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480. (1908) Dix années de roman français. Revue des deux mondes pp. 159-190

Nous n’avons pas à rappeler aux lecteurs de la Revue les beautés du récit et la magnificence de son cadre ; il importe pourtant de faire admirer l’enthousiasme et l’éternelle jeunesse de cœur qui brûle, comme un feu mystérieux, sous la conception de l’artiste. […] Ainsi se sont-ils efforcés de construire des monuments dont l’imposante architecture rappellerait l’échafaudage immortel de l’œuvre balzacienne. […] Comment eussent-ils pu, sans cet optimisme, mener à bonne fin une œuvre dont chaque page devait rappeler un découragement, un malheur ou une souffrance ? […] Nous avons rappelé Balzac à propos de l’Étape. […] Ne le quittons pas, néanmoins, avant d’avoir rappelé le nom de M. 

481. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Edmond et Jules de Goncourt »

Pour revenir aux dîners Magny, vous rappelez-vous la rêverie de Fontenelle devant un troupeau de moutons ? […] Il serait peut-être curieux de rechercher, et peut-être facile de trouver, comment des écrivains de cette valeur et de celle élégance, qui, par le fait de leurs études, ont vécu dans la société du xviiie  siècle, et qui ont montré presque de l’enthousiasme pour cette société artificielle et raffinée, aient pu pencher de ce côté inférieur qui aurait dû leur être si antipathique, et même y verser un jour tout à fait… Vous vous rappelez ce fameux drame d’Henriette Maréchal, joué au Théâtre-Français, et dans lequel les deux auteurs abordèrent si audacieusement la langue la plus verte des bals masqués les plus pourris de Paris, que le public en fut révolté et la pièce outrageusement sifflée… Ceci n’est réellement explicable que par le besoin de nouveauté qui saisit les esprits hardis, quand les vieilles formes littéraires expirent. […] Qui a répondu à cette question, en présence de cette Faustin telle qu’elle est ici, sans trait distinctif, sans personnalité reconnaissable, sans que rien n’agrafe le souvenir et nous rappelle nettement quelqu’un ? […] c’est pour les cœurs profonds, les cœurs jaloux et les cœurs fiers, que la comédienne est dangereuse, puisque son art est de ne plus être une âme humaine comme la nôtre, mais un protéisme d’apparences qui passent et qu’elle rappelle à son gré avec la puissance évocatrice d’une magicienne, qui charme et qu’on ne charme pas !! […] D’un autre côté, le dénouement pathologique est une des faiblesses ordinaires des naturalistes, qui ne croient qu’aux faits de la matière, et celui de M. de Goncourt en rappelle d’autres antérieurement connus : le delirium tremens de L’Assommoir, et la mort de la rage, dans un des romans les plus passionnés de Léon Cladel… Conséquences inévitables du naturalisme, qui se dit, malgré son ignorance, expérimental et scientifique, nous serons peut-être obligés de faire prochainement, dans les livres qui s’adressaient autrefois au cœur ou à l’esprit, le tour des maladies humaines, et nos romans ne seront plus que de dégoûtantes nosographies… M. de Goncourt, l’auteur de la Sœur Philomène, marqué depuis longtemps de ce carabinisme qui a aussi timbré Sainte-Beuve, devait prendre très facilement le fil d’un siècle qui allait, de toutes parts, aux préoccupations physiques, et qui ne trouve plus d’autre terrible et d’autres sources de pathétique, dans ses romans de sentiment et de passion, que la hideuse mort animale de ses héros.

482. (1900) Le rire. Essai sur la signification du comique « Chapitre II. Le comique de situation et le comique de mots »

Est-il besoin de rappeler toutes les formes sous lesquelles cette même combinaison se présente ? […] une allusion à cette mésaventure, un mot qui la rappelle. « Tu l’as voulu, George Dandin », ce mot n’aurait rien d’amusant sans les résonances comiques qui le prolongent. […] On se rappelle ce dialogue entre une mère et son fils dans les Faux Bonshommes : « Mon ami, la Bourse est un jeu dangereux. […] On se rappelle cette observation d’un haut fonctionnaire à un de ses subordonnés, dans une pièce de Gogol : « Tu voles trop pour un fonctionnaire de ton grade. » Pour résumer ce qui précède, nous dirons qu’il y a d’abord deux termes de comparaison extrêmes, le très grand et le très petit, le meilleur et le pire, entre lesquels la transposition peut s’effectuer dans un sens ou dans l’autre. […] On se rappelle les scènes des Faux Bonshommes et de la Famille Benoiton où le mariage est traité comme une affaire, et où les questions de sentiment se posent en termes strictement commerciaux.

483. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 357-358

Ce n’est pas qu’il y en ait moins ; c’est au contraire parce qu’il y en a davantage ; car plus la société est corrompue, plus on est attentif à proscrire tous les termes qui en rappellent les déréglemens.

484. (1759) Salon de 1759 « Salon de 1759 — Collin de Vermont et Jeaurat » p. 94

Point de silence ; rien de sauvage ; rien qui rappelle la justice divine ; nulle idée ; nulle adoration profonde ; nul recueillement intérieur ; point d’extase ; point de terreur.

485. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Mémoires du général La Fayette (1838.) »

Ce qu’il avait déclaré en 89, il le rappelle donc et le maintient en 1800, il le proclame en 1815, il le déploie encore en 1830 ; et, en définitive, août 1830 en a réalisé assez, dans la lettre sinon dans l’esprit, pour que sa vue persévérante ait été justifiée historiquement. […] De la frontière où il travaille à organiser la défense, il écrit, le 16 juin, à l’Assemblée législative, et, après le 20 juin, quittant son armée à l’improviste, il paraît à la barre de cette Assemblée pour la rappeler à l’esprit de la Constitution, à la Déclaration des droits violée chaque jour. […] Rien ne les effraye ni ne les rappelle ; de plus en plus fort ! […] Son livre apprend ou rappelle, sur ce chapitre des fonds secrets, quelques chiffres curieux par leur emploi. […] Se rappeler la belle Épître morale de Pope sur le caractère des hommes, et le passage si vrai sur la passion maîtresse et dominante.

486. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXLe entretien. L’homme de lettres »

Ses traits, effacés par l’âge, lui rappelèrent cependant ceux de Marie Talbot, de cette bonne fille qui avait pris soin de son enfance. […] mais Dieu l’a rappelée, il faut que sa volonté soit faite. » En disant ces mots, elle ouvrit la porte de sa pauvre demeure. […] Cette petite scène lui rappela les jours de son enfance. […] Ces deux têtes charmantes, renfermées sous ce jupon bouffant, me rappelèrent les enfants de Léda enclos dans la même coquille. […] Au moment où le royaume se divisait en deux partis, dont l’un voulait faire une république et l’autre conserver la monarchie, il se hâta de rappeler au peuple les anciennes obligations qu’il avait à son roi.

487. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » p. 368

Cet exemple nous rappelle que plusieurs bonnes Pieces ont dû leur chute à la même cause, comme beaucoup de mauvaises lui ont dû leur succès passager.

488. (1759) Salon de 1759 « Salon de 1759 — Restout » p. 91

Je me rappelle que l’Annonciation est traitée d’une manière sèche, roide et froide ; qu’elle est sans effet ; et qu’on dirait un morceau détaché d’une vieille coupole, qui a souffert et qui n’était pas d’un trop habile homme.

489. (1890) Dramaturges et romanciers

Vous savez qui je suis et où vous m’avez prise ; pourquoi me forcez-vous à vous le rappeler ? […] Rappelez-vous la Crise, le Pour et le Contre, la Clé d’or, le Cheveu blanc. […] Sa pauvreté est une agréable aventure qui a jeté dans sa vie le charme de l’imprévu, et qu’il se rappellera avec bonheur. […] et la Haine, rappellent la plus haute et la plus hardie des ambitions qu’ait eues M.  […] La situation à laquelle se rapporte Gabrielle est aujourd’hui bien oubliée ; rappelons-la en quelques mots.

490. (1929) La société des grands esprits

L’un d’eux s’étonnait de voir un critique rappeler ce fait élémentaire, que la philosophie de M.  […] Rappelez-vous la belle description de Taine, dans la Philosophie de l’art (la Sculpture en Grèce). […] Qui ne se rappelle ces traits, ces apostrophes, ces élans lyriques ? […] Renan a rappelé cette épithète, mais n’a pas dit qu’elle était de Malebranche : il a eu honte pour lui. […] Après Victor Brochard, dont il rappelle un article fameux, M. 

491. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Première série

On se rappelle les derniers sonnets des Épreuves. […] François Coppée me rappelle les grands versificateurs de « l’âge d’argent » de la littérature latine. […] Mais justement l’honneur et le malheur de ces tableaux est de rappeler toujours et inévitablement des œuvres supérieures. […] Il y a dans ce poème de Francine, paru tout récemment, bien de la grâce, de la mélancolie et de la tendresse, sous une forme qui rappelle Jocelyn. […] Pour reprendre l’exemple de tout à l’heure, ce qu’on se rappelle, ce n’est pas un feuillage d’un côté, un chant de l’autre, c’est « une feuille qui chante ».

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