Elle le cloua au trône, pour que le trône fût l’instrument de ses tortures et enfin de sa mort. […] Le gouvernement, attentif aux moindres symptômes, fut tout entier debout avant le jour ; il donna le commandement général de toutes les forces que nous avons énumérées au général ministre de la guerre, pour qu’un déploiement imposant et soudain de ces forces décourageât alors tout ce petit groupe de factieux sans chefs. […] On emporta les restes de Louis XVI dans un tombereau couvert au cimetière de la Madeleine, et on jeta de la chaux dans la fosse, pour que les ossements consumés de la victime de la Révolution ne devinssent pas un jour les reliques du royalisme.
C’est le coup sourd des vagues qui s’amoncellent et qui viennent de minute en minute heurter les flancs du vaisseau ; ce sont les plaintes des madriers et des solives qui, dans cet immense chantier flottant, tendent à se détacher les uns des autres pour reprendre leur liberté ; ce sont les sifflements des ailes du vent à travers les voilures, dont cinq cents matelots intrépides prennent les ris ; le tumulte des hommes sur le pont tremblant, la voix et le sifflet du commandant, les voiles qui se déchirent et qui emportent dans les airs la force échappée de leurs plis, les mâts surchargés qui se rompent et qui tombent avec leurs vergues et leurs cordages sur les bastingages, le pas précipité des matelots courant où le signal les appelle, les coups de haches qui précipitent à la mer ces débris pour que leur poids ajouté au roulis du navire ne l’entraîne pas dans l’abîme ; le tangage colossal de ces débris mesuré par six cents pieds de quille, tantôt semble gravir jusqu’aux nuages la lame écumeuse et la diriger en plein firmament, tantôt, arrivé au sommet de la vague, se précipiter la tête la première, les bras des vergues tendus en avant dans l’abîme où il glisse, le gouvernail touchant au fond de l’océan ; les matelots suspendus aux câbles décrivent des oscillations gigantesques sur l’arc des cieux ; les canons détachés de leurs embouchures roulent çà et là sur les trois ponts avec des éclats de foudre ; à chaque effondrement du vaisseau entre des montagnes d’écumes qui semblent l’engloutir, un cri perçant monte de la prison des condamnés, puis des voix de femmes et d’enfants qui croient toucher à leur dernière heure. […] Cet effet est dû au grandiose de l’architecture, et aux soins infinis que l’on se donne pour que tout, dans Saint-Pierre, rappelle au voyageur qu’il est dans le palais d’un Dieu. » XV « Vous savez que Bramante avait élevé jusqu’à la corniche les quatre énormes piliers de la coupole, qui ont chacun deux cent six pieds de circonférence. […] Pour que l’œil soit satisfait, le contour extérieur de la partie sphérique d’une coupole ne doit pas être le même que le contour intérieur ; la coupole de Saint-Pierre a deux calottes, et entre les deux rampes l’escalier par lequel on monte jusqu’à la boule.
Il y eut assez d’unité morale, d’homogénéité sociale, pour que l’épopée, cette expression synthétique des époques primitives, se développât puissamment. […] Mais pour que le métier soit productif, pour que le jongleur gagne et puisse bien payer le trouvère, il faut plaire à l’auditoire : son goût fera la loi.
Magistrats de nuit, les aréopagites ne siégeaient que dans les ténèbres, pour que le visage du prévenu ne pût les émouvoir par ses angoisses, ni les attendrir par ses larmes. […] Tout à l’heure, elle leur disait avec une déférence respectueuse : — « Comment faire pour que vous ne me reprochiez rien ? […] Pour que l’humanité fût délivrée des traditions de mort qui pesaient sur elle, il fallait que des dieux meilleurs l’eussent emporté sur les divinités féroces des vieux âges, il fallait aussi que ces divinités de terreur, subalternisées mais non abolies, se transformassent elles-mêmes, en se ralliant à l’ordre nouveau.
Si la trilogie doit être tétralogie, si la représentation doit se terminer par une pièce à satyres, si les faunes, les aegipans, les ménades, les chèvre-pieds et les évans doivent venir à la fin faire des farces, si parmi les comédiens, presque prêtres, et qu’on nomme « les hommes de Bacchus », on doit avoir l’acteur favori qui excelle dans les deux modes de déclamation, dans la paraloge aussi bien que dans la paracatologe, si le poëte est assez aimé de ses rivaux pour qu’on ait la chance de voir dans le chœur figurer des hommes célèbres, Eupolis, Cratinus, ou même Aristophane, Eupolis atque Cratinus, Aristophanesque poetae, comme dira un jour Horace, si l’on joue une pièce à femmes, fût-ce la vieille Alceste de Thespis, tout est plein, il y a foule. […] Vers le temps où Jésus-Christ était peint sur les murailles, à Rome, avec des sabots d’âne et cette inscription : Le Dieu des chrétiens ongle d’âne, au troisième siècle, pour qu’on fît de Tacite dix copies par an, ou, comme nous parlerions aujourd’hui, pour qu’on le tirât à dix exemplaires, il a fallu qu’un césar s’appelât Tacite et crût Tacite son oncle.
