférer, s’il avait vraiment approfondi cette phrase de son étude sur Edouard Manet : « Le beau devient la vie humaine elle-même », ou cette autre : « La vie seule parle de la vie, il ne se dégage de la beauté et de la vérité que de la nature vivante18 » ?

2066. (1898) Les personnages de roman pp. 39-76

Mais si vous admettez qu’un homme puisse s’élever au-dessus de la nature et la dompter au point de faire du sacrifice la loi même de sa vie, l’inexplicable devient clair. […] Chez madame X., on doit forcément devenir dessinateur de goût, et le goût doit être discret, fin, tandis que chez nous l’œil le plus terne devra s’habituer et finir par aimer les couleurs vives, et le goût le plus timoré deviendra hardi et original. » On pourrait croire que ce ne sont là que de jolis mots, et que le souci de l’art qu’elles savent exprimer est de bien petite importance dans la vie de ces jeunes filles obligées de travailler pour vivre. […] Elle répond qu’elle serait disqualifiée, qu’au lieu d’être une créatrice d’œuvres personnelles, je ne puis dire tirées, mais portées à un seul exemplaire, elle conduirait une fabrique où le modèle, copié et recopié cent fois, deviendrait banal.

2067. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Chapitre IV. Conclusions » pp. 183-231

. — Dès que le principe est à peu près réalisé, il devient un élément constitutif du groupe, et perd peu à peu sa puissance créatrice ; il est un fait acquis, il n’est plus une foi ; sa réalisation étant forcément incomplète, unilatérale, il en résulte un besoin de corriger, de compléter ; après l’action, la réaction ; et c’est alors qu’apparaît la foi nouvelle, une autre face de l’idéal absolu. […] En participant ainsi, d’une façon quelconque, à l’action du principe, l’individu agit lui-même sur l’évolution ; grâce à un élément psychologique qui lui est particulier, et dont je parlerai bientôt, l’homme devient une cause après avoir été un effet. […] Cette voie nous amènera à la conscience, et de là à la liberté en devenir. […] C’est alors seulement que la vérité relative d’une époque, d’un milieu, vécue par un artiste, prend une valeur absolue : elle n’est plus une abstraction, elle est un fait ; en prenant corps dans une œuvre précise et personnelle, elle devient une réalité agissante et durable à jamais.

2068. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXI. »

L’entendez-vous, dans son langage devenu lyrique, invoquer une croisade, en appelant à son aide la puissance de l’empereur d’Allemagne et le zèle des évêques de France ? […] De ce génie des arts, déjà levé sur l’Occident, la Turquie n’empruntait encore que des instruments de force matérielle, l’artillerie, la construction des forts et quelques notions de marine appliquées par des renégats ; mais, loin que la confiance des Turcs fut diminuée par ce besoin de secours étrangers, elle devenait plus ambitieuse et plus hautaine, comme se sentant prédestinée à prendre captive la chrétienté tout entière, avec ses richesses et ses arts. […] Mais cette amorce même devenait cause de retard, l’avare et rusé monarque différant les préparatifs, multipliant les obstacles et les lenteurs avant la guerre, pour jouir plus longtemps du privilège arraché. […] Comme il était arrivé jadis aux Romains, dans leurs premiers combats de mer contre Carthage, les galères des deux partis se heurtant et s’accrochant avec des crampons de fer, le combat était devenu souvent un duel de pied ferme et corps à corps, où les vieilles bandes d’Espagne, les Italiens et les Grecs vainquirent, après cinq heures de mêlée.

2069. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » p. 293

A l’âge de près de soixante ans, il commença à se douter qu’il pouvoit devenir Auteur ; exemple rare dans un siecle, où l’on n’attend pas si long-temps à se croire en droit d’assommer le Public par ses Ecrits.

2070. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » p. 437

Ceux qui aiment l’Histoire font beaucoup de cas de ce Recueil, devenu très-rare, & ceux qui l’écrivent pourront en tirer un grand parti.

2071. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — C — article » p. 68

Victor, devenue, comme on sait, une des Bibliotheques publiques.

2072. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — F. — article » p. 313

Fontaine-Malherbe ; mais ce n’est que par un vrai talent qu’on peut se distinguer de la foule des Poëtes Dramatiques, qui, chaque jour, devient plus nombreuse, sans que l’Art fasse les moindres progrès.

2073. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 483-484

PELLEGRIN, [Simon-Joseph de] Abbé, né à Marseille en 1663, mort à Paris en 1745 ; Poëte dont le nom est devenu ridicule de nos jours, comme celui de l’Abbé Cotin, dans le Siecle de Louis XIV ; mais on doit reconnoître, à l’égard de l’un & de l’autre, plus de fatalité que de justice dans le mépris qu’ils ont éprouvé de la part de leurs Contemporains.

2074. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Additions et appendice. — Sur le comte Dandolo. (Article Marmont, p. 51.) » p. 514

Le comte Dandolo, cessant d’être sénateur, devint le premier agronome d’Italie.

2075. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « George Sand — George Sand, Valentine (1832) »

encore un talent, me disais-je, que la rapacité des libraires et du public, que cette impatience d’une époque où rien ne mûrit, où tout se dévore, va mettre au pillage sans doute, et dont les semences précieuses iront chaque matin au vent ; car de nos jours, dans les Lettres autant qu’ailleurs, il semble que tout soit devenu le prix de la vitesse et de l’empressement. […] Au sujet de la scène de chambre à coucher, j’avoue que le délire éloquent que l’auteur a su tirer de la potion d’opium bue par Valentine ne me fait point passer sur la convenance de ce moyen fantastique, devenu si à la mode : y aura-t-il donc inévitablement dans chaque roman nouveau une scène d’opium, comme il y avait autrefois un songe et une tirade : Où suis-je ?

2076. (1874) Premiers lundis. Tome II « Alexis de Tocqueville. De la démocratie en Amérique. »

Ceci devient incontestable, surtout après la lecture de l’excellent ouvrage de M. de Tocqueville. […] Permettez-moi, Monsieur, d’attacher à quelque chose plus d’importance encore qu’au jugement que vous portez sur la Démocratie américaine, c’est à voir continuer et devenir plus fréquents les rapports qui se sont établis entre nous.

2077. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre III. Éducation de Jésus. »

Sans parler de l’école juive d’Égypte, ou les tentatives pour amalgamer l’hellénisme et le judaïsme se continuaient depuis près de deux cents ans, un juif, Nicolas de Damas, était devenu, dans ce temps même, l’un des hommes les plus distingués, les plus instruits, les plus considérés de son siècle. […] La Loi, qui représentait, non les anciennes lois du pays, mais bien les utopies, les lois factices et les fraudes pieuses du temps des rois piétistes, était devenue, depuis que la nation ne se gouvernait plus elle-même, un thème inépuisable de subtiles interprétations.

2078. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XVI. Miracles. »

Jésus dut donc choisir entre ces deux partis, ou renoncer à sa mission, ou devenir thaumaturge. […] Un div persan, plusieurs fois nommé dans l’Avesta 747, Aeschma-daëva, « le div de la concupiscence », adopté par les Juifs sous le nom d’Asmodée 748, devint la cause de tous les troubles hystériques chez les femmes 749.

2079. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXIII » pp. 237-250

Madame de La Sablière s’attacha de toute son âme au marquis de La Fare, qui ne devint pas moins amoureux d’elle. […] Née vers 1641, nièce de la femme du chancelier Le Tellier, cousine germaine du ministre Louvois, mariée fort jeune à un homme de robe devenu célèbre par des bons mots et des chansons, riche, spirituelle et gracieuse au plus haut degré, alliée et amie de madame de Sévigné, qui était son aînée de quatorze ans, amie de madame Scarron, elle réunit chez elle l’élite du monde poli, durant l’intervalle de 1660 à 1770.

2080. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre neuvième. »

Cette fable de l’huitre et des plaideurs est devenue, en quelque sorte, l’emblême de la justice, et n’est pas moins connue que l’image qui représente cette divinité, un bandeau sur les yeux et une balance à la main. […] Quelle bizarre idée de prêter à un cierge la fantaisie de devenir immortel, et pour cela de se jeter au feu.

2081. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XIII. Mme Swetchine »

Il fallut qu’il s’y ajoutât quelque chose ; et ce quelque chose ne fut pas non plus la dévotion, la dévotion ordinaire aux vieilles femmes dévotes, dont je n’ai pas, du reste, à dire du mal, car je les ai toujours aimées… Il faut bien l’avouer, cette dévotion-là, ne fût-elle pas pédante ou pincée, a une discrétion qui baisse ses coiffes, même sur le front d’une Mme de Maintenon, tandis que la piété de Mme Swetchine ne baisse pas les siennes, car elle n’a pas de coiffes ; elle a le front tout nu, sous ses cheveux blancs et dans ses rides, comme il convient à une vieille femme, heureuse d’être, par la vieillesse, devenue une voisine de Dieu ! […] Ils s’estropient par coquetterie. » Elle, se serait-elle estropiée, si elle fût devenue littéraire ?

