j’avoue qu’alors il me prend quelque pitié de ce que la postérité, équitable, je le crois, mais aussi avidement curieuse, court risque d’accepter pour vrai et de recueillir pêle-mêle dans l’héritage des grands hommes. […] Le théâtre mis de côté, la satire, qui lui traversa l’esprit un moment, repoussée comme âcre et odieuse, il prit une grande et solennelle détermination : c’était de composer un poëme épique, un Clovis. […] Un académicien-poëte, à qui Béranger, encore inconnu, parlait un jour de ses idylles et du soin qu’il y prenait de nommer chaque objet par son nom sans le secours de la Fable, lui objectait : « Mais la mer, par exemple, la mer, comment direz-vous ? […] En janvier 1814, je le surprends qui fredonne encore à sa jeune maîtresse : Autant de pris sur l’ennemi ; l’année suivante, en juillet 1815, la voix tout émue, et d’un ton qu’il s’efforce en vain d’égayer, il soupire : Rassurez-vous, ma mie. […] C’est après une incubation plus ou moins longue qu’au moment souvent où il n’y vise guère, la nuit surtout, dans quelque court réveil, un mot, inaperçu jusque-là, prend flamme et détermine la vie.
« (Plusieurs membres se lèvent et semblent se disposer à prendre la parole.) […] Mais le Rapport n’a point fait cela : le Rapport a pris fait et cause pour une pétition ; il a pris feu ; il a accepté une liste dénoncée, telle quelle, il l’a produite, il l'a mise à son compte, — au compte du Sénat ; il l’a jugée et condamnée en masse ; il n’a apporté aucune réserve, aucun adoucissement, que dis-je ? […] Quant à ses idées, les politiques elles économistes savent aujourd’hui qu’il y a beaucoup à en profiter et à y prendre. […] J’en prends à témoin mon savant collègue M. […] Prenez-y garde !
Mais, on l’a vu, Boileau n’a jamais pris dans son tempérament particulier la règle de l’art. […] On comprend maintenant la portée que prend, dans l’Art poétique, après la Satire II, l’éternel débat de la rime et de la raison. […] Le seul caractère sur lequel tous les hommes puissent tomber d’accord, dans un poème, c’est la conformité de l’expression à l’objet, si l’objet est pris dans la nature. […] Il estimait sans doute que, quand par la probité absolue de son expression, l’artiste impose le sentiment de la réalité de l’objet qu’il exprime, si particulier que soit cet objet, la copie prend une valeur universelle et constante. […] Racine prend Phèdre, Iphigénie à Euripide ; Corneille emprunte son Cid à Guilhen de Castro.
C’est pitié de voir dans quel cercle tournent ces gens qui le prennent de si haut avec l’esprit humain. […] Bien lui a pris de la demander à un petit livre moins ambitieux, où il n’a rien mis de ses systèmes où, ce qu’il a rêvé est si supérieur à ce qu’il a pensé. […] C’était la différence d’un roman de fantaisie à un roman de cœur ; il prit peu à peu la première place, et il l’a gardée. […] Il est vrai qu’il y ramenait le public par l’imagination plutôt que par la science ; mais ce moyen n’était pas le plus mauvais, surtout dans notre pays, où la raison même, avant de prendre pied, a besoin de s’introduire comme une mode. […] Je pris le feuillet avec émotion, pensant y trouver le secret de ce travail supérieur qui, sous la plume des maîtres, amène les choses à la clarté, à la justesse éloquente, à l’accent.
Aborder Mirabeau en plein serait une rude tâche, et il n’est pas de ceux qui se laissent prendre de biais et qu’on effleure. […] Et déjà la marquise a pris son parti, déjà elle est résignée à tout. […] Je vous dirai ensuite les mesures que je compte prendre : vous les approuverez. […] Il avait pris l’heure du souper de nos gens pour s’introduire dans la maison, afin de n’avoir aucun domestique dans sa confidence. […] Le mot est pris d’Addison.
