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1546. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Gaston Paris et la poésie française au moyen âge »

Je ne puis me tenir de détacher de la conclusion ces lignes où l’émotion de l’érudit, tout en se contenant, teint son style d’une couleur charmante : … Certes nous avons eu, depuis la Renaissance, une littérature plus belle, plus variée, plus riche pour le cœur et pour l’esprit que la poésie rude et simple de Roland ; et, quand nous revenons écouter ce langage naïf en sortant des harmonies savantes de nos grandes œuvres littéraires, il nous semble entendre le bégayement de l’enfance. […] Est-ce parce que le sentiment chrétien, dont le moyen âge était pénétré, répugne au fond à la beauté proprement artistique et littéraire, comme à quelque chose qui tient trop à la matière et à la chair et dont la séduction a je ne sais quoi de païen et de diabolique ?

1547. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre III. Grands poètes : Verlaine et Mallarmé, Heredia et Leconte de Lisle » pp. 27-48

Il est bien que point trop de sénilités ne déparent son labeur littéraire. […] Voilà la trame essentielle de l’œuvre littéraire, sans analogue exact en musique.

1548. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre XI. Quelques philosophes »

Il sait que tout mouvement libre offense les critiques, prêtres de l’immobilité ou porteurs du manipule de foin que suivent toujours, salive à la bouche, les légions, les centuries et les décuries littéraires : « Jadis un homme se levait, bouclier de la foi, contre les nouveautés, contre les hérésies, le Jésuite ; aujourd’hui, champion de la règle, trop souvent se dresse le Professeur. » Mais « la diabolique intelligence rit des exorcismes, et l’eau bénite de l’Université n’a jamais pu la stériliser, non plus que celle de l’Église ». […] Pour peu qu’on continue, le mot « écriture » devenu inutile périra dans son acception littéraire.

1549. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Madame Récamier. » pp. 121-137

Le salon de Mme Récamier était bien autre chose encore, mais il était aussi, à le prendre surtout dans les dernières années, un centre et un foyer littéraire. […] Cousin sur Madame de Sablé, 1854, fin du chapitre ier , p. 63 : « Elle avait, dit-il de Mme de Sablé, de la raison, une grande expérience, un tact exquis, une humeur agréable. — Quand je me la représente telle que je la conçois d’après ses écrits, ses lettres, sa vie, ses amitiés, à moitié dans la solitude, à moitié dans le monde, sans fortune et très en crédit, une ancienne jolie femme à demi retirée dans un couvent et devenue une puissance littéraire, je crois voir, de nos jours, Mme Récamier à l’Abbaye-aux-Bois. »

1550. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XIV. »

Pour en bien juger et les saisir à la source même, nous aurons à remonter un peu dans la chronologie littéraire. […] Cet ami de César, d’abord allié d’Antoine, puis accueilli par Octave et, dans sa retraite littéraire, resté du moins impartial envers le parti qu’il avait combattu, ne pouvait mettre sur la scène ni ces grands caractères romains qu’il honora dans son histoire, ni les héros plus anciens qui les auraient rappelés.

1551. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « VII » pp. 25-29

On est d’ailleurs en veine littéraire.

1552. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamennais — Note »

Je n’avais pas été le premier à le rechercher au début de notre liaison ; lui-même m’avait fait, par Victor Hugo, des avances dès le temps des Consolations ; je l’avais connu prêtre et disant encore la messe, ultramontain et pur romain de doctrine : je l’avais pris avec vivacité et sympathie par tous les points desquels je pouvais me rapprocher et qui m’offraient un moyen de correspondre ; je m’étais efforcé de multiplier ces « points d’attouchement, » comme les appelle Lavater dans son manuel de l’amitié ; je n’avais eu, dès son premier pas dans le libéralisme, que d’excellents et chauds procédés envers lui et lui avais hautement rendu, je puis dire, de bons offices littéraires.

1553. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XII. Du principal défaut qu’on reproche, en France, à la littérature du Nord » pp. 270-275

Ceux-là sont les seuls modèles qui réunissent à la fois toutes les qualités littéraires.

1554. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — A — Augier, Émile (1820-1889) »

Vous êtes poète, j’ai voulu surtout marquer votre place, à ce titre, dans la grande littérature, honorer en vous cette constance qui vous porte à chercher les succès difficiles, et vous inviter à marcher résolument dans ce véritable domaine de l’art, que les auteurs comme le public semblent tentés d’abandonner : non que je porte à la comédie en vers une préférence académique et que je lui croie plus de dignité qu’à la comédie en prose ; une grande comédie en prose est assurément une œuvre très littéraire, surtout si elle est l’œuvre d’un seul auteur ; mais la comédie en vers a cet avantage d’une langue particulière qui parle à la mémoire, et d’un art choisi, précis, délicat, et d’autant plus difficile que les esprits auxquels il s’adresse sont plus cultivés.

1555. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — V — Vicaire, Gabriel (1848-1900) »

Comme son confrère et ami Maurice Bouchor, il se rue en cuisine… [La Vie littéraire (1891).]

1556. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre X » pp. 83-88

Ici il suffit d’observer qu’il y eut à la cour d’Anne d’Autriche plus de galanterie que de bel esprit, et plus d’intrigues d’amour que d’intrigues littéraires ; et enfin qu’à l’époque dont nous parions, la galanterie des Amadis, qu’on appela très improprement chevaleresque, était fort en désarroi depuis le Don Quichotte qui avait paru au commencement du siècle.

1557. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XVII » pp. 193-197

Ces quatre hommes n’ont jamais été considérés que sous leurs rapports avec la gloire littéraire de la France, et avec celle des branches de l’art que chacun d’eux a le plus particulièrement cultivée.

1558. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre XII. Demain »

Demain La plupart des jeunes gens d’aujourd’hui n’ont pas plus de tendances littéraires que de tendances sociales.

1559. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » pp. 493-499

Les deux Corneille, Moliere, Racine, Despréaux, Rapin, Regnard, Destouches, Boissy, l’Abbé Desfontaines, Piron, Palissot, & mille autres, n’ont reconnu qu’un seul genre de Comédie, qui consiste dans l’exposition des vices & des ridicules à dessein de les corriger ; & ces noms respectables, en fait de législation littéraire, valent bien ceux des Diderot, des Marmontel, des Beaumarchais, des Merciers, & des Sedaine.

1560. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » pp. 139-145

Doué d’une intelligence prompte, d’une imagination vive & féconde, d’une mémoire facile & solide, ses premiers pas, dans la carriere littéraire, ont annoncé un athlete singuliérement favorisé de la Nature, & destiné à surpasser les rivaux les plus renommés.

1561. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « De la peinture. A propos d’une lettre de M. J.-F. Raffaëlli » pp. 230-235

Que dirait-on d’un critique littéraire qui placerait Dostoieski en première ligne du mouvement des lettres contemporaines ?

1562. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Gérard de Nerval »

Mais du moins il faut l’être avec une telle désinvolture, avec une telle verve, avec un tel style, que, l’œuvre d’art dominant tout, le livre ne soit plus qu’une forme, une arabesque de la pensée, une volupté littéraire, et non une prétention à la science et à l’aperçu.

1563. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Eugène Chapus »

Chapus prendrait facilement la tête de la high life littéraire.

1564. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Les Femmes de l’Évangile » pp. 89-93

Trop élevé, trop pratique, trop acte, en un mot, pour tomber sous le regard d’une critique purement littéraire, le livre du P. 

1565. (1897) La vie et les livres. Quatrième série pp. 3-401

On peut dire que la description de l’Amérique est devenue, chez nous, un genre littéraire. […] C’est à ce moment que la vocation littéraire apparut chez lui pour la première fois. […] Sur quoi comptez-vous faire votre prochaine Vie littéraire ? […] Le cancan littéraire est une fâcheuse manie. […] Il peut compter sur des succès littéraires.

1566. (1913) Les idées et les hommes. Première série pp. -368

Un écrivain qui sait son âge littéraire ne va pas faire le jeune homme : ce ridicule lui sera épargné. […] Indépendamment, dis-je, de sa perfection littéraire, de son agrément et de sa beauté. […] Badinage littéraire, badinage philosophique et badinage universel. […] Elle abonde en ornements littéraires. […] Il traite, en poète raffiné, un sujet littéraire.

1567. (1898) La poésie lyrique en France au XIXe siècle

Margot, la fille du peuple, l’ouvrière ou la grisette, est un très médiocre critique littéraire. […] Vous connaissez l’histoire de cette bataille littéraire, restée fameuse et restée presque unique. […] Ils sont plusieurs dans la littérature qui ont eu le masque du premier consul, et ici c’est en partie l’origine de la réputation littéraire de François Coppée. […] Coppée est le premier qui se soit véritablement avisé de cette idée, à savoir, que tout le monde a droit à la vie littéraire. […] J’ai essayé de vous faire ressortir les qualités littéraires.

1568. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Ducis épistolaire (suite et fin). »

Abufar ou la Famille arabe réussit fort, après quelque petite hésitation, et fut l’une des émotions littéraires du printemps de 1795 : au sortir de la tyrannie de Robespierre, on se plaisait à ces images de pasteurs et de chameaux du désert, à ces peintures patriarcales embellies. […] J’ai toujours un regret, je l’avoue, quand je vois qu’une belle et bonne chose littéraire toute facile et même déjà faite ne s’achève pas, qu’une gerbe reste éparse faute d’un lien. […] Nos idées nouvelles sur la propriété littéraire, idées avares, illibérales et d’une mesquinerie jalouse, voudront-elles s’y prêter ?

