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443. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Gustave Rousselot  »

C’est par l’enthousiasme qu’il est vengé de la déraison de ses croyances et de la fausseté des systèmes dont il a fait sa poésie. […] Mais à ces incorrections, qui sont des défaillances et qui ne sont pas sans remède, il s’en ajoute d’autres plus coupables, qui viennent de perversion intellectuelle, de volonté et de système.

444. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Introduction »

Notre métaphysique construite, non seulement nous déclarons que les exigences de l’esprit ou celles de la nature sont par-dessus tout respectables ; mais nous l’expliquons, par la place que nous assignons à la nature ou à l’esprit dans notre système du monde. […] Les jugements de la conscience, même lorsqu’un système les formule en propositions plus ou moins générales et les enchaîne logiquement, n’impliquent pas le même rapport du sujet à l’objet que les jugements de la science.

445. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLVIIIe Entretien. Montesquieu »

Possesseur d’une belle fortune, il pouvait le faire honorablement sans avoir l’intention de jeter son argent par la portière de sa voiture : il alla d’abord à Vienne où il rencontra le prince Eugène, ce Coriolan, qui n’avait pas épargné sa patrie ; de là il passa en Hongrie et ensuite en Italie ; il connut à Venise l’Écossais Law, tout meurtri des ricochets de son système, bombe éclatée entre ses mains, mais qui n’était pas un financier vulgaire ; il s’y entretint aussi avec le comte de Bonneval, aventurier destiné à mourir pacha. […] C’est un homme qui lit beaucoup, mais sans attention et sans critique ; qui prend pour vérité un mensonge pittoresque du premier voyageur venu, et qui, de ce seul fait mal compris, mal interprété, souvent absurde, conclut ingénieusement tout un système politique ou législatif en opposition avec le bon sens. […] « Mais quel était ce système de tyrannie produit par des gens qui n’avaient obtenu le pouvoir politique et militaire que par la connaissance des affaires civiles, et qui, dans les circonstances de ce temps-là, avaient besoin, au dedans, de la lâcheté des citoyens pour qu’ils se laissassent gouverner, et de leur courage, au dehors, pour les défendre ? […] Il ne se soutenait que par la dépouille du monde conquis et rançonné ; quand ces rançons et ces dépouilles, qui s’élevaient à trois cents millions dans ses caves, furent dépensées, il tomba, et, quand ses États, changeant de système après sa chute, eurent recours à l’emprunt, ils payèrent facilement la rançon de la France et la France fut sauvée et riche. Maintenant, il faut le reconnaître, l’État a adopté le système de l’emprunt et la France regorge d’opulence.

446. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « Introduction »

Ils pourront même se perdre en systèmes bizarres sur les nombres, comme les pythagoriciens et Platon. […] i Il serait aisé de continuer cette épreuve sur diverses autres sciences, de montrer que la biologie, par exemple, ne s’inquiète que des manifestations de la vie ; mais qu’elle écarte résolument toutes les théories sur sa nature ou son origine, qu’elle les place en dehors de la connaissance scientifique, que le vitalisme, l’animisme, l’organisme, etc., ne sont pour elle que des systèmes ingénieux qui s’entrevalent parce que rien ne les vérifie. […] Et cependant il n’y a pas lieu de s’étonner ; il y en a des raisons très claires, d’abord parce que le génie qu’on dépensait à résoudre l’insoluble et à chercher l’introuvable s’économise au profit des recherches purement scientifiques ; ensuite parce que le but de la science est changé, et que l’on subordonne les théories aux faits et non plus les faits aux théories : les systèmes passent, les expériences demeurent. […] Ils sont si nombreux, qu’il ne s’est encore trouvé personne pour les classer, les réduire et les ordonner en système. […] Système de logique, liv.

447. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre XII : Distribution géographique (suite) »

— De ce que les lacs et les systèmes de rivières sont séparés les uns des autres par des barrières terrestres, on croirait pouvoir conclure que les productions d’eau douce ne sauraient se répandre aisément, même dans les limites des contrées où elles vivent, et comme la mer semble être pour elles une barrière encore plus infranchissable, qu’elles ne peuvent non plus s’étendre jusqu’en des contrées éloignées. […] Mais, sur le même continent, les espèces s’étendent souvent beaucoup et presque capricieusement ; car deux systèmes de rivières auront parfois quelques espèces en commun et quelques autres très différentes. […] Mais j’incline à attribuer principalement la dispersion des poissons d’eau douce à de légers changements survenus dans le niveau des terres, depuis une époque plus ou moins récente, et qui auront changé le système des rivières, en faisant communiquer ensemble des cours d’eau jusque-là séparés. […] Mais je crois qu’il faut attribuer principalement la grande extension des plantes d’eau douce et des animaux lacustres ou fluviatiles inférieurs, soit que les espèces demeurent identiques ou qu’elles se modifient plus ou moins, à la dispersion de leurs graines ou de leurs œufs par des animaux et surtout par des oiseaux aquatiques, doués d’une grande puissance de vol, et qui naturellement voyagent sans cesse d’un système de cours d’eau à un autre souvent même très éloigné. […] Cependant une sorte de concurrence universelle devait avoir lieu, tendant à fixer les lois générales de la vie à la surface de notre planète, selon les conditions partout uniformes qu’elle présentait alors ; et ces caractères généraux, acquis dès lors, seraient ceux-là mêmes qu’on observe encore aujourd’hui dans le règne organique tout entier, caractères peut-être contingents, en ce sens qu’ils sont exclusivement adaptés aux conditions de la vie terrestre, et que nous ne pouvons conséquemment étendre, que par une hypothèse toute gratuite, aux autres planètes du système solaire ou aux autres astres du ciel.