Ou plutôt, et pour prendre une comparaison plus noble et plus d’accord avec son caractère, André Chénier, par ses vœux, par ses souhaits, par ses chagrins d’honnête homme, par ses conseils et ses colères même, représente assez bien le chef du chœur dans les anciennes tragédies. […] La forte impulsion donnée à une si pesante masse la fait vaciller quelque temps avant de pouvoir prendre son assiette. […] Tout à l’heure, c’était l’écrivain et l’homme de goût, dans Chénier, qui se révoltait contre Manuel ; ici, c’est le militaire qui prend feu contre Collot d’Herbois, c’est le gentilhomme qui a porté l’épée et qui sait ce que c’est que la religion du drapeau. […] C’est à toute la jeunesse du royaume, à toutes les gardes nationales, de prendre les couleurs du deuil, lorsque l’assassinat de leurs frères est parmi nous un titre de gloire pour des étrangers. […] Pastoret ; il y fut rencontré par le commissaire et ses acolytes qui y faisaient, de leur côté, une visite domiciliaire, et qui prirent sur eux de s’assurer de sa personne, sans ordre et par mesure de précaution.
On me dit que j’obéis à mon médecin : oui, mais je le choisis et j’en puis prendre un autre ; il n’est pas mon maître, je ne suis pas son sujet. […] Nous sommes loin de soutenir que la passion de l’égalité n’ait pas d’autres principes que celui qu’on vient d’indiquer : les uns légitimes, mais inférieurs, comme l’amour du bien-être, d’autres plus bas encore et tout à fait illégitimes, comme l’envie et les appétits brutaux ; mais si l’on prend les aristocraties par leurs grands côtés, il faut prendre aussi les démocraties par ce qu’elles ont de grand. […] Sans doute une majorité toute-puissante, comme en Amérique, peut empêcher l’individu de penser ce qui ne lui convient pas ; mais il restera toujours un champ très-étendu de pensée libre, et de ce retranchement la liberté pourra toujours faire peu à peu des sorties et prendre pied sur le terrain qui lui est interdit. […] Il n’avait pas atteint cette sphère où la religion ne nous laisse plus rien qui ne prenne sa forme et son ardeur. […] Il mériterait, suivant moi, d’être traité à part, car enfin nous ne prenons ni l’un ni l’autre au pied de la lettre, et comme règle de morale publique, de rendre à César ce que nous lui devons, sans examiner quel est César, et quel est le droit et la limite de sa créance sur nous.
Mais à cette idée nous nous sentions pris de timidités invincibles. […] Il prenait avec intelligence le mouvement indiqué et savait tenir la pose, qualité rare ! […] Ici la façon est toute différente : l’huile prend une fleur de pastel. […] Le poète prenait quelquefois le crayon et le peintre la plume. […] Le drame venait de la prendre au mélodrame ; la poésie au patois du boulevard.
Après avoir assisté pendant des heures à ces débats, souvent aussi éloquents que confus, sans prendre une note, mais aussi sans se dissiper en paroles, il rentrait chez lui tout plein de ce qu’il avait entendu, et il le jetait sur le papier avec feu et avec netteté dans un travail de soirée et de nuit, où sa plume, si hâtée qu’elle fût, ne rencontrait jamais un mot douteux ni une locution louche : il ne pouvait parler ni écrire d’autre langue que celle de sa famille et de sa maison, celle qu’il tenait de son illustre père, et de ses premiers maîtres, de ses premières lectures d’enfance. […] Lisant sans autre but que de s’instruire et de se charmer, de revenir à la source de la juste éloquence et des pensées salutaires, il n’a guère pris la plume en littérature que pour exprimer ce sentiment vif, l’amour et le goût des bonnes et vieilles œuvres. […] Rien n’est si aisé que de traduire Cicéron, si l’on se contente d’exprimer en gros le sens de la phrase : Cicéron n’est pas seulement le plus clair, il est le plus lumineux des écrivains ; rien n’est si difficile, si l’on veut pénétrer dans les nuances, saisir ce rayon fugitif qui brille en passant dans chaque expression, ne jamais prendre pour des synonymes ces mots qui ne complètent l’harmonie de la période qu’en représentant toutes les faces de la pensée. […] Il ne s’agit que de prendre les gens à leur heure et à leur moment, dans ce qu’ils aiment à la folie. […] Aussi, sans viser à l’originalité dans la critique, et par la seule droiture de son goût, par l’incorruptible fidélité de ses affections comme de ses répugnances, il remplit parmi nous une place à part, il tient un coin qu’on ne prendra pas et qui n’est qu’à lui.
