Et lorsque le soir, au cercle, se laissant aller sur un fauteuil dans une attitude harassée, il s’étire les bras en soupirant : « Mon Dieu ! […] madame, comment pouvez-vous admirer les Romans de galanterie d’un homme qui porte de la flanelle et quitte, chaque soir, ses dents en même temps que son pantalon !
Dans le matérialisme qui s’alourdit tous les jours sur nos têtes, dans ce réalisme, bêtise et boue, qui nous monte d’en bas et peut ensevelir du soir au matin une littérature, les poètes de la forme auront le sort des poètes de l’idée, parce que la forme, le travail de la forme, quand il est exquis ou puissant, est une spiritualisation de la matière. […] La délicatesse dans l’expression dont nous avons parlé plus haut, cet enfantillage sans naïveté, mais d’une mignardise assez suave, qui a enluminé cette jolie vignette, par exemple : La Nuit de Printemps : C’était la veille de Mai, Un soir souriant de fête… ne sont pas des qualités assez fortes pour sauver de l’oubli ce qui s’évapore le plus vite de la mémoire des hommes, — des sons et des mots !
Préville jouait, ce soir-là, au bénéfice des pauvres ; il jouait dans deux pièces : La Femme invisible et Le Bourgeois gentilhomme. […] Un soir Mademoiselle Gaussin expire entre les bras de Paulin, la salle est en larmes, l’amante est en pâmoison, l’amant la rappelle en sanglotant : — Ah ! […] On fait le même métier, on apprend ses rôles dans le tête-à-tête de chaque soir, on les répète dans le déshabillé du malin, à toutes les heures du jour ! […] La question est, qu’une fois comédienne et quand elle a bien montré, chaque soir, sous son jour le plus favorable, sa beauté et ses vingt ans, rien que vingt ans ! […] C’était donc tout comme si nous nous étions amusés, ce soir-là, à voir un enfant battre à grands coups de pied son bisaïeul !
Et, le soir, quel soir, après cette journée, la première journée victorieuse ! […] Truffaut, vers le soir de son âge, quitte le bureau de bienfaisance. […] Le jour du départ, il sanglota jusqu’au soir. […] … Chaque soir vous l’a doucement annoncée. […] Un soir, elle lui a bordé son lit ; le lendemain, quand il se réveille, elle est partie.
Fontainas : l’eau calme, grave et tiède d’une anse où, parmi les roseaux, les nénuphars et les joncs, le fleuve, dans la sérénité du soir, se repose et s’endort.
Elle, le caporal, Nâna et trois autres vieilles ayant passé l’âge d’avoir des enfants sont partis vers 6 heures du soir au moment où la nuit tombe.
I J’étais hier9 vers cinq heures du soir sur le quai qui longe l’Arsenal, et je regardais en face de moi, de l’autre côté de la Seine, le ciel rougi par le soleil couchant. […] Une demi-heure après, tout s’éteignait ; il ne restait plus qu’un pan de ciel clair derrière le Panthéon ; des fumées roussâtres tournoyaient dans la pourpre mourante du soir et fondaient les unes dans les autres leur couleur vague. […] Ce soir-là, il se couche à onze heures, après avoir nettoyé ses effets pour la manœuvre du lendemain. […] De retour, il est fatigué et pourtant ne peut manger, nettoie ses effets ; le soir, il ne sent aucune envie de dormir, et ne se couche qu’à une heure du matin. […] « Ces apparitions nocturnes que, le jour, je nommais de sottes illusions, le soir redevenaient pour moi d’effrayantes réalités. » 242.
C’était dans les dernières années de sa courte vie ; elle resplendissait encore des reflets de son soleil couchant, comme une tête de Vénus grecque effleurée, dans un musée, par un dernier rayon du soir. […] Les sons de la musette de Calabre, sur laquelle les pfifferari préludent dans le lointain aux danses du soir, grondent en approchant de la plaine. […] XVIII C’est l’été ; le ciel est pur ; on ne le voit qu’à sa clarté ; il revêt tout de sa lumière, dans laquelle il se noie et se confond lui-même ; l’air, on ne le voit pas non plus, mais on le sent : il est chaud, mais déjà trempé de ces premières moiteurs d’un beau soir qui se mêlent, sur le front, avec la sueur de la journée de l’homme, pour la rafraîchir et pour l’embaumer ; on distingue l’heure, non seulement aux lourdes ombres qui s’allongent derrière les roues du char et derrière les épaules des jeunes filles, mais on la discerne plus visiblement encore aux deux ou trois légers nuages qui flottent très loin dans le ciel et qui se teignent, seulement par le haut, des lueurs répercutées du soleil. […] Les présages sont douteux ; la saison même n’est pas propice, l’heure ne l’est pas davantage ; on reconnaît le soir aux grandes ombres qui traînent sur la terre et aux reflets pâles d’un soleil couchant sur le sommet des édifices. […] Peut-être une rumeur publique, venue de Florence et mentionnée par hasard dans une conversation devant lui, un soir à Venise, lui apporta-t-elle la fatale révélation.
