/ 3290
1029. (1898) Politiques et moralistes du dix-neuvième siècle. Deuxième série

Il arrive que l’ardeur dont on tient à un droit n’est point du tout la mesure de la capacité d’en faire usage ; et il semble bien qu’aujourd’hui on tient au droit de penser librement, beaucoup plus qu’on ne tient à penser quelque chose. […] Saint-Simon semble tenir essentiellement à la propriété individuelle. […] Qu’ils la compensent par des services rendus, en dirigeant bien, on les tiendra quittes. […] Qu’à cela ne tienne. […] Ce fut une œuvre d’amour, de charité, et, si l’on y tient, d’innocence.

1030. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre II, grandeur et décadence de Bacchus. »

Dieu paysan, son royaume tient entre les quatre haies du verger. […] Il tient la férule enveloppée de pampres, sceptre hiératique de sa royauté. […] La luxurieuse Astarté débauche l’aimable Cypris ; elle dénoue sa ceinture tissée par les Grâces, et lui fait tenir des lupanars dans ses temples. […] Il grimpe sur un arbre, à la façon d’un Satyre, et se tient debout à la cime. […] Tous ces hiéroglyphes et tous ces symboles qui ne tiendraient pas sur le plus haut obélisque ne décorent qu’un sépulcre vide.

1031. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1876 » pp. 252-303

» Je me tenais à quatre, pour ne pas lui crier : « Être simple et ignorant, ramasse tes gravures, et va en demander carrément douze cents francs dans la boutique à côté, et on te les donnera !  […] — Un morceau écrit, paraît-il bien, il y a des gens qui soutiennent que cela tient à ce que l’écrivain a trouvé, le jour où il a jeté ce morceau, la formule unique et absolue qui lui convenait. […] Dans le salon du poète presque vide, Mme Drouet, raide dans sa robe de douairière galante, se tient assise à la droite d’Hugo, en une attention religieuse. […] C’était à l’époque de l’Exposition universelle, Renan se tenait dans la grande salle des manuscrits de la Bibliothèque, et à cause de l’affluence des visiteurs, on avait donné à Renan pour compagnon un gendarme. […] j’ai des après-midi d’une tristesse… tenez, je voudrais être une femme pour pleurer ! 

1032. (1898) La poésie lyrique en France au XIXe siècle

Vous comprenez que, étant donné le peu de temps dont je dispose, je serai obligé d’être très bref : je m’en tiendrai aux grands écrivains, je tâcherai de marquer les grands courants. […] Mais c’est une des meilleures parties de l’originalité de Victor Hugo que la façon dont il a su parler des enfants, et cela dans un pays où les enfants tiennent beaucoup de place dans la famille, mais où ils n’en tiennent aucune dans la littérature. […] Chez les Grecs, Iphigénie suppliante montre à son père le petit Oreste, tout petit, en larmes, qui pleure parce qu’il ne sait pas parler, et qui tient sa robe. […] Seulement, il est resté là, il a tenu tête aux chasseurs jusqu’à ce que la louve et ses petits eussent eu le temps de se mettre en sûreté. […] José-Maria de Heredia est parmi tous ces poètes celui qui tient le plus étroitement à la doctrine du Parnasse.

1033. (1907) L’évolution créatrice « Chapitre IV. Le mécanisme cinématographique de la pensée  et l’illusion mécanistique. »

Elle tient, comme la première, aux habitudes statiques que notre intelligence contracte quand elle prépare notre action sur les choses. […] Mais le verbe lui-même, si l’on s’en tient à la partie éclairée de la représentation qu’il évoque, n’exprime guère autre chose. […] Survient alors une philosophie qui tient pour légitime la dissociation ainsi effectuée par la pensée et le langage. […] Et quand elle possède ainsi la pièce d’or, elle tient éminemment cette menue monnaie qu’est le changement. […] La détermination réciproque des apparences juxtaposées dans l’espace tenait à l’indivisibilité de l’être vrai.

1034. (1866) Nouveaux essais de critique et d’histoire (2e éd.)

Son système se tient en l’air, prêt à tomber de tous côtés. […] Tiens, tiens ! […] Il se tient à l’abri quand il les pousse en avant. […] Quelle que soit l’intimité, soyez sûrs qu’ils se tiendront toujours à leur place. […] Toute l’histoire de la condition et de la pensée de la race indienne y tient en raccourci.

