/ 2498
1297. (1908) Esquisses et souvenirs pp. 7-341

Un jour d’été mourait à l’horizon calme. […] Ces jeunes hommes avaient au moins la consolation de pouvoir mourir. […] La plus jeune cousine de ta fiancée, sa préférée, n’est pas morte. Mais ta fiancée, elle, est morte. […] Je suis un pauvre moine, et je meurs de faim.

1298. (1907) Jean-Jacques Rousseau pp. 1-357

Sa mère meurt en le mettant au monde. — Son père lui fait lire des romans à sept ans. […] Ou cette sage-femme était-elle morte ? […] Donc, ils mouraient au moins autant.) […] La maréchale eut l’esprit de mourir en 1787. […] Madame d’Étanges meurt ; elle meurt des duretés de son mari, mais surtout de la faute de sa fille, et du secret qu’elle garde et qui l’étouffe.

1299. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Molière »

Souvent ils meurent, un peu comme aux époques primitives, avant que leurs œuvres soient toutes imprimées ou du moins recueillies et fixées, à la différence de leurs contemporains les poëtes et littérateurs de cabinet, qui vaquent à ce soin de bonne heure ; mais telle est, à eux, leur négligence et leur prodigalité d’eux-mêmes. […] Molière, qu’aurait opprimé, je le crois, cette autorité religieuse de plus en plus dominante, et qui mourut à propos pour y échapper, Molière, qui appartient comme Boileau et Racine (bien que plus âgé qu’eux), à la première époque, en est pourtant beaucoup plus indépendant, en même temps qu’il l’a peinte au naturel plus que personne. […] Le prince, enchanté, voulut se l’attacher comme secrétaire et le faire succéder au poëte Sarasin qui venait de mourir ; Molière refusa par attachement pour sa troupe, par amour de son métier et de la vie indépendante. […] Il y mourut en pleine crise et dans le son le plus aigu de cette saillie montée au délire. […] Mais, ajouta-t-il en réfléchissant, qu’un homme souffre avant que de mourir !

1300. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre II. Le Roman (suite). Thackeray. »

» Le vieux Pendennis meurt. […] Il envoie des poésies lamentables aux journaux du comté, commence un poëme épique, une tragédie où meurent seize personnes, une histoire foudroyante des jésuites, et défend en loyal tory l’Église et le roi. […] Ce qui est pis, elle oubliait qu’une vieille femme peureuse, confinée chez elle, accablée de prédications, empoisonnée de pilules, pouvait mourir avant d’avoir changé son testament, et tout laisser, hélas ! […] Diddlof est un dandy qui mourrait d’un trop fort parfum de rose. […] Votre belle-sœur est la seule de la famille qui ne vous souhaite point morte, parce que Gaunt se remarierait si vous l’étiez.

1301. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CLe entretien. Molière »

Il y planta un mûrier fameux, qui fut mutilé depuis par le fanatisme de ses admirateurs ; il y mourut à cinquante-deux ans, le 23 avril 1616. […] J’attendais avec impatience l’occasion de parler de lui ; la voici, je la saisis ; mais jamais mon cœur ne dira tout ce qu’il éprouve de reconnaissance et de tendresse quand j’entends prononcer son nom, ou quand je passe par hasard devant le seuil de sa studieuse maison, nº 15 de la rue des Petits-Augustins, où je le vis penser, sentir, écrire et mourir ! […] XXV Il mourut en scène. […] Il mourut le vendredi 17e du mois de février de l’année 1673, âgé de cinquante-trois ans, regretté de tous les gens de lettres, des courtisans et du peuple. […] Allez, vous devriez mourir de pure honte ; Une telle action ne saurait s’excuser, Et tout homme d’honneur s’en doit scandaliser.

1302. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre troisième. La connaissance de l’esprit — Chapitre premier. La connaissance de l’esprit » pp. 199-245

. — On vous annonce que telle personne que, la veille, vous avez quittée bien portante, est morte subitement, et Cette idée vous bouleverse. […] La plupart des légendes, surtout les légendes religieuses, se forment de la sorte. — Un paysan dont la sœur était morte hors du pays m’assura qu’il avait vu son âme, le soir même de cette mort ; examen fait, cette âme était une phosphorescence qui s’était produite dans un coin, sur une vieille commode où était une bouteille d’esprit-de-vin. — Le guide d’un de mes amis à Smyrne disait avoir vu une jeune fille apportée en plein jour à travers le ciel par la force d’un enchantement ; toute la ville avait été témoin du miracle ; après quinze heures de questions ménagées, il fut évident que le guide se souvenait seulement d’avoir vu ce jour-là un petit nuage dans le ciel. — En effet, ce qui constitue le souvenir, c’est le recul spontané d’une représentation qui va s’emboîter exactement entre tel et tel anneau dans la série des événements qui sont notre vie. […] Elle épousa un ouvrier, devint grosse, accoucha, et, sur ces entrefaites, le ministre mourut ; elle déclara alors que le ministre, par testament, lui avait laissé 200 000 francs. […] « Parmi plusieurs femmes hypnotisées, dit le docteur Elliotson, l’une s’imaginait qu’elle était de verre, et elle tremblait qu’on ne vînt à la briser ; une autre, qu’elle n’était pas plus grosse qu’un grain de blé ; une autre, qu’elle était morte. » Pareillement, certains fous sont persuadés que leur corps est en cire, en beurre, en bois, et agissent en conséquence.

