Succédant à la génération puissante et féconde des Lagrange, des Laplace, des Monge, venant aussitôt après en tête des générations qui comptèrent avec honneur dans leurs rangs les Poisson, les Malus, les Gay-Lussac, les Ampère, les Poinsot, les Cauchy, les Fresnel, les Arago, il embrassa par l’étendue et la curiosité de son esprit la totalité des connaissances et des découvertes de ses devanciers et de ses contemporains ; il prit une part active, incessante, à tous les travaux de la science de son temps par ses recherches, par ses perfectionnements, par ses applications et ses allées et venues fréquentes d’une branche à l’autre, par ses remarques diverses, multipliées, et ses additions successives, par ses exposés et ses traités généraux que distinguent la netteté et même l’élégance ; mais il inventa peu, moins qu’aucun de tous ceux que je viens de nommer, et dont quelques-uns n’étaient peut-être pas appréciés par lui à leur juste valeur. […] Au moment même où la science rendait les éminents services qu’il vient vivement de nous décrire, elle voyait la mort planer sur elle et frapper les plus nobles têtes : Lavoisier, Bailly, Condorcet. […] Les savants, après s’être livrés à l’analyse la plus minutieuse, pour laquelle on leur a laissé à peine le temps nécessaire, paraissent, — j’allais dire comparaissent, — Berthollet en tête, devant le Comité assemblé : ils déclarent dans leur Rapport « que les eaux-de-vie ne sont point empoisonnées ; qu’on y a seulement ajouté de l’eau dans laquelle se trouve de l’ardoise en suspension, en sorte qu’il suffit de les filtrer pour leur ôter toute propriété nuisible : « Robespierre, qui espérait une trahison, demande aux commissaires s’ils sont bien sûrs de ce qu’ils viennent d’avancer.
La première année de son mariage, elle n’avait lu que des romans, en effet, et de ceux qu’on ne lisait plus à cette date en France que dans les provinces, Tirant-le-Blanc en tête : Mme de Sévigné commença à l’en guérir ; Catherine dévora ses Lettres ; puis les œuvres de Voltaire lui tombèrent entre les mains, et dès lors elle mit plus de choix dans ses lectures, trop avide toutefois pour ne pas se jeter aux heures d’ennui sur tout ce qui était à sa portée, Brantôme et Péréfixe indifféremment, l’Histoire d’Allemagne du Père Barre et Platon, le Dictionnaire de Bayle quelle mit deux ans à lire (« Tous les six mois, dit-elle, je coulais à fond un tome »), que sais-je encore ? […] Elle ne ressemblait pas à Frédéric qui se passait de lecture allemande et ne lisait que des ouvrages français ; elle en lisait aussi en russe et trouvait à cette langue adoptive, qu’elle s’appliquait à parler et à prononcer en perfection, « bien de la richesse et des expressions fortes. » Les Annales de Tacite qu’elle lut en 1754 seulement, c’est-à-dire à l’âge de vingt-cinq ans, opérèrent, dans sa tête une singulière révolution, « à laquelle peut-être la disposition chagrine de mon esprit à cette époque, nous dit-elle, ne contribua pas peu : je commençais à voir plus de choses en noir, et à chercher des causes plus profondes et plus calquées sur les intérêts divers, dans les choses qui se présentaient à ma vue. » Elle était alors dans des épreuves et des crises de cœur et de politique d’où elle sortit haute et fière, avec l’âme d’un homme et le caractère d’un empereur déjà. […] Un jour, à un de ces bals, je la regardais danser un menuet : quand elle eut fini, elle vint à moi ; je pris la liberté de lui dire qu’il était fort heureux pour les femmes qu’elle ne fût pas homme, et que son portrait seul ainsi peint pourrait tourner la tête à plus d’une.
Étienne, dans sa jeune tête, avait peine à concilier tout cela : « Ce conflit, cet amalgame de choses et d’idées incohérentes fit naître dans l’esprit d’Étienne une foule de réflexions contraires, dont le résultat fut de le plonger dans une rêverie profonde. […] Ce rouge et ce cou blanc frappèrent tout à coup l’imagination d’Étienne, excitée déjà par les réflexions que la visite de David lui avait suggérées, et il lui sembla voir tomber la jolie tête de cette jeune femme. […] L’auditoire avait été choisi à souhait : outre les habitués, M. de Chateaubriand en tête, c’était M. le duc de Noailles, plus la vicomtesse de ce nom et sa fille la duchesse de Mouchy, c’est-à-dire la fille et la petite-fille de Mme de Noailles elle-même.
