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547. (1857) Cours familier de littérature. IV « XIXe entretien. Littérature légère. Alfred de Musset (suite) » pp. 1-80

Tout était espagnol en ce temps-là dans le costume poétique. […] Le temps et la jouissance ont usé chez lui l’amour ; cet amour est toujours jeune et brûlant dans le cœur de la danseuse. […] et par elle est compté Chaque pas que le temps fait vers l’éternité. […] Dieu m’écoute ; il est temps. […] J’en pleure aujourd’hui ; mais ce n’est plus le temps de se retourner et de lui dire : donne-moi la main, nous sommes de la même famille !

548. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XXXVIII » pp. 158-163

Je vous avais dit à la date du 3 décembre : « mettez 400 pèlerins en tout et vous aurez le chiffre » ; depuis, ce chiffre a grossi ; quelques retardataires se sont émus et, comme on est badaud dans tous les temps, on s’est mis à vouloir faire le voyage de Londres puisque d’autres l’avaient fait. […] Il serait temps qu’au sein de l’Académie quelque Caton le Censeur se levât et proposât à cet égard un règlement pour tempérer ce luxe d’obsessions qui est tout propre à décourager le mérite modeste. […] Quant à cette banale accusation d’avoir trempé dans la mort de son frère André, il serait temps de laisser une si odieuse calomnie. […] Mais il est toujours temps de revenir à ce point de vue plus vrai après qu’on a profité en détail avec son auteur. — Les Chambres vont s’ouvrir avec l’année ; les retardataires qui prolongent le séjour de la campagne jusque bien avant en décembre arrivent en foule et se multiplient avec rapidité pour réparer le temps perdu.

549. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — C — article » pp. 40-47

Ce n’est pas par des Remarques plus subtiles que justes, par des Réflexions plus fausses que conformes au goût, par des Analyses infidelles & insidieusement présentées, par des Critiques minutieuses & souvent puériles, par des Notes grammaticales auxquelles on attache une importance d’autant plus ridicule, que les fautes de langue qu’on y releve appartiennent moins au Poëte qu’au temps où il vivoit, qu’on pourroit se former une idée sûre du Héros de la Tragédie. Quels motifs ont pu porter un Ecrivain dont la réputation n’a rien de commun avec ce grand Poëte Tragique, à s’acharner contre les hommages rendus de tout temps à sa supériorité ? […] En parcourant l’Histoire du Théatre, on voit le Cid, les Horaces, Cinna, la Mort de Pompée, occuper la Scène avant Venceslas, la seule des Pieces de Rotrou qui ne se ressente pas de l’ignorance & du mauvais goût de son temps. […] Dans le temps que les autres Poëtes employoient tout leur temps à obtenir des graces du Cardinal de Richelieu, il perdit tout le sien à les mériter.

550. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Appendice. Note concernant M. Laurent-Pichat, et Hégésippe Moreau. (Se rapporte à la page 395.) » pp. 541-544

) On a, de nos jours, comme sans doute on a eu de tout temps, la manie de grossir la vie et les mérites des hommes qui sont morts appartenant à une école, à un parti ou à une communion. […] Les critiques s’accroupissent sur sa mémoire ; on refait sa biographie de vingt manières ; on la surcharge de notes ; on étudie à la loupe ce qu’il a écrit ; on dissèque ses vers, et de cette autopsie sortent des rapports mesquins, des procès-verbaux ingénieux et froids. — Il était pris de la maladie de son siècle, dit-on ; — il était irréligieux, irrité ; — on le plaint un peu ; on l’excuse un instant sur ses torts. — Il fut atteint de la petite vérole courante de son temps, a dit de Moreau un critique officiel. […] La maladie de son temps, nous la connaissons, cette maladie, et Moreau n’en était pas atteint. […] Le génie de Moreau était sain et vigoureux ; il ne l’avait emprunté nulle part ; le pauvre enfant avait eu à peine le temps de lire. […] Ils éludèrent toujours la question, et je me résignai à la patience, persuadé que ces messieurs, préoccupés de graves intérêts politiques, n’avaient pas de temps à donner à la littérature.

551. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. Daru. Histoire de la république de Venise. — II. (Suite.) » pp. 434-453

C’est ce qu’il a fait, au moins en partie, m’assure-t-on, mais sans autoriser, je crois, d’ici à un long temps, la publication de ces récits. […] Picard nous a lu Monsieur Musard, ou Comme le temps passe !… C’est une pièce sur un défaut assez commun, mais qui n’est pas le vôtre, celui de ne rien faire, de remettre toujours au lendemain, de perdre son temps en niaiseries. […] Daru (25 novembre), il a fallu que je quittasse Vienne pour trouver le temps de vous écrire. […] L’un d’eux, homme de lettres peu connu aujourd’hui et même de son temps, mais d’un certain mérite et d’assez de goût, qui avait fourni à Picard plus d’un trait pour sa Petite Ville, M. de Larnac, du Languedoc, vieil ami de M. 

552. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Le baron de Besenval » pp. 492-510

Un magistrat, chef du parti français, proposa d’accorder par exception à Besenval un fauteuil dans le conseil des Deux Cents, dont il était membre depuis quelque temps. […] Venu dans un temps « où la fatuité était fort à la mode, où la société était uniquement tournée de ce côté, et où le rôle qu’on y jouait dépendait de s’y faire remarquer par des bonnes fortunes », il s’y adonna. […] Besenval, qui ne regrettait pas les atrocités des temps féodaux, ne paraît pas se douter qu’il nous retrace là des atrocités plus odieuses encore, et plus pernicieuses de symptômes sous leur élégance putride. […] [NdA] Cette personne était Mme de Blot qui devint l’amie de M. de Castries, et la rivale qu’elle eut quelque temps dans le caprice du comte de Frise était Mme de Clermont, la future maréchale de Beauvau. […] [1re éd.] du désordre ou de la dépravation du temps at.

553. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Le journal de Casaubon » pp. 385-404

Casaubon est un des savants les plus solides, les plus substantiels de son temps, un des derniers de cette grande race du xvie  siècle qui en compte de si prodigieux ; mais en même temps il n’a rien, pour l’emphatique et le farouche, de ces grands preux de pédanterie, comme on a pu appeler les Scaliger. […] Cela fait le tissu le plus singulier, et cette bigarrure, qu’il portait jusque dans ses autres écrits, lui a été reprochée dans le temps même : elle est faite pour nous étonner bien plus encore aujourd’hui· Elle n’a d’ailleurs d’effrayant que le premier aspect ; avec un peu d’habitude des langues anciennes, on en vient bientôt à bout, sauf quelques mots qu’on peut négliger. […] Car voilà que, dans le temps même où je me livre à ces pensées, je suis l’objet d’un nouveau don du Père très clément. […] Ce jour-là les études ont tort, ce jour-là et les jours suivants ; et pendant bien du temps encore, l’image de cette aimable et gentille petite créature viendra passer et repasser devant les yeux paternels, et se placer entre lui et son Athénée, qu’il a rouvert. — Que sera-ce quand il perdra par la suite une autre de ses filles, sa bien-aimée Philippe, âgée de dix-huit ans et demi ? […] Et certainement heureux sera le jour, heureuse sera l’année, heureux tout le temps que je vivrai pour toi et que je consacrerai à ta loi divine et à ton Écriture véritablement inspirée ; quoique cependant sans ton secours, ô Père céleste, sans une aide particulière venue d’en haut, cela même ne me réussisse pas.

554. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « CHRISTEL » pp. 515-533

Le comte Hervé n’avait pas vingt-cinq ans ; il était beau, bien fait ; il avait servi quelque temps dans les gardes d’honneur, puis dans les mousquetaires, je crois, en 1814. […] Des obstacles survenus dans leur situation l’avaient décidé, lui, à partir, à se confiner pour un temps dans cet exil fidèle. […] La mère n’insista pas, mais, à la chaleur du refus et à mille autres signes que son œil silencieux depuis quelque temps saisissait, elle avait compris. […] Depuis quelque temps, les lettres venaient plus rares ; une fois, deux fois, il s’était présenté sans en trouver. […] En peu de temps ils mirent ainsi bien du passé dans leur amour.

555. (1892) Boileau « Chapitre VI. La critique de Boileau (Fin). La querelle des anciens et des modernes » pp. 156-181

Et c’est en le prononçant qu’il s’acquit d’abord la confiance et le respect de quelques hommes, qui venaient précisément en ce temps-là réaliser la perfection dont il donnait la première formule. […] En ce temps-là avait paru l’Art poétique, direct et rude coup pour les contempteurs de l’antiquité. […] Il le trouve grossier, prolixe, n’ayant nul sens des bienséances, ignorant des sciences, dépourvu à l’occasion de sens commun : Homère avait du génie, mais qu’en pouvait-il faire en son temps ? […] Vraiment, ici, il se dément, et nous fait rétrograder au temps des Garasse et des Costar. […] On n’échappe jamais à son temps, et nos défenseurs des anciens étaient au fond « modernes » jusqu’à la moelle.

556. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Paul-Louis Courier. — I. » pp. 322-340

De tout temps nous lui verrons cette habitude d’indiscipline, et de partir volontiers sans congé. […] Je n’y ai pas pourtant perdu tout mon temps. […] Dès ce temps-là, il fallait regarder de bien près à la manière dont on s’y prenait avec Courier, de peur de le fâcher, même en le louant. […] … Contentons-nous, monsieur, de lire et d’admirer les anciens du bon temps. […] [NdA] Ces pages de Courier ont été, dans le temps, très bien appréciées par M. 

557. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Édelestand du Méril »

Je n’ignore pas, sans doute, qu’il y a eu l’art en sus, l’art qui s’est développé dans les derniers temps et qui, plus tard, a fait ces chefs-d’œuvre dont quelques-uns nous ont rendus si fiers. […] Mais quand il n’y en a plus, quand le temps les a émiettées et dispersées à tous les vents, est-ce bien la peine de se faire le peseur de toutes ces poussières et, une à une, de les ramasser ? […] Il sait que la science a le temps d’attendre son temps et qu’il vient toujours, pendant que les générations jouent à leurs fossettes ou califourchonnent leurs vélocipèdes. […] Et, de fait, quoi de plus piquant que de voir les sociétés et de juger l’homme à travers les deux ridicules qui font la comédie, — le ridicule éternel et le ridicule de chaque temps ? […] il l’est comme on l’était du temps de Scaliger et de Casaubon ; mais qu’il est bien plus qu’un savant !

558. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Deuxième partie — Chapitre IV. L’unification des sociétés »

Lavisse 189, est un être politique organisé, et il n’y aura pas d’États à proprement parler (de grands États au moins) qu’à la fin du moyen âge. — Une nation est une personne formée, consciente et responsable ; il n’y aura pas de véritable nation sur le continent avant notre temps. » Ainsi États et nations n’apparaissent que dans certains temps et dans certains pays ; et il est facile de voir que ce sont aussi les temps et les pays où l’idée de l’égalité s’est montrée. […] N’est-ce pas, au contraire, un signe des temps modernes que le progrès de la centralisation ? […] Le temps est passé où l’on pouvait dire avec Jefferson que le gouvernement fédéral n’était, pour les États-Unis que le département des affaires étrangères. […] D’un autre côté, des États très peu belliqueux, comme la Chine, ont pourtant abusé des réglementations uniformes ; et même dans les temps modernes, ce sont plus d’une fois des intérêts industriels qui ont demandé l’unification des sociétés. […] Il faut distinguer entre deux espèces de groupements : il peut se faire que la centralisation étouffe l’une dans le même temps qu’elle développe l’autre.

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