2082. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « La Société française pendant la Révolution »

Grâce à Dieu et pour l’honneur de la France, en 1662 comme, plus tard, en 1789, la société française occupait plus de place dans le pays dont elle était la plus jolie gloire que les quelques pieds de l’Œil de-Bœuf ou les barrières de ce Paris devenu à son tour un Versailles, le Versailles de la Révolution ! […] Avant Louis XV, cette société d’un instinct si juste et qui vivait dans une telle atmosphère de lumière, qu’on y disait, en riant, qu’un gentilhomme savait tout sans avoir rien appris, n’avait jamais songé, il est vrai, à devenir littéraire et à échanger ses grâces naturelles, saines et savoureuses, contre le caquet pédant des cercles et l’histrionisme philosophique des salons ; mais, alors même que les influences du xviiie  siècle commençaient de l’atteindre et de la gâter, elle n’était pas pour cela uniquement dans les salons parisiens, où Ton veut obstinément la voir toujours.

2083. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « La diplomatie au xviie  siècle »

Son père, qui de conseiller au Parlement se fit prêtre, devint évêque de Gap. […] Si l’on n’est pas un grand historien, on peut être plus facilement un bon commis… Je ne demande pas mieux que de voir l’auteur du Hugues de Lionne en devenir un, agrémenté de tous les ornements de cette fonction publique ; mais je ne veux pas qu’on nous donne, à nous qui nous occupons de la valeur des livres et de leur beauté, comme preuve de talent, un volume d’une confection aussi facile et de si peu de signifiance.

2084. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « César Daly »

Nous espérons que les conclusions de l’auteur, mises sous ce patronage qui les éclairera en les soutenant et les fera mieux voir encore, saisiront l’attention de l’administration supérieure et pourront devenir, sous son action souveraine, comme une médaille frappée du coup de balancier définitif, toute une législation future. […] Où l’idéal se brise pour moi et devient l’impossible, il continue, pour lui, d’être à la portée de la main humaine.

2085. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Prévost-Paradol » pp. 155-167

Se faire, à tout bout de champ, le saule pleureur d’une ambition, mieux que rentrée, car elle n’est pas sortie ; être né pour avoir la plaisanterie française à son service, cette bonne et jolie plaisanterie dont ils ont tant besoin pour s’égayer, ces pâles vieillards du Journal des Débats, qui, devenus culs-de-jatte, ne se lèvent plus guère devant cette Hélène ! […] Ses condisciples lui donnaient soit le commencement, soit la fin d’une phrase qu’il fallait immédiatement remplir, et sur-le-champ Prévost-Paradol prenait une plume et la remplissait avec une facilité… que j’oserai appeler abominable, car c’est par elle que le rhéteur devint un sophiste plus tard !

2086. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « M. Jules Girard » pp. 327-340

Seulement, voici qui va devenir très singulier : si ce qu’il pense est réellement ce qu’il faut penser sur Thucydide et son histoire, ce n’est pas là une justification de la gloire qu’ont faite et conservée à l’historien grec les Écoles et les Académies. […] Devient-il flatteur à l’étranger ?

2087. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Gustave III »

Ainsi, il vendit des biens d’Église, et devint distillateur et marchand d’eau-de-vie dans les proportions d’un monopole immense, pour faire vivre dans leur luxe effréné ceux-là que Léouzon-Leduc appelle hardiment ses mignons… L’un des plus comiques de ces spectacles fut sa coquetterie avec les Francs-Maçons et le prétendant d’Angleterre, qui était grand-maître de l’Ordre, auquel, dans des vues de conquête politique, il voulut succéder ; et surtout ce fut sa réclamation, comme Maçon, de la Livonie, qui avait jadis, comme on sait, appartenu aux Templiers… Extravagant, mais d’une extravagance qui passait comme un coup de vent, il rêva tour à tour qu’il prendrait la Norvège, qu’il confisquerait le Danemark, qu’il entamerait la Russie ; et il intrigua, brouilla, remua, mais stérilement, dans le sens de tous ces rêves, lesquels n’eurent de réel qu’une superbe bataille navale qu’il gagna lui-même en personne, — belle inutilité de plus ! […] Quoi qu’il devînt plus tard, il bénéficia toute sa vie de ce coup d’État, galant et bien troussé, accompli sans un seul coup de feu, parce qu’on était bien résolu à en tirer dix mille s’il le fallait.

2088. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XVI. M. E. Forgues. Correspondance de Nelson, chez Charpentier » pp. 341-353

Après avoir traversé le bonheur incomparable d’un mariage d’amour, après avoir aimé sa femme comme on aime sa femme en Angleterre, le pays conjugal, le pays de l’amour at home, il devint adultère, et, une fois qu’il le fut, il le fut toujours, car le mal et le bien se partageaient son âme, et l’homme autrefois si fidèle et si tendre, qu’il avait été, transporta dans l’adultère la fidélité et la tendresse. […] rien ne serre plus le cœur de l’historien que cela, rien ne serre plus le cœur qui étudie cette grande âme partagée, que de voir Nelson, frappé d’un dernier coup à Trafalgar, expirant dans sa cabine devenue une boucherie humaine, magnifique de pitié pour ses matelots auxquels il renvoie son chirurgien, magnifique d’amitié pour son camarade de bataille, le capitaine Hardy, qui, entre deux coups de canon, vient lui donner des détails sur sa victoire, magnifique de commandement, car son avant-dernier mot est un mot de commandement : « Faites tomber les ancres ! 

2089. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Nelson »

Après avoir traversé le bonheur incomparable d’un mariage d’amour, après avoir aimé sa femme comme on aime sa femme en Angleterre, le pays conjugal, le pays de l’amour at home, il devint adultère, et, une fois qu’il le fut, il le fut toujours ; car le mal et le bien se partageaient son âme, et l’homme autrefois si fidèle et si tendre qu’il avait été, transporta dans l’adultère la fidélité et la tendresse. […] rien ne serre plus le cœur de l’historien que cela, rien ne serre plus le cœur qui étudie cette grande âme partagée que de voir Nelson, frappé d’un dernier coup, à Trafalgar, expirant dans sa cabine devenue une boucherie humaine, magnifique de pitié pour ses matelots auxquels il renvoie son chirurgien, magnifique d’amitié pour son camarade de bataille, le capitaine Hardy, qui entre deux coups de canon vient lui donner des détails sur sa victoire, magnifique de commandement, car son avant-dernier mot est un mot de commandement : « Faites tomber les ancres ! 

2090. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Sophie Arnould »

Elle devint alors une autre puissance, non moins applaudie, non moins retentissante. […] Edmond de Goncourt avait ajouté de ces choses qu’inspire la vie et qui nous font la mieux comprendre, à mesure que nous la perdons, le livre, œuvre éclatante et charmante, aurait pu devenir un chef-d’œuvre.

2091. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXVI. Médecine Tessier »

Il ganta sa main et masqua son visage, et l’on vit jusqu’à ce lion de Broussais dont Pariset disait : Quærens quem devoret , devenu tout à coup d’une prudence antipathique à son génie, mettre une sourdine à sa voix rugissante et inventer, pour mieux cacher le secret de la comédie, ce mot d’ontologie qui signifiait toutes les chimères et toutes les sottises de la religion, de la métaphysique et de la spiritualité ! […] M. le docteur Tessier n’est pas uniquement préoccupé de spiritualiser l’instruction et de tenir compte de la magnifique duplicité humaine, même dans l’intérêt de l’observation physiologique ; il va plus loin et plus haut… « Le rationalisme dogmatique, dit-il, ne saurait coordonner les phénomènes physiologiques, et comprendre les rapports de la physiologie et de la médecine, mais, sur le terrain de la pathologie, ce rationalisme devient la négation de TOUTE vérité. » Ainsi, comme on le voit, l’enseignement n’est pas seulement matérialiste ; il est de plus arbitraire et antimédical, et l’habile écrivain le prouve avec une rigueur dont, certes, il n’avait pas besoin aux yeux de ceux qui savent jusqu’où peut porter une idée.

2092. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXXII. L’Internelle Consolacion »

De glorieux, le livre est devenu populaire. […] Or, le lieu commun, cette chose respectée, c’est la gloire devenue momie, c’est son embaumement pour l’immortalité, et qui y touche semble faire du paradoxe et du sacrilège.

2093. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Léon Aubineau. La Vie du bienheureux mendiant et pèlerin Benoît-Joseph Labre » pp. 361-375

Il y a ajouté l’amour de celui qui le prononça sur le Thabor, et montré ce que cet amour pouvait devenir dans un cœur d’homme, aux hommes, qui l’avaient oublié ! […] La catholique France du roi très chrétien était devenue, ma foi !

2094. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « L’abbé Brispot »

» Des esprits de tout ordre ont été pris à cette horrible gageure de parti, et c’est parce que le mal a été grand à cet égard et qu’il augmente, que la vulgarisation des Évangiles est devenue de la plus grande opportunité. […] Une Vie de Notre-Seigneur Jésus-Christ comme celle dont il est question ici, est moins un livre qu’une œuvre impersonnelle où la gloire de l’auteur n’est que le bien qu’il peut faire et le mérite des bonnes pensées dont il deviendra l’occasion.

