demain, après-demain, tout sera remis en question et à demi oublié par de nouveaux arrivants, par des recrues ignorantes et insolentes qui ne vous ont pas vu, qui ne vous ont pas connu, et qui sont disposées à douter de tous ces grands exploits dont on leur parle et dont ils demandent la preuve actuelle et présente. […] Je suppose qu’une ou deux de ces grandes séries aient paru, non pas arrangées, non pas triées et écourtées, mais telles quelles, par une de ces indiscrétions et de ces imprudences heureuses dont tout le monde profite ; que cette âme vive, émue, expansive, passionnée et généreuse, magnanime, pour tout dire, cette intelligence avide, empressée, ouverte de toutes parts, divinatrice et sympathique, touchant au génie, se soit montrée et comme versée devant tous dans une multitude de lettres familières, affectueuses, éloquentes, inachevées chacune, mais s’achevant l’une l’autre : les nouvelles générations auraient fait connaissance avec elle plus directement encore que par les livres ; elle ne serait pas restée une gloire aristocratique, la plus haute renommée de salon, mais s’y renfermant ; elle balancerait Chateaubriand non seulement de mérite et de nom, mais de fait ; elle serait lue et encore présente au milieu de nous ; on la discuterait.
On sourit à lire ce Journal qui est vraiment de morale autant que de médecine : quelquefois le roi tient bon contre les tentations, contre celle des beaux muscats, par exemple, qu’on lui présente un jour sans qu’il veuille en goûter ; d’autres fois, et le plus souvent, il fait comme nous, il cède. […] Le Roi qu’après cette lecture le Louis XIV, tel qu’il sort pour nous des mains de ses premiers médecins, « n’est plus le brillant héros que l’histoire nous a dépeint, mais bien un jeune homme valétudinaire, atteint successivement de maladies fort graves, puis un homme toujours souffrant, condamné à un régime sévère, obligé de supporter de graves opérations, et enfin, un vieillard podagre, continuellement tourmenté par la gravelle, dont la gangrène vient enfin terminer l’existence. » Ce portrait est trop noir ; cette suite de maladies et d’indispositions présentées en détail et à la file fait un tableau trop sombre ; nous ne voyons pas assez les intervalles, les saisons de bonne santé, les mortes-saisons du médecin ; et puis il y a dans tout cela maint malaise qui, dans une vie ordinaire et où l’on n’aurait pas le temps de s’écouter, ne compterait pas.
Le ci-devant Roi des halles, chef des importants et des frondeurs, le prince du sang, victorieux et altier, sans mesure et sans scrupule, qui avait songé à détrôner le jeune roi, tout cela redevenu domestique et respectueux et humble, c’était à faire louer Dieu de la paix présente, ajoute la sage Mme de Motteville. […] Condorcet lui-même, dont le nom se présente d’abord comme celui de l’apôtre puni de son zèle et le plus cruellement déçu dans son ardente poursuite, ne s’est pas tant trompé qu’il semble, et quoiqu’il se mêlât à sa foi dans l’avenir un fanatisme que je n’aime nulle part, il n’a pas désespéré du progrès en mourant, et il a bien fait.
En supposant que ces machines si compliquées sortent des villes tyriennes, l’auteur croit parer à l’objection qui se présente naturellement : comment ces barbares, fortuitement ramassés et coalisés, auraient-ils trouvé tant d’habiles ingénieurs et des Archimèdes improvisés ? […] Il nous présente, sur la foi de je ne sais quelle lettre d’un ami et confident, M.
sinon que, présente avec ce soldat, tu sois comme absente ; que jour et nuit tu m’aimes, que tu me regrettes, que tu rêves de moi, n’attendes que moi, ne penses qu’à moi ; que tu m’espères, etc. » Ce qu’André Chénier a trouvé moyen, en transposant la situation, de traduire dans ces beaux vers d’élégie : Ce que je veux ? […] Présente au milieu d’eux, sois seule., sois absente ; Dors en pensant à moi ; rêve-moi près de toi ; Ne vois que moi sans cesse, et sois toute avec moi !
De cette manière, le roi paraîtra faire justice et la fera en effet, et la Chambre, en adjugeant à l’évêque ce qui lui appartient, réunira à la couronne de Sa Majesté la souveraineté des lieux que les évêques auront fait assigner… Afin de ne point faire trop de bruit, il ne faut comprendre dans une même requête que cinq ou six villages, et, de huitaine en huitaine, en faire présenter sous le nom de chacun desdits évêques, moyennant quoi, en peu de temps, l’on aura fait assigner tous les lieux qu’on peut prétendre avoir été autrefois desdits évêchés. » La tactique est assez nettement indiquée ; on voit la marche de cette politique rongeante qui bientôt ne se contenta point d’absorber les petits feudataires enclavés, mais qui s’essayait parfois à sortir du cercle et à pousser jusqu’en pays allemand, à la grande clameur des seigneurs, princes ou même rois qui se sentaient atteints. […] C’est la gloire de Louvois qui, parmi tant d’annexions téméraires et caduques, a donné Strasbourg à la France. » A qui eût regardé une carte du royaume, Strasbourg, en effet, présentait une anomalie frappante : enclavée dans le territoire français, dans l’Alsace acquise depuis le traité de Munster, cette petite république ou ville libre faisait l’effet d’un îlot à demi noyé par l’Océan.