1569. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Vaugelas. Discours de M. Maurel, Premier avocat général, à l’audience solennelle de la Cour impériale de Chambéry. (Suite et fin.) »

Et encore peut-on dire aujourd’hui qu’Insidieux est entré dans la langue littéraire plutôt qu’il n’est passé dans l’usage courant : c’est qu’il est de sa nature un mot savant, dont le sens, dans toute sa force et sa beauté, n’est bien saisi que des latinistes, et qu’il n’a trouvé dans notre langue aucun mot déjà établi, approchant et de sa famille, pour « lui frayer le chemin. » Toutes ces circonstances propres et comme personnelles à chaque mot sont démêlées à merveille par Vaugelas. […] Il y a dans le cours des choses humaines, et des choses littéraires en particulier, de véritables instants décisifs, des crises : un bon conseil bien donné, bien frappé à ce moment, un coup de main de l’esprit fait merveille et peut faire événement. […] Dans une table générale et monumentale des écrivains de la langue, de ceux qui ont compté et concouru le jour ou la veille d’un règne si mémorable, sur cet Arc de triomphe de la France littéraire, on écrirait son nom en petites lettres ; mais il aurait sa place assurée.

1570. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Œuvres françaises de Joachim Du Bellay. [III] »

En avançant dans la vie, je me suis dit bien souvent que celui qui, dans sa jeunesse, à l’âge des nobles ambitions et de la belle ardeur, avait formé les plus hauts projets et conçu les plus magnifiques espérances, si, tout compte fait et toutes illusions dissipées, il se trouvait n’être déçu que de la moitié ou des trois quarts de son rêve, celui-là ne devait pas s’estimer encore trop mal partagé et n’avait pas trop à se plaindre du sort : c’est le cas de Du Bellay, qui, même en échouant et jusque dans le naufrage de la grande Armada littéraire dont il s’était fait le porte-voix et la trompette, a sauvé personnellement toute une part encore enviable de bon renom et de poésie. […] Mais le critique littéraire a un autre devoir que celui qui lit pour son plaisir ; il se préoccupe de la suite, de l’avenir de la langue et de la poésie. […] Bien que de loin, de très loin, et pour la postérité dernière, il ne subsiste que les grandes œuvres et les grands noms auxquels le temps va ajoutant sans cesse ce qu’il retire de plus en plus aux autres, c’est plaisir et devoir pour le critique et l’historien littéraire de rendre justice de près à ces talents réels et distingués, interceptés trop tôt, dans quelque ordre que ce soit, les Vauvenargues, les André Chénier, les Joachim Du Bellay, à ces esprits de plus de générosité que de fortune, qui ont eu à leur jour leur part d’originalité, et qui ont servi dans une noble mesure le progrès de la pensée ou de l’art117.

1571. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Diderot »

Voilà ce que nous avions besoin de nous dire avant de nous remettre, nous, critique littéraire, à l’étude curieuse de l’art, et à l’examen attentif des grands individus du passé ; il nous a semblé que, malgré ce qui a éclaté dans le monde et ce qui s’y remue encore, un portrait de Regnier, de Boileau, de La Fontaine, d’André Chénier, de l’un de ces hommes dont les pareils restent de tout temps fort rares, ne serait pas plus une puérilité aujourd’hui qu’il y a un an ; et en nous prenant cette fois à Diderot philosophe et artiste, en le suivant de près dans son intimité attrayante, en le voyant dire, en l’écoutant penser aux heures les plus familières, nous y avons gagné du moins, outre la connaissance d’un grand homme de plus, d’oublier pendant quelques jours l’affligeant spectacle de la société environnante, tant de misère et de turbulence dans les masses, un si vague effroi, un si dévorant égoïsme dans les classes élevées, les gouvernements sans idées ni grandeur, des nations héroïques qu’on immole, le sentiment de patrie qui se perd et que rien de plus large ne remplace, la religion retombée dans l’arène d’où elle a le monde à reconquérir, et l’avenir de plus en plus nébuleux, recélant un rivage qui n’apparaît pas encore. […] Grimm, dans sa Correspondance littéraire, d’Holbach dans ses prédications d’athéisme, Raynal dans son Histoire des deux Indes, détournèrent à leur profit plus d’une féconde artère de ce grand fleuve dont ils étaient riverains. […] Trois ou quatre ans avant la mort de Diderot, Garat, alors à ses débuts, publia dans quelque almanach littéraire le récit d’une visite qu’il avait faite au philosophe, récit piquant, un peu burlesque, où les qualités naïves de l’original sont prises en caricature.

1572. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « La Bruyère »

» C’est de cette habitude, de cette nécessité de chanter avec toute espèce de voix, d’avoir de la verve à toute heure, que sont nés la plupart des défauts littéraires de notre temps. […] M. de Feletz, bon juge et vif interprète des traditions pures, a écrit : « La Bruyère qui possède si bien sa langue, qui la maîtrise, qui l’orne, qui l’enrichit, l’altère aussi quelquefois et en viole les règles. » (Jugements historiques et littéraires sur quelques Écrivains… 1840, page 250.) […] M. de Barante, dans quelques pages élevées où il juge l’Éloge de La Bruyère par Fabre (Mélanges littéraires, tome II), a contesté cet artifice extrême du moraliste écrivain, que Fabro aussi avait présenté un peu fortement.

1573. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLVIIIe entretien. De la monarchie littéraire & artistique ou les Médicis (suite) »

De la monarchie littéraire & artistique ou les Médicis (suite) I Pendant que ces meurtres s’accomplissaient dans le sanctuaire de la cathédrale, une autre scène, plus confuse encore, avait lieu sur la place du Gouvernement, dans le palais de la Seigneurie. […] L’absence d’ambitions froissées, dans Laurent, et ses goûts littéraires et philosophiques donnaient à la Toscane la sécurité qu’elle désirait. […] Après des études précieuses dans la maison du prince, son père, il vint à Rome et offrit de soutenir une joute littéraire sur vingt-deux langues et sur neuf cents questions philosophiques. « C’était, dit son rival Politien, un homme ou plutôt un être extraordinaire, à qui la nature avait prodigué tous les avantages du corps et de l’esprit.

1574. (1892) Boileau « Chapitre V. La critique de Boileau (Suite). Les théories de l’« Art poétique » (Fin) » pp. 121-155

N’oublions point surtout que Boileau n’a pas vu dans le vers un ingénieux mécanisme, où l’on assemble les difficultés pour les vaincre, ni l’agréable instrument d’un jeu d’esprit littéraire ; jamais il n’en a perdu de vue la valeur artistique, et toutes les lois auxquelles il l’a soumis ne sont pas à elles-mêmes leur fin, mais sont les moyens de produire la cadence expressive, qui procure à l’oreille un plaisir conforme au sentiment dont les mots saisissent l’âme. […] Nous admettrons que, certaines formes littéraires étant liées à certains états d’âme et à certains moments de la civilisation, il y ait des genres qui naissent, comme il y en a qui périssent ; par exemple, le drame bourgeois est légitimé par la même transformation sociale qui semble avoir mis la tragédie hors d’usage. […] Qu’on médite ce petit morceau, et l’on verra que si l’élégance et la noblesse consistent essentiellement à donner à l’œuvre poétique un caractère esthétique et littéraire, qui fait que jamais elle n’est vulgaire, même en exprimant les vulgarités de la nature, le sublime est le degré suprême de la beauté : mais ce degré, c’est tout simplement, pour transposer dans notre langage l’idée de Boileau, c’est l’intensité expressive d’un mot, d’un tour, qui réalise en perfection l’effet voulu et prévu par l’artiste.

1575. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre cinquième »

L’histoire politique ne doit omettre que ceux qui ont subi les événements sans les comprendre, et qui ont ignoré et leur temps et eux-mêmes ; l’histoire de la littérature n’est fermée qu’aux écrivains qui n’ont fait que suivre, et qui ont porté la livrée soit d’un homme supérieur, soit de quelque mode littéraire aussi passagère qu’une mode d’habits. […] L’instinct du réformateur se révélait dans le choix même de ce genre, le plus littéraire de tous. […] C’est de la modération en comparaison des deux ou trois mille que fit un poëte du temps, le Virblaneau, sieur d’Ofayel, un de ces hommes à la suite des modes littéraires, et qui les exagèrent jusqu’à la fureur.

1576. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre quinzième. »

L’esprit français, dans les monuments que je viens d’apprécier, c’est l’esprit humain sous la forme française ; il restait à le voir avec sa propre physionomie, non plus à la recherche d’un idéal littéraire, mais se prenant lui-même pour sujet unique de son étude. […] Ces deux recueils ne sont littéraires que parce qu’ils n’ont pas eu la prétention de l’être. C’est ainsi qu’un document administratif, une dépêche diplomatique, deviennent littéraires par le soin même qu’on a pris d’en exclure tout ornement.