2095. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Charles De Rémusat »

De même, tous ceux qui écrivent dans la Revue des Deux Mondes ne se font rien sauter du tout, ni à eux ni aux autres, mais deviennent, même les gens d’esprit, considérablement ennuyeux de cela seul qu’ils y écrivent. […] Ce serait trop français pour Rémusat, devenu Anglais à force de regarder l’Angleterre, pour Rémusat qui a le spleen politique et la nostalgie du régime parlementaire dont il est privé !

2096. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Lamartine »

… Il n’y a ici que le jeune homme d’avant le poète, le Prince des Ténèbres qu’il est encore avant d’être le Prince de la Lumière, qu’il doit devenir ; Je suis celui qu’on aime et qu’on ne connaît pas ! […] C’est, à son début dans la vie, le naturel en action de cet homme qui est bien plus que naturel, qui est tout nature, qui ne cessera jamais de l’être, et qui, quand un jour il deviendra sublime, sera, sans cesser d’être naturel, idéal.

2097. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Edgar Poe » pp. 339-351

L’ivrognerie de ce malheureux était devenue le vice de sa solitude. […] Sans aucun doute, dans ce jeu bizarre où l’auteur devient de bonne foi, et, comme l’acteur, se fascine soi-même, il y a (et la Critique doit l’y voir) un naturel de poëte dramatique qui, tiré de toutes ces données, sujets habituels des contes d’Edgar Poe : le somnambulisme, le magnétisme, la métempsycose, — le déplacement et la transposition de la vie, — aurait pu être formidable.

2098. (1773) Essai sur les éloges « Morceaux retranchés à la censure dans l’Essai sur les éloges. »

On peut donc lui reprocher d’avoir prodigieusement augmenté cette maladie épidémique des emprunts, qui devient de jour en jour plus mortelle ; d’avoir donné l’exemple de la multiplication énorme des impôts ; d’avoir aggravé tour à tour et la misère par le despotisme, et le despotisme par la misère ; de n’avoir jamais vu que je ne sais quelle grandeur imaginaire de l’État, qui n’est que pour le ministre, et dont le peuple ne jouit point ; et d’avoir sacrifié à ce fantôme les biens, les trésors, le sang, la paix et la liberté des citoyens. […] Il y a apparence que Louis XIV, né à Rome, ne serait point devenu le maître du monde.

2099. (1912) Réflexions sur quelques poètes pp. 6-302

Qu’est devenu ce fer et cet escu, Dont tu rendois le plus brave veincu ? […] Pourquoi voulez-vous donc que je me déclare, contre un homme si bien appuyé, et que ce que nous en avons dit, en notre particulier devienne public ? […] Faut-il croire, comme on l’a dit, que plus tard, devenu grave et sérieux, Belleau jugea frivole son premier enthousiasme ? […] Et cela, à cause d’un hémistiche qui est devenu proverbial, ayant fait sourire les doctes et les ignorants. […] Lebrun use d’un art volontiers ampoulé, et s’il devient soudain torrent, c’est pour se perdre avec pompe dans des trous peu profonds.

2100. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — A — article » p. 136

Il a travaillé pour le Théatre François & pour le Théatre Italien, avec des succès médiocres qui auroient pu devenir plus heureux, si sa mauvaise fortune lui eût permis de cultiver ses talens & de travailler plus soigneusement ses Ouvrages.

2101. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » p. 274

L’Histoire Comique des Etats & Empires de la Lune & du Soleil, prouvent combien il étoit capable de devenir grand Physicien, habile Critique & profond Moraliste, si la mort ne l’eût enlevé presque aussi-tôt qu’il se fut entiérement consacré aux Lettres.

2102. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — N. — article » pp. 421-422

La bizarrerie de son étoile l’a rendu célebre malgré lui-même, ou du moins sans qu’il s’attendît à le devenir.

2103. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Conclusion. »

Il est vrai ; et c’est ce qu’il faudra faire constamment, jusqu’à ce que l’éducation ordinaire soit devenue meilleure, réforme qui ne paraît pas prochaine.

2104. (1765) Articles de l’Encyclopédie pp. 11-15754

Hors de ces trois cas, la préposition à devient un mot composé par sa jonction avec l’article le ou avec l’article pluriel les. […] Un célebre Abréviateur s’est contenté de dire que Joseph fut vendu par ses freres, calomnié par la femme de Putiphar, & devint le Surintendant de l’Égypte. […] Ciceron, qui d’Orateur devint Consul, compare ces minuties aux racines des arbres. […] J’évite d’être long, & je deviens obscur. […] Et que deviendra alors le nom d’animal, sera-t-il encore un nom de genre ?

2105. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Eugène Gandar »

Je crois que la vie de Gandar, bien présentée, nous montrerait, non pas seulement en préceptes, mais en action, toutes les préparations, toutes les études préliminaires, tous les exercices gradués et les préludes déjà définitifs et bien complets, au moyen desquels on peut devenir un digne, un savant, un autorisé et, je ne crains pas d’ajouter, un éloquent professeur. […] Il faut penser qu’il était ici depuis plus de trois ans, et que de tous les membres qui se sont succédé à l’École, c’est lui surtout que la Grèce aura fait ce qu’il est et ce qu’il doit devenir un jour. » M.  […] C’est devenu quasi une mauvaise note que de plaire. […] Peut-être oserai-je vous dire que j’ai gagné quelque chose en fermeté et en raison ; mais ma tâche est devenue plus lourde, et, tout compensé, ce sont bien les chaînes d’autrefois que j’ai reprises après les avoir secouées. […] Mézières : « Sarcey est tout simplement en train de devenir notre premier critique de théâtre. » 166.

2106. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLIVe entretien. Examen critique de l’Histoire de l’Empire, par M. Thiers » pp. 81-176

Quand on a été jugé soi-même, souvent par le premier venu, qui ne connaissait ni les personnages, ni les événements, ni les questions sur lesquelles il prononçait en maître, on ressent autant de honte que de dégoût à devenir, un juge pareil. […] Un passage des Alpes est devenu, comme le passage du Rhin, une des opérations militaires les plus banales de la grande guerre. […] Cependant le doute devint bientôt impossible, et Kléber fut officiellement proclamé successeur du général Bonaparte. […] C’est une passion que le regret de la patrie, et qui devient violente quand la distance, la nouveauté des lieux, des craintes fondées sur la possibilité du retour viennent l’irriter encore. […] Cette proposition, présentée au parlement et accueillie avec respect, fut combattue par ses anciens amis, devenus ses ennemis, et notamment par M. 

2107. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre huitième »

Les beaux endroits de la Thébaïde et de l’Alexandre sont moins des beautés solides que de fortes impressions produites par de grands exemples sur un jeune homme destiné à devenir à son tour un maître de l’art. […] L’esprit de comparaison, qui nous aide à porter des jugements exacts sur les écrivains, deviendrait un travers si nous voulions donner des rangs à ceux qui sont hors de rang, et distinguer des degrés dans la perfection. […] Polyeucte mort, on espère aussi que Pauline deviendra la femme de Sévère. […] Hors des situations héroïques dont le sublime est en quelque sorte le langage familier, les personnages deviennent douteux, leur langage obscur et incertain. […] Elle est devenue champêtre dans les premières années du dix-huitième siècle, sensuelle au milieu, ou, comme on disait alors, sentimentale.

2108. (1880) Goethe et Diderot « Gœthe »

Il devint plus tard directeur de spectacle et il s’ajusta parfaitement à cette fonction. […] Quand elle y devient désespérée, elle n’est plus que déclamatoire, et il la tue pour la changer en une machine d’opéra. […] Si bien que je puis avoir dit le mot de tout le monde, quand, une fois, il sera dit… et attaché ce grelot, qui peut devenir une grosse cloche. […] Ce qu’on trouverait peut-être de mieux dans ce Voyage en Suisse, c’est quelques intérieurs d’auberge ; seulement on se demande ce que ces intérieurs seraient devenus sous la plume de Walter Scott, avec sa sublime bonhomie. […] On dirait qu’il a écrit pour lui-même cette phrase : « L’homme le plus ordinaire devient à Rome quelque chose.

2109. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — C — Cantacuzène, Charles-Adolphe (1874-1949) »

Robert de Montesquiou devienne l’écrivain qu’il s’efforça d’être sans y réussir, précieux, impertinent, lyrique, capable de faire renaître dans ses vers les prêtresses antiques, les marquises et les reines, et de célébrer les grâces fragiles des Parisiennes polies dans les rues en l’an dix-neuf cent-unième, et il s’appellera Charles-Adolphe Cantacuzène.

2110. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » p. 350

Il avoit de grandes connoissances dans l’Histoire de France ; mais les lumieres dirigées par l’esprit particulier, deviennent en peu de temps des lumieres fausses, équivoques, dangereuses, & l’on devroit travailler à se corriger de ce défaut, avant d’entreprendre aucun Ouvrage.

2111. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 211-212

A quinze ans finit la culture ; Le bouton alors devient fleur : C’est à quinze ans que la Nature Parle à nos sens, nous donne un cœur.

2112. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 81-82

Les épithetes doivent être sobrement placées par-tout, plus particuliérement dans le style familier : l'usage des exclamations devient gauche & froid, quand il est trop répété ; & les réticences ne produisent un grand effet, que lorsqu'on sent que l'Auteur ne dit pas tout ce qu'il pourroit dire, non lorsqu'il s'arrête dans l'impossibilité de pouvoir rien dire davantage.

