Madame a un mal au pied (les engelures par suite du froid), et qui se complique d’un mal plus intérieur. […] « Je n’aime pas les scènes », dit-elle un jour un peu brusquement à une femme qui, aux Tuileries, se jetait à ses pieds sur son passage pour la remercier d’un bienfait.
Blanc eut beau se jeter à ses pieds, exprimer son désespoir, son besoin d’embrasser sa femme et ses enfants, le général parut impitoyable et donna ordre de le rembarquer et de le remmener à terre. […] Le talent proprement dit, l’art d’écrire lui vient chemin faisant ; il dira à propos des sépulcres restés vides, qui furent construits près de Jérusalem par Hérode le Tétrarque : « Alors, comme à présent, il y avait des grandeurs passagères ; et des tombeaux promis et élevés ne recevaient pas les cendres qui devaient les occuper. » Mais c’est l’Égypte surtout qui est le but où tend le voyageur ; il y retrouve, en y mettant le pied, les souvenirs présents et les émotions héroïques de sa jeunesse.
Le lent et sourd accroissement de l’angoisse morale de Raskolnikoff, le vertige et l’oppression de son projet, qu’il apercevait vague et cependant fatal dans le délabrement de ses forces, son sourd malaise une fois le sang versé, et l’étrange sensation de retranchement qui le prend, le lâche et le tient quand il revoit sa mère et sa sœur, la cruauté de se sentir interdit à leurs caresses et de ne pouvoir leur parler que les yeux détournés vers l’ombre ; puis la terreur croissante et une sorte d’ironique rudesse s’installant dans son âme, qui l’introduisent à revisiter le lieu du crime, et à machiner de singulières mystifications qui le terrifient tout à coup lui-même — ces choses lacèrent son âme et rompent sa volonté ; ainsi abattu et ulcéré, il est amené d’instinct à visiter Sonia, et à s’entretenir avec elle en phrases dures, qu’arrête tout à coup le sanglot de sa pitié pour elle, pour lui et pour tous, en une crise où il sent à la fois l’effondrement de son orgueil et la douceur de n’être plus hostile ; des retours de dureté, la sombre rage de ses premières années de bague, l’angoisse amère d’un cœur vide et murmurant, conduisent à la fin de ce sombre livre, jusqu’à ce qu’en une matinée de printemps, au bord des eaux passantes d’un fleuve, que continue au loin la fuite indécise de la steppe, il sente, avec la force d’eaux jaillissantes, l’amour sourdre en lui, et l’abattre aux pieds de celle qui l’avait soulagé du faix de sa haine. […] Malade de la névrose épileptique, ayant passé en sa jeunesse par le choc effroyable d’une condamnai ion à mort, et gracié les pieds sur l’échafaud, pour aller traîner des années dans un bagne en Sibérie avec toute la vermine d’une société primitive, il vécut ensuite sous le ciel, « saturé d’encre », de Saint-Pétersbourg, et promena dans cette sombre ville, dure aux pauvres, sa silhouette râpée.
La France répresentée par une femme la couronne fermée en tête, le sceptre à la main et couverte d’un manteau bleu semé de fleurs de lys d’or : le Tibre répresenté par une figure d’homme couché, aïant à ses pieds une louve qui allaite deux enfans, sont des personnages allegoriques inventez depuis long-tems et que tout le monde reconnoît pour ce qu’ils sont. […] Je consens donc que la foi et l’esperance soutiennent un mourant, et que la religion paroisse affligée aux pieds d’un évêque mort.
Tout est, en ce moment du xixe siècle, plongé dans un matérialisme qu’on ne sait plus, pour peu qu’on respecte sa langue, même comment nommer, mais les poètes modernes, de cela seul qu’ils sont des poètes, ont l’horreur instinctive de cette fange dont ils veulent dégager leurs pieds divins, et ils les en arrachent pour ne pas être étouffés par elle. […] Le serpent charmeur des soirées de Paris n’était plus pour eux qu’un clown déhanché qui, la sébile aux pieds, jouait l’épileptique de grand chemin.