1035. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Malherbe »

Ce caractère plus ou moins factice de l’Ode, et qui tient à ce qu’après avoir été une des formes du divertissement public, elle n’est plus, chez les Modernes, qu’un genre littéraire, a passé de Malherbe à ses successeurs, et se marque chez J. […] Ne pas tenir à l’argent, être au-dessus de l’argent, c’est le plus grand signe, chez un homme d’ailleurs capable, qu’il est fait et qu’il est né pour la chose publique. Il est permis aux particuliers (et Malherbe le savait aussi bien que personne) de tenir jusqu’à un certain point à l’argent, par intérêt et considération de famille ; — aux gouvernants des peuples, jamais. […] Et d’ailleurs, on voit bien que ce qu’il laissera d’imparfait ne saurait jamais être achevé par homme qui tienne sa place. […] Dans la chambre de son hôtel garni, il tenait avec les quelques poëtes, ses disciples et sectateurs, école et académie de grammaire autant que de poésie.

1036. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre quatorzième. »

D’une part, il s’en était tenu aux généralités, aux rapports du prince avec les sujets, laissant les affaires à ceux qui en avaient le maniement, et n’en disputant pas quand il n’avait pas qualité pour en décider. […] Pourquoi donc l’esprit de liberté le tient-il pour suspect, et, au contraire, montre-t-il tant de faveur à Fénelon ? […] Le prélat tient fort à ce mot. […] Et c’est au duc de Bourgogne qu’il tenait ce langage. […] En lisant Fénelon, on est poursuivi des images de ces hommes divins qu’il admirait tant dans Homère, lesquels répandaient les paroles ailées et tenaient les peuples suspendus à leur bouche d’or.

1037. (1887) Journal des Goncourt. Tome II (1862-1865) « Année 1862 » pp. 3-73

Elle souffre du ventre affreusement, ne peut se remuer, ne peut se tenir couchée sur le dos ou le côté gauche. […] Elle se tient de la main à la portière. […] Tout cela tient à ce que tu n’as pas comme nous le sens de l’exotique. […] Non, voilà tout… Nous ne sommes pas Français, nous autres, nous tenons à d’autres races. […] Tenez, on parlait devant lui de Broglie, on disait que c’était un bon esprit : — « Oui, un bon esprit faux », fit-il.

1038. (1896) Journal des Goncourt. Tome IX (1892-1895 et index général) « Année 1893 » pp. 97-181

À la suite de cet envoi, il était passé quelques jours après chez lui et il lui avait, à propos de son sonnet sur un poisson, au milieu de grands éloges, tenu un discours un peu délirant. […] Et dans ce travail horizontal, où la circulation se fait assez mal, quelques-uns ont deux ou trois chiens couchés sur eux, pour leur tenir chaud. Vendredi 9 juillet Dans l’espèce de foire, qui se tient autour des bâtiments de la source de la Grande-Grille, il y a un étalage en plein air, au coin duquel se tient un vilain juif, à l’œil dormant d’un chat qui guette une proie. […] Il parle de la tête oscillante du condamné sur les épaules, comme si elle ne tenait plus, de la longueur du visage par la descente de la mâchoire, de la pâleur qui tourne au chocolat, et nous fait voir le couteau, remontant éclaboussé de sang, comme du papier peigne, avec la trace parfaitement indiquée des deux carotides. […] Là-dedans, une seule chose d’un goût personnel, de grandes peaux d’ours blancs, mettant dans le coin où se tient la femme, une blancheur lumineuse.

1039. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre cinquième. Le réalisme. — Le trivialisme et les moyens d’y échapper. »

Tenez, voilà X. ; il ne verra pas si cette table est ronde ou carrée… Toute ma valeur, c’est que je suis un homme pour qui le monde visible existe. » — Fort bien, pour un commissaire priseur le monde visible existe aussi, et la tapisserie, et la table ronde ou carrée. […] Ces deux sentiments sont éternels, ils tiennent au cœur même de l’homme, et, s’ils étaient un signe de folie, nous serions tous fous à ce compte ; c’est de ces deux sentiments que devait vivre la littérature postérieure à Rousseau. […] Le faux, c’est notre conception abstraite du monde, c’est la vue des surfaces immobiles et la croyance en l’inertie des choses auxquelles s’en tient le vulgaire. […] La plupart du temps, poètes et romanciers s’en tiendront à la vie, puissante sans doute, mais sourde, mais latente, que tous plus ou moins nous sentons dans les choses. […] Des chevaux et des ânes débridés mangeaient l’orge dans des seaux de cuir ; quelques cavaliers se tenaient encore à cheval et les femmes voilées n’étaient point descendues de leurs dromadaires.

1040. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Quelques « billets du matin. » »

Plusieurs prétendent qu’il tint à cette époque un magasin de chasubles dans la rue Saint-Sulpice. […] Nous ne nous tenions pas de joie. […] Il est, d’ailleurs, énorme et somptueux ; il tient de la féerie et de la manœuvre militaire. […] Or, au fond, nous y tenons beaucoup, à ces titres, et nous en sommes très fiers, — fiers comme des rois. […] Je le tiens du docteur Félizet.

/ 3290