2113. (1899) La parade littéraire (articles de La Plume, 1898-1899) pp. 300-117

L’heure était grave et délicieuse, nos paroles devenaient solennelles. […] C’est, toutefois, d’une écriture un peu gauche, mais le moindre événement devient émotionnant lorsque Eugène Rouart le raconte. […] Jammes, notamment, le rythme est devenu un simple babil. […] Depuis deux ans, il est devenu un fougueux défenseur du Naturisme, un apôtre véhément et lyrique de l’idée païenne. […] Hostie délicieuse et divine surtout celle-ci, par qui l’homme se transforme et devient l’Homme.

2114. (1908) Jean Racine pp. 1-325

Fou de littérature, il le serait peut-être devenu de lui-même. […] Cependant, on ne sait ce qu’est devenu Porus. […] Fallait-il interrompre vos saintes occupations pour devenir des traducteurs de comédies ? […] J’ai cru que sa prison deviendrait son asile. […] Le type devient ainsi très général.

2115. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Brandenburg, Albert-Jacques (1878-1934) »

Anonyme En un temps où, assoupli, préparé par l’admirable usage qu’en ont fait nos derniers grands poètes, le vers français régulier est devenu si facilement beau, il est difficile de juger de la réelle valeur des poèmes de M. 

2116. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Lautréamont (1846-1870) »

Les imbéciles deviennent fous et, dans leur folie, l’imbécillité demeure croupissante ou agitée ; dans la folie d’un homme de génie, il reste souvent du génie : la forme de l’intelligence a été atteinte et non sa qualité ; le fruit s’est écrasé en tombant, mais il a gardé tout son parfum et toute la saveur de sa pulpe, à peine trop mûre.

2117. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Rictus, Jehan (1867-1933) »

Il a créé un genre et un type ; cela vaut la peine qu’on lui fasse quelques concessions et qu’on se départisse, mais pour lui seul, d’une rigueur sans laquelle la langue française, déjà si bafouée, deviendrait la servante des bateleurs et des turlupins.

2118. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 396-397

Il est malheureux pour lui & pour elle, qu’on n’ait conservé que le titre de ses Productions, qui sont la Renommée Littéraire, la Wasprie, l’Ane Littéraire, & d’autres allusions de ce goût, devenues des cris de guerre dans le plaisant Monde philosophique.

2119. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 275-276

Les matieres les plus abstraites deviennent intéressantes sous sa plume, par la maniere agréable dont il les présente, & par les fleurs qu’il a su y répandre, sans cet air de prétention & de suffisance, qui rend les ornemens ridicules, & par conséquent plus qu’inutiles.

2120. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » p. 299

Que deviendra la douce Tolérance ?

2121. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Maurice et Eugénie de Guérin. Frère et sœur »

Voici donc le pendant de ce beau morceau du Centaure, mais en prose gauloise, digne des vieux aïeux rabelaisiens de la terre bourguignonne ; ce n’est plus un Centaure qui parle ici, mais un paysan (notez-le bien), un manant, fils et petit-fils de manants, d’anciens soldats redevenus bûcherons et un peu braconniers ; c’est l’ancien bouvier devenu trop citadin à son tour, et qui regrette les heures rustiques de sa jeunesse. […] Cet état de langueur a bien des charmes, et ce mélange de verdure et de débris, de fleurs qui s’ouvrent sur des fleurs tombées, d’oiseaux qui chantent et de petits torrents qui coulent, cet air d’orage et cet air de mai font quelque chose de chiffonné, de triste, de riant, que j’aime… » Ne reconnaissez-vous pas le paysagiste d’instinct, qui se joue et qui s’essaye, sans maître, et auquel il faudrait bien peu de chose, — seulement un cadre, plus grand, — pour devenir, un maître en son genre, et lutter peut-être avec notre grand paysagiste du Berry ? […] Loin de moi l’idée d’établir une rivalité, de risquer un parallèle qui pourrait devenir une pomme de discorde et allumer la guerre civile dans un certain monde !

2122. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Œuvres complètes de Molière »

Devenu seul et entier possesseur de l’office, le père Poquelin a évidemment en vue de le céder un jour à son fils, qui prête serment comme survivancier, dès le mois de décembre de cette année 1637. […] Mais ce n’est là que le prétexte ; il aurait eu bien de la peine, même sans cette rencontre, à ne pas devenir un jour ou l’autre ce qu’il a été. […] A peine entré dans la société, Molière en devient le chef.

2123. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Vaugelas. Discours de M. Maurel, Premier avocat général, à l’Audience solennelle de la Cour impériale de Chambéry. »

Vaugelas, en ses dernières années, était donc devenu le grand travailleur, la cheville ouvrière de l’Académie* celui qui tenait la plume pour le Dictionnaire et qui avait la conduite de tout l’ouvrage. […] Le français est devenu et est resté la langue des salons, la langue diplomatique par excellence. […] Le français, dans sa dernière forme toute monarchique, se sentait près de devenir la maîtresse-langue, la langue-reine.

2124. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Marie-Antoinette (suite.) »

« Nous avions beau nous attendre, écrivait-elle à sa mère, à l’événement devenu inévitable depuis deux jours, le premier moment a été atterrant, et nous n’avions pas plus l’un que l’autre de parole. […] Puis elle écrit le jour même à sa mère (10 mai 1774) et se montre à elle dans la vérité de son trouble et de sa sollicitude : « Mon Dieu, qu’allons-nous devenir ? […] Elle disait de lui cette belle parole : « Son estime est ma protection. » Détail singulier pourtant, presque incroyable et inimaginable, mais qui depuis la publication des Mémoires de Mme Campan est devenu l’un des points avérés de l’histoire : après six ou sept ans de mariage, Marie-Antoinette n’était pas encore mère et n’avait pas lieu d’espérer de l’être.

2125. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Histoire de la Grèce, par M. Grote »

Qu’était-ce en réalité qu’Homère, et qu’étaient primitivement les poëmes qu’on lui attribue et qui, après avoir fait « la dignité et le charme de leur époque légendaire », sont devenus l’honneur et le patrimoine même de l’esprit humain ? […] C’était précisément à ces abus qu’il devenait urgent de remédier, en se reportant à un premier type général : il ne s’agissait pas, pour cette Commission, de construire pour la première fois une Iliade, ce qui eût été une innovation bien audacieuse, mais simplement de réunir « les membres en lambeaux d’un Homère sacré », les parties conspirantes d’un poëme préexistant. […] L’Iliade, au contraire, composée de scènes, d’exploits particuliers, de combats et de duels entre les principaux héros, offre « un splendide tableau de la guerre de Troie en général », et répond parfaitement à ce titre plus étendu sous lequel le poëme est devenu immortel.

2126. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Les fondateurs de l’astronomie moderne, par M. Joseph Bertrand de l’académie des sciences. »

Rien de plus humiliant pour l’esprit, et j’avoue que lorsqu’on se voit d’une telle infériorité (fût-on Voltaire ou Gœthe, car il n’y a guère ici de degrés), devant les maîtres de l’analyse, on est tenté de désirer que cette langue des nombres soit une de celles dont l’enseignement devienne obligatoire de bonne heure à toute intelligence digne et capable d’y atteindre. […] Bernardin de Saint-Pierre est dépassé dans ses rêves d’harmonie céleste : Jean Reynaud est devenu le prophète et le saint Jean-Baptiste du système dont M.  […] Biot et a ramené à leur valeur les interprétations trop adoucies et trop émoussées du vieil académicien devenu, dans ses dernières années, un catholique fidèle et soumis.

2127. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Idées et sensations : par MM. Edmond et Jules de Goncourt. »

Ils ont commencé par l’excès, par l’abus ; ils ont abondé dans leur sens, ils ont beaucoup hasardé : mais bientôt ils ont tant vu et compulsé de pièces de ce xviiie  siècle qu’ils chérissent et où ils ont placé leurs origines, ils ont tant recherché et comparé de tableaux, d’estampes et d’images, tant recueilli de détails, tant colligé d’anecdotes, tant dépouillé de journaux, de correspondances, en finissant par les gros livres et par les ouvrages de poids, qu’ils sont devenus à leur tour des habiles, des peintres et témoins fidèles, des experts de première qualité dans la connaissance de cet âge si voisin de nous et si compliqué, si raffiné. […] Ces Suard, ces Morellet, tout académiciens qu’ils sont devenus, n’étaient ni plats ni serviles ; ils savaient au besoin se faire mettre, comme d’autres, à la Bastille ou dans un château fort. […] L’usufruit d’uno agrégation de molécules. » Ils s’arrêtent, d’ailleurs, à temps comme Rivarol, dans l’expression de la non-croyance ; en ce genre ils n’affichent rien : « Lorsque l’incrédulité devient une foi, pensent-ils, elle est moins raisonnable qu’une religion. » Leur incrédulité reste celle de gens comme il faut119. — Moralistes, ils ont des sorties misanthropiques à la Chamfort : « On est dégoûté des choses par ceux qui les obtiennent, des femmes par ceux qu’elles ont aimés, des maisons où on est reçu par ceux qu’on y reçoit. » Je crois avoir assez marqué la variété de ce Recueil, qui gagnerait à ce qu’on en retranchât, à la réimpression, une vingtaine de pensées par trop recherchées et aussi énigmatiques par le fond que par la forme.

