On aurait tort, selon nous, de voir là-dedans un pas rétrograde de M. de Lamartine vers la philosophie humaine et un ébranlement de cette conviction ferme et durable dans laquelle ses Méditations nous font montré établi. […] C’est ce qui fait, selon nous, que, dans tout ce que ces derniers volumes renferment de philosophie religieuse et de débats intérieurs, la décision est moins rapide, le cri de victoire moins triomphant, que dans les Méditations.
Cet héritage de la tradition n’a pas seulement enrichi les croyants et les dociles ; tous y ont participé, et pendant un long temps ceux mêmes qui se sont le plus écartés de l’unité de foi n’ont jamais renié les principes essentiels de la philosophie chrétienne. […] Nul effort, nulle réflexion pénible pour arriver où sa philosophie nous porte.
L’éloquence enfin, quoiqu’elle manquât sans doute, chez la plupart des modernes, de l’émulation des pays libres, a néanmoins acquis, par la philosophie et par l’imagination mélancolique, un caractère nouveau dont l’effet est tout-puissant. […] Enfin ce que la morale de l’Évangile et la philosophie prêchent également, c’est l’humanité.
Il a dit encore : — Dispense-moi du labeur grossier et je t’ajusterai des philosophies ingénieuses qui t’expliqueront l’univers. […] Ô mes frères en prostitution, saluons nos trois héros : Saint Paul qui adresse aux Romains et aux Corinthiens de sublimes épîtres, mais qui se refuse aux simonies, qui ne vit ni de l’autel ni de la parole, qui, pour avoir à manger, tisse des tentes ; — saint Spinoza qui compose la plus logique ou creuse la plus profonde des philosophies, mais qui, ayant besoin chaque jour de quelques grains de gruau pour soutenir son corps ascétique, ne veut pas les obtenir comme professeur, méprise les chaires offertes et polit des verres de lunette ; — saint Tolstoï, le plus noble génie de notre temps, qui donne ses livres libérateurs et ne se reconnaît le droit de dîner que lorsqu’il a raccommodé une paire de souliers.
Quoi qu’il en soit, il est intéressant pour la philosophie de rechercher ce que la science a pu découvrir jusqu’ici dans cette voie si nouvelle, si obscure, si délicate. […] Tandis que certains physiologistes portaient leurs études jusque sur les confins de la philosophie, il est juste de dire que les philosophes de leur côté essayaient une marche en sens inverse.
Il y a eu de la philosophie avant Socrate et de la science avant Aristote. […] Rapports entre la philosophie, la vie et le caractère de Schopenhauer, Le bonheur et le malheur sont subjectifs. […] Il n’y en a pas de pire que celui de professeur, de professeur de philosophie surtout. […] C’est là « la haute et sévère philosophie de nos œuvres naturalistes ». […] Comme dit la chanson, c’est la nature qui est cause de tout Il importe d’avoir cette philosophie bien présente à l’esprit.
Bientôt cette littérature, cette poésie et cette philosophie émigrées s’allièrent par la sympathie du malheur avec tout ce qui avait survécu des lettres en France. […] Homme tout oriental comme son île, et nullement homme européen de son siècle, tout son rôle semblait être de déplacer violemment la révolution de son centre, de changer le courant des idées en courant de conquêtes, et de faire une longue diversion à la philosophie et à la liberté pour faire oublier à la France sa mission et à l’Europe sa régénération par la pensée libre. […] Histoire, poésie, philosophie, romans, théâtres, journaux, libelles : c’était un véritable pillage de l’esprit humain. […] Le reste de l’année, la fréquente correspondance entre nous n’était guère qu’un commentaire familier de nos innombrables lectures, un cours de philosophie et de littérature épistolaires entre quatre amis qui croyaient découvrir chacun de son côté un monde intellectuel nouveau pour son ignorance. […] Cousin : il importait alors en France la philosophie de l’enthousiasme ; il ressemblait plus à un prophète tourmenté par l’inspiration qu’à un disciple de Platon.
Mais, quelque bornée qu’elle puisse paraître, c’est bien toute la philosophie de Stendhal. […] Il a été toute sa vie un étudiant en philosophie et en économie politique. […] Les idées générales de son temps étaient l’idée du progrès, l’idée de la philosophie de l’histoire, l’idée que la philosophie pourrait remplacer la religion comme puissance dirigeante de l’humanité. […] Et s’il « dit à la philosophie » ce que P. […] Personne n’a nié la philosophie de l’histoire et toutes les philosophies de l’histoire plus constamment.