Voilà que ce soir-là, tandis que nous attendions la sortie des souverains de leurs appartements, il s’approche de moi, puis, me prenant par la main, il me conduit dans un coin du salon. […] Le soir du mercredi, quelques-uns d’entre nous apprirent que ce jour-là même, on avait demandé, par ordre de l’Empereur, aux cardinaux Opizzoni et aux autres des treize promus à l’épiscopat, la démission de leurs évêchés. […] Il était onze heures du soir quand nous nous séparâmes du ministre. […] Nous savions que le ministre de la police devait voir Sa Majesté avant celui des cultes, qu’il lui aurait raconté notre entrevue du soir, et que, afin d’être agréable, il lui annoncerait que notre lettre serait rédigée d’après leurs inspirations. […] Le soir arrivé, nous reçûmes tous un billet du ministre nous annonçant que le ministre de la police, parti pour Saint-Cloud avant lui, venait de lui communiquer à son retour que l’Empereur avait avancé son départ, qu’en conséquence l’audience n’avait pas eu lieu.
Théophile Gautier, un soir qu’il rêve à son existence passée, se représente visitant « le Château du Souvenir131 », un vieux manoir perdu dans les broussailles, rongé par le temps et les orages, meublé de vieilles tapisseries et de portraits effacés, peuplé d’ombres grises et roses qui disparaissent avec le soleil levant. […] Ils étaient condamnés à représenter les pourpres du soir, les nuances délicates du matin, la verdure naissante des bois, la moire changeante des lacs avec une palette sur laquelle il n’y avait guère que du gris. […] Et la description reprend : « Ce soir, au bord de l’eau, la crécelle lointaine des rainettes ; par instants, le cri guttural du tire-arache dans les roseaux ; un poisson qui saute ; des arbres qui font dans le ciel une ombre mouillée comme dans l’eau, et dans toute cette nature la paix de la nuit, de la mort. […] Ce sera, si vous voulez, la duchesse de Broglie, qui passe des journées à la Chambre des députés et chaque soir jette sur le papier des notes sur les hommes et les choses qu’elle a vus, en citant bravement du latin au risque de l’écorcher. […] Un soir, les gens qui habitaient dans le voisinage du Bois de Boulogne furent effrayés de voir au milieu des massifs briller une grande flamme.
Après son départ d’Abdère, Mégacréon exhorta ses concitoyens à monter au temple et à remercier les dieux de ce que le Grand Roi n’avait point coutume de se mettre à table deux fois en un jour ; car ils auraient été à jamais ruinés, s’il leur avait fallu lui donner, le matin, un festin pareil à celui du soir. […] Un repas frugal fut distribué aux soldats, viatique suffisant pour le dernier jour. « Nous souperons ce soir chez Pluton », avait dit Léonidas à ses compagnons. […] L’oracle de Bacis fut accompli à la lettre : « Les femmes de Colias feront rôtir avec des rames. » Le soir, cette Armada de l’Asie n’était plus qu’une nuée crevée par la foudre, qui s’écroulait à l’horizon. […] Pausanias tira de ce camp efféminé une morale Spartiate : étant entré dans le pavillon de Mardonios, il ordonna aux cuisiniers perses de lui préparer le festin qu’ils servaient, le soir, à leur maître. […] Le Platéen Euchidas se dévoua à cette mission sainte : il partit du camp le matin et revint le soir ; ayant franchi mille stades d’un vol d’aigle.
Mais sa grande inspiration ne soufflait pas encore en lui quand il écrivait ces sonnets et ces œuvres en prose ; elle ne souffla que dans l’exil, quand les événements, la guerre, la diplomatie, la politique et les passions civiles eurent fait silence, le soir, dans son âme. […] C’était le soir ; le soleil, roulant autour de son disque rouge quelques brumes sanglantes comme les vapeurs de pourpre de ces champs de bataille évaporées dans ses rayons, se précipitait dans la mer étincelante. […] Le matin, c’était un diplomate habile et consommé, traitant avec une autorité polie les intérêts de la France à Rome ; le soir, c’était un érudit presque monastique, élucidant avec des religieux et des bibliothécaires le texte d’un vers du Dante ou le sens d’une allusion obscure de ce poète aux hommes et aux événements de son temps. […] Ses dogmes ruisselaient d’onction, comme les soleils d’Orient ruissellent le matin et le soir de rosée. […] Entre le matin et le soir vous m’avez conduit à ma fin.