La pensée ravage toujours la figure : il est vrai que la vie y suffit très bien. […] Comme nous n’écrivons plus sur un parchemin, mais bien sur du fugitif papier, de L’encre à la noirceur temporaire nous suffit très bien. […] Si elles sont très intéressantes, je ne les ai pas feuilletées assez longtemps pour m’en rendre bien compte, mais elles sont des lettres de Verlaine et cela suffit. […] Et cela suffit pour nous donner l’illusion de la volonté libre. […] On croyait fermement, dans le reste de la France, que le Limousin était un pays de rustres, quasi de sauvages, et ce nom seul suffisait à faire rire.
Il suffit de citer la puissante autorité de Robert Brown qui, parlant de l’un des organes des Protéacées, dit que son importance générique est, « comme celle de tous les autres organes, très inégale, et en quelques cas elle semble s’effacer entièrement, comme il arrive, je crois, non pas seulement chez cette famille naturelle, mais chez presque toutes. » Dans un autre ouvrage, il dit encore que les divers genres des Connaracées « diffèrent les uns des autres en ce qu’ils ont un seul ou plusieurs ovaires, par la présence ou l’absence d’albumen, et par leur préfloraison imbriquée ou valvulaire ; chacun de ces caractères, pris isolément, est fréquemment d’une importance plus que générique, bien que tous ensemble ils soient à peine suffisants pour séparer les Cnestis des Connarus. » Parmi les insectes, les antennes, ainsi que l’a remarqué Westwood, ont une grande constance de structure chez toute une des principales divisions des Hyménoptères ; mais dans une autre division elles diffèrent extrêmement, et leurs différences sont d’une valeur tout à fait subordonnée en classification ; cependant nul n’oserait dire que chez ces deux groupes du même ordre les antennes soient d’une importance physiologique plus ou moins grande. […] Car il suffit d’admettre qu’un grand nombre de formes anciennes qui rattachaient les premiers progéniteurs de la classe des oiseaux aux premiers progéniteurs des autres vertébrés, se soient complétement éteintes. […] De même, à l’égard de la bouche des insectes, nous n’avons qu’à supposer que leur commun progéniteur avait une lèvre supérieure, des mandibules et deux paires de mâchoires, chacun de ces organes étant probablement d’une forme très simple ; la sélection naturelle suffit ensuite à rendre compte de la diversité infinie de structure et de fonctions qu’on observe dans la bouche des représentants de cette classe. […] Owen a remarqué que chez les Céphalopodes « il n’y a aucune métamorphose, et les caractères de la classe se manifestent longtemps avant que les organes de l’embryon soient complets. » De même, selon lui, chez les Araignées, « on ne trouve rien qui vaille le nom de métamorphose. » Que les larves des insectes soient adaptées aux habitudes les plus diverses et les plus actives, ou qu’elles soient dans une complète inactivité, nourries par leurs parents ou placées au milieu de la provision d’aliments qui doit leur suffire, il est à remarquer que presque toutes passent par une phase de développement vermiforme. […] Une fois ces deux principes admis comme suffisamment prouvés, ils suffiront, je crois, à expliquer tous les faits principaux de l’embryologie dont j’ai parlé précédemment.
Certes, dans son œuvre, tous les poètes du siècle dernier se retrouvent un peu : ce peu ne suffira jamais à excuser cet aphorisme : « Hugo fut toute la poésie et toute la pensée du xixe siècle. » Il est de ceux que j’admire sans les aimer : j’admire moins et je hais Baudelaire (que je puis relire) ; j’aime et admire Sagesse, la Bonne Chanson, Jadis et Naguère, le noble et délicieux artiste qui cisela Hérodiade, mais Mallarmé, Verlaine sont « poètes d’aujourd’hui ». […] Et nous hésiterions entre les figures vénérables de Vigny et Stéphane Mallarmé, si le profond, multiforme et magnifique Baudelaire en qui précisément tout son siècle se résume et qui ouvre un siècle nouveau (car tous ceux qui sont venus après lui et ceux qui viennent encore, datent de lui et « l’ont dans le sang »), si Baudelaire ne suffisait à combler notre esprit, notre cœur et nos sens. […] Des goûts comme des couleurs on ne discute pas… Et puis ce serait trop long à expliquer ; vingt-cinq lignes n’y suffiraient pas. […] Mais comme rêveur il est incomparable et cela suffit. […] Mais peut-être me suffirait-il de lire quelques pages d’un autre poète, Leconte de Lisle par exemple, pour changer d’avis.
Il suffit de s’apercevoir du moment où elle arrive. […] Il ne faut pas être misanthrope ; il suffit d’être honnête homme pour n’en rien faire. […] Il en a l’air, et cela suffit. Cela suffît pour que l’on craigne que le public ne remporte une impression mauvaise, mêlée au moins. […] Non pas, répond Rousseau, l’instruction est inutile, l’éducation suffit.
Ces deux lignes devraient suffire quand il s’agit d’un écrivain comme celui-là, car il faut toujours attendre de lui quelque œuvre exquise. […] Il a suffi de l’ouvrir pour voir qu’il n’en était rien. […] Des journées d’indolence, de lectures vagues lui suffisent à présent. […] Le lexique de La Bruyère lui suffisait. […] L’agitation causée, la veille, par l’élection du chocolatier Devinck ne suffisait pas à m’expliquer ce déploiement de forces.
Il suffisait d’une étincelle pour mettre le feu : l’incident de la séance de vendredi 26 est venu faire l’explosion.
La dernière lettre de Camille Desmoulins écrite à sa femme, avant de marcher à la mort, est un mémorable et touchant exemple de cette exaltation qui ne devait s’éteindre qu’avec la vie : mais ici il n’y a rien qui doive étonner ; pour une telle affection, dans un tel moment, nulle expression ne suffit ; l’énergie de l’amour est incalculable, et, comme dit Bacon, c’est la seule passion qui ne fasse pas mentir l’hyperbole.
Ainsi rien de plus étranger en apparence sous le rapport historique que l’homme de l’empire et les Hellènes ; et si le côté moral ou poétique semble plus fécond, il faut convenir que, sans l’appui de quelques faits, des pensées brillantes, mais nécessairement un peu vagues, ne suffiraient pas à un livre.
Ils annoncent que l’auteur s’est depuis longtemps nourri de la pensée ou du sentiment exprimé, qu’il se les est tellement appropriés et rendus habituels, que les expressions les plus communes lui suffisent pour exprimer des idées devenues vulgaires en lui par une longue conception. » En effet, de ce que l’homme emploie les mots de tous les jours, on en conclut qu’il exprime ses pensées de tous les jours.
Si grossières et pauvres que soient les formes où se réalise actuellement cette conception morale, il suffit qu’elle existe pour en faire émaner une lueur de noblesse et de beauté.
Ceux qui sentent la beauté n’ont pas besoin qu’on la leur explique ; il suffit qu’ils la regardent.
C’est à cette méditation qu’il suffirait presque de recourir pour retrouver la philosophie de M.