2128. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « THÉOPHILE GAUTIER (Les Grotesques.) » pp. 119-143

Comment oublier Du Monin, dont le nom était devenu proverbial à titre de poëte amphigourique, vers 1580 ? […] I, p. 156) comme le plus charmant endroit et comme le plus adorable morceau de Théophile une page de prose qui devient parfaitement inintelligible telle qu’il la transcrit, et dans laquelle des lignes indispensables au sens (ligne 16, page 157) ont été omises. […] Nombre de pages qu’il y a semées et qui me reviennent à la fois, par exemple, sur Ronsard pédant et poëte, sur le paganisme d’art au xvie  siècle, sur ce que les Français ne sont pas une nation poétique, sur ce que les poëtes ne sont que rarement musiciens et réciproquement, etc., toutes ces pages se lisent avec plaisir et se retiennent ; elles sont suffisamment vraies ou auraient peu à faire pour le devenir.

2129. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « UN FACTUM contre ANDRÉ CHÉNIER. » pp. 301-324

remy dans ces préambules assez tortueux ; il ne manque pas de décocher au passage bon nombre d’épigrammes sourdes contre les inventeurs de rhythmes nouveaux, qui, en ce temps-là, se prévalurent de l’autorité d’André Chénier ; ce sont déjà de bien vieilles querelles, dans lesquelles les épigrammes elles-mêmes ont le tort d’être devenues fort surannées. […] Le critique veut absolument imiter ici ce personnage d’une pierre antique qui pèse une lyre dans une balance ; je ne doute pas que sa balance ne puisse être, ne puisse devenir un jour très-délicate et très-sensible, mais il faut convenir que, pour le quart d’heure, les branches et les plateaux en sont encore bien lourds et bien massifs, pas assez dégrossis. […] remy de meilleures pages, de plus dignes des études si méritoires auxquelles il s’est livré ; l’autre jour, par exemple95, il défendait avec esprit et goût la mémoire de Charles Nodier, insultée par un pamphlétaire ; sa plume devenait excellente.

2130. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre premier. La structure de la société. — Chapitre II. Les privilèges. »

D’autre part, en dédommagement de ses frais de justice, il reçoit les biens de l’homme condamné à mort et à la confiscation dans son domaine ; il succède au bâtard né et décédé dans sa seigneurie sans testament ni enfants légitimes ; il hérite du régnicole, enfant légitime, décédé chez lui sans testament ni héritiers apparents ; il s’approprie les choses mobilières, vivantes ou inanimées, qui se trouvent égarées et dont on ignore le propriétaire ; il prélève le tiers ou la moitié des trésors trouvés, et, sur la côte, il prend pour lui les épaves des naufrages ; enfin, ce qui est plus fructueux en ces temps de misère, il devient possesseur des biens abandonnés qu’on a cessé de cultiver depuis dix ans. — D’autres avantages attestent plus clairement encore que jadis il eut le gouvernement du canton. […] Jadis capitaine du district et gendarme en permanence, il doit devenir propriétaire résidant et bienfaisant, promoteur volontaire de toutes les entreprises utiles, tuteur obligé des pauvres, administrateur et juge gratuit du canton, député sans traitement auprès du roi, c’est-à-dire conducteur et protecteur comme autrefois, par un patronage nouveau accommodé aux circonstances nouvelles. […] Aujourd’hui il leur en faudrait 20 000 ou 25 000. — En province surtout, par l’effet des chemins de fer, la vie est devenue beaucoup plus chère

2131. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXVIIIe entretien. Tacite (1re partie) » pp. 57-103

Écoutons Tacite, c’est ainsi qu’il commence son premier livre : XI « J’entreprends une œuvre riche en vicissitudes, atroce en batailles, déchirée en séditions, sinistre même dans la paix : « Quatre empereurs tranchés successivement par le glaive, trois guerres civiles, plusieurs guerres extérieures, quelques autres tout à la fois civiles et étrangères ; « Nos armes, prospères en Orient, malheureuses en Occident ; l’Illyrie troublée, les Gaules mobiles, la Grande-Bretagne conquise et perdue presque au même moment ; les races suèves et sarmates se ruant contre nous ; les Daces illustrés par des défaites et par des victoires alternatives ; l’Italie elle-même affligée de calamités nouvelles ou renouvelées des calamités déjà éprouvées par elle dans la série des siècles précédents ; des villes englouties ou secouées par les tremblements de terre sur les confins de la fertile Campanie ; Rome dévastée par les flammes ; nos plus anciens temples consumés ; le Capitole lui-même incendié par la main de ses concitoyens ; nos saintes cérémonies profanées ; des adultères souillant nos plus grandes familles ; les îles de la mer pleines d’exilés ; ses écueils ensanglantés de meurtres ; des atrocités plus sanguinaires encore dans le sein de nos villes ; noblesse, dignités, acceptées ou refusées, imputées à crime ; le supplice devenu le prix inévitable de toute vertu ; l’émulation entre les délateurs, non-seulement pour le prix, mais pour l’horreur de leurs forfaits ; ceux-ci revêtus comme dépouilles des consulats et des sacerdoces, ceux-là de l’administration et de la puissance de l’État dans les provinces, afin qu’elles supportassent tout de leur violence et de leur rapacité ; les esclaves corrompus contre leurs maîtres, les affranchis contre leurs patrons, et ceux à qui il manquait des ennemis pour les perdre, perdus par la trahison de leurs amis. » XII « Toutefois le siècle n’est pas assez tari de toute vertu pour ne pas fournir encore de grands exemples : « Des mères accompagnant leurs fils poursuivis, dans leur fuite ; des femmes s’exilant volontairement avec leurs maris ; des proches courageux ; des gendres dévoués ; la fidélité des serviteurs résistant même aux tortures ; des hommes illustres bravant les dernières extrémités de l’infortune ; l’indigence elle-même héroïquement supportée ; des sorties volontaires de la vie comparables aux morts les plus louées de nos ancêtres. […] je vous parle en ce moment au nom de Galba, devenu mon père, du sénat et de l’empire, que je représente devant vous. […] « Le corps de Galba, longtemps abandonné et devenu le jouet des profanateurs, pendant les ténèbres, fut enfin enseveli par les soins d’Argius, un de ses anciens esclaves, dans les jardins d’un domaine privé que possédait Galba.

2132. (1892) Boileau « Chapitre VI. La critique de Boileau (Fin). La querelle des anciens et des modernes » pp. 156-181

Sur ce xviie  siècle essentiellement précieux et galant, très noble et très raffiné, très ingénieux et plus sensible à l’extraordinaire qu’au simple beau, capable de donner Scarron et Quinault, Voiture et Benserade, et tout au plus peut-être la moitié de Corneille, sur ce xviie  siècle qui laissé à lui-même eût produit sans intervalle et sans arrêt Fontenelle après Balzac, l’étude de l’antiquité, retardant l’éclosion de l’art mièvre tout prêt à succéder à l’art pompeux, fit fleurir des poètes capables de la perfection qui n’étonne pas, de cette perfection qui, semblant d’abord de plain-pied avec nos esprits, se révèle plus haute et inaccessible à mesure qu’elle nous devient plus familière, et nous donne des jouissances infinies que nous n’arrivons pas à épuiser : des artistes enfin tels que Racine et La Fontaine. […] Tout cela est misérable : et que devient le sujet, au milieu de ces violences ? […] Ils tirent leur valeur à notre égard des pensées qui nous sont devenues familières, des doctrines où notre siècle a enfermé ses croyances et son génie : tandis que Boileau, en les écrivant, croyait seulement défendre ses chers anciens, et avec eux tout son Art poétique, aussi éloigné de soupçonner qu’il était « évolutionniste » que saint Augustin se doutait peu d’être cartésien le jour où il rencontrait la fameuse formule : Je pense, donc je suis.

2133. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre II. La première génération des grands classiques — Chapitre I. La tragédie de Jodelle à Corneille »

Au fond, pour lui comme pour Régnier, comme pour D’Aubigné, Ronsard, par une illusion dont l’histoire littéraire offre plus d’un exemple, Ronsard était devenu le représentant de la liberté de l’art, du facile et fécond naturel, contre Malherbe et contre les puristes tyrans du vers et de la langue. […] Ces règles donc, qui sont devenues cause de tant d’invraisemblances dans la décadence du théâtre classique, se sont imposées comme condition nécessaire de la vraisemblance : on en méconnaîtrait le caractère si l’on perdait de vue un seul moment à quel état de la mise en scène elles se rapportent. […] De cette biographie dramatique, il avait extrait un épisode principal, le mariage de Rodrigue, qui était devenu tout son drame.