1577. (1863) Le réalisme épique dans le roman pp. 840-860

Ces surprises de la justice littéraire ne devaient pas se prolonger longtemps ; elles tenaient surtout à la faiblesse des œuvres qui entouraient le roman de M.  […] L’école qui a honoré le début de notre siècle avait eu les plus hautes ambitions littéraires, et l’épopée historique n’avait pas effrayé son ardeur. […] Si elle n’était pas justiciable de la critique médicale autant et plus que de la critique littéraire, comment juger l’intérêt qu’elle prend aux tortures de son amant, la curiosité qui l’enivre, la révélation qui se produit en elle, l’amour enfin, l’amour qui éclate dans sa conscience réveillée, à la vue de ce malheureux écorché, de cette longue forme rouge, qui marche toujours, toujours, les yeux attachés sur les siens ?

1578. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Chamfort. » pp. 539-566

Il avait reçu de la nature, sous des formes agréables et jolies, une certaine énergie ardente qui constitue à un haut degré le tempérament littéraire et qui pousse au talent : Cette énergie, a-t-il remarqué, condamne d’ordinaire ceux qui la possèdent au malheur non pas d’être sans morale et de n’avoir pas de très beaux mouvements, mais de se livrer fréquemment à des écarts qui supposeraient l’absence de toute morale. […] Son grand succès, ou du moins son grand effort littéraire, l’année suivante, fut sa tragédie de Mustapha et Zéangir. […] Il n’épargne pas plus les gens de lettres ses confrères qu’il n’a épargné la société et la nature : Au ton qui règne depuis dix ans dans la littérature, la célébrité littéraire me paraît une espèce de diffamation qui n’a pas encore tout à fait autant de mauvais effets que le carcan, mais cela viendra.

1579. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1858 » pp. 225-262

Mai C’est une drôle de chose — et personne ne l’a remarqué — que le grand monument littéraire de l’atticisme, des élégantes mœurs, du délicat esprit d’Athènes, Aristophane enfin, soit le plus gros monument scatologique de la littérature de tous les peuples. […] Sans goût littéraire, mais fureteur sagace, intelligemment curieux, le seul homme, à l’heure présente, qui dans la presse soit un chroniqueur un peu universel, un peu informé de ce qui court, de ce qui se dit, de ce qui se fait, le seul ayant des oreilles autre part que dans le café du Helder et dans le petit monde des lettres, sur la pointe du pied, à la porte entrebâillée du monde, et de tous les mondes, du monde des filles au monde de la diplomatie, écoutant, pompant, aspirant ce journal de la vie contemporaine qui n’est nulle part imprimé, à la piste de tous les moyens d’information, ayant essayé par exemple, nous dit-il, de donner des dîners où il faisait asseoir toutes les professions à sa table, espérant que chaque spécialité se confesserait à l’autre, et que toute l’histoire intime et secrète de Paris débonderait au dessert, de la bouche du banquier, du médecin, de l’homme de lettres, de l’homme de loi. […] 2 août Par la littérature qui court, c’est vraiment un noble type littéraire que ce Saint-Victor, cet écrivain dont la pensée vit toujours dans le chatouillement de l’art ou dans l’aire des grandes idées et des grands problèmes, couvant de ses amours et de ses ambitions voyageuses la Grèce d’abord, puis l’Inde qu’il vous peint sans l’avoir vue, comme au retour d’un rêve haschisché, et poussant sa parole, ardente et emportée et profonde et peinte, autour de l’origine des religions, parmi tous les grandioses et primitifs rébus de l’humanité : curieux des berceaux du monde, de la constitution des sociétés, pieux, respectueux, son chapeau à la main devant les Antonins, qu’il appelle le sommet moral de l’humanité, et faisant son évangile de la morale de Marc-Aurèle, ce sage et ce si raisonnable maître du monde.

1580. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « II. M. Capefigue » pp. 9-45

Et justement pour cette raison et parce qu’ils s’arrêtent à temps pour rester littéraires, c’est par eux, tout naturellement, que nous ouvrirons cette Revue des diverses écoles historiques du xixe  siècle, ce grand corrupteur par l’Histoire. […] Capefigue soulève ; ce livre à outrance, écrit, malgré l’abandon de sa forme littéraire, avec une hardiesse d’admiration pour Louis XV et son temps, qui n’est pas de l’indulgence, même plénière, mais une manière de voir et de montrer les choses qui a raison d’être, sans nul doute, et que pour cela importe à la Critique de pénétrer ! […] … » Et toute cette tirade contre l’hypocrisie possible de notre temps, refaite cent fois par tous les sacripants littéraires qui se font une vertu à eux du vice de Tartuffe et très indigne, d’ailleurs, d’un écrivain qui se connaît en choses sociales et qui n’a pas le droit de conclure contre les doctrines vertueuses de l’absence de nos vertus, montre mieux que tout le reste à quel point d’anxiété l’auteur de Madame la comtesse Du Barry en est arrivé, le malheureux !

1581. (1898) Les personnages de roman pp. 39-76

Et d’abord, il n’est pas inutile de passer en revue quelques-unes des catégories innombrables auxquelles ils appartiennent, car, selon leur rang social, leur degré d’affinement ou de rusticité, ils offrent à l’écrivain des ressources ou des difficultés particulières, ils ont des qualités ou des défauts littéraires qui influent naturellement sur le choix du sujet. […] Je pourrais passer en revue bien d’autres groupes humains, et dire ainsi les raisons d’ordre littéraire qui peuvent les faire choisir ou rejeter par les écrivains. […] Les héros de roman, pour la plupart, sont beaucoup plus anciens, dans ces réserves de l’esprit, que l’intrigue qui les a groupés, et leur vie littéraire a été précédée d’une période plus ou moins longue de disponibilité, d’où ils sortent tout à coup, appelés et désignés par cette force qui s’appelle l’idée, et qui n’hésite pas, et qui va droit à eux, et leur dit : « C’est toi que je veux, tu vas vivre ! 

1582. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XIII. »

Par deux points, ce souvenir touche à notre sujet : par l’influence de la tradition littéraire, et par l’effort de la rénovation poétique. […] Nul doute que, sans les lacunes faites par la barbarie dans l’héritage des lettres grecques, les traces même purement littéraires de la colonie juive d’Alexandrie ne fussent visibles dans bien des monuments de l’époque Lagide, dans cette foule d’hymnes, de chants religieux et moraux, de poëmes descriptifs qui signalèrent l’imagination laborieuse de ce temps. […] Un lettré païen du second siècle, appelé déjà à mêler tous les souvenirs par syncrétisme littéraire, dit, dans un hymne en prose à Minerve : « Pindare nous enseigne qu’assise à la main droite du père, elle reçoit ses commandements, pour les transmettre aux dieux ; car elle est au-dessus d’un ange, et c’est elle qui aux divers anges transmet les ordres divins qu’elle a recueillis de la bouche du Père149. » Avec cette littérature bigarrée de souvenirs, cette mosaïque savante que travaillait Alexandrie, il y a donc souvent à hésiter sur les vraies sources de l’imitation, et la première apparence peut tromper.

1583. (1910) Muses d’aujourd’hui. Essai de physiologie poétique

Oui, en vérité, dans le creuset de leur cœur, les émotions littéraires et les émotions réelles se confondent en une même vivante sincérité. […] La beauté morale est une vertu tout artificielle et presque contre nature : on ne se doute pas de toutes les essences littéraires et philosophiques dont il fallut imbiber cette fragile églantine pour en créer cette rose pourpre et embaumée. […] De cet idéalisme impersonnel, butiné au cours de sa vie, elle a composé une vivante cire, et c’est de cette cire qu’elle ébauchera les maquettes fragiles de ses Amants littéraires. […] Et Sabine, à l’image de Werther, après avoir écrit son testament sentimental, d’une belle et sereine et stoïque tenue littéraire, se réfugie dans la nouvelle espérance de la mort ‒ ce qui est une espérance toute négative. […] Sa pitié et son socialisme, comme son amour, sont artistiques et littéraires.

1584. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XII » pp. 47-52

On pourrait dire aussi que Soumet récite à l’un de ses amis quelques vers de sa Clytemnestre, de sa voix la plus flûtée, et ajoute : « En voilà, mon cher, et du meilleur, on vous en fera ainsi tant que vous en voudrez. » Le succès de Lucrèce, si légitime qu’il soit, me suggère ces deux pensées, ces deux petits axiomes critiques : 1° En France, pour réussir en matière littéraire, il ne faut rien de trop, mais toujours et avant tout une certaine mesure.

1585. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXI » pp. 237-241

De plus son talent littéraire si réel s’est tenu toujours dans une espèce de teinte obscure où l’on conçoit très-bien qu’il se soit dérobé.

1586. (1874) Premiers lundis. Tome II « La Comtesse Merlin. Souvenirs d’un créole. »

Les Souvenirs, quand ils sont écrits par des personnes du monde, sans prétention littéraire, ont toujours de l’agrément.

1587. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Troisième partie. Disposition — Chapitre III. Du meilleur plan. — Du plan idéal et du plan nécessaire. »

Dans une composition littéraire, la sensibilité de l’écrivain, celle de l’auditeur ou lecteur, l’occasion, mille circonstances, l’information plus ou moins complète, le penchant de l’esprit vers tel ou tel genre de preuves, interviennent sans cesse et font que, sur chaque sujet, il y a autant de plans possibles qu’il y a de gens pour le traiter, et que le même homme, à deux moments différents, peut suivre deux différents plans.

