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504. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLVIe entretien. Examen critique de l’Histoire de l’Empire, par M. Thiers (3e partie) » pp. 249-336

On l’a raillé quelquefois de cette personnalité militaire qui lui fait confondre son rôle d’écrivain avec le rôle du grand capitaine dont il raconte ou dont il critique les exploits ; pourquoi l’accuser de ce qui fait un de ses premiers mérites : s’identifier avec le génie des batailles ? […] L’esprit universel peut tout ; la fortune avare et aveugle ne nous donne qu’un rôle quand la nature nous a façonné souvent pour tous les rôles à la fois ; voilà pourquoi il est si cruel pour les riches natures de mourir sans avoir, comme elles disent, accompli leur destinée. […] La tragédie ne suffit pas ici pour fournir les couleurs au tableau, la comédie lui en prête ; Molière, Beaumarchais, Machiavel, Tacite semblent forcés de se réunir dans ces ténébreuses journées de Bayonne pour peindre un rôle où l’intrigue, l’hypocrisie, la violence et la trahison surpassent Alexandre VI, Tartufe et César dans un même acte diplomatique.

505. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre VI » pp. 394-434

Voilà, je l’espère, une comédie à faire, une étrange et agréable exploitation de l’homme par l’homme, un nouveau drame où le capital joue, en se moquant, le rôle ingrat ! […] Les feuilles nombreuses du chêne et du laurier portaient le nom de tous les rôles créés jusqu’à ce moment, par mademoiselle Mars ; une grande quantité de feuillage attendait les noms qui devaient compléter le couronnement de cette belle vie. […] Elle s’abandonne librement à l’espièglerie de son rôle ; elle est, tour à tour, la fille d’un grand seigneur à l’ancienne marque, et la digne suivante d’une belle dame à la mode des petits appartements ! […] On la voyait, aujourd’hui, luttant contre madame Dorval, comme elle avait lutté naguère contre Talma, qui était, lui aussi, un rude jouteur, et le lendemain jouant le rôle principal dans un mélodrame de Frédéric Soulié, prosternée aux pieds « de l’homme qui a tué Raphaël Bazas » ! […] Elle est donc morte tout à fait, cette personne illustre qui était morte une première fois, quand elle nous fit ses derniers adieux dans ses deux rôles qui étaient ses deux chefs-d’œuvre.

506. (1853) Histoire de la littérature française sous la Restauration. Tome I

Tacite, que Napoléon n’aimait pas, eut trouvé le rôle un peu court pour sa taille. […] Royer-Collard avait pressenti le talent destiné à jouer un si grand rôle dans les luttes philosophiques de la restauration : c’étaient MM.  […] Ducis achève sa longue carrière ; Fontanes, dont les engagements avec l’empire ont été trop étroits pour qu’il puisse recommencer avec éclat un nouveau rôle, va bientôt mourir. […] Comme pour lui faciliter la prise de possession de ce rôle, la restauration apportait une nouvelle forme de gouvernement qui donne aux idées la toute-puissance. […] Déjà la plupart des hommes qui joueront les principaux rôles dans ces luttes vous sont apparus.

507. (1906) La rêverie esthétique. Essai sur la psychologie du poète

L’imagination auditive en effet joue un certain rôle dans la perception des sons eux-mêmes. […] Jamais je n’ai songé à dire que la pensée pure ne jouait et n’avait à jouer aucun rôle dans l’art des vers. […] Il n’a besoin d’intervenir que d’une manière intermittente, pour les remettre dans leur rôle s’ils s’en écartent. […] Presque un rôle de pion. […] Il nous reste à chercher quel rôle peut et doit jouer, dans la genèse de l’œuvre poétique, la pensée lucide et consciente.

508. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Introduction, où l’on traite principalement des sources de cette histoire. »

Enfin, je me bornerais à pressentir le changement de politique qui, sous Constantin, intervertit les rôles, et fait du mouvement religieux le plus libre et le plus spontané un culte officiel, assujetti à l’État et persécuteur à son tour. […] Le rôle de notre évangile dans le gnosticisme, et en particulier dans le système de Valentin 33, dans le montanisme 34 et dans la querelle des quartodécimans 35, n’est pas moins décisif. […] Jésus serait un phénomène unique dans l’histoire si, avec le rôle qu’il joua, il n’avait été bien vite transfiguré. […] Ainsi, le pardon de la femme pécheresse, la connaissance qu’a Luc de la famille de Béthanie, son type du caractère de Marthe répondant au [Greek : diêchonei] de Jean (XII, 2), le trait de la femme qui essuya les pieds de Jésus avec ses cheveux, une notion obscure des voyages de Jésus à Jérusalem, l’idée qu’il a comparu à la Passion devant trois autorités, l’opinion où est l’auteur que quelques disciples assistaient au crucifiement, la connaissance qu’il a du rôle d’Anne à côté de Caïphe, l’apparition de l’ange dans l’agonie (comp.

509. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 14 mars 1885. »

Vous auriez juré souvent qu’elle prenait au sérieux son rôle de prophétesse biblique, — quand elle avait Méhul pour amant, — ou son rôle d’Agnès sincère, quand elle vivait maritalement avec Hérold. […] Par l’audace et la simplicité de ses conceptions tragiques, par son intime connaissance des passions humaines, par son vers musical, par sa musique poétique, par l’invention d’une nouvelle forme mélodique qu’on a appelée la mélodie continue et qui fait que le chanteur chante sans avoir l’air de le faire exprès, par son merveilleux orchestre, qui joue à peu près le rôle du chœur dans la tragédie antique et qui, toujours mêlé à l’action, la corrobore, l’explique, en centuple l’intensité par des rappels analogues ou antithétiques à chaque passion du drame, Richard Wagner vous transportera extasiés dans un milieu inconnu, où le sujet dramatique, vous pénétrant avec une puissance incomparable par tous les sens à la fois, vous fera subir des émotions encore inéprouvées. […] Delaquerrière (David), Soulacroix (Beckmesser), Durat (Pogner), Renaud (Kothner), et tous les rôles secondaires sont consciencieusement tenus ; MM. 

510. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre V. Le souvenir du présent et la fausse reconnaissance »

Pour peu qu’il s’analyse lui-même, il se comparera à l’acteur qui joue automatiquement son rôle, s’écoutant et se regardant jouer. […] Mais le souvenir de ce présent, qui est également là, lui fait croire qu’il répète intégralement des choses déjà dites, qu’il revoit exactement des choses déjà vues, et le transforme ainsi en acteur qui récite un rôle. […] C’est plutôt une oscillation de la personne entre deux points de vue sur elle-même, un va-et-vient de l’esprit entre la perception qui n’est que perception et la perception doublée de son propre souvenir : la première enveloppe le sentiment habituel que nous avons de notre liberté et s’insère tout naturellement dans le monde réel ; la seconde nous fait croire que nous répétons un rôle appris, nous convertit en automates, nous transporte dans un monde de théâtre ou de rêve. […] De là une compénétration d’états qui se fondent et même s’identifient ensemble dans la conscience immédiate, mais qui n’en sont pas moins logiquement incompatibles entre eux et que la conscience réfléchie se représentera dès lors par un dédoublement du moi en deux personnages différents, dont l’un prendrait à son compte tout ce qui est liberté, tandis que l’autre garderait pour lui la nécessité — celui-là, spectateur libre, regardant celui-ci jouer son rôle automatiquement.

511. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Vicq d’Azyr. — II. (Fin.) » pp. 296-311

Nous ne pouvons que deviner le rôle qu’il tint en ces trois années agitées et périlleuses, depuis le 5 octobre jusqu’au 10 août. […] En janvier 1790, Morris a-t-il à faire parvenir au roi un avis sur la marche à suivre, en désapprouvant son idée de se rendre à l’Assemblée pour y déclarer qu’il se met lui-même à la tête de la Révolution, ce qui paraît à Morris d’une faible et dangereuse politique : « Cette note, dit-il dans son Journal, fut remise à la reine par son médecin Vicq d’Azyr. » Deux ans après, en janvier 1792, Morris est-il sur le point de partir pour Londres : « Vicq d’Azyr, le médecin de la reine, est venu ce matin, dit-il encore, pour me demander de la part de Leurs Majestés de communiquer au roi et à la reine tout ce que je pourrai apprendre en Angleterre de nature à les intéresser. » Ce ne sont que des indications, mais qui donnent le sens de tout un rôle suivi que l’on peut assez conjecturer.

512. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Mémoires et journal de l’abbé Le Dieu sur la vie et les ouvrages de Bossuet, publiés pour la première fois par M. l’abbé Guettée. — II » pp. 263-279

On y voit bien son procédé habituel et son rôle. […] Il est certain que par ces condamnations en partie rétrospectives, l’assemblée de 1700 ne faisait que confirmer et terminer en quelque sorte le programme ecclésiastique de la dernière moitié du siècle, qu’elle ne s’attaquait qu’à des doctrines déjà frappées et bientôt stériles, bien qu’elles eussent encore des racines vivaces, et qu’elle n’obviait en rien (et ce ne pouvait être son rôle) à ces autres doctrines bien autrement dangereuses qui s’insinuaient partout et qui étaient à la veille de se démasquer.

513. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) «  Œuvres et correspondance inédites de M. de Tocqueville — II » pp. 107-121

M. de Tocqueville s’isola un peu trop, même dans l’opposition ; il eut jusqu’en 1848 un rôle des plus honorables, mais peu efficace, peu étendu, un de ces rôles d’Ariste ou de Cléante au théâtre, et qui, le faisant estimer dans les deux camps, ne lui procura dans aucun une action proportionnée à ses lumières et en rapport avec l’énergie de ses sentiments.

514. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Térence. Son théâtre complet traduit par M. le marquis de Belloy »

C’est un rôle par trop ingrat, un vrai rôle de dupe que celui où l’on ne peut qu’avoir le dessous.

515. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Souvenirs d’un diplomate. La Pologne (1811-1813), par le baron Bignon. (Suite et fin.) »

Il put rêver à cette heure un grand rôle, et il espéra, un moment, pouvoir prendre sur le vieux et digne monarque un ascendant qui ne fut accordé à personne, et que déjouait une force d’inertie et de routine, la plus sourde de toutes. […] Il n’épargne ni le roi Jérôme qui, durant son passage à Varsovie, s’était renfermé dans son rôle de général en chef d’un des corps de la grande armée, et s’était abstenu soigneusement, avec une intention marquée, de tout ce qui aurait pu blesser le roi de Saxe, souverain du pays, ou gêner l’ambassadeur extraordinaire de l’Empereur, — il n’épargne ni le maréchal Davout, ce grand militaire et qui eut en face de l’ennemi, dans les moments les plus difficiles, de si belles inspirations couronnées par la victoire, ni Vandamme, alors persécuté, ni le duc de Bassano, dépouillé de tous ses pouvoirs et honneurs, ni personne…, ni M. 

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