Pour mes nuits sans sommeil et mes travaux sans fruit, Pour ma vie en ruine et mon bonheur détruit ; Pour les pleurs trop amers que je n’ai pu répandre, Pour mon foyer en deuil dont ils ont pris la cendre, Pour ma moisson brûlée et mon champ dévasté, Pour le mal qu’ils m’ont fait et qu’ils m’ont souhaité, Qu’ils soient tous… ah ! […] Il a, dans son talent monocorde et dans sa destinée, quelque chose d’essentiellement local ; il gagnera à être pris dans son cadre. […] Je ne saurais m’enfoncer dans une étude ; j’effleure la corbeille si remplie qui nous est offerte, je prends le dessus du panier. […] Le poëte prend son parti du labeur et de la peine que tout noble effort suppose, surtout quand il s’agit d’associer des contraires, de ne rien sacrifier, de ne verser d’aucun côté, de ne donner ni dans un idéal trop subtil et trop froid, ni dans une matière trop sensuelle et trop colorée. […] Ce qui veut dire que le studieux et le rêveur lui-même, celui qui autrefois eût été le clerc ou le moine dans sa cellule, et qui hier encore était l’homme de livres et de cabinet, va en chemin de fer et en profite désormais pour visiter le monde, pour prendre sa part de toutes les curiosités, de toutes les beautés d’art ou de nature.
Un individu humain quelconque, bien organisé toutefois, pris au hasard dam l’époque présente ou dans toute autre époque, et se traitant lui-même par la méthode expérimentale intérieure, découvrira, autant qu’il est donné à l’homme de le faire, sa destinée propre, et la destinée des autres hommes ses semblables, et la destinée de l’espèce tout entière ; il saura déterminer, autant que cela nous est possible, la loi du passé et de l’avenir de l’humanité. […] Selon les temps, cette inspiration diffère ; la voir invariablement sous certaines formes déjà produites, c’est ne pas aller au fond et en prendre une pauvre idée. […] Dire qu’une nouvelle religion est impossible parce qu’elle ne saurait plus offrir ces phénomènes singuliers qui ont entouré le berceau des religions anciennes, c’est se prendre aux apparences et ne pas tenir compte des circonstances différentes ; c’est comme si l’on objectait aux philosophes eux-mêmes que toute philosophie est désormais impossible, parce que Socrate, leur père, croyait à un démon familier, et que pareille chose probablement n’arrivera plus. […] Vous la supposez dès l’abord à votre insu, et vous serez ensuite tout heureux de la découvrir ; mais prenez-y garde, et ne croyez pas avoir saisi la clef des choses, car c’est vous qui l’y aurez mise. […] Il ne faut pas prendre ici l’expression actif dans le sens que lui donnent les psychologistes.
Ils prenaient quatre sols de salaire par tête de tous les Français, et il y avait tel concours, que les quatre meilleurs prédicateurs de Paris n’en avaient pas tous ensemble autant quand ils prêchaient. » Cet empressement du public se comprend aisément. […] Quoique tout n’eût pas été agrément dans l’excursion des premiers Gelosi en France, les troupes de comédiens italiens prirent tour à tour le chemin de Paris. […] Je pris de la main gauche le trésorier et m’en servis comme d’un bouclier ; et, tirant Durandal du fourreau, je la dirigeai vers le roi qui s’avançait pour me frapper ; d’un coup, je fendis le pavé, j’ouvris la terre jusqu’aux abîmes où Neptune fut frappé de stupeur. […] Quand je fus sorti du palais, arrivé sur la place, je te pris mon trésorier par un pied et le lançai en l’air jusqu’à la voûte du ciel. […] De ce livre imprimé du temps de Henri IV, j’ai pris le dessin de l’habit d’Arlequin. » Ce costume, comme on le voit, est bien différent de celui qu’Arlequin adopta par la suite : il porte ici une jaquette ouverte par devant et attachée par de mauvais rubans ; un pantalon étroit, collant, couvert de morceaux d’étoffes placés au hasard, et sans doute de diverses couleurs.