1588. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Troisième partie. Disposition — Chapitre VI. Exordes. — Péroraisons. — Transitions. »

Quand on aura étudié ainsi que je viens de l’indiquer le plan et l’ordre de l’ouvrage, on n’aura pas à s’embarrasser de mettre en pratique toutes ces recettes érigées jadis en règles par les rhéteurs, et qui de leurs cahiers ont passé dans presque tous les traités sur la composition littéraire.

1589. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre premier. Du rapport des idées et des mots »

La comparaison qu’on fait souvent de l’œuvre littéraire à un édifice est fausse, et bonne pour encourager la pire rhétorique.

1590. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Rodenbach, Georges (1855-1898) »

On sait le rang qu’il s’était conquis par son talent et l’estime que lui avait méritée sa belle tenue littéraire.

1591. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » pp. 512-518

Non seulement il a su, quoique jeune, se garantir de la contagion des travers littéraires de notre siecle, mais encore il a eu le courage de se déclarer pour le bon goût ; & les différentes critiques qu’il a publiées, prouvent qu’il en connoît les principes, & qu’il est capable de les rappeler avec succès.

1592. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Art français » pp. 243-257

Préface de la première édition (1881)54 En ce temps, où les choses, dont le poète latin a signalé la mélancolique vie latente, sont associées si largement par la description littéraire moderne, à l’histoire de l’Humanité, pourquoi n’écrirait-on pas les mémoires des choses, au milieu desquelles s’est écoulée une existence d’homme ?

1593. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Avant-Propos. » pp. -

Notre but principal est de contribuer à l’utilité du lecteur par le tableau des querelles littéraires.

1594. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome I « Lettre a monseigneur le duc de**. » pp. -

J’ai puisé dans tous les Livres de critique, dans les Journaux, dans les Observations, dans les Jugemens littéraires ; mais j’ai très rarement cité mes autorités.

1595. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Madame de La Fayette ; Frédéric Soulié »

Mais est-elle littéraire ?

1596. (1896) Études et portraits littéraires

Il traite Villemain d’« eunuque littéraire opéré par le goût ». […] De comparaison littéraire, il ne peut être question entre un livre d’artiste et un recueil de notes sans style. […] C’est que, de l’une à l’autre, les auteurs ont singulièrement renouvelé leur conception de l’art littéraire. […] Spronck dans ses Artistes littéraires. […] Émile Faguet, Études littéraires sur le dix-neuvième siècle.

1597. (1896) Journal des Goncourt. Tome IX (1892-1895 et index général) « Année 1892 » pp. 3-94

Causerie sur les ménages amis, où, nous tous, nous nous mettons à parler du charme du ménage Rodenbach : de l’homme à la conversation spirituellement animée, à la discussion littéraire passionnante, de la femme, aux rébellionnements à voix basse, aux flots de paroles irritées, qu’elle vous jette dans l’oreille, quand elle entend une chose qui n’est pas vraie, ou qui ne lui semble pas juste, et nous constatons le petit émoi chaleureux, qu’apporte dans la froideur ordinaire des salons, la vie nerveuse de ces deux aimables êtres. […] Et le voyageur parle de ces populations de Samarcande, de ces populations calomniées par les Persans, de ces populations lettrées, amoureuses de discussions littéraires, et où il a vu un individu soudainement poser une fiche en terre, portant l’annonce d’une thèse philosophique qu’il allait soutenir, et les passants et les vendeurs du marché, abandonnant leurs choses à vendre, pour se mêler à la discussion. […] Rodenbach croit plus tard, à un grand mouvement lyrique sur l’industrie, et il parle éloquemment des attitudes recueillies, de l’aspect presque religieux des occupations mécaniques, enfin d’une synthèse poétique du travail ouvrier, d’une étude au-delà de la simple photographie littéraire. […] Il parle du raté, disant toujours nous ; des poètes d’à présent, qu’il trouve plus près du piano que de la pensée ; de la jeunesse littéraire, portant dans la vie, la figure d’un petit débitant, dont le commerce ne va pas. […] Il blague ce peuple de littérateurs et de peintres, qui se précipitent à la suite du découvreur d’un procédé littéraire ou artistique, en sorte que les découvertes n’ont plus l’air d’être faites par un seul, comme elles le sont depuis le commencement du monde, mais par un monôme.

1598. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLVIIe entretien. Littérature latine. Horace (1re partie) » pp. 337-410

Les peuples ont leurs saisons comme la terre ; le peuple romain, peu littéraire et peu poétique de sa nature, a eu une saison productive très courte, mais dans cette saison très courte ce peuple semble avoir concentré en quelques années la vie et les œuvres des trois plus beaux génies de la latinité, Cicéron, Horace et Virgile. […] Les échelons manquent dans cette littérature ; le siècle littéraire d’Auguste est un sommet entouré de vide. Il est bien remarquable que cette saison productive du peuple romain en littérature se trouve précisément placée au moment de son histoire où la liberté tombe, où la tyrannie s’élève ; on dirait que la décadence politique coïncide exactement avec l’éclosion du génie littéraire. […] XXVI Une immense renommée, renommée à la fois littéraire, aristocratique et populaire, s’attacha à la mémoire de ce poète de la cour, du plaisir et de la solitude, après sa mort.

1599. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 juin 1885. »

Qu’il unisse intimement la poésie et la musique, non pour les faire briller l’une par l’autre, mais en vue du drame seul ; qu’il repousse sans faiblesse, poète, tous les agréments littéraires, musicien, toutes les beautés vocales et symphoniques qui seraient de nature à interrompre l’émotion tragique ; qu’il renonce au récitatif, aux ariettes, aux strettes, aux ensembles même, à moins que le drame, à qui tout doit être sacrifié, n’exige l’union des voix diverses ; qu’il rompe le cadre de l’antique mélodie carrée ; que sa mélodie, sans se germaniser, se prolonge infiniment selon le rythme poétique ; que sa musique, en un mot, devienne la parole, mais une parole qui soit la musique pourtant ; et surtout, que l’orchestre mêlant, développant, par toutes les ressources de l’inspiration et de la science, les thèmes représentatifs des passions et des caractères, soit comme une grande cuve où l’on entendra bouillir tous les éléments du drame en fusion, pendant qu’enveloppée de l’atmosphère tragique qui en émane, l’action héroïque et hautaine, complexe, mais logiquement issue d’une seule idée, se hâtera parmi les passions violentes et les incidents inattendus, et les sourires, et les pleurs, vers quelque noble émotion finale ! […] Cependant, Richard Wagner achevait Parsîfal : le texte littéraire avait été publié, en décembre 1877, et la partition était terminée, au printemps de 1879 : les deux représentations de Parsîfal auxquelles les membres du Patronat avaient le droit d’assister, gratuitement, furent annoncées, pour l’été de 1882. […] Elle signifie l’alliance, naturelle, nécessaire, des trois formes de l’Art, plastique, littéraire, musicale, dans la communion d’une même fin, unique : créer la vie, inciter les âmes à créer la vie. […] Wyzewa définit le wagnérisme comme une « doctrine esthétique » qui a la valeur d’une révélation philosophique et qui suppose « l’alliance naturelle, nécessaire, des trois formes de l’Art, plastique, littéraire, musicale, dans la communion d’une même fin unique, créer la vie, inciter les âmes à créer la vie. » Ainsi, cette doctrine s’applique-t-elle à toutes les formes de l’art, et surtout pas à la seule musique.

1600. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 juillet 1885. »

. — Tristan et la Tétralogie sont des drames littéraires, avec musique et plastique : le texte littéraire est fondamental de l’œuvre, il est le commencement, le moyen, et la fin ; la représentation scénique l’éclaire seulement, et la musique, aussi, l’éclaire, par son commentaire, sa psychique explication, prodigieuse glose à la parole et à l’acte. […] Et la différence artistique est non moins marquée : En ses opéras, Wagner reste librettiste d’opéra, content avec une esquisse de poème au lieu d’un poème développé, avec une ébauche littéraire, hâtée, confuse, incorrecte, un récit de fait-divers, au lieu de la précise et complète analyse du roman ; le spectacle est celui de l’opéra, dialogues d’interlocuteurs qui ne se regardent point, brillants défilés ; enfin, musicien d’opéra, Wagner emploie, — génialement, — une forme étriquée, et, — mélancoliquement, — il renonce aux richesses symphoniques de l’étude passionnelle… Mais, en ses drames, il est poète, avec les subtilités, les grandeurs, et les affinements des purement poètes ; son drame existe, littérairement, comme un roman dialogué ; — et il est le musicien révélateur de l’essence musicale, et son orchestre a appris à exprimer, — clairement (pour la première fois), — les ineffables intimités des âmes. […] Ayant reconnu l’identité du drame chez Beethoven et Shakespeare, nous pouvons dire, encore, que ce drame complet devra être, par rapport à l’Opéra, ce qu’est à un Drame littéraire une pièce de Shakespeare, et une symphonie de Beethoven à une Musique d’Opéra.

1601. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1884 » pp. 286-347

Vendredi 22 février Je lis aujourd’hui le roman japonais : Les Fidèles Ronins, et je suis un peu surpris — moi qui jusqu’à présent, ne croyais pas bien violemment à l’existence d’une littérature japonaise — je suis surpris de la rencontre, dans ce livre, de certaines qualités littéraires très remarquables. […] Les attaques littéraires n’agissent pas sur le coup. […] Mardi 18 novembre Le haut de ma maison, je le bouscule, et jette à bas les cloisons, et cherche à faire des trois petites pièces du second sur le jardin, une espèce d’atelier sans baie, pour y installer, à la sollicitation de mes amis de la littérature, une parlote littéraire, le dimanche. […] cet homme qui, dans la souffrance, a des sensations distinguées, assaisonnées de remarques et de réflexions presque littéraires, lorsqu’il écrit, est absolument dénué de littérature, et ne se doute pas du tout de ce qui fait la beauté d’un livre.

