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1706. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Les cinq derniers mois de la vie de Racine. (suite et fin.) »

Il aime fort l’Écriture, et surtout les Psaumes. » Boileau resta donc davantage lui-même jusqu’à la fin ; il était une nature plus fixe que Racine. […] Le chrétien étant donné, cette faiblesse de sa part consistait, sur la fin, à rester courtisan un peu malgré lui, à n’oser se séparer de la-faveur, à vouloir mener de front deux choses inconciliables, la Cour et la dévotion, à vouloir pousser celle-ci jusqu’à la pénitence et à ne jamais passer outre.

1707. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Le comte de Gisors (1732-1758) : Étude historique, par M. Camille Rousset. »

Après l’avoir désiré et sollicité avec instance au début de cette guerre, il n’a plus l’air de tenir à son commandement, et à chaque contrariété on le voit prêt, pour ainsi dire, à remettre les mains dans ses poches, et disant que pour pis aller il lui restera toujours l’agrément d’aller tirer les perdreaux à Bernv. […] Il fit mine d’en vouloir sortir, il est vrai, mais il se laissa persuader assez aisément d’y rester sous couleur de patriotisme, et il y était encore quand il mourut en janvier 1761, à la veille, dit-on, d’être remercié par le roi.

1708. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Œuvres choisies de Charles Loyson, publiées par M. Émile Grimaud »

Loyson lui-même, en ces années de fin d’Empire et au début de la Restauration, était loin de rester étranger à la politique. […] Ce n’était pas la seule contradiction qu’il trouvait au dedans de lui ; il avait coutume de dire encore, en regrettant de ne pas rester un simple amateur, ce qui est si doux et si désirable aux délicats : « Quel dommage que j’aie toujours envie d’écrire !

1709. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Jean-Baptiste Rousseau »

Sans dire positivement qu’il fût un malhonnête homme, sans trancher ici la question restée indécise des derniers couplets, on peut affirmer que ce fut un cœur bas, un caractère louche, tracassier, né pour la domesticité des grands seigneurs ; avec cela, nul génie, peu d’esprit, tout en métier. […] Que restera-t-il donc de J.

1710. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Millevoye »

De tous les jeunes poëtes qui ne meurent ni de désespoir, ni de fièvre chaude, ni par le couteau, mais doucement et par un simple effet de lassitude naturelle, comme des fleurs dont c’était le terme marqué, Millevoye nous semble le plus aimé, le plus en vue, et celui qui restera. […] Son souvenir est resté intéressant et cher ; ce qui a suivi de brillant ne l’a pas effacé.

1711. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre X. De la littérature italienne et espagnole » pp. 228-255

Les Arabes restés en Afrique ne ressemblaient point, à cet égard, aux Arabes établis en Espagne. […] Si vous ôtiez l’affectation de certains ouvrages, il n’y resterait rien ; tandis qu’en corrigeant les défauts du genre espagnol, l’on arriverait à la perfection de la dignité courageuse et de la sensibilité profonde.

1712. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Conclusion. »

La science du bonheur moral, c’est-à-dire d’un malheur moindre, pourrait être aussi positive que toutes les autres, on pourrait trouver ce qui vaut le mieux pour le plus grand nombre des hommes dans le plus grand nombre des situations ; mais ce qui restera toujours incertain, c’est l’application de cette science à tel ou tel caractère : par quelle chaîne, dans ce genre de code, peut-on lier la minorité, ni même un seul individu à la règle générale ? […] Sans l’exercice de cette vertu, quelle palme nouvelle vous resterait-il encore à recueillir ?

1713. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre deuxième. Les mœurs et les caractères. — Chapitre III. Inconvénients de la vie de salon. »

Ce n’est pas que le fond des mœurs devienne différent ; elles restent aussi mondaines, aussi dissipées jusqu’au bout. […] Ils se laisseront prendre, ils iront docilement en prison ; faire du tapage serait une marque de mauvais goût, et, avant tout, il s’agit pour eux de rester ce qu’ils sont, gens de bonne compagnie.

1714. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre quatrième. Les conditions physiques des événements moraux — Chapitre II. Rapports des fonctions des centres nerveux et des événements moraux » pp. 317-336

Nous saurions donc que, quand nous aimons, le mouvement se produit dans une direction, et que, quand nous haïssons, il se produit dans une autre ; mais le pourquoi resterait encore sans réponse. » Ainsi l’expérience la plus vulgaire nous montre les deux faits comme inséparablement liés l’un à l’autre, et leurs représentations les montrent comme absolument irréductibles l’un à l’autre. — D’un côté, on éprouve que la pensée dépend du mouvement moléculaire cérébral ; de l’autre côté, on ne conçoit pas qu’elle en dépende. — Là-dessus, les physiologistes oublient volontiers la seconde vérité et disent : « Les événements mentaux sont une fonction des centres nerveux, comme la, contraction musculaire est une fonction des muscles, comme la sécrétion de la bile est une fonction du foie. » — De leur côté, les philosophes oublient volontiers la première vérité et disent : « Les événements moraux n’ont rien de commun avec les mouvements moléculaires des centres nerveux et appartiennent à un être de nature différente. » Sur quoi les observateurs prudents interviennent et concluent : « Il est vrai que les événements mentaux et les mouvements moléculaires des centres nerveux sont inséparablement liés entre, eux ; il est vrai que pour notre esprit et dans notre conception ils sont absolument irréductibles entre eux. […] Il en resterait là, s’il ne faisait pas d’expériences nouvelles ; les deux choses seraient toujours pour lui différentes en qualité ; elles formeraient deux mondes entre lesquels il n’y aurait pas de passage.

1715. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre I. La littérature pendant la Révolution et l’Empire — Chapitre III. Madame de Staël »

Mais, en femme qu’elle reste toujours, l’impératif catégorique ne peut rester en elle à l’état de commandement intérieur, abstrait et formel : il faut qu’il se réalise ; et du devoir, Mme de Staël passe à Dieu. […] Cette Allemagne, qui n’est pas celle de Henri Heine, qui n’est pas celle dont nous avons eu la révélation en 1870, a été vraie à une certaine date : ce qui nous intéresse ici, c’est que, malgré Henri Heine, elle est restée jusqu’en 1870 l’Allemagne de nos littérateurs et de nos artistes.

1716. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « J.-J. Weiss  »

Quand on vient de parcourir, comme j’ai fait, dans la Revue bleue 76 et dans le Journal des Débats les trois années de critique dramatique de cet ancien professeur qui a été journaliste, conseiller d’État, directeur des affaires étrangères, et qui est resté un fantaisiste, sinon un bohème, un « inclassable », sinon un déclassé, on est charmé, ravi, ébloui : mais on est aussi déconcerté, ahuri, abasourdi. […] Et quand on serait parvenu à tirer le critique au clair, l’homme resterait, plus complexe et plus surprenant encore.

1717. (1899) Le préjugé de la vie de bohème (article de la Revue des Revues) pp. 459-469

De gras rédacteurs dûment appointés, ayant tout juste produit deux mille chroniques dans leur existence, s’attendrirent ou devinrent lyriques devant la force de la belle jeunesse qui sait rester joyeuse au milieu de la misère, et qui, et que… La Vie de Bohème est, malgré tout, un livre rebutant et désolant, et je ne crois pas qu’il y ait un écrivain vrai, un homme de talent et de cœur qui n’ait la nausée devant ces plaisanteries vieillies alternant avec ces crachats de phtisique et ce dépenaillement. […] Elles souffrent, elles pleurent, mais elles restent fines et presque élégantes.

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