Ce beau volume, chef-d’œuvre de typographie, qui s’offre à nous encadré, illustré d’ornements en tête et à la fin des chapitres, parsemé d’images sur bois figurant les Évangélistes ou les scènes des Évangiles, a cela de remarquable qu’il a été composé et imprimé en très peu de temps ; on avait dit qu’on n’irait pas à l’Exposition de Londres, que l’Imprimerie Impériale n’y serait pas représentée cette fois. […] Pour lui, il répondait, par un coup de collier valeureux, de réparer les mois perdus et de faire acte de présence à Londres en y paraissant, et non des derniers, avec une production digne de l’établissement unique en Europe, à la tête duquel la confiance de l’Empereur venait de le placer. […] Sa taille est grande et bien formée, son air est doux et vénérable, ses cheveux sont d’une couleur qu’on ne saurait guère comparer : ils tombent par boucles jusqu’au-dessous des oreilles, d’où ils se répandent sur ses épaules avec beaucoup de grâce, et sont partagés sur le sommet de la tête à la manière des Nazaréens.
Il y a en tête, de ce manuscrit : Discours des choses de Lesbos ; de ce mot discours (λόγοι) lu de travers, on aurait fait Longus, qui a si peu l’air en effet d’un nom grec ; la faute une fois mise en circulation, et voilà un auteur célèbre de plus à l’adresse de la postérité11. […] Si l’on voulait se donner le spectacle de l’incertitude et de la fragilité du goût, même chez les plus savants hommes, et même en ces matières classiques, il suivrait de lire le jugement que porte le docte Huet de ce joli roman ; c’est dans sa Lettre à Segrais, en tête de ; il vient de parler de deux mauvais romans composés par des Grecs byzantins : « Je fais à peu près le même jugement, dit-il, des Pastorales du sophiste Longus ; car, encore que la plupart des savants des derniers siècles les aient louées pour leur élégance et leur agrément, joint à la simplicité convenable au sujet, néanmoins je n’y trouve rien de tout cela que la simplicité, qui va quelquefois jusqu’à la puérilité et à la niaiserie. […] le premier jugement avait couru et court encore ; c’est le seul qu’on ait réimprimé et qui se lise en tête de toutes les éditions de Bayle qui, dans son Dictionnaire, s’autorise, sans la contrôler, de l’opinion de Huet, ne songe qu’à renchérir, à son tour, sur l’article des mœurs ; non qu’il en prenne la défense et qu’il fasse le rigoriste, mais en érudit qui ne se trouve pas souvent à pareille fête, il badine à sa façon derrière du latin et du grec, il se gaudit des légèretés du roman en y cherchant le graveleux et sans y soupçonner la délicatesse.
Cervantes nous dit nettement et clairement ce qu’il a voulu ; son livre (il nous explique pourquoi dans la Préface) n’a pas besoin, pour paraître au jour, de tout l’appareil de sonnets laudatifs et de témoignages pompeux qui s’étalent en tête des écrits du temps ; il n’a besoin non plus, chemin faisant, d’aucun attirail d’érudition sacrée ou profane, et il peut se passer de ces notes et commentaires de toutes sortes qui encombrent d’ordinaire les marges ou qui chargent la fin des volumes, et qui produisent de si belles listes d’auteurs cités. […] faut-il fendre la tête pour découvrir ce que Pascal appelle la pensée de derrière ? […] Bouterwek avait commencé, et il attribuait à Cervantes une idée plus haute que celle d’avoir voulu décréditer les mauvais romans de chevalerie, bien qu’il lui reconnût aussi cette dernière intention, mais seulement comme occasionnelle et secondaire ; il la réduisait au point de la subordonner tout à fait à je ne sais quelle vue supérieure : « On ne saurait supposer, disait-il, que Cervantes ait eu l’absurde pensée de vouloir prouver l’influence fâcheuse des romans sur le public, par la folie d’un individu qui aurait pu tout aussi bien perdre la tête en lisant Platon ou Aristote.
La Savoie, qui était alors la tête de l’Italie, et une tête française, se sentait opprimée et contrainte ; la jeunesse des écoles, à Chambéry, s’exalta et prit feu. […] dût le chemin qui mène à ma patrie Être plus rude encore, et ma tête meurtrie Ne pas trouver de pierre où se poser le soir ; Dussé-je n’avoir pas une table où m’asseoir, Pas un seul cœur ému qui de moi se souvienne, Pas une main d’ami pour étreindre la mienne ; Comme le lépreux d’Aoste, au flanc de son rocher, Dussé-je cultiver des fleurs sans les toucher, N’avoir pour compagnon, dans ma triste vallée, Qu’un chien, et pour abri qu’une tour désolée, Et quand je souffre trop pendant les longues nuits, Qu’une sœur pour me plaindre et bercer mes ennuis, Une sœur qui, souffrant de la même souffrance, Prie et veille avec moi jusqu’à la délivrance…, Je veux aller revoir les lieux que je chéris, De mon bonheur au moins retrouver les débris ; Si ce ne sont les morts qui dorment sous la pierre J’embrasserai leurs fils, hélas !