1602. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Le Roman de Renart. Histoire littéraire de la France, t. XXII. (Fin.) » pp. 308-324

Histoire littéraire de la France, t.  […] Son originalité (nous ne l’avons jamais mieux compris) est toute dans la manière et non dans la matière. — Mais n’admirez-vous pas comme les horizons littéraires s’étendent, comme les points de vue changent et se déplacent ?

1603. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres complètes de Saint-Amant. nouvelle édition, augmentée de pièces inédites, et précédée d’une notice par M. Ch.-L. Livet. 2 vol. » pp. 173-191

En un mot, il y a des pèlerins pour toute chapelle qui a ses reliques, et cela est fort heureux, fort consolant, surtout quand on aspire soi-même à laisser un jour sa relique dans l’histoire littéraire. […] Il a fait de cette portion d’histoire littéraire comme sa province.

1604. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « La marquise de Créqui — III » pp. 476-491

La religion romancée de Mme de Genlis révoltait la religion positive et vraie de Mme de Créqui ; ses jugements littéraires, dictés par la prévention et arrangés selon le thème du moment, étonnaient le goût ferme et sain de la marquise, et ce système d’éducation tout échelonné en jeux et en plaisirs n’offensait pas moins sa solidité. […] Voltaire, dont notre Révolution eût fait le désespoir (car jamais esprit ne fut à la fois plus aristocratique et plus libéral), excitait ses disciples de Cour à mêler aux discussions littéraires l’examen de l’état social de leur époque ; ce puissant intérêt, tout nouveau pour des esprits légers, les élevait à leurs propres yeux, en même temps qu’il ouvrait à leur curieuse ardeur un champ inconnu et sans bornes.

1605. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Mémoires pour servir a l’histoire de mon temps. Par M. Guizot »

quand on publie ses Mémoires de son vivant, on s’expose à un jugement complet de son vivant ; on le réclame ; car ne demander qu’un simple jugement littéraire en venant présenter au public toute sa personne, toute sa vie, ce serait par trop diminuer le droit du lecteur et rabaisser sa juridiction. […] Je m’aperçois que j’omets de noter une singularité littéraire mémorable : l’homme éminent que nous critiquons et qui s’offre si délibérément coup sur coup au jugement du public, n’avait pas tout à fait les vingt-cinq ans exigés par le règlement, lorsqu’en 1812 il fut nommé par M. de Fontanes à une chaire de la Faculté des Lettres ; il lui fallut une dispense d’âge.

1606. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Louis XIV et le duc de Bourgogne, par M. Michelet »

L’attention est piquée aussitôt par cette annonce : le duc de Bourgogne a l’esprit curieux et très littéraire, très tourné aux choses de l’antiquité : il est tout oreilles. […] Par elles on assiste (et M. de Bausset l’a très bien montré) aux divers incidents de cette éducation littéraire si distinguée, et où le précepteur avait affaire à un sujet si inégal, mais qui excellait et se surpassait par moments.

1607. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Louis XIV et le duc de Bourg, par M. Michelet. (suite.) »

Ces savants désœuvrés, comme on l’a vu dans tous les siècles éclairés, traiteront des questions frivoles ou dangereuses ; et sous le prétexte de communiquer aux hommes leurs découvertes et leurs lumières, il les corrompront par leurs préjugés ; et plus on fera de chemin en suivant ces lumières trompeuses, plus on s’égarera… » Je cite exprès cette page naïve, non précisément que je la blâme pour son excès de prudence ni que je la trouve déplacée sous la plume du petit prince, mais parce qu’elle jure étonnamment avec l’esprit littéraire du siècle qu’il aurait été chargé de diriger et de présider. […] Faible et fougueux, orgueilleux, méprisant, cruel railleur, et à chaque instant furieux… Fort pénétrant, précoce aux choses littéraires, ayant tous les défauts et des princes et des gens-de lettres.

1608. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « La Grèce en 1863 par M. A. Grenier. »

Moi-même, si parva licet…, si j’ose, en présence de tant de noms et d’œuvres d’alors, me rappeler tout bas ce premier souvenir de ma vie littéraire, lorsqu’en 1824 j’entrais comme apprenti rédacteur au Globe, que me demandait comme échantillon, comme premier essai de ma plume, mon ancien maître M.  […] Je reçois des Études littéraires et morales sur Homère, par M. 

1609. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « De la poésie en 1865. (suite et fin.) »

Buchon qu’il m’a fait une querelle inutile, lorsqu’il a supposé que je pouvais lui conseiller, à lui ou à tout autre, de tenter pour les patois de son pays ce que Jasmin a fait pour les patois du Midi, c’est-à-dire de les fusionner dans une sorte de dialecte commun ou composite et de langue littéraire poétique. […] Voir la Revue littéraire de la Franche-Comté, 1863.

1610. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « Oscar Wilde à Paris » pp. 125-145

Il décelait déjà ce besoin d’exactitude et de précision qui lui fera appliquer tout à l’heure, à ses investigations littéraires, les procédés rigoureux de l’analyse anthropométrique et de l’instruction judiciaire. […] * *   * Parmi les dîners de la Côte d’Or, restés célèbres dans les fastes littéraires de l’heure, figure celui qui réunit, pour la première fois, Oscar Wilde et les poètes romans.

1611. (1913) Le bovarysme « Première partie : Pathologie du bovarysme — Chapitre III. Le Bovarysme des individus »

Lemaître a énuméré les snobismes littéraires : et il nous a montré les snobs, à commencer par les Précieuses de l’Hôtel de Rambouillet, s’assemblant successivement autour de diverses modes de l’esprit, — autour d’une théorie, avec la règle des trois unités faussement attribuée à Aristote, avec le naturisme de Rousseau, avec le pessimisme de Schopenhauër, — autour d’une école d’art, avec l’engouement pour les préraphaélites, pour Botticelli, pour John Bums, — autour d’une nouveauté littéraire ou philosophique, avec l’intellectualisme, le culte du moi, l’occultisme, le symbolisme.

1612. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « J. K. Huysmans » pp. 186-212

Et toutes ces propriétés cachées d’une âme muette, se manifestent en ce corps des intelligences littéraires, le style. […] Huysmans, par son dernier livre surtout, a donné plus que des promesses de talent ; on peut légitimement compter, sans illusion amicale, que ses travaux aideront à maintenir et à exalter l’excellence actuelle de notre école littéraire.

1613. (1900) Le lecteur de romans pp. 141-164

Et j’oserai avancer que la perfection de cette forme littéraire exige tant de conditions et de si subtiles, qu’il faut, pour la comprendre et pour la goûter complètement, pour en tirer un autre profit que celui, très banal souvent, d’une anecdote, une intelligence déjà mûre et ornée. […] J’espère avoir établi que la formule du roman pour toutes les mains est celle tout simplement d’une erreur littéraire.

1614. (1874) Premiers lundis. Tome I « Mémoires sur Voltaire. et sur ses ouvrages, par Longchamp et Wagnière, ses secrétaires. »

Ils se rapportent à la marquise autant qu’à Voltaire lui-même, et, comme cette partie de sa vie qu’ils retracent, ne sont pas moins galants et mondains que littéraires.

1615. (1874) Premiers lundis. Tome I « Œuvres de Rabaut-Saint-Étienne. précédées d’une notice sur sa vie, par M. Collin de Plancy. »

Boissy-d’Anglas, a depuis longtemps rappelé les titres littéraires et politiques de son ami, et l’a presque confondu avec Malesherbes dans le même culte pieux qu’il leur rend.

1616. (1874) Premiers lundis. Tome I « M. de Ségur. Mémoires, souvenirs et anecdotes. Tome II. »

Il y a dans ce rapprochement de famille de quoi faire naître plus d’une idée, et sur la différence des époques, et en particulier sur la différence des manières littéraires.

1617. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Gilbert Augustin-Thierry »

Augustin-Thierry nous avertit, dans sa préface, qu’il a prétendu faire « une tentative littéraire nouvelle ».

1618. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Donec eris felix… »

Encore l’est-il pour des raisons exclusivement littéraires et comprises de lui seul.

1619. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — P — Ponsard, François (1814-1867) »

[Causeries littéraires (1854).]

1620. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre premier. Préliminaires » pp. 1-8

Elle a voulu voir clair dans ses origines, elle a poursuivi sa filiation littéraire avec persévérance, avec acharnement.

1621. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — C — article » pp. 40-47

De tels prodiges sont rares sans doute dans le Monde Littéraire, par la raison qu’ils sont des prodiges, & la Nature ne doit ni ne peut les répéter souvent.

1622. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Appendice. Note concernant M. Laurent-Pichat, et Hégésippe Moreau. (Se rapporte à la page 395.) » pp. 541-544

Laurent-Pichat, ayant à faire des lectures, des Causeries littéraires, dans un cercle rue de la Paix, a pris récemment (1861) pour l’un des sujets de sa déclamation encore plus que de son étude, Hégésippe Moreau, dont la vie prête au vague et lui a paru un canevas commode à ses propres pensées.