On s’aperçut que c’était là des beautés absolument neuves ; mais Corneille et Racine n’en avoient pas encore appris assez à la nation pour qu’elle pût saisir tout ce qu’un pareil ouvrage avait d’étonnant. […] Il faut plus d’une génération pour que les connaissances, s’étendant de proche en proche répandent un grand jour sur les monumens du génie. […] Réunissez dans les mêmes honneurs ces deux hommes trop grands pour que la nature ait pu les réunir dans un même siècle ; et mettez sur leurs statues cette inscription qui les caractérise et qui sera la leçon de tous les âges, le beau et le vrai.
Eu supposant qu’ils eussent influé sur l’animal « aux têtes frivoles » des salons et des boudoirs, auraient-ils assez régné sur la partie vraiment intellectuelle de la société à laquelle ils appartenaient pour que toute une littérature les reflétât et les caressât en les reflétant, comme un miroir d’Armide tenu par des mains amoureuses ? […] Mais en attendant ce résultat funeste, que la Critique doit montrer de loin à Gustave Doré pour qu’il s’efforce de l’éviter, il s’est rencontré que la manière du jeune artiste, de ce créateur, difficile à classer, qui se joue des formes en leur communiquant la vie, a trouvé son emploi le plus heureux dans les Contes drolatiques de Balzac. […] Ils ont introduit l’anarchie dans l’ordre et la hiérarchie de Balzac, comme si le génie des plus grands écrivains ne leur avait été donné que pour que des éditeurs pussent s’y vautrer tout à leur aise.
. — Il fallut sans doute plus d’un siècle après le déluge pour que la terre moins humide pût exhaler des vapeurs capables de produire le tonnerre. […] Pour que les hommes se décident à abandonner pour toujours la terre où ils sont nés, et qui naturellement leur est chère, il faut les plus extrêmes nécessités. […] Ils ont cru que les nations païennes, dès leur commencement, avaient compris l’équité naturelle dans sa perfection idéale, sans réfléchir qu’il fallut bien deux mille ans pour qu’il y eût des philosophes, et sans tenir compte de l’assistance particulière que reçut du vrai Dieu un peuple privilégié.
Il fit faire des enquêtes exactes par toutes les provinces, pour que, si quelqu’un avait à réclamer contre quelque injustice ou exaction commise en son nom, elle fût réparée. […] Cet abbé de Cheminon lui donne l’écharpe et le bourdon, et le voilà parti en pèlerin, pieds nus et en chemise, faisant visite à tous les saints lieux d’alentour, sans plus devoir rentrer à son château jusqu’à ce qu’il revienne de Palestine ; et en passant d’un de ces lieux des environs à l’autre, « pendant que j’allais, dit-il, à Blécourt et à Saint-Urbain, je ne voulus jamais retourner mes yeux vers Joinville, pour que le cœur ne m’attendrît pas trop, du beau château que je laissais et de mes deux enfants ».
Des divers ouvrages qu’il a publiés et qui sont à emporter en voyage, on peut surtout conseiller ses Promenades dans Rome ; c’est exactement la conversation d’un cicerone, homme d’esprit et de vrai goût, qui vous indique en toute occasion le beau, assez pour que vous le sentiez ensuite de vous-même si vous en êtes digne ; qui mêle à ce qu’il voit ses souvenirs, ses anecdotes, fait au besoin une digression, mais courte, instruit et n’ennuie jamais. […] avoir trop vu l’Italie, avoir trop compris le xve siècle romain ou florentin, avoir trop lu Machiavel, son Prince et sa vie de l’habile tyran Castruccio, a nui à Beyle pour comprendre la France et pour qu’il pût lui présenter de ces tableaux dans les justes conditions qu’elle aime et qu’elle applaudit.
On avait cherché à diminuer le nombre croissant des candidats aux carrières dites libérales, en n’admettant que les seuls d’entre eux vraiment capables ; les épreuves imposées étaient devenues plus sérieuses, plus difficiles : on faisait la barrière plus haute, pour que tous indifféremment ne pussent la franchir. […] Sous le précédent Empire, il y a près de cinquante ans déjà, lorsque l’Université eut sa fondation et sa renaissance, bien des débris vivaient encore, bien des germes fermentaient qu’il suffisait de rapprocher et de mettre en contact pour qu’il en sortît des productions variées et puissantes.
Il faut que ce soit un Français aussi Français que Voltaire qui dise de ces choses à sa nation d’alors et d’autrefois pour qu’on se permette de les répéter. […] Si Voltaire avait été ministre, il y a des jours où Mme Denis aurait été obligée de l'enfermer sous clef et de le cacher, pour qu’il ne parût pas un enfant.