Sous bien des rapports ils paraissent avoir fait entre eux l’espèce de convention tacite que le spectateur fait en entrant au théâtre, de prendre l’apparence des choses pour la réalité. […] Sir Walter Scott sait gré au jeune vainqueur du respect et de la pitié que lui inspira le guerrier à cheveux blancs, mais ce n’est pas sans ajouter quelque épigramme contre le coup de théâtre du manteau.
Vainement la plupart des féroces empereurs de Rome montrèrent-ils un goût excessif pour les jeux et pour les spectacles ; aucune pièce de théâtre digne d’un succès durable ne parut sous leur règne, aucun chant poétique ne nous est resté des honteux loisirs de la servitude. […] Les crimes inouïs dont l’empire romain a été le théâtre, sont l’une des principales causes de sa décadence.
Les lettres lui offraient dans la prose, dans la poésie, au théâtre, dans la chaire, des réflexions sur l’âme humaine, exactement liées et logiquement déduites. […] Il fallait se former soi-même : dans le monde, dans les lectures, au théâtre, payer de sa personne, et ne pas s’endormir ; hors de soi, ni en soi, on n’avait de souffleur, qui dispensât de la peine.
Mais dans ses autres compositions il fut moins fidèle aux traditions de la comédie de l’art ; il céda, à son tour, à la tendance qui emportait le théâtre italien vers les complications extravagantes et les spectacles fantastiques. […] Voyez ci-contre Scapin, d’après la planche 8 de l’Histoire du Théâtre italien : « Nous avons, dit Riccoboni, une estampe de cet habit dessinée et gravée à Paris par Le Bel, qui était un fameux dessinateur italien de ce temps. » Le costume traditionnel du premier zanni, c’est la veste et le pantalon blancs galonnés sur les coutures avec des lamelles d’étoffe ordinairement vertes, la toque blanche bordée d’un galon vert, le manteau à brandebourgs de même.
Regarde. « On vient de découvrir… Droits à percevoir… » Et plus bas : « Hier, une foule innombrable… Légataire universel… Au théâtre de l’Odéon… » […] (Ils se retirent tous deux vers le fond du théâtre.
Le Demi-Monde Je ne sache pas que jamais comédie ait fait, au théâtre, une plus triomphale et plus fulgurante entrée que le Demi-Monde. […] C’en est fait, le théâtre a trouvé un maître et la comédie moderne saura désormais à qui parler ! […] Elle se traîne donc à genoux aux pieds de l’amant irrité, perdue dans ses cheveux, noyée dans ses pleurs, et elle avoue, elle se confesse, elle demande grâce, et l’homme de guerre ne résiste pas à cette pantomime de Madeleine apprise au théâtre ; seulement il exige qu’elle renvoie, sur l’heure, à M. de Thonnerins la fortune infamante qu’elle doit à son caprice. […] A part la légère chicane que je lui faisais tout à l’heure, je ne connais pas, au théâtre, de plus sympathique figure que celle de cet élégant stoïcien, qui vergète les jupons fripés avec une fine et sifflante cravache de dandy. […] Il revient du Havre ; cette innocente promenade a fait tomber les actions de sa maison dans les bas-fonds de la baisse ; il les a rachetées à cinquante pour cent au-dessous du pair : le tour est fait… Mais ce tour est celui d’un Mercadet à ses débuts et non celui d’un homme six fois millionnaire ; mais cette fausse sortie, exécutée sur le théâtre sérieux des affaires, conduirait tout droit son homme en police correctionnelle ou en cour d’assises ; mais c’est là une fourberie impossible, imaginaire, fantastique, et dont ce pauvre diable de millionnaire sacrifié ne peut être responsable aux yeux du public !
Il nous parle de la salle de spectacle, qui comme le plus grand local, sert aux assises, et où l’on pend sur la scène, après le théâtre, — et où il a vu, dit-il, un pendu qui se raccrochait aux montants des coulisses, et sur lequel les spectateurs tiraient de leur place. Dans ces pays, il paraîtrait aussi, que pour les rôles de criminel, les directeurs de théâtre sont en quête d’un vrai criminel, et quand il s’agit de jouer Macbeth, on fait des propositions d’engagement à une empoisonneuse, au moment de sortir de prison : et l’on voit des affiches ainsi conçues : Le rôle sera rempli par Mme X***, et entre parenthèses (10 ans de travaux forcés). […] Pour les gens qui veulent bien accepter la matérialité du théâtre, l’acte de la couronne démontée pour le Mont-de-Piété, est une émotionnante chose, un clou puissant. […] Il y a pour moi, dans cette pièce, des vraies scènes d’un théâtre moderne, seulement, parfois abîmées par les expressions littéraires en retard, de Delair. […] Zola, lui, proclame qu’il faut faire du théâtre, en s’en fichant… qu’il croit que sa pièce, à lui, n’ira pas jusqu’au bout.