1623. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « La course à la mort » pp. 214-219

Il convient peut-être de dire que la jeunesse littéraire est pessimiste comme le furent en 1830 les jeunes romantiques et en 1850 les réalistes, et plus tôt encore la pléiade des Parnassiens.

1624. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Jean-Baptiste Guarini, et Jason de Nores. » pp. 130-138

L’espoir de ramener ses contemporains, de leur apprendre à penser, à distinguer les beautés réelles de ce qu’il jugeoit n’en avoir que l’apparence, lui fit interrompre les fonctions les plus graves, pour se jetter dans des discussions littéraires.

1625. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « X »

… La loi du travail littéraire est si absolue qu’elle s’est imposée même aux improvisateurs les plus abondants… Du travail obstiné on pourrait donc tout attendre.

1626. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Nicole, Bourdaloue, Fénelon »

Il fallait que ce Satan fourré eût quelque diabolique raison pour vanter Nicole, — comme Mirabeau vantait Siéyès, — ou qu’il cédât à un de ces préjugés d’éducation dont il ne fut pas toujours affranchi, malgré la netteté lucide de sa sensation littéraire.

1627. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Charles Barbara » pp. 183-188

Et comme l’ensemble d’une composition littéraire est toujours plus vaste que l’étroit espace ou l’étroite durée d’un tableau, il se trouve que L’Assassinat du Pont-Rouge n’a pas que la beauté solitaire du principal personnage, tête merveilleuse de désordre et d’anarchie depuis son crime, Satan vrai, Satan d’homme, à qui Barbara s’est bien gardé de donner même un pouce de plus que la taille humaine !

1628. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Champfleury ; Desnoireterres »

Ces réalistes contemporains, dont Courbet est l’épais champion en peinture, et qui n’ont pas encore trouvé de Courbet littéraire dans leurs rangs, ne prennent point en suspicion des facultés absentes ; au contraire.

1629. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1875 » pp. 172-248

» * * * — Dans ce moment-ci, chez les écrivains littéraires, c’est une recherche, une sélection, une chinoiserie de style, qui tendent à rendre l’écriture impossible. […] Et tout en causant des raisons littéraires, qui sont la cause de cet état, et qui nous tuent les uns après les autres, nous nous étonnions du manque de rayonnement autour de cet homme célèbre. […] Le fameux vase alhambresque, je l’avoue à ma honte, me fait l’effet d’un vase en carton peint, pour un drame littéraire et assyrien de l’Odéon. […] « Il n’y a, dit-il, de vraies haines, que les haines littéraires. […] Les hommes n’apportent pas aux idées de ce domaine la même foi qu’à leurs doctrines littéraires, qui sont et le credo convaincu et le produit d’un tempérament. » Ici, il s’interrompt pour jeter : « Tenez, nous sommes cinq dans ce salon, qui pensons absolument d’une manière différente, eh bien, je sais que nous nous aimons mieux, que ne m’aime Emmanuel Arago ! 

1630. (1890) La bataille littéraire. Deuxième série (1879-1882) (3e éd.) pp. 1-303

Comme les livres d’Alphonse Daudet présentement, ceux de M. de Goncourt ont été et sont encore aujourd’hui des événements littéraires. […] Son chef-d’œuvre restera comme un monument littéraire, il n’a pas de valeur historique. […] Octave Feuillet n’a jamais entretenu le public de sa personnalité littéraire ; ajoutons qu’il n’en a jamais eu besoin et que ses œuvres le défendraient plus que suffisamment s’il était attaqué. […] Il y a là un épisode intéressant de notre histoire littéraire. […] La mythologie et l’histoire tiennent dans mon travail autant de place que l’esthétique littéraire

1631. (1896) La vie et les livres. Troisième série pp. 1-336

Pourtant, je ne raffolais pas des prouesses littéraires de M.  […] » C’est grâce aussi, il faut bien le dire, à un certain goût tout cérébral pour la polissonnerie littéraire. […] Il remarqua, dans les musées des Américains, un mélange stupéfiant de Bouguereau et de Besnard, et, dans leurs cervelles, les amalgames littéraires les plus bizarres : Verlaine avec Georges Ohnet, Mallarmé avec Armand Silvestre. […] Henri de Régnier est sortie récemment des petites revues et des salons littéraires, où ce poète délicat et noble eût risqué de périr, comme l’empereur Héliogabale, enseveli sous des pétales de roses. […] Son portrait, exposé au Salon frondeur du Champ de Mars par le littéraire Jacques Blanche, commença de répandre le bruit de son nom hors des cénacles.

1632. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XLV » pp. 176-182

On aime et on aimera toujours en France ces sortes de comparaisons, de luttes littéraires et de tournois.

1633. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Mort de M. Vinet »

Vinet un critique littéraire du premier ordre, et c’est à ce titre qu’il nous touche particulièrement.

1634. (1874) Premiers lundis. Tome I « Mémoires de Dampmartin, Maréchal de camp »

Il aime à y parler des littérateurs célèbres qu’il a connus, et ce qu’il dit lui-même de la mélancolie du piquant chevalier de Boufflers dans l’émigration, et de la triste fin du brillant Rivarol, porte l’empreinte d’un talent littéraire facile et pur.

1635. (1874) Premiers lundis. Tome I « M. Tissot. Poésies érotiques avec une traduction des Baisers de Jean Second. »

Mais alors les voies littéraires n’étaient pas préparées au génie ; les langues, celles du nord en particulier, n’étaient pas faites, ou n’étaient pas polies : il n’y avait qu’une seule langue commune à tout le monde savant, et vraiment digne de lui ; l’enfant qu’on destinait aux lettres l’apprenait en naissant, et le latin pour lui était presque la langue de sa nourrice.

1636. (1874) Premiers lundis. Tome II « Dupin Aîné. Réception à l’Académie française »

En somme, toute cette séance s’est passée froidement ; elle n’a eu aucun caractère littéraire, ni même politique.

1637. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre X. De la simplicité du style »

Il arrive aussi que, chez les débutants, dans leurs travaux littéraires, l’émotion sincère ne se traduit pas par l’expression naïve, et qu’ils poussent parfois le pathétique jusqu’à l’emphase du mélodrame.

1638. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Introduction. Origines de la littérature française — 4. Physionomie générale du moyen âge. »

Il était nécessaire de le dire, car la littérature ici ne reflète pas tout le génie national : si le Parthénon et une tragédie de Sophocle, un discours de Bourdaloue et les jardins de Versailles sont des manifestations étroitement apparentées du même génie, rien dans les formes littéraires du moyen âge français n’évoque l’idée de la conception esthétique qui fit surgir les grands monuments de l’art roman ou gothique.

1639. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — J — Jammes, Francis (1868-1938) »

Il existe assez réellement lui-même pour pouvoir se passer d’adjuvants, des communes ressources littéraires ; de sorte qu’on s’étonne d’abord, tant sa littérature emprunte peu à celle des autres.

1640. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Renan — I »

Nous risquons d’être injustes et de cette façon-même que prévoyait l’illustre écrivain : peut-être taxons-nous de faiblesse ce qui ne fut que prudence ; mais il ne faut pas s’exagérer l’importance d’une injustice en matière littéraire, c’est le procédé de tous les petits-fils vis-à-vis de leurs grands-parents.

1641. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « LOUISE LABÉ. » pp. 1-38

Cette célèbre Lyonnaise a obtenu un honneur que n’ont pas eu bien des noms littéraires plus fastueux, on n’a pas cessé de la réimprimer : l’édition de ses œuvres publiée en 1824, avec notes, commentaires et glossaire, était la sixième au dire des éditeurs, ou plutôt la septième, comme l’a prouvé M. […] Si elle dut en partie ce rôle d’exception au caractère tout intime et passionné de ses vers, elle ne le dut pas moins à la position littéraire qu’occupait alors en France la cité lyonnaise. […] Les preuves de ce fait général seraient abondantes, et le Père de Colonia, sans en tirer toutes les conséquences, a pris soin d’en rassembler un grand nombre dans l’histoire littéraire qu’il a tracée de sa cité adoptive.

1642. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE KRÜDNER » pp. 382-410

Les particularités de sa première vie sont déjà bien loin : elle avait atteint vingt ans avant que la Révolution française eût commencé ; n’ayant encore aucune célébrité ni prétention littéraire, elle était simplement une femme à la mode : tout ce que sa grâce, son esprit et son âme ne manquèrent pas alors d’inspirer ou de ressentir, n’a laissé que des traces légères comme elle. […] On trouve, dans l’interminable fatras intitulé Mélanges militaires, littéraires et sentimentaires du prince de Ligne, une suite de Valérie qui n’est qu’une plaisanterie de cet homme d’esprit, par trop écrivain de qualité. […] (Voir Derniers Portraits, ou au tome III des Portraits littéraires, édit. de 1864.)

1643. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « George Farcy »

Il donna aussi quelques articles littéraires au Globe dans les premiers temps de sa fondation. […] Le monde politique et littéraire était alors divisé en partis, en écoles, en salons, en coteries. […] « Aujourd’hui (dans les Consolations) il sort de sa débauche et de son ennui ; son talent mieux connu, une vie littéraire qui ressemble à un combat, lui ont donné de l’importance et l’ont sauvé de l’affaissement.