Mélancolique et la tête penchée, était la jeune fille, avec sa douleur, et les larmes de ses yeux perlaient sur l’herbe de la prairie. […] Il a pour titre Élie Mariaker 62, sans nom d’auteur, avec une eau-forte en tête, une gravure de rêveur éploré, échevelé, accoudé sur un roc devant un paysage fantastique et nocturne. […] Quoique j’aie dit que je ne prétendais pas faire le moins du monde une Notice sur Boulay-Paty, je suis pourtant amené, par l’incomplet et l’insuffisance absolue de celle qui est en tête du Recueil posthume, à donner quelques indications précises et quelques dates.
Puis le silence se fait : d’autres générations succèdent, prennent la tête et s’emparent de la renommée dans le domaine de la poésie. […] La gravure qui est en tête et qui représente le poète mourant couché dans un lit à longs rideaux, entouré de ses amis vêtus encore à la mode de 1811, et lui-même, dans cette chambre à coucher d’un ameublement moderne, tenant à la main sa lyre, — une vraie lyre (barbiton) ; — la vignette du titre où une femme, une muse en costume d’Empire, apprend l’art de pincer du luth à un petit Amour à la Prudhon ; les bouts-rimés et les quatrains qui s’entremêlent dans le volume aux pièces sérieuses, tout cela retarde et montre que le nouveau goût qui va naître et qui signalera proprement l’ère de la Restauration n’en est encore qu’à de vagues et craintifs essais. […] Pourquoi me rapprocher de ces têtes chéries, Objet de tant d’amour et de tant de regrets ?
Sainte-Beuve est mort cependant, ignorant la cause de son mal, la soupçonnant peut-être, l’indiquant même par de certaines comparaisons et images réelles, basées sur ses sensations douloureuses, dont la médecine et la chirurgie (qui se croient plus positives) ne tiennent pas assez de compte dans la bouche d’un littérateur, et disant un jour : « Vous verrez qu’on ne saura ce que j’ai que lorsqu’on m’ouvrira… après moi… » — Que si la recherche de la vérité a besoin d’excuse, la catastrophe du 13 octobre dernier pourrait en être une suffisante : mais je renverrai ces délicats, qui me reprocheraient la crudité trop pathologique de ces détails, en tête du premier livre posthume d’un écrivain mort peut-être pour n’avoir pas été assez exa miné à fond, au tome V, page 523 de Port-Royal, où M. […] Sainte-Beuve disait à un ami en face de lui, dans une de ces conversations familières qui le prenaient parfois après une forte journée de travail : « Je ne me serais pas cru libre dans un journal qui porte un emblème en tête (il montrait le Journal officiel) ; il faut trop se ranger, quand on marche sous une bannière ; on a peur de marcher sur le pied de son voisin ; on se gêne ou l’on gêne ; on n’est plus là pour discuter, mais pour suivre ; on est enrôlé ; allez donc discuter les affaires de Rome, par exemple, comme on les sent, dans un journal qui épouse tant là légitimité que cela ; qui semble voué à la reine Marie-Antoinette ; oh il est sans cesse question d’elle ! […] Je suis un peu mauvaise tête, même avec mes amis… »
que de générations spontanées vont éclore de toutes parts et lever la tête sur cette eau dormante ! […] Il n’y résistera pas longtemps, et se relancera, tête baissée, dans ce monde qui tourbillonne autour de lui. […] Surtout ces pleurs avec délices En ruisseaux d’amour s’écoulaient, Chaque fois que sous des cilices Des fronts de seize ans se voilaient ; Chaque fois que des jeunes filles, Le jour de leurs vœux, sous les grilles S’en allaient aux yeux des parents, Et foulant leurs bouquets de fête, Livrant les cheveux de leur tête, Épanchaient leur âme à torrents.
Dans ces têtes ardentes, aisément crédules, aisément fanatiques, germèrent toutes les superstitions et tous les crimes dont la raison a gémi. […] Nous marcherons plus vite que nos ancêtres, parce qu’à la tête des hommes sans éducation il se trouve quelquefois des esprits remarquablement éclairés, parce que le siècle où nous vivons, la découverte de l’imprimerie, les lumières du reste de l’Europe doivent hâter les progrès de la classe nouvellement admise à la direction des affaires politiques ; mais l’on ne saurait prévoir encore par quel moyen la guerre des anciens possesseurs et des nouveaux conquérants sera terminée. […] Les dogmes spirituels exerçaient les hommes à la conception des pensées abstraites ; et la longue contention d’esprit qu’exigeait l’enchaînement des subtiles conséquences de la théologie, rendait la tête propre à l’étude des sciences exactes.