Des personnages de son théâtre, aux héros de la Légende des Siècles aux femmes et aux enfants qui traversent certains poèmes, tous sont ainsi peints au décuple, saisis une première fois d’un coup, repris, traités à nouveau, enclos de mille contours semblables et déviants, obsédés et retouchés par une main sans cesse retraçante. […] A tous les tournants des drames ou des romans, se passent des coups de théâtre, de poignantes alternatives, des luttes de conscience entre deux devoirs, des ironies tragiques qui font dire ou faire à un personnage le contraire de ce qu’il veut de toute son âme. […] De là ses romans allant de coups de théâtre en crises de conscience, de situations extrêmes, en soudaines catastrophes, sans que même les interstices soient comblés par des files de petits incidents médiocres et quotidiens, tels que les chroniques et les mémoires nous les montrent exister sous les plus grands remuements de l’histoire. De là son théâtre machiné, sanglant et surtendu dont les péripéties ont tantôt l’air apprêté des effets de M. […] Le faux Lord Chancharlie est historiquement vraisemblable, et de toutes les héroïnes de théâtre, la reine Marie Tudor, se distingue par des passions humaines conçues en termes vrais.
Il lui faut des faits pour prouver ses assertions générales, le désir qu’ont les menuisiers de ne travailler que pour le théâtre, une fois qu’ils ont goûté de cette gloriole, pour montrer la séduction que celui-ci exerce sur tout ce qui l’approche ; des faits pour trait final à une analyse de caractère, ou à la notation d’un changement moral ; la mère des Zemganno appelée en justice, ne voulant témoigner qu’en plein air, pour montrer le farouche amour de la bohémienne pour le ciel libre ; pour représenter la modification produite en Chérie par sa puberté, décrire en détail la gaucherie et la timidité subite de ses gestes. […] Ce que M. de Goncourt nous montre, ce sont les colères d’une petite fille gâtée, se roulant par terre dans la rage d’une soupe ôtée ; l’affollemenl d’une jeune femme mourant de sa chasteté, et courant à la quête d’un mari ; l’état d’âme inquiet et alangui d’une actrice entretenue, élaborant un rôle de grande amoureuse, se jetant dans le plus poétique et le plus émouvant amour, abandonnant le théâtre, puis reprise par lui, récupérant ce coup d’œil aigu d’observatrice qui la fait inconsciemment mimer la mort de son amant. […] Ils annonçaient alors un roman qui n’a jamais paru, le Camp des Tartares ; ils faisaient des comptes rendus de théâtre (le Joseph Prudhomme de Monnier à l’Odéon), des notes bibliographiques ; parfois même ils chroniquaient tout simplement comme dans leur Voyage de la rue Lafitte à la Maison d’Or, et une citation gaillarde les menait en police correctionnelle.
Il fut un vrai roi de théâtre. […] Ses Lettres à Babet ne sont plus lues aujourd’hui ; mais son Ésope est resté au théâtre. […] Les opéra d’Armide & d’Atys ont élevé le père de notre théâtre lyrique au niveau de ses plus illustres contemporains.
Le théâtre d’abord a été sanctifié. […] » C’est qu’il manquait à Renan la forte préparation du théâtre. […] Le théâtre d’alors rend fidèlement l’image de la vie réelle. […] Meurtres, trahisons, trivialités et bestialités, l’éclaboussement des injures et l’éclaboussement du sang, cela est pareil de son théâtre à leur théâtre. […] En fait, la forme de théâtre qui consiste à discuter un problème moral en analysant des sentiments est celle même des maîtres de notre vieux théâtre.
— Ce qui n’est pas moins de mode à Paris pour le quart d’heure, c’est évidemment le Théâtre grec et la Grèce bien ou mal entendue. […] Hippolyte Lucas, rédacteur ordinaire des feuilletons de théâtre au Siècle, et qui n’a d’ailleurs en rien, nous dit-on, la prétention de savoir le grec : il semble en vérité que ce soit la condition la moins requise pour traduire ces grands poëtes d’autrefois.