Nous ne sommes point partisans de sa civilisation, que nous regardons comme trop élémentaire et trop brutale : si nous avions vécu du temps de Louis XVI, nous n’aurions pas conseillé à ce prince infortuné de déclarer la guerre aux Anglais pour favoriser à tout prix une nation anglaise d’insurgés contre leurs frères. […] « Oui », répondit-elle sans me regarder. […] Le canon de mon fusil était disposé à frapper de mort celui qui s’approcherait de moi ; mon chien regardait alternativement son maître et ses agresseurs. […] Si vous regardez attentivement, vous compterez cinquante, soixante ou plus de ces nids, les uns séparés par un intervalle de quelques pieds seulement, d’autres à l’écart, à plusieurs pas. […] Pour moi, je ne cessais de le regarder avec ravissement, et je me demandais comment la Nature avait pu le douer d’un sens aussi réfléchi et d’une telle puissance.
Ils vouaient leur génie à cette œuvre illusoire ; Se fiant à lui seul, ils ne pouvaient pas croire Qu’ayant l’intelligence ils dussent regarder. […] Je les regarde avec angoisse et tremblement. […] Qui sait, après tout, si regarder obstinément, ce n’est point finir par voir ? […] Les premiers serments d’amour furent échangés près d’un arbre effeuillé par les vents, sur un roc en poussière, devant un ciel toujours voilé qui change à tout moment, sous les yeux de l’Etre immobile qui regarde mourir245. […] Mme Ackermann, reprenant le même sujet, mais avec beaucoup moins de poésie, nous montre à son tour le contraste de la réalité qui passe avec les aspirations infinies de l’amour : Regardez-les passer, ces couples éphémères !
Dans Paul et Virginie, Marguerite, à force de regarder durant sa grossesse le portrait de l’ermite Paul qu’elle porte à son cou, communique un peu de sa ressemblance à l’enfant qu’elle baptise pour cela du nom de Paul. […] On lit tout haut la lettre : la mère s’évanouit, le père regarde ses enfants et sort dans une horrible anxiété. […] Si la Vierge et Notre-Seigneur me regardent en pitié, ne le sauras-tu pas un des premiers ? […] nous étions bien contentes de nous regarder et de nous serrer les mains. […] Si nous les avons mérités, c’est encore plus triste. — Cette réflexion ne regarde que moi, ma bonne amie.
Mais cela ne regarde que quelques-unes des précieuses, car il y en a qui ne se mettent pas tant à tous les jours. » Mademoiselle de Montpensier les représente dans la société des gens du monde, comme « fort sottes et fort niaises quand elles y sont seules de leur genre, comme fort insolentes quand elles y sont plusieurs. […] Certes, il ne viendra dans l’esprit de personne que cela regarde la maison de Rambouillet Molière, dans la préface de la pièce, exprime positivement une intention opposée aux applications de nos biographes modernes : « Les vicieuses imitations de ce qu’il y a de plus parfait, ont été de tout temps, dit-il, la matière de la comédie ; les plus excellentes choses sont sujettes à être copiées par de mauvais singes. […] Mais ces précautions ne pouvaient regarder que les précieuses subalternes, qui avaient pu se croire atteintes par l’auteur, et c’est ce que Molière a eu l’attention de faire en séparant les intérêts des véritables précieuses, des précieuses ridicules, c’est-à-dire les honnêtes femmes beaux-esprits, des hypocrites pleines d’affectation. C’est de leur propre autorité que nos biographes appliquent à madame de Rambouillet une précaution qui regardait des précieuses d’une autre classe. […] Quoique le secret d’ennuyer soit celui de tout dire , et que j’aie déjà dit beaucoup plus qu’il n’était nécessaire pour détourner de l’hôtel Rambouillet l’application des Précieuses ridicules, je ne puis m’empêcher de revenir sur l’opinion des écrivains qui donnent pour une adroite précaution contre les plaintes des personnes de cette société la préface où Molière déclare que sa pièce regarde uniquement les mauvais singes , les ridicules copies des illustres précieuses.
