Lundi 21 et mardi 22 avril 1862 De ce que j’ai beaucoup aimé autrefois la poésie, de ce que je l’ai aimée comme on doit l’aimer quand on s’en mêle, c’est-à-dire trop, ce n’est pas une raison aujourd’hui pour n’en plus parler jamais. […] La première est, quand on parle d’un poëte en particulier, de ne point être injuste envers tous ceux qu’on omet et qui se croient des droits à l’attention autant et plus que le préféré. […] Il y a réussi en plus d’une ; et pour ne parler que de l’Agonie d’un Saint, qui est à la fin du recueil, c’est une pensée hardie et humaine qui a inspiré ce petit drame, et l’exécution en est parfaite. […] Mais parlez-moi des Soleils de juin, des Soleils de novembre, nobles essors d’une âme qui sait se retremper aux vraies sources de consolation. […] Souviens-toi seulement des accents passionnés que je te fis entendre, et quand tu aimeras un jour un beau jeune homme, demande-toi s’il te parle comme je te parlais et si sa puissance d’aimer approcha jamais de la mienne.
En religion, en politique, dans les sciences, on m’a partout tourmenté, parce que je n’étais pas hypocrite et parce que j’avais le courage de parler comme je pensais. […] On n’a jamais mieux défini Voltaire dans sa qualité d’esprit spécifique et toute française, qu’il ne l’a fait ; on n’a jamais mieux saisi dans toute sa portée la conception buffonienne des Époques de la Nature ; on n’a jamais mieux respiré et rendu l’éloquente ivresse de Diderot ; il semble la partager quand il en parle : « Diderot », s’écrie-t-il avec un enthousiasme égal à celui qu’il lui aurait lui-même inspiré, « Diderot est Diderot, un individu unique ; celui qui cherche les taches de ses œuvres est un philistin, et leur nombre est légion. […] L’Allemagne, en y pénétrant, y produit une grande fermentation, et ce n’est que dans vingt ans que l’on verra les résultats qu’elle a donnés. » Et l’année suivante, il n’hésite plus et se prononce (1er juin 1826) : « Gœthe m’a parlé du Globe. […] Mais, si on l’interrogeait sur les vrais talents, sur Béranger, sur Mérimée, auteur dès lors du théâtre de Clara Gazul, Gœthe faisait aussitôt la distinction, et il reconnaissait en eux la vraie marque, l’originalité : « Je les excepte, disait-il : ce sont de vrais talents qui ont leur base en eux-mêmes et qui se maintiennent indépendants de la manière de penser du jour. » Avoir sa base et son fondement en soi, c’était la chose qu’il estimait le plus ; il a parlé quelque part de ces faux talents, qui n’en ont que le semblant et le premier jet : « Nous vivons dans un temps, disait-il, où il y a tant de culture répandue qu’elle s’est, pour ainsi dire, mêlée à l’atmosphère qu’un jeune homme respire. […] Dans une lettre adressée à Mme Récamier le 9 mai 1827 et publiée quelques jours après dans le Globe par suite d’une indiscrétion non regrettable, le jeune voyageur s’exprimait en ces termes, qui sont à rapprocher de ceux dans lesquels Eckermann va nous parler des mêmes entretiens : « Gœthe, écrivait M.
Mais il est toujours très-périlleux de faire parler Dieu ; on pourrait aussi bien, et sans plus de témérité, supposer qu’il vous demandera compte du talent spécial qu’il vous aura confié ; s’il y a diversité de dons parmi les hommes, il peut y avoir diversité de ministères, et cela semble surtout plausible, quand le signe est aussi glorieux et aussi évident que dans le cas de M. de Lamartine. […] Adolphe Dumas, reprenant les idées de la préface, les redouble agréablement, et tend à consacrer tout à fait cette théorie de négligence et de laisser aller indéfini que trop d’autres pièces confirment sans en parler. […] Les réflexions abondent, et je parlerai comme Job, dans l’amertume de mon cœur : cette négligence, cette prodigalité des beaux vers jetés sans aucun soin ni respect est-elle donc de la vraie humilité ? […] Ne prenez pas Virgile au mot quand il vous parle, presque en rougissant, de son loisir sans honneur, ignobilis otî ; ou c’est qu’en latin le mot n’a pas ce sens-là. […] Mais ici, c’est d’un autre ordre ; la faute crie ; il sort de ses tons ; grâce à ces mots étranges, même sans se flatter d’être de ceux dont parle La Bruyère et qui ont le cœur justement ouvert à la perfection d’un ouvrage, on court risque de remporter désormais un regret mortel des plus belles pages de Lamartine.