2134. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre XI. L’antinomie sociologique » pp. 223-252

Mais bientôt l’idéal nouveau s’incarne dans une organisation définie ; il suscite à son tour une réglementation sociale ; il devient un instrument de règne aux mains d’une hiérarchie. Le christianisme primitif est devenu le catholicisme : le socialisme à son tour ne triomphera qu’en devenant unitaire et autoritaire. — La loi d’intégration sociale croissante peut donc amplifier les masses sociales et élargir les courants sociaux ; elle peut amener la formation de vastes groupements d’hommes tels que les États-Unis d’Amérique ou peut-être dans un avenir plus ou moins prochain, les États-Unis d’Europe ; elle peut favoriser la formation de tel grand courant social ou religieux : provoquer peut-être l’avènement du socialisme universel ; tout cela n’augmentera pas nécessairement la somme de liberté ni la somme de bonheur des individus. […] Le mot de Renan est très juste : « Il est devenu trop clair, dit-il, que le bonheur de l’individu n’est pas en proportion de la grandeur de la nation à laquelle il appartient101. » La loi de différenciation sociale croissante, contrepartie de la loi d’intégration, n’est pas non plus un sûr garant de la liberté ni du bonheur des individus.

2135. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Le père Lacordaire orateur. » pp. 221-240

Devenu étudiant en droit, toujours à Dijon, il commença à se distinguer par un talent réel de parole dans des conférences qu’avaient établies entre eux les étudiants et de jeunes avocats. […] Drouot était fils d’un boulanger de Nancy, le troisième de douze enfants : Issu du peuple par des parents chrétiens, il vit de bonne heure, dans la maison paternelle, un spectacle qui ne lui permit de connaître ni l’envie d’un autre sort, ni le regret d’une plus haute naissance ; il y vit l’ordre, la paix, le contentement, une bonté qui savait partager avec de plus pauvres, une foi qui, en rapportant tout à Dieu, élevait tout jusqu’à lui, la simplicité, la générosité, la noblesse de l’âme, et il apprit, de la joie qu’il goûta lui-même au sein d’une position estimée si vulgaire, que tout devient bon pour l’homme quand il demande sa vie au travail et sa grandeur à la religion. […] Le soir, on éteignait la lumière de bonne heure par économie, et le pauvre écolier devenait ce qu’il pouvait, heureux lorsque la lune favorisait par un éclat plus vif la prolongation de sa veillée.

2136. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Mémoires d’outre-tombe, par M. de Chateaubriand. » pp. 432-452

Et puis, si l’on va au fond, le public n’a pas été trompé sur un point capital : il n’a pas, je le crois, été assez frappé du talent, mais il a senti, à travers ce récit où tant de tons se croisent et se heurtent, une opiniâtre personnalité, une vanité persistante et amère qui, à la longue, devient presque un tic. […] À partir de 1837 environ, sa main se gâta ; ses coups de pinceau devinrent plus heurtés, plus brisés dans leur énergie dernière. […] Ce qui reste évident pour lui, c’est qu’on ne sent nulle part l’unité de l’homme ni le vrai d’une nature ; et, à la longue, ce désaccord devient insupportable dans une lecture de mémoires.

2137. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Mme du Châtelet. Suite de Voltaire à Cirey. » pp. 266-285

Dans un moment elle s’exagère les périls ; son imagination va jusqu’à se représenter Voltaire peu en sûreté même en Hollande : « Je ne sais, écrit-elle à d’Argental, si vous daignerez me rassurer sur cette crainte, vous penserez que je deviens folle. […] Le paradis terrestre de Cirey était devenu un enfer de tracasseries et d’inquiétudes : « En vérité il est bien dur, disait-elle, de passer sa vie à batailler dans le sein de la retraite et du bonheur. […] Privé de l’amie qui le fixait et qui tenait pour lui le gouvernail, il ne savait plus que devenir ni à quoi se rattacher.

2138. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Histoire du chancelier d’Aguesseau, par M. Boullée. (1848.) » pp. 407-427

Son père, le plus pacifique, le plus prudent et le moins novateur des hommes, était pourtant attaché, par des affinités de vertu et de mœurs comme de pensée, à cette école qu’on désignait alors sous le nom de Port-Royal, et son fils en devint sous ses yeux comme un élève extérieur et libre, et tout littéraire, au moins par les méthodes qu’on lui fit suivre, et par l’esprit général qui présida à son éducation. […] Aucun moment n’était perdu, et les voyages mêmes de l’intendant procuraient des occasions variées d’exercices et de conférences : M. d’Aguesseau emmenait ses enfants avec lui, et son carrosse devenait une espèce de classe, où l’étude exacte et régulière s’entremêlait doucement avec l’entretien. […] Devenu chancelier de France et ministre en 1717, sous la Régence, d’Aguesseau laissa trop voir alors ce qui lui manquait comme homme politique, et sa vertu, égarée entre Law, Dubois et le Régent, rencontra plus d’un piège qu’elle ne sut point éviter.

2139. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « La Harpe. » pp. 103-122

Ce ton nous fait sentir déjà ce que devient aisément l’amour propre de La Harpe quand sa tête se monte et qu’il s’irrite de la contradiction même. […] La Harpe en usa trop ; il eut trop affaire aux chenilles de la littérature, et il n’en devint pas plus rossignol pour cela, ni plus poète. […] L’ancienne tragédie française (je dis ancienne, parce qu’elle n’existe plus) avait ses règles, ses artifices, ses convenantes, que Racine surtout avait connus et portés à la perfection, et dont il était devenu l’exemplaire accompli La Harpe, après Voltaire, les entendait et les sentait plus que personne, et il est le meilleur guide en effet, du moment qu’on veut entrer dans l’économie même et dans chaque partie de ce genre de composition pathétique et savante.

2140. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Le président de Brosses. Sa vie, par M. Th. Foisset, 1842 ; ses Lettres sur l’Italie, publiées par M. Colomb, 1836. » pp. 85-104

Pourtant, quand il aura vu Rome, c’est-à-dire la grande et suprême beauté, il regrettera plus d’une de ses exclamations premières et superlatives, qui lui sont échappées : « À mesure qu’on se forme le goût, on devient plus difficile. » Il ne regarde pas seulement ce qui est de l’art, il fait attention aux hommes, beaucoup aux dames, à la société, aux conversations, à la nature. […] Il n’y a point d’étoffe là-dedans. » En architecture, en sculpture, il est contre le contourné, qui était alors à la mode : Les Italiens nous reprochent qu’en France, dans les choses de mode, nous redonnons dans le goût gothique ; que nos cheminées, nos boîtes d’or, nos pièces de vaisselle d’argent sont contournées et recontournées, comme si nous avions perdu l’usage du rond et du carré ; que nos ornements deviennent du dernier baroque : cela est vrai. […] De retour à Dijon (1740), il devient président de simple conseiller qu’il était ; il se marie ; il vit plus en plein que jamais de sa vie de magistrat, de sa vie d’homme du pays, et aussi d’homme de lettres au sens d’autrefois.

2141. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « L’abbé Barthélemy. — I. » pp. 186-205

Le nom du duc et de la duchesse de Choiseul et celui de l’abbé Barthélemy sont devenus inséparables. […] Au retour de ce voyage d’Italie, la vie de l’abbé Barthélemy s’assoit et se complète de plus en plus ; il devient inséparable des Choiseul et ne distingue plus sa fortune de leur destinée. […] Villemain), se tournant vers la maîtresse de la maison, dit en plaisantant : « Princesse, il ne faudrait pas pourtant qu’un tel précédent devînt un principe. »

2142. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1880 » pp. 100-128

Il se plaint des amateurs qui travaillent à devenir les amis des peintres, pour payer moins cher, et à ce propos, il me cite la phrase de Diaz : « Oui, ils veulent connaître intimement la p…, dans l’espérance de devenir ses maquereaux ». […] * * * — Je rencontre à une exposition du Palais de l’Industrie, une jeune et jolie brune qui a profité des vingt jours de réserviste de son mari, pour devenir complètement blonde.

2143. (1897) Préface sur le vers libre (Premiers poèmes) pp. 3-38

mais il y a toujours un moment où l’on s’en aperçoit, et l’évolution assez prolongée est devenue suffisamment nette, pour s’appeler une transformation. […] Ce vers est devenu le vers de douze syllabes, avec dix césures possibles, avec césure obligée, car il n’y a pas de mots de douze syllabes : ce qui est presque l’abolition de la césure. […] Sans admettre que le vers devienne un verset complet, et là le goût et l’oreille sont suffisants pour avertir le poète, on peut grouper en un seul vers trois ou quatre éléments ayant intérêt à ce que leur jaillissement soit resserré.

2144. (1889) Émile Augier (dossier nécrologique du Gaulois) pp. 1-2

Un vœu se présente naturellement à bien des gens en face de ce cercueil : demander que les obsèques d’Émile Augier, le plus grand dignitaire de la Légion d’honneur que comptent les lettres françaises, soient faites aux frais de l’État et deviennent l’occasion d’un deuil national. […] Nogent Saint-Laurens se découragea, abandonna les lettres et se fit inscrire au barreau, où il devint par la suite le célèbre Me Nogent Saint-Laurens. […] Mgr le duc d’Aumale, dont il devint le bibliothécaire.

