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1746. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Victor Hugo — Note »

Aujourd’hui même le moment ne me semble pas encore venu pour chercher et pour donner la clef de cette organisation d’artiste et de poëte qui est assurément la plus extraordinaire et la plus inattendue qu’ait vue paraître la littérature française . […] Dans les premières années qui suivirent, il semblait que, sauf un peu plus de vivacité dans ce qui concernait les droits du poëte au théâtre, il fût resté dans cette même mesure.

1747. (1874) Premiers lundis. Tome I « Walter Scott : Vie de Napoléon Bonaparte — II »

Tous ceux qui faisaient partie de ces deux tiers, « véritables comédiens ambulants qui changèrent de nom et d’habit en même temps que de rôle »,lui paraissent « indignes non-seulement de gouverner, mais encore de vivre. » Il reconnaît pourtant qu’en voyant meilleure compagnie ils se sont amendés sous quelques rapports, et que, pour tout dire, « ils ont fait à peu près comme ces malheureuses femmes, qui, ramassées dans les carrefours et dans les prisons de la capitale, sont envoyées dans les colonies Étrangères, où, quoique leur jeunesse se soit écoulée dans le désordre, elles adoptent une nouvelle vie, redeviennent honnêtes, et, grâce à de nouvelles habitudes, dans une position nouvelle, sont encore des membres tolérables de la société. » Le rapprochement n’a rien de flatteur ni de délicat ; mais l’illustre baronnet n’y regarde pas de si près ; il a même tant d’affection pour ces sortes d’images, que plus tard l’arrangement du premier consul avec ses ministres lui semblera « pareil aux mariages contractés par les colons espagnols ou les boucaniers avec les malheureuses créatures envoyées pour peupler les colonies », et qu’il trouvera les moyens en un endroit de comparer, je ne sais trop pour quelle raison, M. de Talleyrand à une vivandière. […] Entendu de cette façon, il nous semble que le talent fécond, brillant et pittoresque de Walter Scott, abordant le genre austère de l’histoire, a bien pu s’égarer, comme il l’a fait, à la merci de passions mesquines et de préjugés aveugles ; égarement miraculeux et de tout point incompréhensible, si l’on reconnaît à l’auteur cette intelligence profonde des époques et ce sens historique pénétrant dont on l’a jusqu’ici trop libéralement doué.

1748. (1874) Premiers lundis. Tome I « A. de Lamartine : Harmonies poétiques et religieuses — II »

La pièce qui a pour titre Pensée des morts nous semble le miracle de cette poésie simple, pénétrante et bénie. […] Habituellement, M. de Lamartine semble craindre, en refeuilletant, comme dit André Chénier, son âme et sa vie, de rouvrir en lui-même des émotions trop déchirantes, de ranimer des traces trop vives.

1749. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — Deuxième cours des études d’une Université » pp. 489-494

C’est le sentiment de Grotius. « En général, dit-il, ne pas commencer par des faits surannés qui nous sont indifférents, mais par des choses plus certaines, et qui nous touchent de plus près, et s’avancer de là peu à peu vers l’origine des temps86. » Voilà ce qui nous semble plus conforme à un véritable enseignement, c’est l’étude des faits soumis à notre principe général : et pourquoi en serait-elle une exception ? […] Je ne puis être de leur avis : il me semble qu’il est utile et convenable de posséder la notion du juste et de l’injuste, avant la connaissance des actions, des personnages et de l’historien même, auxquels on doit l’appliquer.

1750. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 40, si le pouvoir de la peinture sur les hommes est plus grand que le pouvoir de la poësie » pp. 393-405

Il semble même que l’oeil ébloüi par l’ouvrage d’un grand peintre, croïe quelquefois appercevoir du mouvement dans ses figures. […] On les renferme dans des bordures dorées qui jettent un nouvel éclat sur les couleurs, et qui semblent, en separant les tableaux des objets voisins, réunir mieux entr’elles les parties dont ils sont composez, à peu près comme il paroît qu’une fenêtre rassemble les differens objets qu’on voit par son ouverture.

1751. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 7, nouvelles preuves que la declamation théatrale des anciens étoit composée, et qu’elle s’écrivoit en notes. Preuve tirée de ce que l’acteur qui la recitoit, étoit accompagné par des instrumens » pp. 112-126

Mais je vais encore rapporter deux passages de Ciceron qui me semblent si décisifs, que peut-être le lecteur trouvera-t’il que j’ai eu tort d’en copier d’autres. […] Il semble même qu’elle imitât le sujet, et pour me servir de cette expression, qu’elle joûtât avec lui.

