Oui, qu’il étudie la littérature anglaise, la civilisation italienne, quelques écrivains français contemporains, la société parisienne ou la révolution, son souci constant est d’appliquer et de vérifier une certaine méthode. […] Après avoir satisfait les esprits les plus novateurs, après avoir été celui de qui s’autorisaient les contempteurs de la vieille morale, de la vieille religion, de la vieille société, après avoir passé pour un « révolutionnaire », M.
Pour que les hommes déjà entrés dans la société pussent se communiquer les mœurs, droits et gouvernements dont nous venons de parler, il se forma trois sortes de langues et de caractères. […] Cette nature fut celle des poètes-théologiens, les plus anciens sages du paganisme, car toutes les sociétés païennes eurent chacune pour base sa croyance en ses dieux particuliers.
Ces petits récits, amusettes d’enfants, contiennent en abrégé la société du dix-septième siècle, la société française, la société humaine. […] Il doit « complaire à son maître », chasser les gens mal vêtus, les mendiants, tout ce qui n’est point digne d’être reçu dans la société choisie. […] L’homme disparaît, la machine reste ; chacun prend les défauts de son état, et de ces travers combines naît la société humaine. […] Le loup est procureur du roi, appelle l’âne « pelé, galeux », demande la tête du coupable, et veut sauver la société. […] Je n’ai eu besoin que de réunir des traits épars pour reformer une société tout entière.
Mais la société n’en est pas là, et, dans la discussion présente, lorsqu’en prenant le parti sévère, on se tient simplement à la morale du monde, à ce qu’on appelle être honnête homme, à la morale qui admet la comédie et la tragédie, Tartufe et Phèdre, et la ceinture de Vénus et les jardins d’Armide, oh ! […] Or, depuis qu’il y a des sociétés civilisées, des littératures polies, ces littératures, soit sur le théâtre, soit dans les poésies lyriques, soit dans les autres genres d’imagination, ont vécu sur des exceptions pathétiques, passionnées, criminelles souvent, sur des amours, des séductions, des faiblesses, et les œuvres qu’on admire le plus parmi les hommes sont celles qui ont triomphé dans la forme et l’expression, dans un certain charme qui y respire, dans une certaine moralité qui résulte autant de la beauté de la production que de la conclusion expresse, ou qui même est quelquefois en sens contraire de cette conclusion littérale qu’on y pourrait voir. […] les susceptibilités moralistes d’outre-mer, les ménages vertueux, mais étroits, de toutes les provinces, ou encore la majorité d’une Chambre des députés (je demande pardon à tout ce que cette majorité renferme de membres individuellement spirituels) : le jour où il y aura une telle littérature, claire, évidente, bien déduite, bien moralisante, n’offrant incontestablement que d’honnêtes tableaux, ce jour-là la société aura gagné beaucoup en tout autre point que le goût.
Tout porte l’esprit aux idées générales plutôt qu’aux observations particulières ; mais lorsque les sociétés brillantes de la cour et de la ville ont un grand crédit politique, le besoin de les observer pour y réussir développe un grand nombre de pensées fines ; et si, d’un côté, il y a moins de philosophie pratique dans un tel pays, de l’autre, les esprits sont nécessairement plus capables de pénétration et de sagacité. […] Hobbes, Ferguson, Locke, etc., avec des systèmes différents, recherchent quel fut l’état primitif des sociétés, afin d’arriver à connaître quelles sont les lois qu’il faut instituer pour les hommes. […] Nos écrivains français ayant toujours présent à leur pensée le tribunal de la société, cherchent à obtenir le suffrage de lecteurs qui se fatiguent aisément ; ils veulent attacher le charme des sentiments à l’analyse des idées, et faire ainsi marcher simultanément un plus grand nombre de vérités.
L’idée du droit s’est dissociée en deux idées secondaires : l’une, l’idée ancienne, celle du droit social, consigné dans les codes, garanti par la contrainte légale ; et l’autre, l’idée nouvelle, celle du droit individuel, du droit considéré comme un fait de conscience, une idée, une force intérieure qui pousse l’individu à soutenir certaines prétentions, à revendiquer certains avantages comme lui étant dus soit par ses semblables pris isolément, soit par l’ensemble de la société. […] Il s’agit toujours dans ces problèmes, de savoir où cesse le droit de l’individu et où commence celui de la société ou inversement. […] En raison de quoi, Papinien proclame qu’il vaut mieux juger faussement que de ne point juger du tout ; car les hommes sans justice sont autant que bêtes en forêts, tandis que par justice se manifeste leur noblesse et dignité96. » L’individu n’est rien ; il doit être trop heureux d’être sacrifié à la société et de jouer le rôle du guillotiné par persuasion.
