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1520. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « L’abbé Maury. Essai sur l’éloquence de la chaire. (Collection Lefèvre.) » pp. 263-286

L’abbé Maury en effet, durant cette première partie de sa carrière, antérieure à la Révolution, n’était encore qu’un homme d’esprit et de talent, faisant volontiers oublier dans la société ce qu’il annonçait de supérieur par ce qu’il avait d’aimable, très gai, capable d’un bon conte, d’un conte salé qui sentait le frère Jean des Entommeures encore plus que le panégyriste de saint Vincent-de-Paul ou de saint Louis32 ; vif, ardent, véhément de nature, au demeurant bon homme et cher à ses amis. […] Les chefs-d’œuvre de la chaire sont présentés, analysés en grand, et il n’oublie pas les particularités qui peuvent en éclaircir et en faire valoir quelques effets déjà inaperçus.

1521. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Le maréchal Marmont, duc de Raguse. — II. (Suite.) » pp. 23-46

Une société qui a épuisé son feu et qui a vu en face les dangers, se présente tout autre qu’une société confiante en la théorie et qui a oublié l’expérience. […] Car, ne l’oublions pas, une transaction alors, dans une affaire si mal engagée, était la seule solution possible.

1522. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Beaumarchais. — II. (Suite.) » pp. 220-241

Les lettres qu’on a de lui à cette date (1774-1775) nous le montrent émerveillé lui-même de sa destinée, se retournant, se regardant de profil pour se dire combien elle est étrange et bizarre, courant le monde, l’Angleterre, l’Allemagne, faisant sept cent quatre-vingts lieues en six semaines, et plus de dix-huit cents lieues en huit mois, et s’en vantant, attentif dans ses absences à ne point se laisser oublier, à se remettre de temps en temps sur le tapis par des récits de périls et d’aventures qui n’arrivaient qu’à lui seul. […] Bref, il est bien né, on ne l’oublie pas malgré ses fautes, et, si Beaumarchais avait songé à faire par lui une critique de son Figaro, il y aurait réussi.

1523. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Rollin. » pp. 261-282

Au lieu de s’en tenir aux préceptes serrés et brefs, aux prescriptions techniques, à la Poétique d’Aristote ou aux Partitions oratoires de Cicéron, auxquelles Gibert en revenait toujours et dont le siècle n’avait que faire, le bon Rollin s’abaissait et s’oubliait aux exemples, et même aux digressions ; s’il disait avec surabondance des choses inutiles, il y mêlait une variété de beaux endroits qui empêchaient l’ennui. […] Les ruines les environnent, et ils passent devant elles sans éprouver seulement la curiosité ordinaire à un voyageur : ils ont déjà oublié ces temps d’une éternelle mémoire.

1524. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre sixième. La volonté — Chapitre premier. Existence de la volonté »

. — Münsterberg oublie qu’on ne peut atteindre un but qu’on ne voit pas, ni réaliser un mode de mouvement intestin dont la sensation ne nous donne aucun schème. […] Mais nous avons vu que la réciproque est vraie aussi, quoiqu’on l’oublie sans cesse.

1525. (1864) William Shakespeare « Deuxième partie — Livre II. Shakespeare — Son œuvre. Les points culminants »

Qu’on ne l’oublie pas, l’esprit humain, à demi divin qu’il est, crée de temps en temps des œuvres surhumaines. […] se sentir oublié dans le départ, avoir perdu sa raison d’être ici-bas, être désormais un homme qui va et vient devant un sépulcre, pas reçu, pas admis ; c’est une sombre destinée.

1526. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Le Prince » pp. 206-220

Pour moi qui ne retiens d’une composition musicale qu’un beau passage, qu’un trait de chant ou d’harmonie qui m’a fait frissoner ; d’un ouvrage de littérature qu’une belle idée, grande, noble, profonde, tendre, fine, délicate ou forte et sublime, selon le genre et le sujet ; d’un orateur qu’un beau mouvement ; d’un historien qu’un fait que je ne réciterai pas sans que mes yeux s’humectent et que ma voix s’entrecoupe ; et qui oublie tout le reste, parce que je cherche moins des exemples à éviter que des modèles à suivre, parce que je jouis plus d’une belle ligne que je ne suis dégoûté par deux mauvaises pages ; que je ne lis que pour m’amuser ou m’instruire ; que je rapporte tout à la perfection de mon cœur et de mon esprit, et que soit que je parle, réfléchisse, lise, écrive ou agisse, mon but unique est de devenir meilleur ; je pardonne à Le Prince tout son barbouillage jaune dont je n’ai plus d’idée, en faveur de la belle tête de ce musicien champêtre. […] L’art de lever un pan du voile et de montrer aux hommes un coin ignoré ou plutôt oublié du monde qu’ils habitent.

1527. (1759) Réflexions sur l’élocution oratoire, et sur le style en général

La clarté, cette loi fondamentale, aujourd’hui négligée par tant d’écrivains, qui croient être profonds et qui ne sont qu’obscurs, consiste à éviter non seulement les constructions louches, et les phrases trop chargées d’idées accessoires à l’idée principale, mais encore les tours épigrammatiques dont la multitude ne peut sentir la finesse ; car l’orateur ne doit jamais oublier que c’est à la multitude qu’il parle, que c’est elle qu’il doit émouvoir, attendrir, entraîner. […] Il est vrai que Cicéron fait oublier ce défaut par les autres qualités de l’orateur qu’il possède au suprême degré.

1528. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Nisard » pp. 81-110

Mais ce qui est bien pis que d’être épileptique, il était avare ; il empruntait et oubliait de rendre. — Avare ! […] Byron ne nous est pas particulièrement cher à cause de la beauté de son génie, il l’est pour des raisons plus hautes encore… Nous n’oublierons jamais, nous, que les plus beaux vers de ce protestant sont adressés à la Vierge Marie, qu’il a voulu que sa fille Allegra fût catholique, et que, dans nos églises, la force et la beauté du catholicisme lui remuaient le cœur.

1529. (1868) Curiosités esthétiques « VII. Quelques caricaturistes français » pp. 389-419

Parmi tous ces grands hommes de la monarchie naissante, que de noms déjà oubliés ! […] Il ne faut pas oublier que Traviès est le créateur de Mayeux, ce type excentrique et vrai qui a tant amusé Paris.

1530. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre IV. Le rêve »

Souvent il s’agit d’un détail oublié, d’un souvenir qui paraissait aboli et qui se dissimulait en réalité dans les profondeurs de la mémoire. […] Oui, je crois que notre vie passée est là, conservée jusque dans ses moindres détails, et que nous n’oublions rien, et que tout ce que nous avons perçu, pensé, voulu depuis le premier éveil de notre conscience, persiste indéfiniment.

1531. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Première partie — Chapitre II. Réalité des idées égalitaires »

— Soit, mais n’oublions pas notre but : nous ne cherchons nullement ici à connaître, dans ce qui caractérise et distingue, chacun d’eux, les différents systèmes élaborés par les théoriciens mais bien à discerner le sens général des idées qui ont « réussi », c’est-à-dire s’imposent aux sociétés modernes, et pénètrent leur organisation. […] * ** Mais, refuser de connaître l’égalitarisme au point de départ des sociétés, ce n’est nullement affirmer — nous ne l’oublions pas — qu’il ne peut apparaître qu’aux dernières étapes de leur évolution.

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