Regardez mes yeux.” — Et il tourna vers moi deux grandes prunelles blanches sans regard. — “Je suis aveugle, mon cher, aveugle pour la vie ! […] Elle est bien moins de lui que d’une école dont on peut regarder Flaubert comme le chef, de fait sans théorie et sans enseignement. […] Alphonse Daudet, cette âme dans le talent, a mieux à faire maintenant qu’à regarder, du bout des yeux, une société qui passe et qui a été décrite jusqu’à épuisement. Il a à regarder dans l’âme humaine, qui ne passe point. […] L’exil, l’insupportable exil, même pour le gros ventre de Louis XVIII, qui, du moins, intriguait, s’agitait, avait encore des tronçons de royauté qui se remuaient dans son corps impotent, et qui ne se contentait pas des résidences aumônées sordidement par des souverains sans cœur à leur royal frère ; l’exil est à présent accepté et presque regardé comme une bonne aubaine, — la bonne aubaine de la Royauté en naufrage.
Il était alors à Puteaux près de Neuilly, et obligé de perdre une partie de son temps sur les grands chemins : Malgré ma servitude privée, disait-il en finissant, je souhaite, mon cher ami, que vous soyez bientôt aussi libre que moi ; que vous puissiez aussi regarder la Seine couler comme je le fais et vais le faire plus que jamais de mes fenêtres ; enfin que nous puissions grommeler ensemble sur toute l’espèce humaine qui heureusement n’est pas toute la nature, et réaliser une bonne fois à nous deux la grande faction des insociables dont la France a été tant tourmentée depuis deux ans. […] À l’instant un des interlocuteurs change de ton ; il essaye de se rétracter, ou du moins d’atténuer ce qu’il vient de dire : On le regarde, on se regarde, on ne sait d’où vient un changement si subit. […] Des hommes jusque-là jugés incapables se rendaient utiles ; des hommes jusque-là distingués se trouvaient tout à coup confondus ; des hommes regardés comme les ressources de l’État se trouvaient inutiles ; et toutes les âmes ambitieuses de gloire furent forcées de se contenter d’un reflet de sa gloire.
Le vrai Cid n’y regardait pas de si près. […] Elle leva les yeux, et commença de regarder Rodrigue. […] Les premiers vers du poème manquent ; le Cid banni nous apparaît tout d’abord pleurant à l’aspect de sa maison et des biens qu’il va quitter : « Pleurant très-fortement de ses yeux, il tournait la tête et il les regardait. […] En les livrant aux Juifs, on leur fait jurer qu’ils n’y regarderont pas de toute l’année.
Je m’éveille ce matin dans une chambre pleine de portraits d’aïeux et d’aïeules qui me regardent tous, dans le costume de leur profession ou dans l’habillement de leur classe, avec des accessoires aussi naïfs d’indication que les phylactères du moyen âge : le médecin avec un Boerhave à la main, le prêtre avec un paroissien, l’homme de banque avec une lettre de change. […] * * * — Hier en chemin de fer, je regardais dormir, en face de moi, un petit jeune homme. […] Et regardez encore la petite fille toute de lumière, enfant de soleil qui jette ses reflets d’ambre à toute la toile, cette petite fille coiffée d’or, qu’on dirait habillée d’émeraudes et d’améthystes, et à la hanche de laquelle pend un poulet : petite juive, vraie fleur de Bohème. […] Elles regardent éternellement, par les carreaux, un canal de Hollande, des feuilles mortes sur une eau morte, un ciel gris, un soleil jaune, des briques noires, des arbres noirs.