Toutes ces choses ne sont que momentanées… Le roi désire plus ; il voudrait que Votre Majesté lui rendit tous les bons offices à la Cour de Russie (sur laquelle l’on est persuadé ici que nous influons beaucoup) pour qu’elle ne se mêle point de la présente guerre… » En résumant, pour finir, tous les avantages que trouve le roi de Pologne à cette alliance française, l’esprit de famille à son tour triomphe chez Maurice, et le fils de race saxonne s’applaudit : « Enfin, Sire, que vous dirai-je ? […] » Une réflexion cependant se présente, et je la glisse en passant : c’est que, dans le désir qu’il avait de faire sauter les deux d’Argenson, et surtout le second, le maréchal ne réussit que pour le marquis, c’est-à-dire celui qui était déjà condamné : preuve qu’il n’avait nullement cette toute puissance qu’on lui attribue.
Ainsi, dans les Réflexions sur l’État de l’Église, de 1808, la puissance spirituelle n’est pas présentée encore comme la supérieure et la régente du pouvoir temporel : ce sont plutôt aux yeux de l’auteur deux alliés qui s’entr’aident. […] Il y a dans sa conduite d’alors et dans sa tendance d’aujourd’hui cette véritable, cette seule ressemblance, à savoir qu’il ne s’est jamais borné et même qu’il n’a guère jamais aimé à envisager le christianisme, comme tant de grands saints l’ont fait, par le côté purement intérieur et individuel, par le point de vue du salut de l’âme et des âmes prises une à une, mais qui l’a embrassé toujours de préférence (et en exceptant, si l’on veut, son Commentaire sur l’Imitation et sa traduction de Louis de Blois) par le côté social, par son influence sur la masse et sur l’organisation de la société ; et c’est ainsi qu’il se portait avant tout pour la défense des grands papes et des institutions catholiques. « Jésus-Christ, disait-il en 1826, ne changea ni la religion, ni les droits, ni les devoirs ; mais, en développant la loi primitive, en l’accomplissant, il éleva la société religieuse à l’état public, il la constitua extérieurement par l’institution d’une merveilleuse police, etc. » Toutefois les moyens que M. de La Mennais proposait et exaltait jusqu’à la veille de juillet 1830 étaient, il faut le dire, séparés du temps actuel et de sa manière de penser présente par un abîme.
On a eu raison de louer le Cantique sur la mort de madame de Broglie ; j’y remarque pourtant des longueurs qui nuisent à l’effet, quelques mots discordants, et surtout un manque de décision dans le sentiment religieux avec lequel il eût fallu aborder cette admirable personne, d’une foi si précise, et dont l’âme présente doit, ce semble, moins que jamais souffrir rien d’évasif à ce sujet. […] Alors il n’y avait qu’un homme ou plutôt un demi-dieu, Louis XIV, le Roi, qui fût en scène de la tête aux pieds, et il y restait, il est vrai, depuis le lever jusqu’au coucher, dans toutes les situations les plus privées, depuis la chemise que lui présentaient ses gentilshommes, jusqu’à ses amours dans les bosquets que célébraient les peintres et que roucoulaient les chanteurs.
Aura-t-on à présenter, sous les phénomènes excentriques éclatants qui illustrent et compromettent aussi une époque, et dans l’entre-deux de ces hasards de génie aussi souvent insensés que glorieux, un fonds plus sage, un corps de réserve et d’élite encore, rebelle à entamer, sensé, judicieux, fin, mesurant applaudissement ou sentence sur ce qui joue et brille ou s’égare devant lui ? […] Cet article, qui avait pour but de rallier à la Revue des Deux Mondes un groupe d’écrivains et de critiques, présente sur la plupart des personnages littéraires une suite d’aperçus qui tiennent au courant et qui sont comme des appoints aux précédents portraits.
Le code des devoirs est présenté par Cicéron avec plus d’ensemble, plus de clarté, plus de force, que dans aucun autre ouvrage précédent. […] Le caractère romain était un modèle auquel tous les grands hommes adaptaient leur nature particulière ; et les écrivains moralistes présentaient toujours le même exemple.
Les littératures étrangères et populaires ont présenté des types inconnus de beauté ; les sciences ont fourni leurs méthodes et leurs systèmes pour fonder de nouvelles doctrines esthétiques et critiques. […] On pourrait se demander si, à l’heure présente, ne commence pas, avec les décadents et les symbolistes, une ondulation nouvelle, en sens inverse du naturalisme, et qui emporterait de nouveau la littérature vers un idéal contraire à celui de Boileau.