2145. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 33, que la veneration pour les bons auteurs de l’antiquité durera toujours. S’il est vrai que nous raisonnions mieux que les anciens » pp. 453-488

Peut-être même que la generation qui suivra immédiatement la nôtre, frappée des fautes énormes d’Homere et de ses compagnons de fortune les dédaignera, ainsi qu’un homme devenu raisonnable dédaigne les contes puériles qui ont fait l’amusement de son enfance. […] L’imprimerie, cet art si favorable à l’avancement de toutes les sciences, qui deviennent plus parfaites à mesure que les connoissances s’y multiplient, fut trouvée dans le quinziéme siecle, et près de deux cens ans avant que Monsieur Descartes, qui passe pour le pere de la nouvelle philosophie, eut fait part au public de ses méditations. […] Depuis quatre-vingt ans que les esprits ont commencé à devenir si justes et si pénetrans, on n’a fait aucune découverte de l’importance de celle dont nous parlons.

2146. (1860) Ceci n’est pas un livre « Une préface abandonnée » pp. 31-76

Mais il l’a si traîtreusement déformé, il l’a tant et tant de fois jeté en l’air, que le sombrero en est tout grotesquement bossué ; il a roulé à l’entour tant de rubans ridicules, il en a tourmenté les bords d’une telle façon, que le grave couvre-chef du conspirateur est devenu un chapeau d’arlequin. […] si Champfleury pouvait contempler — comme moi — la dernière ligne de ce manuscrit, où la mort n’a pas laissé le temps de jeter le point final, certes son œil deviendrait morne et s’humecterait… peut-être même ferait-il une Méditation lamartinienne, en songeant que les réalistes de ce bas monde ne sont que vanité ! […] Que le public s’approche maintenant, le tour est fait : Roméo et Juliette sont devenus les Amoureux de Sainte-Périne.

2147. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Essai sur la littérature merveilleuse des noirs. — Chapitre III. Personnages merveilleux des contes indigènes »

Chez les Bambara à demi-fétichistes, il devient Gouala ou Nouala et la conception arabe est déjà déformée sensiblement. […] Le pleureur perd sa turbulence et ses instincts malfaisants pour devenir secourable (v. […] Effet produit par la vue des guinné Comme pour les Napeae antiques, qui les voit devient fou et meurt le plus souvent.

2148. (1824) Discours sur le romantisme pp. 3-28

Pour ne parler que de la France, ces productions, généralement nobles et décentes sous Louis XIV, devinrent licencieuses et impies sous la Régence ; ensuite, sauf de glorieuses exceptions qui s’offrent à la pensée de tous, futiles et affectées pendant le long règne de Louis XV, elles semblèrent se régénérer, avec les mœurs publiques et privées, dans les années trop peu nombreuses du règne de son infortuné successeur ; et enfin, nous les avons vues, durant les jours de nos discordes civiles, partager la fortune diverse des partis, et suivre les phases variées du corps social, tantôt abjectes et furibondes, tantôt sublimes et dévouées, ici célébrant les épreuves de la vertu, et là consacrant les triomphes du crime. […] Le sublime se perd dans les nues, et devient de l’incompréhensible. La simplicité rampe sur la terre, et devient de la bassesse ou de la platitude.

2149. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Ernest Renan »

nous sommes devenus des Germains, au contact de cet homme revenu d’Allemagne, et nous discutons, avec une considération obséquieuse, la considération du bonhomme Géronte pour Sganarelle quand il l’entend parler latin, des sottises qu’il fallait écarter avec le rire souverain des railleurs ! […] Mais le respectueux dit qu’après tout Jésus ne fut pas impeccable, et que lui (Jésus), si à l’aise au bord de son petit lac, devint fastidieux et exténué à Jérusalem (page 346) ! […] Mais ce qui aurait dû n’être jamais que de l’histoire littéraire faillit devenir presque de l’histoire ecclésiastique… Les chaires retentirent.

2150. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Charles Baudelaire  »

Ce profond rêveur qui est au fond de tout grand poète s’est demandé, en Baudelaire, ce que deviendrait la poésie en passant par une tête organisée, par exemple, comme celle de Caligula ou d’Héliogabale, et Les Fleurs du mal — ces monstrueuses ! […] » Et la chose (ce comique) devient si forte, si forte et si visible, qu’on se demande si le haschisch se moque encore de lui quand il nous en raconte les frasques dans la tête humaine, ou si, lui, le narrateur, se moque de nous et prétend être notre haschisch ? […] Les effets se ressemblent beaucoup cependant, mais les hommes diffèrent… Monographe obstiné de l’ivresse, qui doit la peindre dramatiquement après l’avoir scientifiquement décrite, Baudelaire peut en devenir le Hogarth à sa manière ; mais un Hogarth littéraire, plus fort et plus fin que l’autre Hogarth.

2151. (1900) La province dans le roman pp. 113-140

Là il n’était pas ridicule, il était admirable, il sortait du domaine comique, il devenait un acteur du grand drame qu’est la vie d’une nation : il était un bon serviteur de la France. […] Quant aux autres provinciaux, bourgeois et bourgeoises, marchands et marchandes des villes ou des gros bourgs, ils s’habillent précisément à la mode de Paris, qui est devenue la mode universelle. […] Elles deviennent négligeables, tant à cause de ce que j’appellerai l’usure littéraire d’un pareil moyen, que pour cette autre raison qu’il est tiré de l’histoire ancienne plus que de la réalité présente.

2152. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre II : M. Royer-Collard »

Le sens commun devint pour lui une doctrine toute faite ; M.  […] Ainsi définie, la perception extérieure devient certaine, parce qu’elle est naturelle et forcée. […] L’objet imaginaire10 paraît réel ; la forêt intérieure devient extérieure.

2153. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre X : M. Jouffroy psychologue »

Ayant aperçu la pêche, nous concevons sa proximité, son éloignement, son rapprochement ; l’idée du rapprochement est agréable ; toute idée agréable tendant à se compléter et à devenir affirmative, nous tendons à effectuer ce rapprochement. […] Bien plus et bien pis, voilà que la volonté en nous devient la personne, le moi lui-même, être et principe distinct, lequel est à nos facultés ce que Dieu est à l’univers, et ce que l’ouvrier est à la montre. […] Mais continuez ; cela deviendra plus clair.

2154. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXVI. Des oraisons funèbres et des éloges dans les premiers temps de la littérature française, depuis François Ier jusqu’à la fin du règne de Henri IV. »

Après avoir suivi le genre des éloges chez les peuples barbares, ou ils n’étaient que l’expression guerrière de l’enthousiasme qu’inspirait la valeur ; chez les Égyptiens, où la religion les faisait servir à la morale ; chez les anciens Grecs, où ils furent employés tour à tour par la philosophie et la politique ; chez les premiers Romains, où ils furent consacrés d’abord à ce qu’ils nommaient vertu, c’est-à-dire, à l’amour de la liberté et de la patrie ; sous les empereurs, où ils ne devinrent qu’une étiquette d’esclaves, qui trop souvent parlaient à des tyrans ; enfin, chez les savants du seizième siècle, où ils ne furent, pour ainsi dire, qu’une affaire de style et un amas de sons harmonieux dans une langue étrangère qu’on voulait faire revivre ; il est temps de voir ce qu’ils ont été en France et dans notre langue même. […] Il sont devenus trop souvent des discours, où avec une fausse éloquence on célèbre des vertus encore plus fausses, et où l’on étale avec pompe des titres que le mort a flétris, des talents qu’il n’a point eus, et des services qu’il n’a pu rendre. […] Il entrevit ces principes étouffés tour à tour par l’ignorance et par l’orgueil, qu’il n’y a ni législation, ni politique sans lumières ; que ceux qui éclairent l’humanité, sont les bienfaiteurs des rois comme des peuples ; que l’autorité de ceux qui commandent n’est jamais plus forte que lorsqu’elle est unie à l’autorité de ceux qui pensent ; que le défaut de lumière, en obscurcissant tout, a quelquefois rendu tous les droits douteux, et même les plus sacrés, ceux des souverains ; qu’un peuple ignorant devient nécessairement ou un peuple vil et sans ressort, destiné à être la proie du premier qui daignera le vaincre ; ou un peuple inquiet et d’une activité féroce ; que des esclaves qui servent un bandeau sur les yeux, en sont bien plus terribles, si leur main vient à s’armer, et frappe au hasard ; qu’enfin, tous les princes qui avant lui avaient obtenu l’estime de leur siècle et les regards de la postérité, depuis Alexandre jusqu’à Charlemagne, depuis Auguste jusqu’à Tamerlan, né Tartare et fondateur d’une académie à Samarcande, tous dédaignant une gloire vile et distribuée par des esclaves ignorants, avaient voulu avoir pour témoins de leurs actions des hommes de génie, et relever partout la gloire du trône par celle des arts.

2155. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Morhardt, Mathias (1863-1939) »

.), il devient le plus charmant causeur, l’esprit le plus délié, le critique d’art le mieux informé.

2156. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — S — Souza, Robert de (1865-1946) »

Thomas Braun Naïve, archaïque, enluminée, cette gaucherie d’écriture nous charme lorsqu’elle interprète les chansons de gestes de telles Histoires de France, — elle ne suffit pas à nous lasser d’autres légendes ou récits comme la Huche, l’Embaumeur et les Accordailles dont les trouvailles charmantes et les images délicieuses relèvent l’intérêt ; mais elle devient insupportable dans les descriptions d’une nature sentimentale ou même philosophique.