1644. (1920) Enquête : Pourquoi aucun des grands poètes de langue française n’est-il du Midi ? (Les Marges)

Albert Thibaudet écrivait dans La Nouvelle Revue française : « A-t-on remarqué que le Midi n’a donné à la France, dans toute son histoire littéraire, pas un seul de ses grands poètes ? […] La création artistique ou littéraire a besoin d’être stimulée par cet échange d’idées, de sentiments, d’impressions qui est possible seulement dans un cercle où règne la curiosité des choses de l’esprit. […] D’autre part, quelle opinion qu’on ait de Rostand, son succès universel — en dehors bien entendu d’une grande partie des milieux littéraires — ne permet pas de l’oublier, ni Paul Arène, qui a fait des vers exquis — Navarrot, béarnais, était aussi un excellent poète français.

1645. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 15 décembre 1886. »

Nous avons connu le nom de Richard Wagner par des morceaux littéraires longtemps avant d’avoir pu apprécier le musicien dans ses créations lyriques. […] Il : procédé littéraire de Wagner ; relation entre le drame musical et le théâtre, grec ; l’amour dans le drame wagnérien. III : procédé musical ; subordination de la musique à l’élément littéraire ; importance prépondérante de l’orchestre tant comme agent symphonique que comme agent mélodique ; création d’un théâtre modèle.

1646. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1883 » pp. 236-282

Il est impossible de mieux faire valoir, de mieux monter en épingle la valeur des mots, et quand on entend cela, c’est comme un coup de fouet, donné à ce qu’il y a de littéraire en vous. […] Cet homme est un charmant bavard, bavard littéraire, et je ne sais comment, au lieu de me faire une conférence musicale sur la Lucia, il s’est mis à me parler de son enfance. […] Il y a pour moi, dans cette pièce, des vraies scènes d’un théâtre moderne, seulement, parfois abîmées par les expressions littéraires en retard, de Delair.

1647. (1902) La métaphysique positiviste. Revue des Deux Mondes

Une autre preuve nous en est donnée par un autre titre, celui du Journal des Savans, où, dès l’origine, pour quelques articles « scientifiques » les articles littéraires abondent. […] La fondation de l’Académie des sciences, 1666, y aidait ; et le progrès des sciences physiques et mathématiques ; et l’influence de quelques hommes, au premier rang desquels il faut nommer Fontenelle2 ; et enfin et peut-être surtout l’agitation que soulevait dans le monde littéraire et intellectuel, aux environs de 1695, la querelle des Anciens et des Modernes. […] Aux lecteurs qui seraient tentés de trouver ce jugement un peu sévère, je ne ferai pas cette mauvaise plaisanterie de leur demander s’ils connaissent la philosophie de Duns Scot, — dont Renan, dans L’Histoire littéraire de la France, t. 

1648. (1884) L’art de la mise en scène. Essai d’esthétique théâtrale

On se rappelle la discussion récente qui, dans un tournoi littéraire, a armé l’un contre l’autre M.  […] J’ajouterai, afin qu’on ne se méprenne pas sur ma pensée, que cette différence peut être considérée comme le fondement du jugement littéraire. […] Dans le domaine littéraire, on peut la ressentir à l’audition ou à la lecture des œuvres les plus diverses, et elle est d’ailleurs variable d’intensité. […] Tout d’abord, si nous remontons le cours de notre propre histoire littéraire, nous verrons comment ce modèle imaginé a été long à se former en nous. […] Puis le dialogue vif, alerte reprenait, et le vaudeville continuait sans grande ambition littéraire, éveillant ainsi de temps à autre la sensibilité du public.

1649. (1896) Le livre des masques

Préface Il est difficile de caractériser une évolution littéraire à l’heure où les fruits sont encore incertains, quand la floraison même n’est pas achevée dans tout le verger. […] Quand elles le méritent par leur importance, leur nécessité, leur à-propos, les évolutions littéraires reçoivent un nom ; ce nom très souvent n’a pas de signification précise, mais il est utile : il sert de signe de ralliement à ceux qui le reçoivent, et de point de mire à ceux qui le donnent ; on se bat ainsi autour d’un labarum purement verbal. […] Eekhoud est donc un écrivain représentatif d’une race, ou d’un moment de cette race : cela est important pour assurer à une œuvre la durée et une place dans les histoires littéraires. […] On ne sait rien de sa vie brève ; il ne semble avoir eu aucunes relations littéraires, les nombreux amis apostrophés en ses dédicaces portant des noms demeurés occultes. […] S’il fallait, ce qui est bien inutile, s’exprimer plus clairement, on dirait que, de l’avis de quelques-uns, qui en valent peut-être beaucoup d’autres, toute l’histoire littéraire n’est, rédigée par des professeurs selon des vues éducatives, qu’un amas de jugements presque tous à casser et que, en particulier, les histoires de la littérature française ne sont que le banal catalogue des applaudissements et des couronnes échus aux plus habiles ou aux plus heureux.

1650. (1861) Cours familier de littérature. XI « LXIIe entretien. Cicéron » pp. 81-159

Cicéron I Cicéron est le plus grand homme littéraire qui ait jamais existé parmi les hommes de toutes les races humaines et de tous les siècles, si nous en exceptons peut-être Confucius. […] VII Ces aptitudes et ces goûts oratoires et littéraires de la famille de Cicéron, et la tendresse qui se change en ambition pour son fils dans le cœur d’une noble mère, firent élever dans les lettres grecques et romaines l’enfant, qui promettait de bonne heure tant de gloire à sa maison. […] Les passions n’ont pas baissé de nos jours ; mais l’éloquence littéraire a perdu les foudres dont Démosthène, Cicéron, Vergniaud, ébranlaient leurs tribunes et pulvérisaient les factions ou la tyrannie. […] C’est là qu’il écrivit, sans relâche et sans lassitude, ses plus belles œuvres littéraires.

1651. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre troisième »

J’en vois d’autres encore, dans cette douce famille d’esprits conservateurs, qui seraient plus comptés si nos richesses littéraires, presque trop grandes pour le peu de temps que nous avons à donner aux lectures solides, ne nous forçaient de négliger le bon pour le meilleur et de faire des choix même dans l’excellent. […] C’est l’heureux privilège de l’histoire naturelle que ses principales vérités soient à la portée de tous, et que la langue littéraire suffise à les exprimer. […] Vient enfin Marmontel, définisseur par profession, qui voit dans le goût « un sentiment vif et prompt des finesses de l’art, de ses délicatesses, de ses beautés les plus exquises, et de même, de ses défauts les plus imperceptibles et les plus séduisants. » C’est bien raffiné pour être un sentiment, et le raffinement est trompeur : témoin Marmontel, qui, pour en avoir trop mis dans ses jugements littéraires, en vint à dire du mal de Boileau, et, qui pis est, à le dire en vers, prouvant, contre sa propre théorie, qu’il ne savait voir ni les beautés chez les autres, ni les défauts chez lui. […] Dans ces pages, où les mêmes choses servent à l’instruction et à l’éducation, toutes les raisons littéraires sont par quelque côté des vérités morales.

1652. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « VII »

Je ne vois qu’une seule façon de tourner la difficulté ; se serait de tenter une solution approximative en faisant, parallèlement, ceux traductions : l’une littérale et littéraire, comme je l’ai indiquée, — l’autre, littérale aussi, mais qui ne se soucierait que des exigences de la musique, et qui ne craindrait pas de sacrifier à ces exigences la syntaxe, pour placer chaque fois que cela est nécessaire, et sans une seule exception, le mot sous le mot et sous la note. […] [Francfort] FRANCFORT. — A Francfort le professeur Dr Max Koeh de Marbourg prendra cet hiver, au Freies Deutsches Hochtift, pour sujet de son cours d’histoire littéraire, Wagner, considéré comme dramaturge et littérateur. […] Fritzsch entreprend une seconde édition du Recueil des écrits et poèmes de Richard Wagner, en 31 livraisons à 60 pfennigs et du format in-18 ; c’est une édition populaire de l’œuvre littéraire complète du maître qui va prendre sa place à côté de la grande édition déjà parue. […] On peut même très bien imaginer une traduction à ce point de vue seul : une traduction excessivement littérale et littéraire.

1653. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. Daru. Histoire de la république de Venise. — III. (Suite et fin.) » pp. 454-472

Lui-même il a résumé, mieux que je ne pourrais le faire, toute sa vie considérée selon cet ordre littéraire continu, et dans laquelle la politique, vue en arrière, ne lui paraissait presque plus avoir été qu’un accident : J’ai trouvé, disait-il, dans l’étude des lettres, au bout d’une vie déjà longue et traversée par bien des événements, un grand charme, une grande utilité, souvent de grandes consolations. […] Daru avaient désigné pour ce bon office littéraire.

1654. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Œuvres complètes de Buffon, revues et annotées par M. Flourens. » pp. 55-73

Flourens apporte ce double soin littéraire et scientifique qui est son cachet ? […] Foisset, le savant historien de De Brosses, et qui possède si bien toute l’histoire politique et littéraire de sa Bourgogne.

1655. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Maucroix, l’ami de La Fontaine. Ses Œuvres diverses publiées par M. Louis Paris. » pp. 217-234

Louis Paris, estimable frère du spirituel académicien, vient de donner en deux volumes le recueil des Œuvres diverses de Maucroix, qui sont en partie composées de productions inédites, lettres et vers ; il a fait précéder son recueil d’une étude complète sur la vie et les ouvrages de l’auteur, et il a bien mérité par là de notre histoire littéraire. […] Pourtant Maucroix mêle à ses souvenirs littéraires, et aux imitations dont il s’appuie, un sentiment de mollesse qui lui est particulier et qui n’est pas sans charme.