1303. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXIIIe entretien. Fior d’Aliza » pp. 177-256

XXIX La véritable maladie dont Alfieri mourut à quarante ans était l’ennui qu’il éprouvait lui-même de ses propres œuvres ; aussi se réfugiait-il dans l’étude du grec et dans des poésies systématiques, épigrammatiques, civiques, démocratiques, aristocratiques, qui fatiguaient l’esprit sans nourrir le cœur. […] Il mourut chez la comtesse d’Albany, qui fit élever par Canova, dans l’église de Santa Croce, un magnifique monument avec la statue colossale de l’Italie pleurant son poète. […] S’immoler sans espoir pour l’homme qu’on méprise, Sacrifier son or, ses voluptés, ses jours, À ce rêve trompeur… mais qui trompe toujours ; À cette liberté que l’homme qui l’adore Ne rachète un moment que pour la vendre encore ; Venger le nom chrétien du long oubli des rois ; Mourir en combattant pour l’ombre d’une croix, Et n’attendre pour prix, pour couronne et pour gloire Qu’un regard de ce Juge en qui l’on voudrait croire Est-ce assez de vertu pour mériter ce nom ? […] Dans ce dernier poème, je supposais que le poète anglais, en partant pour aller combattre et mourir en Grèce, adressait une invective terrible à l’Italie pour lui reprocher sa mollesse, son sommeil, sa voluptueuse servitude.

1304. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XVI. La littérature et l’éducation publique. Les académies, les cénacles. » pp. 407-442

Elles entretiennent le cœur dans une noble haine de la tyrannie. « Et ce n’est pas assez que les jeunes gens apprennent à vivre avec le vieux Caton, à mourir avec Socrate ou Léonidas. […] Il est permis de dire que c’est un symptôme inquiétant pour une école littéraire, quand ses représentants les plus saillants ont enfin leur fauteuil sous la coupole : l’hommage qui lui est rendu est presque funéraire  ; elle est bien près d’être morte, dès qu’elle a sa place en ce musée des antiques. […] Les jeunes conquérants de la Pléiade n’ont qu’un souci : pousser au tombeau toutes ces vieilleries qui ne meurent pas assez vite. […] Quand Ronsard mourut en 1585, on lui éleva un tombeau de marbre surmonté de sa statue ; Apollon, les Muses, la France versèrent sur lui des torrents de larmes ; une oraison funèbre fut prononcée, où l’on évoquait les poètes de jadis pour immoler leur mémoire à la sienne.

1305. (1894) Journal des Goncourt. Tome VII (1885-1888) « Année 1886 » pp. 101-162

Le pauvre diable, l’aurait-on cru, avait 650 000 francs de dettes, et pendant qu’il mourait, la rue s’emplissait de paysans des environs, auxquels il avait emprunté de petites sommes, ainsi qu’il en avait emprunté au commis de librairie Lecuyr, au relieur Petit, aux boutiquiers de la place Saint-Marc, quand il habitait Venise. […] c’est vraiment de la bien grosse psychologie, que la psychologie de romans, comme celui de La Morte. […] Il s’est vu avec la parfaite connaissance de son état, mourir d’une phtisie due à l’alcoolisme, dans une agonie qui a duré six semaines, où il a montré pour la mort, arrivant à petits pas, l’indifférence d’un homme, regardant sur un mur ensoleillé, l’ombre manger lentement la lumière. […] Il laisse entendre plutôt qu’il ne me le dit, qu’on le laisse mourir sans l’utiliser.

1306. (1882) Essais de critique et d’histoire (4e éd.)

Il avait, quand il mourut, environ cinquante ans. […] Ils avouent franchement que sans lui ils mourraient de faim. […] « Jour ou nuit, midi ou nord, mer ou plage, proie morte ou vivante, tout leur est un. […] je crois que tu aimerais mieux mourir. […] « Je me mourais de joie, j’en étais à craindre la défaillance.

1307. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « De la dernière séance de l’Académie des sciences morales et politiques, et du discours de M. Mignet. » pp. 291-307

Jouffroy (car, avec tout mon désir de le laisser en dehors de cette critique, je ne puis tout à fait l’omettre), Jouffroy n’avait rien du comédien et était sérieux ; il a fini par mourir de ce qui a fait vivre les autres. […] Sa vraie supériorité est dans la manière dont il entend et dont il traite l’histoire, non pas celle de ce temps-ci et qui se passe sous nos yeux (elle est trop mobile et trop variable à chaque instant), mais l’histoire morte et telle qu’elle se refait après coup.

1308. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Le Roman de Renart. Histoire littéraire de la France, t. XXII. (Fin.) » pp. 308-324

Il commence et il finira par prier le Dieu qui mourut en croix d’avoir pitié des âmes de tous ceux qui combattirent ce jour-là, et qui sont morts la plupart au moment où lui, trouvère, il raconte : tous tant qu’ils sont, soit Bretons, soit Anglais, il ne les sépare point dans sa prière. […] Mais pour Sparte, ce n’est pas de mourir, c’est de fuir qui est proprement la mort.

/ 2498