L’abbé Roque, épris de la comtesse de Manteigney, est certainement coupable aux yeux de Dieu, des hommes et de lui-même ; mais il combat avec fureur contre sa passion qui ne l’a égaré qu’une seule fois, mais il est dévoré de remords, mais il se met humblement au pied de la croix, mais, tout le reste de sa vie, il est irréprochable, héroïque et sublime. — Et lorsque, dans le roman de Droz où la Comédie alterne avec le Drame, Larreau, le père de la comtesse, qui dès le premier jour a visé ce prêtre pour son miracle et veut, à force de sophismes et de bagout industriel et progressif, et même religieux, le faire complice de son grotesque et abominable mensonge, le prêtre indigné, dont la colère monte devant le Seigneur, ne fléchit pas une minute dans son indignation et sa colère, — une colère terrible ! […] Exemple : la scène du rendez-vous dans la montagne avec la petite chevrière aux pieds nus, qui est si maigre, qu’a séduite le comte de Manteigney, et sa manière de faire l’amour.
Kahn et Vielé-Griffin, parmi bien d’autres, demandent l’entier rejet de règles imposant aux vers un nombre déterminé de pieds. […] Laissons-nous persuader Au souffle berceur et doux Qui vient à tes pieds rider Les ondes de gazon roux.
On garde fidèlement l’ordre naturel des pensées, on s’attache aux transitions, on marche pas à pas sans poser jamais un pied plus vite ni plus loin que l’autre, et avec la régularité d’une procession. […] Il amène un réformé aux pieds de sa dame ; aux affirmations des catholiques, il joint le témoignage d’un ministre protestant inconnu, qu’il découvre exprès, Pierre Dubosc. — C’est trop peu encore ; il énumère tous les portraits de Mme de Longueville, peintures, gravures, émaux, médailles.
II Tel est cet orateur que l’imagination poétique et l’esprit d’érudition ont promené dans l’érudition et égaré dans la philosophie, qui, après avoir voyagé parmi divers systèmes et hasardé un pied, et même deux pieds, dans le panthéisme, est venu se rasseoir dans les opinions moyennes, dans la philosophie oratoire, dans la doctrine du sens commun et des pères de famille ; qui, pensant faire l’histoire du dix-septième siècle, en a fait le panégyrique ; qui, croyant tracer des portraits et composer des peintures, n’a su que recueillir des documents et assembler des textes ; mais qui, dans l’exposition des vérités moyennes et dans le développement des sujets oratoires, a presque égalé la perfection des écrivains classiques, et qui, par la patience de ses recherches, par le choix de ses publications, par la beauté et la solidité de ses monographies, a laissé des modèles aux érudits qui continueront son œuvre, et des matériaux aux philosophes qui profiteront de son travail.
Amour était sur le point de mettre un pied dedans, lorsque Folie s’avance, l’écarte, et passe la première. […] Il était en chemise et pieds nus, et il disait en riant : — Je ne reprocherai jamais à la guerre de m’avoir dépouillé. […] Il venait de mettre pied à terre à la porte d’une hôtellerie, lorsqu’un cavalier inconnu l’assaillit brusquement. […] Il rêvait de réformer l’orthographe selon les principes du savant Ramus, et d’adapter les pieds et les mesures de l’ancienne poésie. […] Au pied de cette roche, Que de ces tristes murs nous voyons la plus proche.
Son miroir d’abord, et ensuite les figures croisées sur le boulevard, lui révèlent ces Caligula, ces Néron, ces Commode au petit pied, que la société tient enchaînés dans leurs rêves. […] on m’aurait vu m’en retourner à pied ! […] Un de ses pieds, un pied bleuâtre et stigmatisé, rencontre au bas de la croix l’épaule nue de Madeleine. […] « Malgré moi j’ourdissais des plans abominables ; et chaque jour Madeleine, à son insu peut-être, mettait le pied dans des trahisons. […] Mettre sur pied quelques pages sur Rousseau, pour une publication, lui coûte une peine infinie, des semaines de travail inhabile et gauche.
A gauche, au pied de la montée, commence la plaine : le village est là avec son enclos de verdure, et sa flèche qui domine ; on distingue en avant les sillons des pièces labourées et les plans potagers des jardins, mais au delà du village la plaine fuit en s’élargissant ; les fermes et les enclos s’y effacent ; la rivière y serpente comme un filet ; le ciel est voilé, bien que spacieux, et de grands nuages échevelés le parcourent, venus de l’Océan ; pourtant çà et là il est crevé en azur, et quelque rayon effleure par places le lointain de la plaine : une fumée montante anime le fond et se détache en tournoyant sur l’uniformité bleuâtre des horizons redoublés qui se confondent avec le gris plus foncé des nuages.