1656. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Henri IV écrivain. par M. Eugène Jung, ancien élève de l’École normale, docteur es lettres. — I » pp. 351-368

Berger de Xivrey, et qui sont arrivées déjà jusqu’au tome VI, — si, dis-je, on entamait cette lecture dans une pensée d’agrément littéraire ; c’est avant tout un livre d’étude et une vaste source de renseignements pour l’histoire ; la grâce, la galanterie, la gentillesse d’esprit, qui se rattachent à bon droit au souvenir de Henri IV, n’y sont qu’incidentes et clairsemées. […] Elle n’a pas à se plaindre pourtant et n’a rien à envier même à la belle Gabrielle, au moins si l’on en juge, comme aime à le faire la postérité, au point de vue poétique et littéraire ; car assurément la plus ravissante lettre de Henri, la plus développée et la plus épanouie, celle où il se montre le mieux à nous dans un intervalle de paix pastorale et tendre et de repos, lui est adressée ; c’est la lettre où il lui décrit le pays de Marans sur la Sèvre Niortaise ; la voici, — voici ce coin de paysage délicieux : J’arrivai hier soir de Marans, où j’étais allé pour pourvoir à la garde d’icelui.

1657. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Santeul ou de la poésie latine sous Louis XIV, par M. Montalant-Bougleux, 1 vol. in-12. Paris, 1855. — I » pp. 20-38

Montalant-Bougleux est estimable par le sujet et par l’intention ; il y a des idées justes, mais non assez précises, mais trop mêlées de digressions étrangères, et exprimées dans un style qui est loin d’être celui de la correction ornée : et c’est là le style qui conviendrait si bien à ce genre de dissertations littéraires. […] Au reste, sans être Santeul, on comprend la joie, l’enivrement presque légitime qui devait inonder son cœur lorsque lui, fragile, mais croyant et fidèle, perdu dans la foule, il entendait le chœur entier des lévites et de l’assistance entonner quelqu’une de ces hymnes aux nobles accents, dont l’une au moins, le Stupete gentes, a été comme touchée du souffle sacré et mérite, ce me semble, de vivre. — Dans ce vent soudain sorti du sanctuaire, et qui tend aujourd’hui à tout balayer de Santeul et à n’y rien laisser de sa mémoire, s’il était permis de faire entendre un humble vœu littéraire, je demanderais grâce pour une seule hymne de lui, et pour celle-là.

1658. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres inédites de P. de Ronsard, recueillies et publiées par M. Prosper Blanchemain, 1 vol. petit in-8°, Paris, Auguste Aubry, 1856. Étude sur Ronsard, considéré comme imitateur d’Homère et de Pindare, par M. Eugène Gandar, ancien membre de l’École française d’Athènes, 1 vol. in-8°, Metz, 1854. — I » pp. 57-75

Je ne prétends pas aujourd’hui que la cause soit gagnée : il y a très peu de points qui soient gagnés définitivement en histoire littéraire ; les conclusions les plus claires et les mieux motivées suscitent et ramènent de temps en temps des procès qui recommencent. […] Le poète polonais Mickiewicz, dans ses considérations d’histoire littéraire, adresse un reproche de ce genre à Ronsard ; il l’accuse d’avoir rompu avec la tradition du Moyen Âge, et d’avoir jeté la poésie française dans la route qu’elle n’a plus quittée.

1659. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Sénecé ou un poète agréable. » pp. 280-297

Né à Mâcon le 27 octobre 1643, fils d’un père lieutenant-général au bailliage, petit-fils et arrière-petit-fils de médecins fort considérés, Antoine Bauderon (c’était son nom de famille), connu sous le nom de Sénecé, qui est celui d’une terre, reçut une éducation très littéraire, mais qui sentait un peu la province. […] Mais dans cette lettre, sous prétexte que Lulli descendu aux Enfers est renvoyé par Proserpine pour être définitivement jugé par-devant le Bon Goût, on se met en marche du côté où l’on suppose qu’habite ce dieu ou demi-dieu : et ici Sénecé nous trace tout un itinéraire où il expose sa théorie littéraire et critique sous forme d’emblème.

1660. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Madame Bovary par M. Gustave Flaubert. » pp. 346-363

Je n’oublie pas que cet ouvrage a été l’objet d’un débat tout autre qu’un débat littéraire, mais je me souviens surtout des conclusions et de la sagesse des juges. […] Car en bien des endroits, et sous des formes diverses, je crois reconnaître des signes littéraires nouveaux : science, esprit d’observation, maturité, force, un peu de dureté.

1661. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « La princesse des Ursins. Ses Lettres inédites, recueillies et publiées par M. A Geffrot ; Essai sur sa vie et son caractère politique, par M. François Combes » pp. 260-278

Puis, peu à peu, sur cette première couche littéraire, réputée aujourd’hui superficielle, et qui était du moins délicate et légère, on viendrait ajouter graduellement des teintes plus fortes, plus marquées, des figures plus expressives ; on lirait cette suite de mémoires charmants qui faisaient autrefois partie de toute éducation d’homme et de femme comme il faut : Mme de Motteville, Mlle de Montpensier, le cardinal de Retz, Mme de La Fayette, Mme de Caylus, tout Mme de Sévigné : Saint-Simon, qui outre déjà, ne viendrait que le dernier après tous les autres. […] Cousin ; mais on ne commencerait point par là ; on ne se piquerait pas d’emblée d’être érudit avant d’avoir été tout uniment instruit (le grand et détestable travers du moment et le danger littéraire de l’avenir !) 

1662. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Charles-Victor de Bonstetten. Étude biographique et littéraire, par M. Aimé Steinlen. — II » pp. 435-454

Bonstetten y obtenait du succès ; les hommes les plus sérieux de ces salons littéraires, Thomas, l’abbé de Mably, s’attachaient à lui et s’étaient mis dans la tête de lui faire faire une histoire de la Suisse, — cette même histoire dont l’honneur était réservé à l’illustre ami de Bonstetten, Jean de Muller. — Bonstetten, dont ce n’était pas la vocation, éludait, les laissait dire, et les entendait pendant des heures développer leurs plans patriotiques, emphatiques ; lui, qui craignait déjà les ennuyeux, il ne savait bientôt plus comment fuir ces prédicateurs acharnés qui voulaient faire de lui un Raynal suisse ; il en était poursuivi jusque dans le parc de Saint-Ouen, chez Mme Necker ; jusque dans le château de La Rocheguyon, chez ses amies les duchesses de La Rochefoucauld, qui elles-mêmes se mettaient de la partie et devenaient complices : Ce qui ajoute à l’envie de me retrouver chez moi, écrivait-il de La Rocheguyon, c’est que voilà quatre jours que je me trouve avec l’abbé de Mably. « Et quand verrons-nous cette histoire de la Suisse ? […] Le voisinage et l’influence littéraire de Rousseau se font sentir dans ces exhortations chaleureuses où se dresse à tout moment l’apostrophe.

1663. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Correspondance de Lammenais » pp. 22-43

Le public a droit de se plaindre, dans ce cas, de l’application du droit de propriété littéraire ; et si ce droit s’étend, comme plusieurs personnes le désirent, le cas se reproduira souvent. Le point de vue des familles n’est pas nécessairement celui du monde littéraire et philosophique ; il serait plutôt tout l’opposé.

1664. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Le Mystère du Siège d’Orléans ou Jeanne d’Arc, et à ce propos de l’ancien théâtre français (suite.) »

Il y a ainsi, pour les divers genres littéraires, des heures plus ou moins favorables et comme des tours de rôle : après des années de retard et d’attente, tel genre qui était primé par d’autres passe à son tour sur le premier plan et se donne toute carrière. […] C’est à regret qu’on signale ces faiblesses et ces fragilités de jugement, dans des écrits d’ailleurs dignes d’estime par les recherches et par le zèle tout littéraire qu’ils supposent chez les honorables auteurs.

1665. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Térence. Son théâtre complet traduit par M. le marquis du Belloy (suite et fin.) »

Fénelon et Addison, deux esprits polis et doux, de la même famille littéraire, ont loué ce passage de Térence comme d’une beauté et d’un naturel inimitables. […] Ce ne sont pas des jeux d’esprit que je me permets : chaque écrivain ou poète classique a sa qualité distinctive et singulière, sa vertu à lui, souveraine, et qui est faite pour guérir du défaut littéraire opposé.

1666. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Théophile Gautier (Suite.) »

Je me rappelle qu’en 1831, vers le temps où parut sa gracieuse idylle de Marie, comme je le visitais en compagnie d’un ami, directeur d’un journal, nous le trouvâmes au lit, dans une assez pauvre chambre d’hôtel où il logeait, et assez mécontent du sort ; nous l’engageâmes à travailler et à se joindre à nous pour quelques articles littéraires : à quoi il nous répondit d’un ton sec : « Non, je veux que ma carte de visite reste pure. » Ce qui, je dois le dire, nous parut légèrement impertinent, à nous qui alors étions jusqu’au cou dans la prose. […] La conquête littéraire véritable de Théophile Gautier est de ce côté, et je dois y insister.

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