Quoiqu’elle ne ressemblât guère à un sphinx, cette aimable fille au long sourire, elle en avait peut-être, quand on regarde à sa vie placide et réglée, l’immobilité. […] Maurice de Guérin s’en alla dans les collèges, — puis des collèges dans ce triste monde qui est l’école de toutes les luttes et de toutes les misères ; mais quand, à travers les brutales modifications qu’y subissent les plus fermes cœurs, il voulut se retrouver et se revoir et reprendre, pour ainsi parler, l’identité de son être, il regarda vers le Cayla et dans l’âme de sa sœur, — ce pur miroir toujours suspendu à la même place, comme la glace du fond d’un tabernacle ! […] Nous n’ayons pas à les dire au monde : cela ne le regarde pas ! […] la seule chose qui pût la distraire d’une douleur qu’elle portait au pied de l’autel et qu’elle en rapportait toujours, la seule voix qui ne fût pas celle de Dieu et qui pût faire remonter son âme du fond de cette tombe placée dans le cimetière de Saint-Médard d’Andillac, et regarder du côté du monde une fois encore, c’était l’idée de la gloire de son frère, mort sans renommée.
Dans ce sens, on peut regarder comme vraie la tradition selon laquelle on ne consultait que la nature dans l’élection des rois des premiers âges. […] Aussi Tite-Live, tout ignorant qu’il est de ce qui regarde la constitution ancienne de Rome, nous raconte que les nobles se plaignaient d’avoir plus perdu par la loi Publilia, que gagné par toutes les victoires qu’ils avaient remportées la même année71. […] En cela, les plus grands philosophes d’une nation si éclairée sont d’accord avec les barbares de l’ancienne Germanie, chez lesquels, au rapport de César, le brigandage, loin de paraître infâme, était regardé comme un exercice de vertu. […] De telles guerres entraînent dans toute leur dureté les servitudes héroïques ; les vaincus sont regardés comme des hommes sans dieux, et perdent non-seulement la liberté civile, mais la liberté naturelle. — D’après toutes ces considérations, les républiques doivent être alors des aristocraties naturelles, c’est-à-dire composées d’hommes qui soient naturellement les plus courageux ; le gouvernement doit être de nature à réserver tous les honneurs civils à un petit nombre de nobles, de pères de famille, qui fassent consister le bien public dans la conservation de ce pouvoir absolu qu’ils avaient originairement sur leurs familles, et qu’ils ont maintenant dans l’état, de sorte qu’ils entendent le mot patrie dans le sens étymologique qu’on peut lui donner, l’intérêt des pères (patria, sous-entendu res).
J’écoutais ces propos de parentage en rougissant, et le remerciant de sa confiance prématurée ; mais au fond de mon cœur je regardais avec étonnement son imprudence et manque de jugement sur quantité de choses. […] Je ne témoignais de penchant pour aucun côté, ni ne me mêlais à rien ; j’avais toujours un air serein, beaucoup de prévenance, d’attention et de politesse pour tout le monde, et comme j’étais naturellement fort gaie, je vis avec plaisir que de jour en jour je gagnais l’affection du public, qui me regardait comme une enfant intéressante et qui ne manquait pas d’esprit. […] Un jour, à un de ces bals, je la regardais danser un menuet : quand elle eut fini, elle vint à moi ; je pris la liberté de lui dire qu’il était fort heureux pour les femmes qu’elle ne fût pas homme, et que son portrait seul ainsi peint pourrait tourner la tête à plus d’une.
Il se regardait, selon sa magnanime expression, « comme une des nombreuses vagues avant-courrières qui doivent se briser et mourir sur le rivage avant que la marée soit haute. » Dans son ambition modeste et mâle, il n’ambitionnait que « la fosse du soldat », Le premier et le plus glorieux des philhellènes, il se montra, dans le court espace de temps qu’il lui fut donné de vivre encore et d’être à l’œuvre, homme d’action et homme pratique, d’une générosité judicieuse, propre à l’organisation et au commandement. […] il regarda, il vit tout, il pensa de son chef, et dit gaiement, impertinemment et avec une grâce des plus vives et des plus mordantes, tout ce qu’il pensait ; il se passa toutes ses saillies et ses fantaisies à la barbe des vieux murs et des grands ancêtres. […] Et je regardai mon berger s’éloigner, afin d’éviter de lui tourner le dos. » Je recommanderai encore le fragment de voyage intitulé Trois Jours à Sparte (page 99).