Mais, s’il ne faut lui demander ni émotion ni pitié, il peint merveilleusement ses loqueteux et les fait très bien parler. […] Le poète affecte d’entrer dans leur peau, qui est une sale peau, et parle leur argot, qui est une langue infâme, dont les mots puent et grimacent, dont les syllabes ont des traînements gras et font des bruits de gargouille. […] l’affreux poète qui, pour nous parler de la divine illusion d’amour, nous dit qu’il « a pris son fromage pour la lune » et dont le dernier mot est qu’il sera comme ces buveurs qui « restent soûls de la veille ». […] Je ne parle ici au nom d’aucune morale ni d’aucune religion ; je ne m’occupe pas de la vérité : je ne m’occupe que de la beauté de la vie. […] Je ne parle pas de Braves gens, et je ne prétends pas, du reste, que M.
On l’employait dans les cours étrangères à la rédaction des actes ; on la prenait pour la langue naturelle des hommes : si un sourd-muet, disait-on, recouvrait la parole, il parlerait le français de Paris. […] C’est cet homme dont parle Pascal, qui était jeune au temps de l’antiquité, qui a pris des années depuis Pascal, qui se reconnaît dans les pensées d’un homme né trois mille ans avant lui, sous un autre ciel, dans une autre forme de société, avec d’autres dieux. […] Ils n’y peuvent d’ailleurs initier la foule, qui seule fait les langues et les littératures, et ils communiquent entre eux dans une langue qui ne se parle plus. […] C’est, si je puis ainsi parler, un expédient de l’esprit humain, né tout à la fois de l’ignorance qui lui est insupportable, et de cet éternel besoin de principes, certains et supérieurs, qui règlent la vie, et arrachent l’homme à la domination de ses appétits. […] Je n’en parle ainsi qu’au point de vue littéraire.
Brienne, en sortant du château de Vincennes, rencontra Fouquet qui venait à pied par les jardins et à qui il apprit cette mort, ajoutant que le roi voulait lui parler ; et Fouquet, se voyant en retard, s’écria : « Ah ! […] Fouquet me parla de M. le président Le Coigneux comme d’une personne qu’il fallait tâcher de voir ; je lui dis que j’allais quelquefois à la chasse avec lui, et que je verrais de quelle manière je pourrais m’y prendre. […] Je ne sais au juste ce que renfermait cette précieuse cassette dont on a tant parlé : elle existe, je le crois, à la Bibliothèque nationale dans quelque recoin ignoré ; le jour où elle en sortira, on en pourra faire à tête reposée l’inventaire52. […] En apprenant son arrestation, le gazetier Loret, l’un de ses pensionnaires, parla de lui en des termes qui firent supprimer sa pension par Colbert. […] Je parle des gens de lettres dans le temps où ils faisaient une classe à part, et de l’élite de cette classe.
Le jeune séminariste, mis en présence du monument inconnu, ne put que répondre : « Attendons. » Ces deux jeunes gens, compatriotes et dès lors adversaires, ne se sont jamais revus depuis ; mais l’abbé Gerbet et Jouffroy, en se combattant l’un l’autre plume en main, n’ont cessé de le faire dans les termes de la controverse la plus digne, et Jouffroy, dont le cœur, sous cette parole absolue, était si bon, ne parlait, s’il m’en souvient, de l’abbé Gerbet qu’avec les sentiments d’une affectueuse estime. […] Si vous introduisez votre tête dans ce sépulcre pour mieux voir, prenez garde : ne remuez plus, ne parlez pas, retenez votre respiration. […] Vous ne comprendrez pas tout ce que je vais vous dire : je ne peux vous parler de ces choses que dans la langue nouvelle que le christianisme a faite ; mais vous en comprendrez toujours assez. […] « C’est ainsi que parlerait Platon chrétien », a dit M. de Lamartine de ce Dialogue, et l’éloge n’est que vrai. […] L’abbé Gerbet a donc trouvé un ami égal et tendre, et tout conforme à sa belle et fidèle nature, en M. de Salinis ; parler bien de l’un, c’est s’attirer aussitôt la reconnaissance de l’autre.