1752. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 14, de la danse ou de la saltation théatrale. Comment l’acteur qui faisoit les gestes pouvoit s’accorder avec l’acteur qui récitoit, de la danse des choeurs » pp. 234-247

Les choeurs avoient d’abord des maîtres particuliers qui leur enseignoient leurs rolles, mais le poëte Eschile qui avoit beaucoup étudié l’art des représentations théatrales, entreprit de les instruire lui-même, et il semble que son exemple ait été suivi par les autres poëtes de la Grece. […] Il me semble qu’un pareil spectacle n’étoit pas la scéne la moins touchante d’une tragédie.

1753. (1860) Ceci n’est pas un livre « Les arrière-petits-fils. Sotie parisienne — Premier tableau » pp. 180-195

Il me semble que tu me piétines le cœur. […] Il me semble (il étend les mains) que je palpe déjà des billets de cent, des billets de mille… (Ses mains étendues rencontrent les notes élevées en l’air par Bidault, Nichot, Cascaret, Poupardot.)

1754. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Edmond About » pp. 63-72

La Grèce contemporaine semble vouloir appartenir, ou par le ton ou par le sujet, à cette catégorie distinguée et restreinte des livres légers qui, réussis, sont des œuvres exquises, mais dont on peut dire, comme de certains verres : « On en casse beaucoup avant d’en faire un. » Avec l’invention des chemins de fer, tout livre de voyage est menacé de devenir prochainement une impertinence. […] Et About, qui est un homme d’esprit, semble l’avoir compris ; car c’est à la personnalité qu’il a visé dans son ouvrage.

1755. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Charles Monselet »

Cet homme aimable, que tout le monde appelait Monselet tout court dans une chaleureuse et flatteuse sympathie et parce qu’il plaisait à tout le monde, ce nonchalant de mœurs, fait, à ce qu’il semblait, pour se chauffer, lazzarone d’esprit, au soleil de tous les printemps et au feu de toutes les cuisines, cette gloire de tout festin et que toute la terre qui sait dîner eut voulu avoir à sa table, hospitalité intéressée ! […] Les éclats de ces rires faisaient danser les vitres, et les chansons déchevelées bondissaient comme des Bacchantes jusqu’à ce plafond qui semblait tourner comme le ciel et contre lequel elles jetaient et brisaient leurs verres.

1756. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre I. Les origines. — Chapitre I. Les Saxons. » pp. 3-71

En Hollande le sol n’est qu’une boue qui fond ; à peine si la terre surnage çà et là par une croûte de limon mince et frêle, alluvion du fleuve que le fleuve semble prêt à noyer. […] D’un élan, elle parcourt les quatre coins de son horizon, et touche en un instant des objets qui semblent séparés par tout un monde. […] Telle me semble la vie des hommes sur la terre, en comparaison du temps incertain qui est au-delà. […] Il y a tel chant, un chant de funérailles, où c’est la Mort qui parle, l’un des derniers composés en saxon, d’un christianisme terrible, et qui en même temps semble sortir des plus noires profondeurs de l’Edda. […] Alors il sembla au joueur de harpe que rien ne lui plaisait plus dans ce monde.

1757. (1856) Cours familier de littérature. II « Xe entretien » pp. 217-327

Au sortir de mon berceau et pendant que je suçais encore le lait de ma mère, une circonstance tout accidentelle semblait m’avoir prédestiné à ce commerce de prédilection avec les grands esprits de mon siècle. […] Le jeune homme, quoique pâle et les cheveux fouettés par le vent, semblait plus attentif à la majesté de la scène qu’au danger de sa barque. […] Son front chauve, son sourcil superbe, ses joues affaissées de vieillard, ses yeux profonds et limpides, sa lèvre inférieure relevée par le pli du dédain, sa voix grave et lente qui semblait distiller les syllabes en les prononçant, donnaient une autorité physique à sa personne. […] Il semblait l’évoquer du geste, dans la certitude anticipée de la gouverner, mais sans prévoir qu’il contribuerait également à la perdre ! […] L’historien semble avoir recueilli en une seule clameur les tumultes confus, sourds et stridents qui sortent d’une foule à mille voix comme l’entrechoquement des vagues dont chacune a son explosion en frappant la rive, et dont toutes ensemble ne forment qu’un mugissement.

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