Dans nos sociétés établies sur une idée très rigoureuse de la propriété, la position du pauvre est horrible ; il n’a pas à la lettre sa place au soleil. […] La communauté des biens fut quelque temps de règle dans la société nouvelle 494. […] En dégageant l’homme de ce qu’il appelait « les sollicitudes de ce monde », Jésus put aller à l’excès et porter atteinte aux conditions essentielles de la société humaine ; mais il fonda ce haut spiritualisme qui pendant des siècles a rempli les âmes de joie à travers cette vallée de larmes.
* * * Un curieux fait dans l’histoire de l’humanité que ce grand acte de dévouement accompli dans une société féodale par toute une famille de vassaux, et que, depuis deux siècles, le Japon célèbre par le théâtre, le roman55, l’image. […] Mais ouvertement il se présenta comme artiste, se fit appeler Shiyó dans la société de poésie, et fut ami de Kikakou, célèbre poète de ce temps. Il fut admis également à la société de thé de Tchanoyu et fut élève de Yamada Sôhen, célèbre maître de thé, qui connaissait Kira (Kotsuké) assez intimement.
On y trouve un écrivain dont les grands talens doivent faire oublier ses Lettres du chevalier d’Her… ses comédies peu théâtrales, son Apologie des tourbillons de Descartes & les Essais informes qu’il a faits dans les genres de Lucien & de Théocrite ; plus heureux dans ceux de Quinault & de Bacon, & surtout dans la géométrie ; faisant aimer les sciences les plus abstraites ; réunissant la subtilité du raisonnement à un stile qui lui est particulier & qui a fait beaucoup de mauvais imitateurs ; ayant plus d’esprit que de génie, & plus de délicatesse que d’invention ; placé sous deux règnes pour mériter l’estime de deux siècles, & par la variété de ses connoissances, & par la singularité de son ame toujours paisible, modérée, égale, inaccessible aux mouvemens inquiets ou violens, qui rendent les autres hommes malheureux ; fait, en un mot, pour les agrémens & les délices de la société, mais non pour être l’exemple des belles ames, des cœurs sensibles & reconnoissans. […] Il faut louer la douceur, l’enjouement, la franchise qu’il apportoit dans la société. […] Il en débitoit en ville de contraires, & dogmatisoit dans ses sociétés.
Une société de précieuses établie à Paris, y avoit mis en mode un jargon ridicule analogue à leur caractère, une façon romanesque de s’exprimer, une affeterie continuelle, un ton hors de nature, & qu’elles appelloient celui de la bonne compagnie. […] Dictionnaire qu’il s’est attribué, & qui est l’ouvrage d’une société littéraire, suivant l’auteur de la Vie de M. […] Un mot singulier & nouveau, échappé au hazard, en fit naître l’idée à un des membres de cette société, qui l’exécuta avec ses confrères.
Donner à causer (on causait alors), lire ses romans à ses intimes, recevoir dans sa loge à l’Opéra les littérateurs qui, à Paris, sont toujours un peu femmes et qui aiment à se montrer à leur public ; un soir exhiber dans son salon le jeune Victor Hugo, l’enfant du génie, qui a commencé (ce qui n’est ni très poétique, ni très sauvage) par des succès de société, comme M. […] » Et enchantée de cette idée, bonne tout au plus pour une comédie de société, elle ajoute plus bas : « Il n’est pas de grand talent, de grand personnage plus choyé que l’homme ridicule dont la manie doit occuper et divertir une société entière, toute une réunion de moqueurs… » Mais s’il y a d’autres ridicules que des ridicules gais, s’il y en a de tristes, par exemple, sa thèse à l’instant même s’ébrèche sur le bonheur des gens ridicules qui rappelle, du reste, un peu trop un autre livre, le livre de M.
Ainsi encore, à un autre endroit de son livre, l’auteur du Tableau nous dit que la forte poésie « exprime l’idéal d’une société », et quoiqu’on s’étonne de trouver ces vagues formules — la fumée de cigare du dix-neuvième siècle — sous la plume incisive de M. […] L’idéal d’une société, en supposant qu’on sache ce que c’est, serait au contraire une mauvaise mesure de poésie. Il donnerait des poètes de société et des hôtels de Rambouillet que, par parenthèse, M.