« L’Évangile parle à mon cœur », disait-il. […] Quelles que soient les destinées des croyances dogmatiques, il y aura toujours des hommes qui pourront dire : « L’Évangile parle à mon cœur. » Ceux-là seront de race chrétienne, lors même qu’ils ne croiront pas à tout ce que croient les fidèles. […] « Vous ne nous parlez, s’écriera-t-on, que de sentiments : où sont les principes, où sont les règles dans Jean-Jacques Rousseau ? […] En éducation, Rousseau a répandu des principes dont on peut abuser, dont il abuse lui-même, mais qui sont d’une grande portée : laisser agir la nature et parler à la raison. […] Ce siècle ne dit rien à son cœur, il ne parle qu’à son esprit.
Mais ce n’est pas de ces ennemis-là que je veux parler. […] Les ennemis de la lecture dont je veux parler, ce sont les tendances, les penchants et les habitudes qui empêchent de bien lire, de lire comme il est utile, profitable et agréable de faire. […] Ainsi parlera un homme qui prendra le mot « critique » dans le sens où tout le monde le prend aujourd’hui. […] En dehors même de cette impatience des supériorités dont j’ai parlé plus haut, l’instinct de taquinerie est une des formes de l’instinct querelleur, qui est extrêmement fort dans l’humanité. […] Voilà au moins quelques éléments de cet esprit critique dont parle La Bruyère et entendu comme il l’entend.
Ce fut une de ces « déviations » littéraires dont j’aurai à parler plus longuement. […] Quand je parle de « genre » lyrique, ou épique, ou dramatique, c’est, à mon sens, une façon pratique et très élastique de désigner trois modes essentiels de concevoir la vie et l’univers ; ces conceptions répondent à des tempéraments divers ou à des âges divers ; elles se succèdent le plus souvent chez le même homme ; elles peuvent même exceptionnellement cohabiter en lui. […] Victor Hugo nous a donné des exemples merveilleux de strophes lyriques et de strophes épiques ; sans parler de cet artiste souverain que fut Gœthe. […] Un exemple : quand on parle de la littérature française au xviie siècle, la pensée court aussitôt à Corneille, Racine et Molière. […] Chaque ère est dominée par un grand principe (politique, moral, social) qui en fait l’unité et dont les phases successives caractérisent les périodes : les débuts lyriques, la création épique, la désagrégation dramatique. — Je dénomme les ères d’après leur principe, en renonçant absolument aux termes vagues qui sont hélas en usage ; nous parlons d’histoire ancienne (qui comprend les Pharaons, la république d’Athènes et l’empire romain !)
D’autres ont mal parlé des pèlerinages, ou du pape, ou des reliques, ou de la confession. […] Rien de plus simple et de plus efficace que son éloquence ; et la raison en est qu’il ne parle jamais pour parler, mais pour faire une œuvre. […] La conscience parlait seule, et son inquiétude était devenue une terreur. […] Point de style ; ils parlent en hommes d’affaires ; tout au plus, çà et là, un pamphlet de Prynne a de la vigueur. […] Pour bien parler des impressions surnaturelles, il faut être sujet aux impressions surnaturelles.
Mais laissons-le parler. […] est-ce qu’ils se querellent qu’ils parlent si haut ? […] Il renverse en six mots l’autorité de cette révélation et de toute autre : « Dire que Dieu a parlé en rêve à un homme, c’est dire simplement qu’il a rêvé que Dieu lui parlait. […] Par malheur, ce talent conduit parfois aux balourdises ; quand on parle bien de tout, on se croit le droit de parler de tout. […] comment pouvez-vous parler du ciel et avoir tant de perversité dans le cœur ?