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540. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Notes et éclaircissements. [Œuvres complètes, tome XIII] »

Par exemple, lorsqu’il dit que la raison de l’homme seule ne peut arriver à une démonstration parfaite de l’existence de Dieu, on triomphe, on s’écrie qu’il est beau de voir Voltaire prendre le parti de Dieu contre Pascal. […] Mais si je fais tout ce qui dépend de moi afin que vous puissiez vivre dans une parfaite tranquillité, que cette considération pour le moins vous retienne, si toutes les autres sont inutiles. […] C’est l’auteur d’Athalie qui est l’homme parfait. » (Corresp. gén.

541. (1913) La Fontaine « VI. Ses petits poèmes  son théâtre. »

Sûr de lui, sûr de sa parfaite mesure, sûr de sa discrétion, de son goût parfait, il se permettait le burlesque, sachant bien qu’il s’arrêterait de lui-même et sans s’y appliquer, au moment où le burlesque devient trivial, devient rebutant. […] ma mère, voilà la perle des servantes, dit-il en parlant d’une servante qui le trompe et dans laquelle il a la plus parfaite confiance.

542. (1892) Les idées morales du temps présent (3e éd.)

quand on a l’infini à parcourir et le parfait à atteindre !  […] Aujourd’hui, quoique la cohésion ne soit pas parfaite dans toutes ses parties, le roman est achevé, son auteur répète volontiers qu’il en est satisfait. […] Il est poli au point de se gêner sans cesse, parce que la bonne éducation, qui rend timide, est à peu près la même dans les palais et dans les séminaires  Il est arrivé « à la parfaite bonté, à l’absolue indulgence, à l’indifférence tempérée par la pitié et le dédain », grâce à son complet détachement de tout : « la plus solide bonté est celle qui se fonde sur le parfait ennui, sur la vue claire de ce fait que tout en ce monde est frivole et sans fond réel »  Il hait l’athéisme. […] Lemaître, un code du parfait galant homme. […] Si le style n’est pas toujours irréprochable, la pensée est toujours d’une sincérité parfaite, car j’aimerais mieux labourer l’arpent de terre que le travail m’a donné que d’exprimer un mot que je ne penserais pas.

543. (1913) Les idées et les hommes. Première série pp. -368

Jérôme et Jean Tharaud l’ont développée avec une habileté parfaite. […] Ils sont des artistes parfaits. […] À la maison, de ton, de manières, parfaites, réservées, distinguées même. […] Le colonel, fort honnête homme, fut parfait pour son beau-fils. […] Avec cela, du linge parfait, une propreté d’hermine.

544. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « M. Littré. »

C’était, telle qu’on me l’a dépeinte, une figure antique, habillée le plus souvent non comme une dame mais comme une servante, en faisant l’office au logis, la femme de ménage parfaite, une mère aux entrailles ardentes, et avec cela douée d’une élévation d’âme et d’un sentiment de la justice qu’elle dut transmettre à ce fils dont elle était fière et jalouse. […] De même qu’il respecta toujours dans sa femme la piété qu’elle avait, il la respecta également dans sa fille avec une délicatesse et une douceur parfaites. […] La Notice est parfaite, simple, grave et sentie ; mais l’éditeur, astreint à des volontés particulières rigides, et les respectant avec scrupule, a fait entrer dans le recueil trop de matière, et sur des sujets dès longtemps éteints ; il n’a pas tout mis, il aurait dû retrancher plus encore, couper, tailler, sacrifier sans merci dans l’intérêt du mort et pour dégager la statue. […] Il se rendit compte d’abord avec une parfaite exactitude de tous les systèmes des philologues allemands ; il les exposa dans notre Journal des Savants avec analyse et discussion, dans une suite d’articles aujourd’hui recueillis, et dont quelques-uns en leur genre sont admirables.

545. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Madame de Verdelin  »

C’est ici que nous avons à citer une fort belle lettre de Rousseau, parfaite de raison, de sagesse ; il oppose les conseils d’une morale juste et saine aux objections un peu trop délicates et raffinées, au bon sens attristé de Mme de Verdelin. […] Quelle mesure parfaite ! […] Avant la fièvre, je charmais les douleurs de mon bras en chantant vos charmants airs ; je me suis bien affligée dans ce moment de la médiocrité de ma voix ; j’aurais voulu pouvoir rendre toute la mélodie de cette délicieuse musique : mais elle est si parfaite que, malgré le défaut de mon expression, tout le monde en était charmé ; je la quittais pour vous lire. […] Je prends presque au hasard, dans la suite complète des lettres de Rousseau à Mme de Verdelin, quantité de mots touchants et émus qui sont en parfaite contradiction avec le ton à demi ironique et aigre-doux qui règne dans la page des Confessions où il est parlé d’elle ; par exemple : « Votre éloignement me fait bien sentir ce que j’ai perdu ; vos bontés ne m’ont fait d’effet que quand elles m’ont été ôtées, et je puis vous dire d’un cœur vraiment pénétré qu’elles vous ont acquis un serviteur fidèle, qui le sera jusqu’à son dernier soupir.

546. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CVe entretien. Aristote. Traduction complète par M. Barthélemy Saint-Hilaire (3e partie) » pp. 193-271

Dieu est donc éternel, infini, parfait, vivant, tout-puissant ; il sait tout ; il est partout. […] Peut-être les hommes vivraient-ils en troupes comme quelques autres espèces d’animaux ; mais ils ne pourraient jamais avoir entre eux ces rapports et ces liens durables qui forment les peuples et les nations, avec les gouvernements plus ou moins parfaits qu’ils se donnent et qui subsistent des siècles. […] On peut même ajouter que ces théories sont en parfait accord avec les croyances instinctives du genre humain, et que les religions les plus éclairées les sanctionnent, en même temps que la philosophie les démontre. […] Ce n’est pas l’apogée, c’est la moyenne parfaite de la philosophie hellénique de cette époque ; l’encyclopédie du vulgaire, distinguée de la science de ses contemporains ; c’est toute l’intelligence de la Grèce, mais ce n’est pas son âme.

547. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Conclusions »

L’appareil sensoriel même, plus solidement parfait, subit sans fléchir la multitude d’impressions qui le traversent et le secouent. […] Cet auteur presque parfait mais moyen, a rencontré de vives amitiés parmi les écrivains de l’époque impériale ; il n’a guère influé sur aucun d’eux, sauf, peut-être Prosper Mérimée, auquel il put apprendre dans une certaine mesure à modifier la forme de sa nouvelle, à passer du récit compassé de ses premières œuvres à une ordonnance plus libre. […] Daudet creusent davantage le problème, analysent mieux les sensations et les sentiments, reviennent de certaines thèses sentimentales excessives ; ils n’en sont pas moins des passionnés et ce qu’ils proclament dans leurs livres, c’est non la supériorité ou la parfaite pondération intellectuelle, mais la force des passions, ou de leur forme inférieure, des sensations. […] Peu à peu dans cette école de poètes et de prosateurs, le souci de l’expression l’emporta sur celui de la chose à exprimer et comme la passion est un élément de trouble dans la belle ordonnance des périodes par les heurts et les interjections qu’elle affecte, comme les phrases parfaites s’appliquent mieux à des idées pures, mieux encore à de simples perceptions de couleur et de forme, les poètes et une partie des romanciers de l’époque impériale furent impassibles et descriptifs, d’un mérite artistique intellectuel et surtout pictural extrême, d’une grande science et d’une profonde observation, mais de peu de prise sur le public qui continuait à réclamer des œuvres moins achevées et plus frémissantes de passions humaines.