2157. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « [Errata] — Fautes à corriger dans le second Volume. » p. 366

deviennent.

2158. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Contes — VI. Le canari merveilleux. »

Ses parents la frappaient souvent pour la corriger, mais c’était peine perdue : elle n’en devenait pas meilleure pour cela.

2159. (1870) La science et la conscience « Avant-propos »

La science et la conscience, affirmant le oui et le non sur les attributs essentiels à la nature humaine, deviennent ainsi suspectes, l’une aux savants, l’autre aux moralistes.

2160. (1925) Portraits et souvenirs

Aussi est-il naturel que son enseignement devienne vite tout machinal. […] Barrès, puisque, avant de devenir l’auteur de Colette Baudoche, M.  […] Ce qui, longtemps, fut un rêve deviendra une réalité. […] Le séjour du château devenait dangereux et il était urgent d’aviser. […] Le « petit émigré », devenu un homme et même un vieillard, en parlait volontiers, paraît-il.

2161. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre huitième. L’introduction des idées philosophiques et sociales dans la poésie (suite). Victor Hugo »

Avec Hugo, la poésie devient vraiment sociale en ce qu’elle résume et reflète les pensées et sentiments d’une société tout entière, et sur toutes choses. […] » Et la nuit augmentait sur mon âme ravie, Et l’ange devint noir, et dit : « Je suis l’amour. » Mais son front sombre était plus charmant que le jour, Et je voyais, dans l’ombre où brillaient ses prunelles, Les astres à travers les plumes de ses ailes164. […] Après avoir montré comment Le peuple parfois devient impopulaire, Il ajoute ce vers admirable : Personne n’est méchant, et que de mal on fait ! […] Peu de terre, nul soin, nulle culture… Avec quelque peine qu’on prendrait, l’ortie serait utile ; on la néglige, elle devient nuisible. […] Quand elle y atteint, elle a atteint par cela même sa mission morale et sociale : elle est devenue une des plus hautes manifestations de la sociabilité dans le monde spirituel et une des principales forces qui assurent le progrès humain.

2162. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — E — Ernault, Louis (1865-19..) »

La jeune ressuscitée deviendra donc une prostituée.

2163. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Magre, André (1873-1949) »

Je voudrais pouvoir citer plusieurs de ces pages exquises qu’il faut lire et aimer et dans lesquelles nous retrouvons tous un peu de nous-mêmes, car elles sont, fixées par un Véritable poète, les minutes fugitives d’amour, de souffrances et de joies de nos enfances et de nos vingt ans, aujourd’hui déjà devenus de lointains passés.

2164. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — C — article » pp. 60-61

Il étoit déjà un Cotin ridicule, il seroit devenu un Cotin odieux.

2165. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » pp. 363-365

Gaillard est chargé de la partie Littéraire du Journal des Savans ; ce qui est certain, c’est que, depuis quelques années, depuis sur-tout que la Philosophie cherche à s’emparer des Tribunaux littéraires, ce Journal est devenu, comme la plupart des autres, un dépôt d’encens pour les Philosophes du jour, ou de critiques injustes à l’égard de ceux qui ne le sont pas.

2166. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » pp. 461-462

Depuis ce temps-là, on ne sait ce que cette pierre est devenue.

2167. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 525-526

Il n’en faut pas davantage pour devenir un homme médiocre aux yeux des prétendus Philosophes, qui ne font consister le génie que dans l’intrépidité des paradoxes & l’audace à fronder les vérités les plus respectées.

2168. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — T. — article » pp. 357-358

Ce jeune Poëte travailloit à une seconde Tragédie, lorsqu'une mort imprévue l'enleva au Théatre, où sa carriere auroit pu devenir plus glorieuse que celle de ses rivaux, pour peu qu'il eût eu le temps de perfectionner son génie.

2169. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — T. — article » pp. 384-385

Ce défaut, assez ordinaire aux jeunes Littérateurs, prend sa source dans une imagination trop vive ; car dans quelques esprits, il faut que l’imagination décroisse, pour que le goût se fortifie ; comme il faut, à l’égard de certains tempéramens, que le corps se dégraisse, pour devenir robuste.

2170. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — V. — article » pp. 415-416

Quoique la plupart de ses Remarques soient devenues inutiles, par les progrès de la Langue, dont la perfection a été fixée dans les bons Ouvrages du Siecle de Louis XIV, elles peuvent encore être très-instructives, & ceux qui ont voulu écrire sur la Grammaire, l'ont regardé comme un Auteur fondamental.

2171. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) «  Poésies inédites de Mme Desbordes-Valmore  » pp. 405-416

Un ami poète, qui l’avait souvent entourée de ses soins, mais dont l’absence s’était fait remarquer un jour, dans un des deuils trop fréquents qui enveloppèrent ses dernières années, devint l’occasion, l’objet de ce cordial et vibrant appel : La voix d’un ami Si tu n’as pas perdu cette voix grave et tendre Qui promenait ton âme au chemin des éclairs Ou s’écoulait limpide avec les ruisseaux clairs, Éveille un peu ta voix que je voudrais entendre. […] La seconde fille de Mme Desbordes-Valmore, poète également si l’on peut appeler de ce nom la sensibilité elle-même, avait plutôt en elle la faculté de souffrir de sa mère, cette faculté isolée, développée encore et aiguisée à un degré effrayant ; pauvre enfant inquiet, irritable, malade sans cause visible, elle se consumait, elle se mourait lentement, et par cela seul qu’elle se croyait moins regardée et favorisée, moins aimée ; devenue l’objet d’une sollicitude continuelle et sans partage (car elle était restée seule au nid maternel), rien ne pouvait la rassurer ni apprivoiser sa crainte, et la plus tendre chanson de sa mère ne faisait que bercer son tourment sans jamais réussir à l’apaiser ni à l’endormir : Inès Je ne dis rien de toi, toi la plus enfermée.

2172. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Madame Desbordes-Valmore. »

« Mais j’allais vous parler de ce que vous connaissez mieux que moi, vous qui jadis avez été Flamande comme j’en vois dans les tableaux de Yan Eyck et de Yan Dyck, avant de devenir une des gloires de l’Hélicon de France. […] Cette devise roumaine lui était devenue familière, et elle, si pauvre, si dénuée, elle se plaisait à la répéter quelquefois ; elle la pratiqua toujours.

2173. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Appendice à l’article sur Joseph de Maistre »

Deplace ; une lettre de M. de Maistre au curé de Saint-Nizier (22 juin 1819) en fait foi : « J’ai toujours prévu que votre ami appuierait particulièrement la main sur ce livre V (qui est devenu l’ouvrage sur l’Église gallicane). […] Joseph de Maistre parut, j’étais, dit-il, occupé d’un grand travail que je ne pouvais interrompre : je me bornai à recueillir quelques notes, et ce sont ces notes que, devenu plus libre, je me sujs décidé à présenter à mon lecteur en leur donnant plus d’étendue. » Les Soirées de Saint-Pétersbourg ont paru en 1821 ; vingt ans et plus d’intervalle entre l’ouvrage et sa réfutation, c’est un peu moins de temps que n’en mit le Père Daniel à réfuter les Provinciales.

2174. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre cinquième. Le peuple. — Chapitre IV »

. — Étranges recrues pour garder une société, toutes choisies dans la classe qui l’attaque, paysans foulés, vagabonds emprisonnés, gens déclassés, ; endettés, désespérés, pauvres diables aisément tentés et de cervelle chaude, qui, selon les circonstances, deviennent tantôt des révoltés et tantôt des soldats. […] Eux aussi, ils sont devenus politiques et frondeurs.

2175. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Troisième partie. Disposition — Chapitre VII. Narrations. — Dialogues. — Dissertations. »

S’il suit la réalité, il risque d’être insignifiant, plat, superficiel : s’il tire les idées et les sentiments du fond des cœurs, il devient symbolique, froid, invraisemblable. […] Mais rien n’est plus idéaliste que ce réalisme : ce blessé anonyme et invisible n’était rien : il est devenu pour l’artiste le symbole des milliers d’individus que la même fatalité soumet à la même misère, il les personnifie, les exprime, les évoque.

2176. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre II. Filles à soldats »

les dix volumes sont devenus trente volumes. […] Car la guerre devient « le premier, le plus beau des devoirs, aussitôt qu’elle défend les champs, les villes, la race même, les trésors et le passé d’un peuple ».

2177. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre V : La religion — Chapitre III : Le problème religieux »

Si la philosophie ne peut devenir une religion, il n’est nullement contraire à la nature des choses qu’une religion devienne une philosophie.

2178. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 45, de la musique proprement dite » pp. 444-463

C’est ainsi que le plaisir de l’oreille devient le plaisir du coeur. […] La fiction qui fait endormir Atys, et qui lui présente ensuite des objets si diversifiez durant son sommeil, devient plus vrai-semblable et plus touchante par l’impression que font sur nous les symphonies de differens caracteres qui précedent le sommeil, ou qui se succedent à propos pendant sa durée.

/ 3414