448. (1904) Propos littéraires. Deuxième série

Il y a du romanesque aussi dans son système psychologique. Ce système est très flatteur pour nous. […] Le système reste pour moi plus spécieux que juste. […] Elle n’est pas de force à embrasser en leur entier et à suivre jusqu’à leur terme les systèmes qui se sont produits avant elle. […] Et, peu à peu, ses idées sur la littérature dramatique se formaient dans son esprit et y devenaient un système.

449. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Note préliminaire » pp. 5-6

Le temps des systèmes est passé, même en littérature.

450. (1925) Promenades philosophiques. Troisième série

Le système nerveux ne peut en retenir qu’une très petite partie et tout est toujours à recommencer. […] Cela nous donnera quatre systèmes, probablement aussi chimériques les uns que les autres. […] Avec ce système, chacun vit très mal, très petitement, mais chacun vit. […] Il est absurde et ne saurait convenir qu’aux systèmes nerveux affaiblis, aux débiles. […] Voir, sur Porta et son système, le premier chapitre du présent tome.

451. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre quatrième. Éléments sensitifs et appétitifs des opérations intellectuelles — Chapitre deuxième. Les opérations intellectuelles. — Leur rapport à l’appétition et à la motion. »

Si les idées en lutte se contrarient de manière à se contrebalancer mutuellement, il y aura doute et suspension de jugement ; s’il y a un excès en faveur d’une idée ou d’un système d’idées, la réaction intellectuelle aura lieu de ce côté, et la réaction volontaire suivra, du moins à son début, sauf à être arrêtée en chemin par quelque intérêt venant à la traverse. […] Enfin, la portée pratique se ramenant à un système d’actions et de mouvements, on peut dire de nouveau que c’est le rapport au mouvement, la force plus ou moins intensive et effective, qui fait le caractère plus ou moins objectif d’un état de conscience, la vivante vérité d’un jugement. […] De là la conclusion du système nominaliste, qui réduit les idées générales, en ce qu’elles ont de distinct des images, d’abstrait et de vraiment générique, à de simples signes. […] Le système logique de l’induction peut donc se résumer ainsi : Premier terme de l’induction : Faits positifs. […] Les hommes, toutes choses égales d’ailleurs, continueront de mourir : Ce système logique est analogue au système mécanique suivant qui se réalise dans le cerveau : Premier terme : Forces se dirigeant en un sens ; Deuxième terme : Absence de forces capables de détourner vers un autre sens ; Troisième terme : Mouvement du cerveau continué dans de même sens.

452. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXXIIIe entretien. Considérations sur un chef-d’œuvre, ou Le danger du génie. Les Misérables, par Victor Hugo (1re partie) » pp. 305-364

J’écrivis à Hugo pour lui dire « que je l’avais lu, que j’étais tour à tour ravi du talent, blessé du système ; que la critique radicale de la société, chose sacrée parce qu’elle est nécessaire, chose imparfaite parce qu’elle est humaine, m’était antipathique ; que, si j’écrivais sur son livre, je respecterais avant tout l’homme, l’amitié, le suprême talent, le génie, cette épopée du talent ; mais qu’en confessant mon admiration pour le talent, il me serait impossible de ne pas combattre à armes cordiales le système ; et qu’en combattant le système, je froisserais peut-être involontairement l’homme et l’œuvre ; que par conséquent j’attendrais sa réponse avant d’écrire une ligne de l’admiration et de la réprobation qui bouillonnaient en moi ; et que, s’il craignait que la condamnation des idées du livre ne blessât le moins du monde en lui l’homme et l’ami, je n’écrirais rien, car, même pour défendre la société, il ne faut jamais, comme un vil séide, enfoncer même une épingle au cœur d’un ami, et qu’il me répondît donc, s’il le jugeait à propos ; que, s’il ne me répondait pas, j’interpréterais son silence, et je n’écrirais rien ». […] « Votre vieil ami, « Victor Hugo. » Cette belle lettre, aussi cordiale que confiante en soi-même et dans mon amitié, étant reçue, j’écrivis, sans crainte de blesser l’homme en combattant le système, ce qui suit, mais sans crainte aussi de démontrer ce que je crois la vérité sociale suprême à tous les hommes et même à tous les génies.

453. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XIV. La littérature et la science » pp. 336-362

La philosophie, si expérimentale, si scientifique qu’elle puisse être un jour, fie sera jamais dispensée de mettre toute la lumière et toute l’harmonie possibles dans l’exposé des systèmes de plus en plus vastes auxquels elle aboutit ; l’histoire si érudite, si prudente qu’elle veuille être, n’échappe pas à la nécessité d’être une résurrection et par là même une œuvre de vie, une œuvre d’art. […] Et en même temps qu’on s’efforçait de mettre hors de conteste les faits, matière primordiale de toute histoire, on s’attachait à les grouper, à les coordonner, aies subordonner, à les réunir en systèmes. […] La science devient encore et surtout poétique, parce qu’elle transforme et renouvelle en nous la conception du monde, parce qu’elle fait naître une philosophie plus complexe et plus large que les vieux systèmes désormais dépassés. « La poésie, écrivait Lamartine123, sera de la raison chantée. […] Or comment ne pas remarquer les rapports du système philosophique de Descartes avec la géométrie ?

454. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Sully, ses Économies royales ou Mémoires. — I. » pp. 134-154

Ainsi en advint-il pour Sully : on avait fait de Colbert le représentant d’un système, on fit de Sully le représentant du système contraire. […] Évitons cette autre forme de l’erreur et de l’esprit de système qui se déguise sous la prétention à la finesse.

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