548. (1885) La légende de Victor Hugo pp. 1-58

La bourgeoisie de France, mieux renseignée, voyait dans Victor Hugo une des plus parfaites et des plus brillantes personnifications de ses instincts, de ses passions et de ses pensées. […] Il serait difficile, si on ne connaissait les mœurs du temps et les qualités de la famille Hugo, de comprendre qu’un jeune homme, fût-il de génie, put posséder d’une manière si parfaite, l’art de se contenir et de dissimuler ses sentiments. […] Mais Hugo, et c’est là son plus sérieux titre à la gloire, sut mettre en contradiction si flagrante ses actes et ses paroles, qu’il ne s’est pas encore rencontré en Europe et en Amérique un politicien pour démontrer d’une manière plus éclatante la parfaite innocuité des truculentes expressions du libéralisme. […] Cependant les lettrés du xviie  siècle annonçaient que l’Adone effacerait à jamais le Roland furieux, la Divine Comédie et l’Iliade d, et des foules en délire promenaient des bannières, où l’on proclamait que l’illustre Marin était « l’âme de la poésie, l’esprit des lyres, la règle des poètes… le miracle des génies… celui dont la plume glorieuse donne au poème sa vraie valeur, aux discours ses couleurs naturelles, au vers son harmonie véritable, à la prose son artifice parfait… admiré des docteurs, honoré des rois, objet des acclamations du monde, célébré par l’envie elle-même, etc., etc. ».

549. (1857) Cours familier de littérature. III « XVIIe entretien. Littérature italienne. Dante. » pp. 329-408

Puis, après ces douze ou vingt transfigurations accomplies, qui tantôt les rapprochaient de Dieu par leurs vertus, tantôt les en éloignaient par leurs fautes, en même temps que ces vertus ou ces fautes les rapprochaient aussi ou les séparaient davantage l’une de l’autre, je les réunissais enfin dans l’unité de l’amour mutuel et de l’amour divin, à la source de vie, de sainteté et de félicité d’où tout émane et où tout remonte par sa gravitation naturelle vers le souverain bien et le souverain beau, l’Être parfait, l’Être des êtres, Dieu. […] Son orthodoxie parfaite pour lui-même était une charité d’esprit parfaite aussi pour les autres. […] La troisième et dernière partie est celle où il envisage les hommes parfaits ; et il l’appelle Paradis, pour exprimer la hauteur de leurs vertus et la grandeur de leur félicité, deux conditions hors desquelles on ne saurait reconnaître le souverain bien.

550. (1884) Articles. Revue des deux mondes

Vous pouvez tenir pour certaines la médiocrité d’un artiste qui trouve bonne son œuvre telle qu’elle est, l’insuffisance d’une vertu qui ne se souhaite pas plus parfaite : augurez de même d’un siècle ou d’un peuple qui n’aspire pas à sortir de soi pour s’élever plus haut. […] Bien que de révélation divine, la nouvelle religion avait été annoncée dès le commencement du « monde ; une initiation graduelle avait préparé l’humanité, ou tout au moins le peuple juif, à l’avènement de la vérité et de la vie parfaite dans le Christ. […] Le cœur sera rempli de cet amour parfait qui exclut l’égoïsme et la crainte ; la volonté, affranchie du péché, n’aura plus besoin d’une loi qui la gouverne, mais sera à elle-même sa propre loi. […] Et qu’est-ce au fond que cette idée de parfait, principe et mesure de nos jugemens moraux, sinon l’idée de Dieu ?

551. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Le prince de Ligne. — II. (Fin.) » pp. 254-272

Cela dit, prenons-le par ses bons côtés, par ses saillies qui souvent vont fort loin dans le vrai et dans le sérieux, prenons-le dans sa parfaite connaissance de la vie, du monde et des hommes. […] On pleurera le meilleur des hommes dans Louis XVI, la plus belle et la plus parfaite des reines, des milliers de victimes, on servira Dieu mieux qu’auparavant, et on respectera plus son souverain.

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