Ouvrages de philosophie politique et de polémique religieuse […] Philosophie politique. — Polémique religieuse. — Madame de Staël. — De Bonald […] Nous avons, vers la fin du premier tiers de ce siècle, admiré comme auditeurs, et nous admirons aujourd’hui comme lecteurs, une brillante application de la critique à l’histoire de la philosophie. […] Peut-être eût-on désiré pour une si belle plume une fortune plus haute que l’histoire ou la critique des systèmes ; peut-être un nouvel effort supérieur d’invention et de démonstration, pour nous faire monter quelques échelons de plus vers l’inaccessible, eût-il plus servi la philosophie que les modestes affirmations de l’éclectisme. […] En tout cas, la Sorbonne était digne de recruter pour Notre-Dame, et si on lui en donne la louange, c’est un honneur que ne refuserait pas la philosophie la plus jalouse de rester distincte de la religion.
Déjà il avait écrit ses cinq volumes de la Littérature anglaise, et ses deux volumes de la Philosophie de l’Art, pour nous prouver par de nombreux exemples qu’un écrivain et qu’un artiste subissent plus ou moins l’influence de la race, du climat et qu’ils peignent ce qu’ils ont sous les yeux. […] On devint grave à son exemple sous prétexte de science et de philosophie. […] Il n’a peut-être point lu le marquis de Sade et pourtant sa philosophie se rapproche de celle du célèbre écrivain érotique, qui n’est point, comme on l’a dit, un amas de divagations, mais un système très intéressant où Sade semble avoir condensé, clarifié et développé l’œuvre de La Mettrie et d’Helvétius. […] Il y a en lui non pas du germain, mais du slave et du slave mystique, et on sent aussi le fils du pasteur et le professeur de philosophie qui parle en prophète et en homme habitué à ce qu’on ne discute pas ses jugements, même lorsqu’il ne se donne pas la peine de les motiver. […] Mais le système, en somme, importe peu ; la philosophie, si contestable soit-elle, n’empêche pas l’action profonde d’une œuvre.
L’impérieux devoir qui m’obligea, durant les années de ma jeunesse, à résoudre pour mon compte, non avec le laisser aller du spéculatif, mais avec la fièvre de celui qui lutte pour la vie, les plus hauts problèmes de la philosophie et de la religion, ne me laissait pas un quart d’heure pour regarder en arrière. […] Je savais bien, avant mon voyage, que la Grèce avait créé la science, l’art, la philosophie, la civilisation ; mais l’échelle me manquait. […] Une philosophie, perverse sans doute, m’a porté à croire que le bien et le mal, le plaisir et la douleur, le beau et le laid, la raison et la folie se transforment les uns dans les autres par des nuances aussi indiscernables que celles du cou de la colombe. […] Si une société, si une philosophie, si une religion eût possédé la vérité absolue, cette société, cette philosophie, cette religion aurait vaincu les autres et vivrait seule à l’heure qu’il est. […] Toute cette grande philosophie, qui, en somme, a plus fait que Luther et Calvin, était là réunie.
L’Histoire de ta littérature anglaise, l’Essai sur La Fontaine, la plupart des traités composant la Philosophie de l’art, sont consacrés à démontrer, avec une admirable éloquence, que tout écrivain et tout artiste considérable porte dans son œuvre la trace des facultés marquantes de sa race, des caractères saillants du pays, de l’époque, des mœurs qui l’ont formé, et qu’ainsi, cette assertion admise, on peut remonter de l’œuvre à l’auteur et de celui-ci à la société et la nation dans lesquelles il a vécu. […] Taine essaye de prouver par un nombre considérable de faits, deux sortes de causes sont assignées plus ou moins explicitement : l’hérédité (préface et début de l’Histoire de la littérature anglaise) qui fait participer tout homme aux caractères de ses ascendants, ceux-ci à ceux des leurs, et ainsi de suite à travers toute l’étendue de la race ; la sélection naturelle (dans le 2e chapitre de la Philosophie de l’art) qui s’opère entre les artistes et entre les facultés de l’artiste, grâce à sa participation à toute la situation sociale, grâce à son imitation de l’état d’âme de ses contemporains, à la malléabilité particulière de son esprit, aux conseils qu’il reçoit et à accueil qui est fait à ses œuvres. […] Que l’on néglige les cas de la Renaissance en France et du XVIIIe siècle en Angleterre où des causes politiques et perturbatrices sont en jeu ; ce qui s’est passé à Rome dès le premier éveil de la littérature, ce qui s’est passé en France au XVIIe siècle pour la tragédie, au XVIIIe pour la philosophie et pour le roman, au XIXe pour la poésie lyrique, ne peut être éclairé par aucune des lois de l’ancienne critique sociologique. […] Taine donna une série de cours à l’Ecole des Beaux-arts, qui furent ensuite publiés : Philosophie de l’art en Italie (1866) ; Philosophie de l’art en Grèce (1869) ; Philosophie de l’art aux Pays-Bas (1869).